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ASSEMBLÉES DE DANSE.

Je n'ai jamais bien conçu pourquoi

l'on s'effarouche fi fort de la Danfe & des Affemblées qu'elle occafionne : comme s'il y avoit plus de mal à danfer qu'à chanter, que chacun de ces amusemens ne fut pas également une inspiration de la nature, & que ce fut un crime de s'égayer en commun par une récréation innocente & honnête. Pour moi, je pense, au contraire, que toutes les fois qu'il y a concours des deux fexes tout divertiffement public devient innocent par cela même qu'il eft public, au lieu que l'occupation la plus louable eft fufpecte dans le tête-à-tête. L'homme & la femme font destinés l'un pour l'autre, la fin de la nature est qu'ils foient unis par le mariage. Toute

fauffe religion combat la nature, la nôtre feule qui la fuit & la rectifie annonce une inftitution divine & convenable à l'homme. Elle ne doit donc point ajouter fur le mariage, aux embarras de l'ordre civil des difficultés que l'Evangile ne prefcrit pas, & qui font contraires à l'efprit du Chriftianifme. Mais qu'on me dife où de jeunes perfonnes à marier auront occafion de prendre du goût l'une pour l'autre, & de fe voir avec plus de décence & de circonfpection que dans une affemblée, où les yeux du public inceffamment tournés fur elles les forcent à s'observer avec le plus grand foin? Eh! quoi, Dieu eft-il offensé par un exercice agréable & falutaire, convenable à la vivacité de la jeuneffe, qui confifte à se préfenter l'un à l'autre avec gracé & bienféance, & auquel le fpectateur impofe une gravité dont perfonne n'oferoir fortir?

Peut-on imaginer un moyen plus honnête de ne tromper perfonne au moins quant à la figure, & de fe montrer avec les agrémens & les défauts qu'on peut avoir aux gens qui ont intérêt de nous bien connoître avant de s'obliger à nous aimer? Le devoir de fe chérir réciproquement n'emporte-t-il pas celui de fe plaire, & n'eft-ce pas un foin digne de deux perfonnes vertueufes & chrétiennes qui fongent à s'unir, de préparer ainfi leurs cœurs à l'amour mutuel que Dieu leur impofe?

Qu'arrive-t-il dans ces lieux où régne une éternelle contrainte, où l'on punit comme un crime la plus innocente gaité, où les jeunes gens des deux fexes n'ofent jamais s'affembler en public, & où l'indifcrete févérité d'un Pasteur ne fçait prêcher au nom de Dieu qu'une gêne fervile, & la trifteffe & l'ennui? On élude une tyrannie infupportable

que la nature & la raison défavouent. Aux plaifirs permis dont ont prive une jeuneffe enjouée & folâtre, elle en fubftitue de plus dangereux. Les tête-à-tête adroitement concertés prennent la place des affemblées publiques. A force de fe cacher comme fi l'on étoit coupable, on eft tenté de le devenir. L'innocente joie aime à s'évaporer au grand jour, mais le vice eft ami des ténèbres, & jamais l'innocence & le mystère: n'habiterent long-tems ensemble..

DESSE IN.

POUR rendre heureusement un Desfein, l'Artiste ne doit pas le voir tel qu'il fera fur fon papier, mais tel qu'il eft dans la nature. Le crayon ne diftin gue pas une blonde d'une brune, mais l'imagination qui le guide doit les dif tinguer. Le burin marque mal les clairs & les ombres, fi le Graveur n'imagine auffi les couleurs. De même dans les figures en mouvement, il faut voir ce qui précéde & ce qui fuit, & donner au tems de l'action une certaine latitude; fans quoi l'on ne faifira jamais bien l'unité du moment qu'il faut exprimer. L'habileté de l'Artifte confifte à faire imaginer au fpectateur beaucoup de chofes qui ne font pas fur la planche ; & cela dépend d'un heureux choix de cir

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