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août 1632 (1). Sa famille étoit une des plus considérables de cette ville. Son père, Etienne Bourdaloue, jouissoit parmi ses concitoyens d'une grande considération qu'il avoit méritée par sa probité et par la grâce singulière avec laquelle il parloit en public.

Bourdaloue n'ayant encore que quinze ans, exprima le désir d'entrer dans la société des jésuites il y fut reçu le 10 novembre 1648.

:

Après avoir fait ses études avec un rapide sue

cès, il fut successivement chargé de professer la rhétorique, la philosophie et la théologie. Il donna dès-lors des preuves de l'étendue et de la solidité de son esprit.

Ses supérieurs et lui-même hésitoient encore sur le genre de fonctions qu'il devoit embrasser, lorsque quelques sermons prêchés par lui tandis qu'il professoit la théologie morale, firent décider qu'il se consacreroit uniquement au ministère de la chaire.

Il commença ses prédications en 1666. Cette même année mourut la reine Anne d'Autriche et, parmi les vingt-cinq orateurs chrétiens qui prononcèrent son oraison funèbre, on ne peut

1607, mort en 1667, auteur d'une grande collection de Conciles, en 17 vol. in-fol., et de beaucoup d'autres ouvrages.

pape

(1) Ce fut en cette année que le Urbain VIII approuva la congrégation des Pères de la Mission, fondée par saint Vincent de Paul en 1625, et établie par lettres-patentes de 1627.

citer que Mascaron (1) et le P. Senault (2); ce dernier avoit commencé à purger l'éloquence chrétienne de l'érudition profane qui la déshonoroit (3). Mascaron prêchoit l'Avent à la cour l'année même où Bourdaloue faisoit en province ses premiers essais dans un art qu'il devoit bientôt porter à toute sa hauteur.

On peut dire que l'éloquence de la chaire n'existoit point encore en France. Il n'y avoit guère qu'un siècle d'écoulé depuis qu'on ne prêchoit plus en latin. Lingendes (4), presque con

(1) Jules MASCARon, évêque de Tulles, et puis d'Agen, ' naquit à Marseille en 1634, entra chez les PP. de l'Oratoire, prêcha à la cour six avens et six carêmes, fut nommé à l'évêché de Tulles en 1671, et transféré à l'évêché d'Agen eu 1678. Il mourut le 16 décembre 1703. On n'a de Mascaron que ses Oraisons funèbres, qui urent imprimées en 1702, in-12, et réimprimées en 1740. Rollin a joint Mascaron à Fléchier et à Bossuet : mais il est moins orné que l'un, et moins sublime que l'autre.

(2) Jean-François SENAULT, général de l'Oratoire, né à Paris en 1601, prêcha, pendant quarante ans, avec un succès extraordinaire, à Paris, à la cour, et dans les principales villes de France. Il mourut le 3 août 1672. On n'a imprimé de ses sermons que 3 vol. de Panégyriques en 1655

et 1682.

(3) On a dit que le P. Senault fut à Bourdaloue ce que Rotrou avoit été à Corneille, son prédécesseur, et rarement son égal.

(4) Claude de LINGENDES, jésuite, né à Moulins, mort à Paris le 12 avril 1660. « C'est une chose assez surprenante, dit l'abbé Goujet ( Biblioth. franç., tom. 2, p. 285), que le P. de Lingendes, dont toute la France a admiré l'élo

temporain de Bourdaloue, composoit dans la langue de l'école les discours qu'il devoit prononcer en français.

Avant Bourdaloue, les sermons étoient chargés de traits d'histoire souvent apocryphes, de citations de lois, d'hébreu, de grec et de latin, de passages tirés d'Homère, d'Horace ou d'Ovide, et des philosophes païens. Les orateurs entassoient les métaphores, faisoient un monstrueux mélange du sacré et du profane, et joignoient aux vérités évangéliques les erreurs du temps sur la physique, l'histoire naturelle et l'astrologie. Au reste, il régnoit encore plus de barbarie dans l'éloquence du barreau (1).

quence, n'étudiât point les termes dont il se servoit, et qu'il s'en mit même si peu en peine, qu'il composoit en latin les sermons qu'il devoit prononcer en français. » Ces sermons ont eté imprimés à Paris, en 1666, 3 vol. in-4.o et in-8°. Les deux volumes de sermons sur les évangiles du carême, que l'on a publiés en français sous son nom, ne sont qu'une traduction ou même une imitation imparfaite de ses sermons latins, dont le P. Bourdaloue n'a pas fait difficulté de prendre quelques traits. On a encore de Lingendes un volume de sermons pour l'octave du SaintSacrement. Ils sont en français; et l'on croit qu'on s'est servi, pour les publier, des manuscrits de plusieurs co pistes qui les avoient écrits dans le temps que Lingendes: les prêchoit.

(1) Il y a dans les archives de l'ancien parlement de Paris, un registre intitulé les Matinées, où l'on trouve un plaidoyer qui commence par ces mots: Quand je vois le soleil et quand je vois la lune. Boileau, dont le père étoit greffier du parlement, et Racine, ami de Boileau, paroissent avoir eu connoissance de ce singulier plaidoyer. Le registre est du 15. siècle.

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Sans remonter plus haut que le commencement du 17. siècle, Camus, évêque de Belley, citoit dans ses homélies Virgile et Didon, Socrate et Vénus, Aristote et Bellerophon (1). Mais, sur la fin du règne de Louis XIII, ces vices de l'art oratoire commencèrent à disparoître dans la chaire, tandis qu'ils continuoient de régner au palais, tandis que tous les genres de littérature portoient encore l'empreinte du mauvais goût. Cependant, vers le milieu du 17. siècle, Biroat (2), qui passoit pour avoir fait le premier l'application à l'éloquence sacrée des divisions et des subdivisions, et plusieurs autres prédicateurs, continuoient de suivre dans leurs sermons la

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(1) Jean-Pierre CAMUS, mort le 26 avril 1652, a publié 15 volumes d'homélies, de prônes et d'exhortations pastorales. Nous citerons ici quelques passages d'un de ses sermons pour le jour de Noël, afin de faire connoître ce qu'étoit l'art de la chaire en France, avant que Bourdaloue l'élevât tout à coup à sa plus haute perfection : « Cessent les empyriques de vanter leurs distillations qui réduisent à si >> peu de si grosses masses; car voici la divinité réduite sous » l'humanité, et comme alambiquée et quintessenciée sous » le corps d'un petit enfant. Quelle prodigieuse alchimie !.... » Voici l'iliade de la divinité sous la coquille de l'humanité... » Voici l'Océan dans une coquille. Voici la perle de la di» vinité dans la nacre de la mortalité.... Admirez ce peu » de levain qui doit enfler la pâte de l'évangile. Voyez ce » grain de moutarde, etc. »>

(2) Jacques BIROAT, né à Bordeaux, conseiller et prédicateur du roi, religieux de l'ordre de Cluny, mourut vers l'an 1666. On a de lui soixante-quatorze panégyriques, deux avens un carême, des sermons et des oraisons funèbres, formant 12 vol. in-8°.

marche scholastique. Leurs discours étoient tous partagés en trois points, et chaque point l'étoit en trois parties. D'autres, comme le P. Lejeune (1), formoient la première partie de leurs sermons des preuves tirées de l'Ecriture; la seconde, de l'autorité des Pères; et la dernière, des raisons : en sorte que ces discours ne contenoient chacun qu'une vérité et une seule proposition. On sent que de cette méthode devoit résulter beaucoup de sécheresse et de monotonie. Les prédicateurs qui faisoient imprimer leurs sermons, affectoient aussi des titres singuliers. Claude Texier (2), qui prêcha devant Louis XIV, intitula son Avent : L'Impie malheureux, ou les Trois Malédictions du pécheur; Biroat donna pour titre au sien, la Condamnation du monde.

Tel étoit l'état de l'éloquence de la chaire au commencement du règne de Louis XIV. Senault et Lingendes en furent les premiers réformateurs. Bossuet, le seul rival que pût avoir Bourdaloue, avoit prêché devant la cour l'Avent en 1661, et

(1) Jean LEJEUNE, prêtre de l'Oratoire, célèbre missionnaire, mort à Limoges, le 19 août 1672, à l'âge de quatre-vingts ans. Il avoit perdu la vue en prêchant le carême à Rouen, dans sa trente-cinquième année : ce qui le fit nommer dans la suite le Père aveugle. Il fit des missions pendant soixante ans. Ses sermons ont été recueillis en 10 vol. in-8.o, et plusieurs fois réimprimés.

(2) Claude TEXIER, jésuite, provincial de la province ďAquitaine, prêcha le carême devant Louis XIV en 1661, et mourut à Bordeaux en 1687. Ses sermons imprimés à Paris, 1673--1678, forment 10 vol. in-8°.

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