Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

De ces vierges du ciel le maintien se rassure;
Leur père a de leurs yeux séché les pleurs amers;
Debout et le front ceint de lauriers toujours verts,
Ici, près d'un autel où brille un feu propice,
Elles offrent pour nous le dernier sacrifice,
Et nuit et jour, leur main, des mortels innocents,
Jette en des urnes d'or et les vœux et l'encens.
Cet encens épuré toujours brûle autour d'elles;
Il s'élève, et conduit par des routes fidèles,

Monte droit vers l'Olympe, et sur ses hauts sommets
Répand un doux parfum qu'ils gardent à jamais.

Léonidas paraît et le portique s'ouvre; Mais, lorsqu'à ses regards l'Olympe se découvre, Homme et Dieu tout ensemble, il songe malgré lui A Sparte, aux deux enfants qu'il laissa sans appui. Oh! s'il était permis à sa vue inquiète De revoir un moment les sommets du Taygète, L'Eurotas et ses fils, et sa chère Amyclé!

Soudain, comme les Dieux à qui rien n'est voilé, Il perce d'un regard cette immense étendue Où, comme un faible point, notre terre est perdue, Distingue nos climats, nos montagnes, nos mers, Et jusqu'aux humbles bords qui lui furent si chers, Sparte et ses citoyens, et la table frugale

Qui nourrit avec eux son enfance royale,

Quel spectacle! ô douleur! près d'un tombeau récent,
Qu'entoure de son deuil un peuple gémissant,
Sous de pâles flambeaux, et d'un crêpe entourée,

Telle qu'on peint la Nuit, une femme éplorée,
Entre deux jeunes fils, pleurait Léonidas;

C'est Amyclé, c'est elle; il lui tendait les bras:
Voici qu'au même instant le Monarque suprême
Agite de son front l'immortel diadème;
Sa voix se fait entendre à l'Olympe assemblé :
L'aigle qui tient la foudre a lui-même tremblé ;

Les Dieux baissent leur front; tous les mondes frémissent;
Et sur la terre enfin ces accents retentissent :

« Terre! console-toi ; Cieux! réjouissez-vous; << Et toi, cesse, Amyclé, de pleurer ton époux! « Qu'on invoque son nom, le Ciel est sa conquête, << Et que d'un nouveau Dieu Sparte ordonne la fête ! ».

Ces accents ont de Sparte adouci les chagrins;
Amyclé lève au ciel des regards plus sereins;
Elle embrasse les fils dont l'aspect la console,
Et répète avec eux la céleste parole.

Léonidas les voit, il veille sur leurs jours,

Et son rang chez les Dieux est marqué pour toujours.

Dans un cercle étoilé qui rayonne autour d'elle,
L'Éternité repose à jamais jeune et belle:
Sous ses pieds sont le Temps, l'Espace et le Destin.
Des soleils, qui n'ont plus de soir ni de matin,
Couvrent d'un même éclat son trône inaltérable;

Sa main, dans une langue à l'homme impénétrable,
En triangle a tracé le nom mystérieux

Du Dieu qui de son sein enfanta tous les Dieux;

Il Est, Fut et Sera : c'est ainsi qu'il se nomme.

Le jour, où dans sa gloire il admet un grand homme, Se grave en lettres d'or dans son livre éternel,

Et des jours de l'Olympe est le plus solennel.

Phébus chante, et sa voix doucement cadencée A de son père même enchanté la pensée ; Les Dieux sont réjouis par cet hymne divin, Que la voix d'un mortel voudrait redire en vain. Dans la coupe d'Hébé, jeune épouse d'Hercule, Bientôt de main en main l'allégresse circule. Sur un trône éclatant le nouveau demi-dieu Jouit de son triomphe, et d'un dernier adieu Saluant Thémistocle, en ces mots l'encourage:

« Défenseur de la Grèce, achève ton ouvrage ; Dans l'Olympe avec nous mérite de monter; Mais par de longs malheurs il faudra l'acheter. Si ton pays ingrat oubliait tes services, Qu'Athène, en déplorant ses longues injustices, Dise un jour: Thémistocle, errant, persécuté, De ses concitoyens qui l'avaient rejeté Gardant au fond du cœur la mémoire chérie, Aima mieux s'immoler que trahir sa patrie. »>

Le demi-dieu se tait : tout s'efface, tout fuit,
Les songes vrais et faux sont rentrés dans la nuit.
Au bord du gouffre obscur le héros se retrouve,
Étonné des transports qu'en secret il éprouve.
Il a rejoint la foule, il porte dans ses traits

La majesté des Dieux qu'il a vus de si près.
Quel effort aujourd'hui lui serait impossible?
Tous les Grecs, inspirés par son âme invincible,
Le suivent au combat, et, sûrs de leurs succès,
Courent dans leurs vaisseaux triompher de Xerxès.

FIN DU HUITIÈME CHANT.

FRAGMENTS.

LE PROSCRIT.

Épisode'.

Déjà nous approchions des remparts de Tégée;
Et, sur sa cime au loin de chênes ombragée,
Le haut Parthénius, que franchissent nos pas,
Des vieux rois argiens nous montre les états.
Un sentier nous conduit vers les dormantes ondes
Qu'empoisonna cette Hydre aux cent têtes fécondes.
Lerna bientôt s'éloigne, et dans la mer d'Argos
Le Phryxus à nos yeux court engloutir ses flots.
Argos paraît: nos voix ont salué les rives
Où Danaüs guida ses filles fugitives,
Où l'on dit qu'Inachus poliça les mortels
Et que le grand Persée a conquis des autels:
Ces fameux souvenirs nous enflammaient encore.
Cependant le temps vole, et quatre fois l'aurore
A rouvert du soleil le palais radieux,

Depuis l'instant où Sparte a reçu nos adieux.
Enfin aux derniers traits du jour qui brille à peine,
Se découvre un hameau qui fut jadis Mycène.

1 Cet épisode semble avoir dû faire partie d'abord du second chant et du récit d'Agénor: le poëte avait changé de dessein, et le voulait sans doute transporter ailleurs en le modifiant.

« ZurückWeiter »