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SCIENCES ET ARTRS,

L'ESPR

'ESPRIT a fes besoins ainfi que le corps. Ceux-ci font les fondemens de la fociété, les autres en font l'agré

ment.

Le befoin éleva les trônes ; les Sciences & les arts les ont affermis. Puiffances de la terre, aimez les talens, & protégez ceux qui les cultivent. Peuples policés, cultivez-les; heureux esclaves, vous leur devez ce goût délicat & fin dont vous vous piquez, cette douceur de caractère & cette urbanité de mœurs qui rendent parmi vous le commerce fi liant & fi facile, en un mot les apparences de toutes les vertus fans en avoir aucune.

Il y a des ames lâches & pufillanimes qui n'ont ni feu, ni chaleur, & qui

ne font douces que par indifférence pour le bien & pour le mal. Telle eft la douceur qu'infpire aux peuples le goût des lettres.

Plus l'intérieur fe corrompt, & plus l'extérieur fe compofe: c'eft ainfi que la culture des lettres engendre infenfiblement la politeffe.

Que de dangers! que de fauffes routes dans l'investigation des Sciences! par combien d'erreurs mille fois plus dangereufes que la vérité n'eft utile, ne faut-il point paffer pour arriver à elles? Le défavantage eft vifible; car le faux eft fufceptible d'une infinité de combinaisons; mais la vérité n'a qu'une maniere d'être.

C'est un grand mal, que l'abus du tems. D'autres maux- pires encore fuivent les Lettres & les Arts. Tel eft le luxe né comme eux de l'oifiveté & de la vanité des hommes, le luxe va rare

ment fans les Sciences & les Arts, & jamais ils ne vont sans lui.

Quand les hommes innocents & ver tueux aimoient à avoir les Dieux pour témoins de leurs actions, ils habitoient, enfemble fous les mêmes cabanes; mais 'bientôt devenus méchans, ils se laffe rent de ces incommodes fpectateurs, & les releguèrent dans des temples magnifiques. Ils les en chafferent enfin pour s'y établir eux-mêmes, ou du moins les temples des Dieux ne fe diftinguèrent plus des maifons des Citoyens. Ce fut alors le comble de la dépravation; & les vices ne furent jamais pouffés plus loin que quand on les vit, pour ainfi dire, foutenus à l'entrée des palais des Grands fur des colonnes de marbres, & gravés fur des chapiteaux corinthiens.

O, Fabricius ! qu'eût penfé votre grande ame, fi, pour votre malheur

rappellé à la vie, vous euffiez vû la face pompeufe de cette Rome fauvée par votre bras, & que votre nom refpectable avoit plus illuftrée que toutes ses conquêtes? << Dieux! euffiez-vous dit » que font devenus ces toîts de chau»me & ces foyers ruftiques qu'habi» toient jadis la modération & la vertu ? » Quelle fplendeur funefte a fuccédé à » la fimplicité Romaine? Quel eft ce langage étranger? Quelles font ces » mœurs efféminées? Que fignifient ces » ftatues, ces tableaux, ces édifices? Infenfés, qu'avez-vous fait ? Vous, » les maîtres des Nations, vous vous êtes rendus les efclaves des hommes » frivoles que vous avez vaincus ! Ce » font des Rhéteurs qui vous gouver«nent! c'eft pour enrichir des Archi»tectes, des Peintres, des ftatuaires & » des hiftrions, que vous avez arrofé » de votre fang la Gréce & l'Afie! les

כל

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» dépouilles de Carthage font la proie » d'un joueur de flute ! Romains, hâ»tez-vous de renverfer ces amphithéâ

tres; brifez ces marbres, brûlez ces » tableaux, chaffez ces efclaves qui » vous fubjuguent, & dont les funeftes » Arts vous corrompent. Que d'autres » mains s'illuftrent par de vains talens

le feul talent digne de Rome eft celui » de conquérir le monde & d'y faire » régner la vertu. Quand Cynéas

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prit notre Sénat pour une affemblée » de Rois, il ne fut ébloui, ni par une >> pompe vaine, ni par une élégance recherchée. Il n'y entendit point cette »éloquence frivole, l'étude & le char» me des hommes futiles. Que vit donc » Cynéas de fi majeftueux? O citoyens ! » il vit un fpectacle le plus beau qui ait jamais paru fous le Ciel, l'affemblée » de deux cens hommes vertueux, digne de commander à Rome, & de gouverner la terre. »

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