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befoin de tant de Talens ; ils fe foutiennent mieux par leur fimplicité que les autres par toute leur industrie. Mais à mefure qu'ils fe corrompent, leurs Talens fe développent comme pour fervir de fupplément aux vertus qu'ils perdent, & pour forcer les méchans eux» mêmes d'être utiles en dépit d'eux.

GOUT

LE bon n'eft que le beau mis en ac-

tion;

l'un tient intimement à l'autre & ils ont tous deux une fource commune dans la nature bien ordonnée. Il s'enfuit que le Goût fe perfectionne par les mêmes moyens que la fageffe, & qu'une ame bien touchée des charmes de la vertu doit à proportion être auffi fenfi*~ ble à tous les genres de beautés:

On s'exerce à voir comme à fentir

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ou plutôt une vue exquife n'eft qu'un fentiment délicat & fin. C'est ainsi qu'un peintre à l'afpect d'un beau paysage ou devant un beau tableau s'extafie à des objets qui ne font pas même remarqués d'un fpectateur vulgaire. Combien de chofes qu'on n'apperçoit que par fentiment, & dont il eft impoffible de rendre raison? Combien de ces je ne fçais quoi qui reviennent fi fréquemment & dont le goût feul décide?

Le goût eft en quelque maniere le microscope du jugement; c'est lui qui met les petits objets à fa portée, & fes opérations commencent où s'arrêtent celles du dernier. Que faut-il donc pour le cultiver ? S'exercer à voir ainfi qu'à fentir, & à juger du beau par infpection comme du bon par fentiment.

Le luxe & le mauvais goût font inféparables. Par-tout où le goût eft difpendieux, il eft faux.

C'eft fur-tout dans le commerce des deux fexes que le goût, bon ou mauvais prend fa forme; fa culture eft un effet néceffaire de l'objet de cette fociété. Mais quand la facilité de jouir attiédit le défir de plaire, le goût doit dégénérer; & c'eft-là, ce me femble, une raifon des plus fenfibles pourquoi le bon Goût tient aux bonnes mœurs.

Le Goût fe corrompt par une délicateffe exceffive, qui rend fenfible à des chofes que le gros que le gros des hommes n'apper

çoit pas cette délicateffe méne à l'esprit de difcuffion; car plus on fubtilife les objets, plus ils fe multiplient: cette fubtilité rend le tact plus délicat & moins uniforme. Il fe forme alors autant de goûts qu'il y a de têtes. Dans les difputes fur la préférence, la philo? fophie & les lumieres s'étendent; & c'eft\ ainfi qu'on apprend à penfer. Les obférvations fines ne peuvent guères être

faites que par des gens très-répandus,,

attendu qu'elles frappent après toutes les autres, & que les gens peu accoutumés aux fociétés nombreuses y épuifent leur attention fur les grands traits. Il n'y a, peut-être, à préfent un lieu policé sur la terre, où le goût général soit plus mauvais qu'à Paris. Cependant c'eft dans cette Capitale que le bon goût fe cultive; & il paroît peu de livres eftimés dans l'Europe, dont l'Auteur n'ait été fe former à Paris. Ceux qui penfent qu'il fuffit de lire les livres qui s'y font, fe trompent; on apprend beaucoup plus dans la converfation des Auteurs. que dans leurs livres ; & les Auteurs eux-mêmes ne font pas ceux avec qui l'on apprend le plus.. C'eft l'efprit des; fociétés qui développe une tête penfânte, & qui porte la vûe auffi loin: qu'elle peut aller. Si vous avez une étincelle de génie, allez paffer une année à

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Paris: bientôt vous ferez tout ce que vous pouvez être, ou vous ne ferez ja

mais rien.

IMAGINATION.

LE

E pouvoir immédiat des fens eft foi⭑ble & borné : c'est par l'entremise de Imagination qu'ils font leurs plus grands ravages; c'eft elle qui prend Efoin d'irriter les défirs, en prétant à leurs objets encore plus d'attraits que ne leur en donnât la nature; c'eft elle qui découvre à l'œil avec fcandale ce qu'il ne voit pas feulement comme nud mais comme devant être habillé. Il n'y a point de vêtement fi modeste au tra⚫ vers duquel un regard enflammé par Imagination n'aille porter les défirs.. Une jeune Chinoise, avançant un boutde pied couvert & chauffé, fera plus

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