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II.

Page, combien sont-ils, dis-moi ? je serais aise

De le savoir. Je vais vous le dire : un, deux, trois,

Quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix et trois font treize,
Quatorze et quinze !... mais ce n'est pas tout, je crois :

J'en aperçois encor, si mon œil ne me trompe :

Un, deux, trois, quatre et cinq, six, sept, huit, neuf et dix! Est-ce tout? Non... encore ! ..Onze et douze! après? compte: Treize, quatorze et quinze !... en tout, trente ennemis !

C'est bien puisqu'ils ne sont ainsi que nous que trente,
En avant mes amis ! Droit aux chevaux !... allons!
Sus! avec les fauchards! abrégeons leur attente;
Ils ne mangeront plus nos blés verts aux sillons!

III.

Les coups tombaient si prompts qu'on eût dit, sur l'enclume'

Le bruit de lourds marteaux ! aussi, le sang coulait

Et si rouge et si chaud sur le sol plein d'écume,
Qu'au ruisseau débordant alors il ressemblait !

Si rude et si terrible elle était, la mêlée,
Que l'on voyait traîner les armures de fer
Comme de vils haillons! et que, sur la vallée,
Les cris des chevaliers tonnaient comme la mer !...

IV.

La tête de Blaireau, (Bembrough) plein d'insolence,
Disait à Tinténiac, qui s'approchait tiens, voi,
Je te garde ce coup! Dis, si ma bonne lance
Est un roseau sans force et vide.... c'est pour toi !

Ne te presse pas tant; car ce qui sera vide,
Sous peu, mon bel ami, c'est ton crâne, entends-tu !
Ton crâne, où le corbeau de ta cervelle avide,
Fouillera, je te jure, avec son bec pointu!

Il n'avait pas fini sa réponse superbe,

Qu'il lui portait un coup de maillet de tel poids
Que comme un limaçon qu'on écrase sous l'herbe,
Il broyait de l'Anglais casque et tête à la fois !

Kéranrais en voyant cela se mit à rire,

A rire à grince-cœur :

Ob dit-il le fier coup !

Si tous restent ainsi, du moins pourront-ils dire

Qu'ils sont les conquérants de leur tombe.... Et c'est tout!

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V.

Du petit point du jour jusqu'à midi, du glaive,
Du maillet, de la lance, on frappa sans pitié ;
De midi jusqu'au soir encor, ce fut sans trève
Un pèle mêle affreux, corps-à-corps, pied-à-pied.

Robert de Beaumanoir, d'une voix qui s'éraille

Dit : — J'ai soif ! J'ai grand soif! mais du Bois en passant Lui crie en se jetant au cœur de la bataille :

- Pour étancher ta soif, Beaumanoir, bois ton sang!

Quand Robert entendit cette parole fière,

Le rouge de la honte à sa face monta ;

Il reprit tout-à-coup sa force et sa colère,
Et rugissant de rage, il se précipita.

Et bien longtemps encore on put le voir combattre ;
Il tua cinq Anglais !... Bon écuyer, combien

En reste-t-il? Seigneur, j'en vois un, deux, trois, quatre,
Cinq et six, et c'est tout !.... - Six par ma foi, c'est bien !

Ceux-là vivront, mais non sans rançon, je te jure ' Ils paieront cent sous d'or chacun ; cent sous d'or fin Pour ce pauvre pays que la guerre pressure,

Et que tous ces Anglais ravagent en chemin !

VI.

Certe, il n'eut pas été l'ami de la Bretagne
Celui-là qui, sans joie eut vu nos chevaliers
Rentrer dans Josselin après cette campagne
Ayant des genêts verts fleuris à leurs cimiers ;

Celui-là qui n'eut point loué nos gens de guerre,
Et n'eut point admiré tout ce peuple en éveil,
Et chanté comme lui : « Dans les cieux et sur terre,
Béni soit Saint-Kado ! le patron sans pareil !

TOUJOURS SEUL

PAR VICTOR FLEURY

Membre Résidant

Lorsque je vois au déclin des journées
Fumer un chaume au fond d'un vallon creux,
Je dis tout bas que d'heures fortunées
Passent ici! combien il est heureux

Celui qui, las de son labeur rustique,
Parmi les siens: femmes, enfants, aïeul,
S'assied en paix au foyer domestique !....
L'exilé, lui, sur terre est toujours seul !

Où s'en vont-ils ces rapides nuages

Que la tempête au loin disperse aux cieux ?...
Elle me chasse aussi vers d'autres plages,

Où ?... que m'importe? obéissons comme eux !...
Il n'est qu'un ciel, le ciel de la patrie,

Tout autre, hélas ! n'est qu'un sombre linceul
Qui fait le cœur triste et l'âme flétrie....
L'exilé, lui, sur terre est toujours seul!

Ces arbres verts aux feuillages fidèles
En mon chemin m'offrent d'obscurs abris,
Ces fleurs aussi dans ces gazons sont belles ;
Mais est-il rien de beau loin du pays?

A ces trésors, oh ! combien je préfère L'ombrage aimé de notre vieux tilleul, L'iris d'azur qui croît sur la chaumière.... L'exilé, lui, sur terre est toujours seul!

Ce frais ruisseau qui coule dans la plaine,
Je l'entends fuir sans plaisir, sans émoi,
Il ne vit pas mon enfance sereine,
Et ses chansons n'éveillent rien en moi !
Qu'elle chantait bien mieux dans ma vallée
L'humble fontaine où fleurit le glaïeul !
Rien ne répond à mon âme troublée....
Pauvre exilé, je suis seul, toujours seul!

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