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de ravage à Pekin que n'eût fait la pluš belle fille du monde danfant toute nue au bas du Taygete.

Malheur à qui n'a plus rien à désirer ! il perd pour ainfi dire tout ce qu'il pofféde. On jouit moins de ce qu'on obtient que de ce qu'on efpere, & l'on n'eft heureux avant d'être heureux. En effet, l'homme avide & borné, fait pour tout vouloir & peu obtenir, a reçu du Ciel une force confolante qui rapproche de lui tout ce qu'il défire, qui le foumet à fon Imagination, qui le lui rend préfent & fenfible, qui le lui livret en quelque forte, & pour lui rendre cette imaginaire propriété plus douce, le modifie au gré de fa paffion. Mais tout ce preftige difparoît devant l'objet même; rien n'embellit plus cet objet aux yeux du poffeffeur; on ne fe figure point ce qu'on voit: l'imagination ne pare plus rien de ce qu'on pofféde

l'illufion ceffe où commence la jouif fance.

En toute chofe l'habitude tue l'Ima gination, il n'y a que les objets nouveaux qui la réveillent. Dans ceux que l'on voit tous les jours, ce n'eft plus l'Imagination qui agit, c'eft la mémoire, i & voilà la raifon de l'axiome ab affue ris non fit paffio; car ce n'eft qu'au feu de l'Imagination que les paffions s'allu

ment.

L'odorat eft le fens de l'Imagination. Donnant aux nerfs un ton plus fort, il doit beaucoup agiter le cerveau ; c'eft pour cela qu'il ranime un moment le tempérament & l'épuife à la longue. Il a dans l'amour des effets affez connus :) le doux parfum d'un cabinet de toilette n'est pas un piége auffi foible qu'on penfe; & je ne fçais s'il faut féliciter ou plaindre l'homme fage & peu fenfible, que l'odeur des fleurs que fa maîtreffe

a fur le féin ne fit jamais palpiter

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Le fouvenir des objets qui nous ont frappés, les idées que nous avons acquises, nous fuivent dans la retraite, la peuplent, malgré nous, d'images plus féduifantes que les objets mêmes, & rendent la folitude auffi funeste à celui qui les y porte, qu'elle eft utile à celui qui s'y maintient toujours feul.

Quoique l'ufage ordinaire foit d'annoncer par degrés les triftes nouvelles, il y a des Imaginations fougueufes, qui fur un mot portent tout à l'extrême, avec lefquelles il vaut mieux fuivre une route contraire & les accabler d'abord pour leur ménager enfuite des adoucif femens,

SIGNES

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UNE des erreurs de notre âge eff d'employer la raifon trop nue, comme fi les hommes n'étoient qu'efprit. En négligeant la langue des Signes qui parlent à l'imagination, l'on a perdu le plus énergique des langages. L'impreffion de la parole eft toujours foible, & l'on parle au coeur par les yeux bien mieux que par les oreilles. En voulant tout donner au raifonnement, nous avons réduit en mots nos précep tes, nous n'avons rien mis dans les ac-. tions. La feule raifon n'eft point actielle retient quelquefois, rarement elle excite, & jamais elle n'a rien fait de grand. Toujours raisonner eft la manie des petis efprits. Les ames fortes ont bien un autre langage; c'est par

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ce langage qu'on perfuade & qu'on fait agir.

Dans les fiécles modernes, les hommes n'ont plus de prife les uns fur les autres que par la force & par l'intérêt; au lieu que les anciens agiffoient beaucoup plus par la perfuafion, par les affections de l'ame, parce qu'ils ne négligeoient pas la langue des Signes, Toutes les conventions fe paffoient avec folemnité pour les rendre plus inviolables. Dans le gouvernement, l'augufte appareil de la Puiffance royale en imposoit aux fujets. Des marques de dignités, un trône, un fceptre, une robe de pourpre, une couronne un bandeau, étoient pour eux des chofes facrées. Ces Signes refpectés leur rendoient vénérable l'homme qu'ils en voyoient orné; fans foldats, fans menaces, fi-tôt qu'il parloit, il étoit obéi,

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Le Clergé Romain, les a très-habile

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