De plusieurs lettres adressées par le gentilhomme anglonormand à M. l'abbé Jeuffrain, lettres aussi remarquables par l'exquise courtoisie du style que par le culte intelligent des souvenirs, il résulte que le duc de Somerset et les comtes de Warwick et d'Egmont descendent également, non en ligne directe, comme l'auteur, mais par les femmes, de notre Guillaume Malet.

Aussi déjà, à la prière et à l'exemple de Sir Alexander Malet, sa seigneurie le comte de Warwick s'est-elle empressée de souscrire pour la restauration du tombeau de Guillaume, fondateur du prieuré de Graville.

A également souscrit M. le marquis Gaston de Graville.

Le blason de la branche anglaise des Malet, modifié à l'époque de la seconde croisade, est d'azur, à trois coquilles d'or (1).

Guillaume Malet, signataire de la Grande-Charte et fondateur du prieuré de Graville, portait de gueules, à trois fermails, fremans ou fermalets d'or.

<< Magny cite une autre famille Malet de la Grue, qui blasonnait comme les Mallet, ajoutant un chevron. J'ai un ou deux seigneurs de cette branche qui ne sont pas dans la généalogie de M. Borel d'Hauterive (2). »

De l'épouse de Guillaume je ne dis rien ici, et pour cause. En l'absence d'inscription sur la pierre tombale, comme de toute armoirie particulière qui aurait au moins servi à dési

(1) Pierre-Charles Renault, dit comte d'Angennes, seigneur de Graville et de Fontaine-Riant, né en 1690, colonel du régiment de ce nom et ensuite du régiment de Normandie, mort à Paris le 7 Octobre 1716, enterré à St-Roch, portait également d'azur, à la fasce d'or, accompagnée de trois coquilles de même. (V. P. Anselme, tome II p. 433). (2) Lettre de M. l'abbé Caresme.

gner sa famille, il m'a été jusqu'à présent impossible, malgré toutes mes recherches et à mon grand regret, de découvrir

son nom.

Les armes des Malet sont donnés par tous les héraldistes, et se retrouvent encore sur quelques uns de nos monuments normands, notamment au-dessus de la porte latérale de l'église de Saint-Michel du Havre, où elles ont été reconnues et dessinées récemment par M. E. Dumont, de la société française d'archéologie, au crayon obligeant duquel nous devons encore une excellente reproduction de la pierre tombale de Guillaume Malet et de son épouse.

APPENDICE

I.

PROCÈS-VERBAL de reconnaissance des restes de Guillaume Malet, fondateur du prieuré de Graville, et de son épouse, enterrés au milieu du chœur de l'église de Sainte-Honorine.

Je soussigné docteur en médecine, licencié-ès-sciences, certifie que le lundi 29 Juillet, à quatre heures de relevée, j'ai été requis par M. l'abbé Jeuffrain, curé de l'église Sainte-Honorine de Graville, à l'effet de constater et de classer le résultat des fouilles opérées dans le chœur de ladite église, pour y retrouver les restes du sire Malet de Graville, son fondateur, et ceux de sa femme.

Lors de mon arrivée dans le choeur, en présence de MM. l'abbé Jeuffrain, curé de la paroisse; l'abbé Allais, vicaire; Brianchon, archéologue, et Allouis, chef ouvrier de M. Henri Certain, architecte, exécutant les travaux d'investigation, j'ai procédé à l'inspection des ossements extraits du sol et enfouis depuis plus de six cents ans. Après quelques instants d'examen, j'ai reconnu les débris de deux squelettes appartenant, l'un au sexe masculin, l'autre au sexe féminin.

Ces divers ossements provenaient d'une fouille faite directement au centre du chœur. Et cela d'après des indications précises fournies par une pierre tombale bien conservée et déplacée il y a seulement 30 à 35 ans, et aussi d'après des documents

sérieux consultés par M. Brianchon, M. l'abbé Jeuffrain et quelques autres personnes intéressées dans les recherches.

Avant de procéder à mon expertise, je vérifiai la nature de l'excavation d'où les ossements avaient été extraits. C'était une large ouverture de 2 mètres environ sur 1 mètre 50 centimètres de surface, et 1 mètre 40 centimètres de profondeur à peu près, présentant deux fosses très distinctes. Celle de droite recélait encore un fémur, une rotule, un tibia et un pied d'homme. Ces diverses pièces du squelette étaient comme enchassées dans le terrain argilo-calcaire du sol; tous les autres ossements, enlevés avec un soin religieux, étaient déposés sur un banc de l'église, et permettaient de reconstruire facilement une notable partie de ce que fut le sire Malet de Graville. La fosse placée à gauche, et la première en regardant l'autel, fouillée imparfaitement, contenait encore quelques débris d'ossements moins bien définis. Mais, des premiers ossements extraits de cet endroit et qui ont été soumis à mon examen, on peut affirmer, en toute conscience, que ces restes appartiennent à la femme du sire Guillaume Malet de Graville, qui avait été inhumée à sa gauche.

Les pièces suivantes, exhumées un peu avant mon arrivée, ont été soumises à mon inspection. Toutes provenaient de la fouille du côté droit.

1 Trois fragments assez considérables de la voûte du crâne et de sa partie postérieure. L'un de ces morceaux mesurait 18 centimètres de longueur sur 10 de largeur: les deux autres. portions représentaient les pariétaux ;

2. Le temporal gauche complet, avec le rocher, parfaitement intacts;

3. Une portion notable du maxillaire supérieur gauche, avec les sinus maxillaires admirablement conservés ;

4° L'apophyse zygomatique et le pourtour osseux de l'orbite ́ du côté droit, avec le sinus maxillaire très bien conservé;

5o Des portions détachées, mais facilement reconnaissables, du maxillaire supérieur droit;

Go La branche entière et complète du maxillaire inférieur gauche avec toutes ses dents, trois grosses molaires, deux petites,

une canine et deux incisives, toutes sans la moindre altération de l'émail;

7° La branche du maxillaire inférieur droit, brisé en morceaux, mais complète cependant avec toutes ses dents, encore placées dans les alvéoles, ou hors des alvéoles, mais agglutinées, après leur rupture, par la terre argilo-calcaire environnante;

8° Une vertèbre cervicale (l'axis); des morceaux des corps des vertèbres dorsales; une vertèbre sacro-lombaire.

90 La clavicule gauche très bien conservée ; 10o Les omoplates droite et gauche;

11. Deux humérus un peu avariés ;

12o Deux cubitus rongés aux cxtrémités;

13o Le radius droit et le radius gauche, presque entiers, sauf en bas;

14° Huit os métacarpiens;

150 Le haut du sternum (os de la poitrine);

16o Trois fragments de côtes;

17° Tête du fémur, avec son col attaché, à angle très obtus,

avec une portion du corps,

18° La rotule magnifiquement conservée;

19° Les surfaces articulaires du tibia gauche ;

20° Le corps du tibia;

21° Sept os du métatarse.

L'ensemble de ces diverses parties permet de reconstituer, avec la certitude la plus inébranlable, le squelette du sire Guillaume Malet de Graville qui, vers l'an 1200, fonda le prieuré de Sainte Honorine; en 1215, fut un des vingt-quatre barons signataires de la Grande Charte anglaise, et dut mourir dans la force de l'âge, à 50 ans environ, si l'on en juge, comme cela doit être, par le développement et la force des os du crâne, par l'étendue considérable des sinus maxillaires et la présence de toutes les dents, fortes, larges, très saines et parfaitement implantées.

Les ossements trouvés dans la fouille pratiquée à gauche du