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La conformité des vues de M. Isidore MAIRE avec les nôtres et l'élégance de style avec laquelle il vous les a exposées, nous ont laissé une si agréable impression, que depuis nous nous sommes avoué un regret, regret que vous nous autoriserez probablement à exprimer, car vous l'aurez éprouvé comme nous c'est que les occupations de M. Isidore MAIRE ne lui aient pas permis, depuis son entrée dans la Société, de nous fournir de nouveaux témoignages de son beau style et de son aimable érudition.

La réponse de M. le Président à ces deux discours a fait d'une pierre deux coups, mais cette pierre a su, comme toujours, faire jaillir de nombreuses et vives étincelles. M. LECADRE pense et nous croyons qu'il a bien raison que l'intérêt causé par la diversité des études est un des principaux mobiles qui font songer leurs auteurs à se réunir à nous; c'est également cet intérêt qui nous contraint à être encyclopédistes. Et cependant, l'orateur, dans cette diversité même, diversité bien accentuée par les discours de MM. LECHAUT et MAIRE, ne pouvait s'empêcher d'apercevoir un lien, un trait-d'union qu'il vous signalait; ce trait d'union, c'est l'observation. En effet, sans l'observation, ni l'acclimatation, ni la philosophie des beaux-arts n'eussent été et ne seraient jamais possibles; avec la théorie seule et la prévention, sans l'observation constante, bon nombre de végétaux utiles nous feraient encore aujourd'hui défaut ; sans elle, l'île Maurice attendrait encore le Manioc qui y est aujourd'hui l'objet de grandes cultures, et ici, en France, nous n'aurions pas non plus l'humble mais si utile Pomme de terre. Notre Président comme votre rapporteur, Messieurs, considère l'acclimatation comme un fait acquis à la science et au bien-être de l'humanité.

Examinant plus particulièrement ensuite le discours sur l'esthétique, M. LECADRE débutait en établissant que l'idée du beau est toujours précédée de la réflexion, suite naturelle de l'observation. Le beau, nous disait-il, et il appuyait son aphorisme de divers exemples, le beau n'est

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pas absolu; on voit sa notion varier suivant les climats et les tempéraments, et devenir le sujet de préoccupations bien diverses et de goûts bien différents. Il en est de même dans les arts pour lesquels on a vainement tenté d'établir des règles immuables pour l'appréciation du beau.

Bref, le discours de M. le docteur LECADRE a été une nouvelle affirmation de ce que nous disait M. BEZIERS l'an dernier, que dans vos solennités de réception, on est forcément entraîné à se demander chaque fois, et quel que soit le thème abordé par le récipiendaire, lequel est le plus versé dans la spécialité qui se présente, ou du Président ou du membre nouvellement élu.

Nous pardonnerez-vous, Messieurs, de vous avoir fait assister un peu longuement dans ce rapport auquel nous avons ainsi fait perdre sa seule qualité, à cette séance du 8 Mars 4867? Elle a marqué si heureusement dans notre existence, et elle nous a laissé de si aimables souvenirs, surtout dans la portion où nous avons, pour la première fois dans cette enceinte, joué le rôle heureux et profitable d'auditeur, que nous n'avons pas su résister au désir de la faire revivre quelque peu: Puisse ce motif avoué franchement, être notre excuse auprès de vous.

Le 9 Août, M. H. DURANT exposait à la Société, en la remerciant de son élection comme Membre résidant, qu'il y avait longtemps déjà qu'il désirait se présenter aux suffrages de ses collègues actuels, mais que ses nombreuses occupations s'étaient toujours jetées à la traverse. Aujourd'hui, il allait, en compagnie de ses nouveaux collègues, passer une revue critique des Beaux-Arts à l'Exposition Universelle de 1867 (section de peinture), et tranquillement, comme s'il s'était agi de la chose la plus simple, M. DURANT nous révélait par son travail un critique esthétique, versé dans les arcanes du chevalet et de la brosse, rompu à toutes les connaissances de l'atelier, observateur d'un goût sûr et d'un ordre peu ordinaire. Ce n'est pas une

tâche aisée de juger et de comparer entre elles toutes les œuvres des peintres modernes que l'Exposition Universelle avait groupées l'an dernier, et plus difficile encore à nos yeux est la tâche d'exprimer cette comparaison et de libeller ce jugement sans se répéter et sans tomber, bien malgré soi, dans une presque inévitable monotonie. Vous savez avec quel bonheur M. DURANT s'est tiré de [ce labeur ardu, et quels sons harmonieux et variés il a su faire rendre à ce sujet monocorde. Les jugements portés par M. Durant nous ont paru dictés par un grand amour de l'art, une connaissance étendue du sujet traité et une consciencieuse impartialité. Personnellement, nous lui avouerons que notre américanomanie a été, en entendant son discours de réception, un peu irritée de sa sévérité envers les artistes des Etats-Unis, mais comme depuis nous avons trouvé dans un journal américain même (The New-York Tribune), un jugement à peu près semblable au sien, nous sommes bien forcé d'admettre que, eu égard aux pièces du procès qu'il avait sous les yeux, le juge a été équitable, ce qui ne nous empêchera pas de dire avec M. DOUSSEAU, que le procès ne sera complet et le verdict sans appel, que lorsqu'une Exposition universelle ayant eu lieu chez chacune des nations compétitrices, chaque peuple aura été ainsi mis à même de se montrer sous son jour le plus opulent et le plus favorable.

Quoiqu'il en soit, voici la place relative que la critique de M. DURANT assigne, au point de vue de l'art pictorial, à chacune des nations représentées au champ de Mars. La France, inférieure à ce qu'elle était en 1855, occupe encore le premier rang; à sa suite marchent la Belgique, la Bavière, la Hollande; puis viennent la Suisse, l'Espagne, et enfin des individualités chez les autres nations.

La savante analyse de M. DURANT, qui, par cela même qu'elle est une analyse, échappe à la nôtre, a fourni à notre Président une nouvelle occasion de nous montrer la flexibilité de son talent et l'universalité de ses connaissances.

Sur ce terrain tout spécial des Beaux-Arts, il était facile de voir qu'il était à son aise et tout à fait chez lui. Aussi est-ce en connaissance de cause et en toute sincérité, qu'il a pu féliciter le récipiendaire de son esprit de critique. bienveillante et constater la justesse de ses appréciations.

L'art est, dit-il, l'enfant du génie, mais il est aussi le résultat de l'étude; et comparant, à l'appui de son dire, la valeur de Michel-Ange à celle de Raphaël, il rappelait deux anecdotes tendant à prouver combien ces deux beaux génies s'estimaient entre eux, et combien leur exemple devrait servir de leçon aux artistes de notre époque où, comme à celle où vivaient ces deux peintres immortels, les favoris d'Apollon se partagent en deux écoles, disons mieux, en deux camps parfois assez belliqueux; le camp des spiritualistes et le camp des réalistes.

Envisagés au point de vue de l'avancement de la science, but de toutes les sociétés savantes, les discours de réception ne peuvent occuper qu'une place très secondaire dans les travaux utiles de ces sociétés ; au point de vue littéraire, il en est autrement. Quelque dédain qu'il puisse habituellement. affecter pour la forme, l'écrivain qui, pour la première fois, vient prendre officiellement place au sein d'une société scientifique dont il a sollicité les suffrages, et y affirmer la spécialité de ses études, cet écrivain soignera plus particulièrement la forme de son œuvre; il tiendra à se montrer digne, autant que possible, de l'honneur qui lui est fait, et sa phrase, son style se ressentiront du respect que tous nous avons pour ceux de nos semblables que nous avons couronnés, in petto, les premiers d'entre leurs pairs, et près desquels nous aspirons à nous asseoir.

Dans les travaux originaux, travaux qui sont la raison d'être des sociétés savantes, l'année dont nous sommes l'historiographe s'est noblement inaugurée par un travail de philosophie de notre vénéré et bien-aimé bibliothécaire, M. l'abbé HERVAL. Confucius et sa doctrine, tel était le grave et important sujet que notre érudit collègue s'était chargé

u élucider. Cette étude, commencée en 1866, a paru dans le Recueil de la Société, elle est donc maintenant placée sous les yeux du juge suprême le public. Nous croyons que l'auteur de l'étude sur le grand législateur chinois peut attendre avec calme le verdict de ce juge impitoyable. Attiré par l'importance capitale du sujet, il a voulu examiner, une à une, ces grandes figures des fondateurs de religions, phares jetés à travers les siècles pour en illuminer fragmentairement les importantes profondeurs, problèmes complexes à solutions si opposées suivant le point de vue des observateurs, personnifications dominantes des aspirations de l'humanité au moment qui les a vus surgir; tour à tour déifiés ou jetés aux gémonies, les fondateurs des religions ont été lors de leur apparition, la synthèse du développement moral et métaphysique de l'être humain collectif à leur époque. A ce point de vue, lorsque M. l'abbé HERVAL nous expose les dogmes de Confucius, des Kings et des lettres chinois relatifs à l'existence d'un Être Suprême, à la nature de l'âme et aux actes qu'elle doit accomplir; lorsqu'il nous déve loppe les idées de ce bienfaiteur de l'humanité sur la vie future, sur le culte des esprits et sur celui des ancêtres, lorsqu'enfin il nous démontre que, sauf quelque légère restriction, les chinois pratiquent la vertu de tolérance la plus complète en matière de religion, vertu qu'ils doivent aux leçons de Confucius, il nous donne de leur législateur religieux une opinion aussi élevée que respectueuse, laquelle rejaillit jusque sur ce peuple de race secondaire et assez généralement vilipendée.

Cette tolérance à laquelle les peuples n'arrivent qu'après une longue civilisation, qui dénote une union assez intime. entre la raison et la foi, est en ce moment même soumise à une assez rude épreuve dans l'Empire du Milieu. Écrasés sous la puissante main de la race blanche, les enfants du Royaume fleuri subissent la loi du vainqueur. Sans doute, cette civilisation européenne qui leur est imposée par le droit canon a des côtés supérieurs à celle à laquelle elle se veut substituer, mais que répondre aux philosophes chinois

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