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branche de la phisolophie morale et politique. Quiconque rejette les notions sublimes que la religion nous donne de la nature et de son auteur, se prive volontairement d'un moyen fécond d'images et de pensées.

En effet, celui-là connoîtra mieux les hommes, qui aura long-temps médité les desseins de la providence ; celui-là pourra démasquer la sagesse humaine, qui aura pénétré les ruses de la sagesse divine. Les desseins des rois, les abominations des cités, les voies iniques et détournées de la politique, le remuement des cœurs par le fil secret des passions, ces longues inquiétudes qui saisissent par fois les peuples, ces transmutations de puissance du roi au sujet, du noble au plébéïen, du riche au pauvre ; tous ces ressorts resteront inexplicables pour vous si vous n'avez, pour ainsi dire, assisté au conseil du Très-Haut, avec ces divers esprits de force, de prudence, de foiblesse et d'erreur, qu'il envoie aux nations qu'il veut ou sauver ou perdre.

Mettons donc l'éternité au fond de l'histoire des tems; rapportons tout à Dieu, comme à la cause universelle. Qu'on vante tant qu'on voudra celui qui, démêlant les secrets puérils de nos cœurs, fait sortir les plus grands événemens des sources les plus

misérables: Dieu attentif aux royaumes des hommes; l'impiété, c'est-à-dire l'absence des vertus morales, devenant la raison im~ médiate des malheurs des peuples; voilà, il nous semble, une base historique bien plus noble, et aussi bien plus certaine que la première.

Et pour en montrer un exemple dans notre révolution; qu'on nous dise si ce sont des causes ordinaires qui dans le cours de quelques années dénaturèrent toutes nos affections, et éteignirent parmi nous cette simplicité et cette magnificence particulières au cœur de l'homme ? L'esprit de Dieu s'étant retiré du milieu du peuple, il ne resta de force que dans la tache originelle, qui reprit son empire, comme au jour de Caïn et de sa race. Quiconque vouloit être raisonnable sentoit en lui je ne sais quelle impuissance du bien; quiconque étendoit une main pacifique, voyoit cette main subitement séchée : le drapeau rouge flotte aux remparts de toutes les cités; la guerre est déclarée à toutes les nations: alors s'accomplirent les paroles du prophête : les os des rois de Juda, les os des prêtres, les os des habitans de Jérusalem, seront jetés hors de leur sépulchre (1). Le sang

(1) Jerem. cap. VIII, v. 1,

ruisselle de toutes parts: coupable envers les souvenirs, on efface les institutions antiques; coupable envers les espérances, on ne fonde rien pour la postérité; les tombeaux et les enfans sont également profanés. Dans cette ligne de vie qui nous fut transmise par nos ancêtres, et que nous devons prolonger au-delà de nous, on ne saisit que le temps présent, et chacun se consacrant à sa propre corruption, comme à un sacer-. doce abominable, vit comme si rien ne l'eût précédé, et que rien ne le dût suivre.

Mais tandis que cet esprit de perte dévoroit intérieurement la France, d'où lui venoit cet esprit de salut qui la défendoit au dehors? Elle n'a de prudence et de grandeur que sur sa frontière; au dedans tout est abattu, à l'extérieur tout triomphe. La patrie n'est plus dans ses foyers, elle est dans un camp sur le Rhin, comme au temps de la race de Mérovée : on croit voir le peuple Juif chassé de la terre de Gessen, et domptant les nations barbares

dans le désert.

Qui pourroit chercher une telle combinaison de choses dans les événemens humains? comment voyoit-on au même pays tant de folie et de sagesse? L'écrivain religieux peut découvrir ici un profond conseil du TrèsHaut si les puissances coalisées n'avoient

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voulu que faire tesser les violences de Robespierre, et laisser ensuite la France intègre, réparer ses maux et ses erreurs ; peut-être eussent - elles réussi. Mais Dieu vit l'iniquité des cours, et il dit au soldat étranger: « je briserai le glaive dans ta main, et tu ne détruiras point le peuple » de Saint Louis ».

Ainsi la religion conduit à l'explication des faits les plus incompréhensibles de l'histoire. De plus il y a dans le nom de Dieu quelque chose de superbe, qui sert à donner au style une certaine emphase toute merveilleuse; en sorte que l'écrivain le plus religieux est presque toujours le plus éloquent: sans religion, on peut avoir de l'esprit; mais il est difficile d'avoir du génie. Ajoutez qu'on sent dans l'historien de foi, un ton, nous dirions presque un goût d'honnête homme, qui fait qu'on est tout-à-fait disposé à croire ce qu'il raconte on se défie, au contraire, de l'historien sophiste; car représentant presque toujours la société sous un jour odieux, on est incliné à le regarder lui-même comme un méchant et un trompeur.

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CHAPITRE II.

CAUSES GÉNÉRALES QUI ONT EMPÊCHÉ LES MODERNES DE RÉUSSIR EN HISTOIRE.

IL

Beautés des sujets antiques.

L se présente ici une grande objection: si le christianisme est favorable au génie de l'histoire, pourquoi donc les modernes sont-ils généralement inférieurs aux anciens dans cette partie ?

D'abord, le fait supposé par cette objection n'est pas d'une vérité rigoureuse, puisqu'un des plus beaux monumens historiques qui existent chez les hommes, le Discours sur l'histoire universelle, a été dicté par l'esprit même du christianisme. Mais, en écartant un moment cet ouvrage, les causes de notre infériorité en histoire, (si cette infériorité existe), méritent d'être recherchées.

Elles nous semblent de deux espèces : les unes tiennent à l'histoire, et les autres à l'historien.

Les Grecs et les Romains ont offert deux vastes tableaux que le monde n'a pu reproduire. Les premiers ont sur-tout été rémarquables par la grandeur des hommes; les seconds, par la grandeur des choses. Rome et Athènes, parties de l'état de nature pour

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