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Au reste, nous pouvons dire ici des sujets de tableaux, ce que nous avons dit ailleurs des sujets de poëmes : le christianisme a fait naître pour la peinture une partie dramatique, très - supérieure à celle de la mythologie. C'est aussi la religion qui nous a donné les Claude Lorrain, comme elle nous a fourni les Delille et les Saint Lambert. Mais tant de raisonnemens sont inutiles qu'on ouvre la galerie du Louvre, et qu'on dise si l'on veut, que le génie du christianisme est peu favorable aux beaux

encore,

arts.

A

CHAPITRE V.

Sculpture.

quelques différences près qui tiennent à la partie technique de l'art, ce que nous avons dit de la peinture s'applique pareillement à la sculpture.

t

La statue de Moyse par Michel-Ange, à Rome; Adam et Eve, par Baccio, à Florence; le groupe du voen de Louis XIII, par Cos· tou, à Paris; le Saint Denis, du même; le tombeau du cardinal de Richelieu, ouvrage du double génie de Lebrun et de Girardon; le monument de Colbert, exécuté d'après le dessin de Lebrun, par Coyzevox

et Tuby; le Christ, la Mère de Pitié, les huit Apôtres de Bouchardon, et plusieurs autres statues du genre pieux, montrent que le christianisme ne sait pas moins animer le marbre que la toile.

Cependant il est à desirer que les sculpteurs bannissent à l'avenir de leurs compositions funèbres, ces squelettes qu'ils ont placés au monument; ce n'est point là le génie du christianisme, qui peint le trépas si beau pour le juste.

Il faut également éviter de représenter des cadavres (1) (quel que soit d'ailleurs le mérite de l'exécution), ou l'humanité succombant sous de longues infirmités (2). Un guerrier expirant au champ d'honneur, dans toute la force de l'âge, peut être superbe; mais un corps usé de maladies est une image que les arts repoussent, à moins qu'il ne s'y mêle un miracle, comme dans le tableau de saint Charles Borromée (3). Qu'on place donc au monument d'un chrétien, d'un côté, les pleurs de la famille et les

(1) Comme au mausolée de François Ier, et d'Anne de Bretagne.

(2) Comme au tombeau du duc d'Harcourt.

(3) La peinture souffre plus facilement la représentation du cadavre que la sculpture, parce que le marbre offrant des forces palpables et glacées, est trop près de la vérité.

regrets des hommes; de l'autre, le sourire de l'espérance et les joies célestes; un tel sépulchre, des deux bords duquel on verroit ainsi les scènes du temps et de l'éternité, seroit admirable. La Mort pourroit y paroître, mais sous les traits d'un ange à-la-fois doux et sévère; car le tombeau du juste doit toujours faire s'écrier avec saint Paul: O mort! où est ton dard? qu'as-tu fait de ton aiguillon?

Ν

CHAPITRE V I.

ARCHITECTURE.

Hôtel des Invalides.

EN traitant de l'influence du christianisme dans les arts, il n'est besoin ni de subtilité, ni d'éloquence; les monumens sont là pour répondre aux dépréciateurs du culte évangélique. Il suffit, par exemple, de nommer Saint-Pierre de Rome, Sainte-Sophie de Constantinople, et Saint-Paul de Londres, pour prouver qu'on est redevable à la religion, des trois chefs-d'œuvre de l'architecture moderne.

Le christianisme a rétabli dans l'architecture, comme dans les autres arts, les véri-. tables proportions. Nos temples, moins petits que ceux d'Athènes, et moins gigantesques

B..

que ceux de Memphis, se tiennent dans ce sage milieu où règnent le beau et le goût par excellence. Au moyen du dôme, inconnu des auciens, la religion a fait un heureux mélange de ce que l'ordre gothique a de hardi, et de ce que les ordres

simple et de gracieux.

grecs ont de

Plus les âges qui ont élevé nos monumens ont eu de piété, plus ces monumens ont été frappans, par la grandeur et la noblesse de leur caractère. On en voit un bel exemple dans l'hôtel des Invalides et dans l'Ecole militaire. Le premier semble avoir dilaté ses voûtes dans le ciel, à la voix de la religion; l'autre, s'être abaissé vers la terre, à la parole du siècle athée.

Trois corps-de-logis, formant avec l'église un carré long, composent tout l'édifice des Invalides. Mais quel goût parfait dans cette simplicité ! quelle beauté dans cette cour, qui n'est pourtant qu'un cloître militaire, où l'art a mêlé les idées guerrières aux idées religieuses, et marié l'image d'un camp de vieux soldats, aux souvenirs attendrissans d'un hospice. C'est à-lafois le monument du Dieu des Armées, et du Dieu de l'Evangile. La rouille du temps qui commence à le couvrir, lui donne de nobles rapports avec ces vétérans, ruines animées, qui se promènent sous ses vieux

portiques. Dans les avant-cours, tout retrace l'idée des combats; fossés, glacis, remparts, canons, tentes, sentinelles. Pénétrez-vous plus avant? le bruit s'affoiblit par degré, et va se perdre à l'église, où règne un profond silence. C'est une grande pensée que d'avoir mis le bâtiment religieux derrière tous les bâtimens militaires, comme l'image du repos et de l'espérance, au fond d'une vie pleine de troubles et de périls.

Le siècle de Louis XIV est peut-être le seul qui ait bien connu ces admirables convenances morales, et qui ait toujours, fait dans les arts juste ce qu'il falloit faire, rien de moins, rien de plus. L'or du commerce a élevé les fastueuses colonnades de l'hôpital de Greenwhich, en Angleterre ; mais il y a quelque chose de plus fier et de plus imposant dans la masse des Invalides. On sent qu'une nation qui bâtit de tels palais pour la vieillesse de ses armées, a reçu la puissance du glaive, ainsi que le sceptre des arts.

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