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celui qui s'ifole le plus, qui concentre le plus fon cœur, en lui-même meilleur eft celui qui partage également fes affections à tous fes femblables. Il vaut beaucoup mieux aimer une maî-treffe que de s'aimer feul au monde.Mais quiconque aime tendrement fes. parens, fes amis, fa patrie, & le genre: humain, se dégrade par un attachement : défordonné qui nuit bientôt à tous les autres, & leur eft infailliblement pré-féré.

L'Amour de foi, qui ne regarde qu'à nous, eft content quand nos vrais befoins font fatisfaits; mais l'Amour propre, qui se compare, n'eft jamais content & ne sçauroit l'être, parce que ce sentiment, en nous preférant aux autres, exige auffi que les autres nous. préférent à eu, ce qui eft impoffible... Voilà comment les paffions douces & affectueufes naiffent de l'Amour de foi,, Fa

& comment les paffions haineufes & irafcibles naiffent de l'Amour propre. Ainfi ce qui rend l'homme effentiellement bon, eft d'avoir peu de befoins & de peu fe comparer aux autres ; ce qui le rend effentiellement méchant, eft d'avoir beaucoup de befoins & de tenir beaucoup à l'opinion.

Les préceptes de la loi naturelle ne font pas fondés fur la raifon feule, ils ont une base plus folide & plus fage. L'amour des hommes dérivé de l'amour de foi, eft le principe de la juftice humaine.

ON

AMOUR.

N peut diftinguer le moral du phyfique dans le fentiment de l'Amour. Le physique eft ce défir général qui porte un fexe à s'unir à l'autre : le moral eft ce qui détermine ce défir & le fixe fur un feul objet exclufivement, ou qui, du moins, lui donne pour cet objet préféré un plus grand dégré d'énergie. Or il eft facile de voir que le moral de l'Amour eft un fentiment factice, né de l'ufage de la fociété, & célébré par les femmes avec beaucoup d'habileté & de soin pour établir leur empire, & rendre dominant le fexe qui devroit obéir.

On aime bien plus l'image qu'on fe fait, que l'objet auquel on l'applique. Si l'on voyoit ce qu'on aime exacte

ment tel qu'il eft, il n'y auroit plus d'amour fur la terre. Quand on ceffe d'aimer, la personne qu'on aimoit reftela même qu'auparavant, mais on ne la voit plus la même. Le voile du preftige. tombe, & l'amour s'évanouit.

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Les premieres voluptés font toujours myftérieufes; la pudeur les affaisonne & les cache la premiere maîtreffe ne rend pas effronté, mais timide. Tout abforbé dans un état fi nouveau pour lui, le jeune homme fe recueille pour le goûter, & tremble de le perdre. S'il eft bruyant, il n'eft ni voluptueux ni tendre; tant qu'il fe vante il n'a pas.

joui.

Le véritable amour eft le plus chaffe de tous les liens. C'eft lui, c'est fon feu divin qui fçait épurer nos penchans naturels, en les concentrant dans un feul objet; c'eft lui qui nous dérobe aux tentations, & qui fait qu'excepré

cet objet unique, un fexe n'eft plus rien pour l'autre.

L'argent tue l'amour infailliblement Quiconque paye, fut-il le plus aimable des hommes, par cela feul qu'il paye, ne peut être-long-tems aimé. Bientôt il payera pour un autre, ou plutôt cet autre fera payé de fon argent ; & dans ce double lien formé par l'intérêt, par la débauche, fans amour, fans honneur, fans vrai plaifir, la femme avide, infidéle & miférable, traitée par le vil qui reçoit comme elle traite le fot qui donne, reftè ainfi quitte envers tous deux.

Celui qui difoit: je pofféde Laïs fans qu'elle me poffede, difoit un mot fans efprit. La poffeffion qui n'eft pas réciproque n'est rien : c'eft tout au plus la poffeffion du fexe, mais non pas de Findividu. Or, où le moral de l'amour n'eft pas, pourquoi faire une fi grande

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