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«< changer ma malignité en reconnaissance et en « estime pour ces mêmes personnes que j'ai re<«< connu n'avoir eu que la gloire de M. votre frère << en vue en tout ce qu'ils ont fait. J'espère que « M. Perier et vous en jugerez comme moi, et « ne voudrez plus, après que vous aurez vu ce <<< que je vous envoie, qu'on retarde davantage « l'impression du plus bel ouvrage qui fût jamais. « Je me charge des approbations et de tout le << reste, etc. »>

Ainsi M. de Brienne, au moment où il écrivait, était principalement chargé des détails matériels de l'impression des Pensées. On voit encore dans sa lettre, que le fidèle et le plus intime ami de Pascal était aussi le plus zélé pour une publication qu'il regardait comme utile aux intérêts de la religion et à ceux d'une mémoire qui lui était chère : le jeune duc de Roannez avait fait sur les Pensées un travail de révision, que madame Perier considérait comme un grand commentaire. Mais ce travail même fut soumis à la révision, à la correction ou à l'approbation d'Arnauld, de Nicole et des autres amis de Pascal, qui n'avaient, ajoute de Brienne, qu'un même sentiment dans cette affaire.

Jalouse de la gloire de son frère, madame Perier craignait que l'œuvre des correcteurs, confondue avec celle de l'auteur, ne formât une sorte d'alliage où le public ne pourrait plus faire la

part du génie. << Elle souhaitait, nous apprend en<«< core de Brienne, qu'on dît positivement que « c'étaient de petits morceaux de papier qu'on << avait trouvés mal écrits, et que c'étaient les premières expressions des pensées qui lui ve<< naient lorsqu'il méditait sur son grand ou<< vrage contre les athées que M. Pascal, ni per<< sonne, n'avait repassé dessus que pour les met<<< tre en ordre seulement; qu'on avait encore les originaux en la manière qu'on les avait trou« vés, etc. >>

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Le fils aîné de madame Perier faisait de son mieux pour seconder les intentions de sa mère; citons encore M. de Brienne : «Je vous dois dire, << madame, que M. votre fils est bien aise de se « voir tantôt au bout de ses sollicitations auprès << de moi et de vos autres amis, et de n'être plus obligé à nous tenir tête avec l'opiniâtreté qu'il faisait, et dont nous ne pénétrions pas bien les << raisons; car la force de la vérité l'obligeait à « se rendre, et cependant il ne se rendait point <«< et revenait toujours à la charge.... Mais, main<< tenant, nous ferons bientôt la paix, et j'espère <«< que notre satisfaction, et la gloire, et l'applau«< dissement, qui sont inséparables de la publica<< tion de cet ouvrage, achèveront de mettre fin <«< aux petits différends que nous avons eus, M. de << Roannez et moi, avec M. votre fils. »

La première édition des Pensées parut enfin au

commencement de l'année 1670. Elle devait être précédée d'une Vie de Pascal, que madame Perier avait écrite dès 1662. Les documents que nous avons consultés n'apprennent pas le motif qui fit écarter cette biographie intéressante; mais on peut supposer que ce furent Roannez, Arnauld et Nicole, et les autres amis de Pascal, qui s'opposèrent alors à la publication de la même manière qu'ils l'empêchèrent en 1678, ainsi que nous le dirons plus loin.

La préface de cette première édition laisse beaucoup à désirer, soit en ce qui touche la vie de Pascal, soit en ce qui pouvait faire connaître le travail des premiers éditeurs. Cette préface, jusqu'à présent mal à propos attribuée à l'abbé Perier, qui n'avait, en 1670, que dix-huit ans, a été composée par son frère aîné, Étienne Perier, qui fut depuis conseiller à la Cour des aides de Clermont 2.

Voici comment s'exprime Étienne Perier sur le travail des éditeurs : « Comme l'on savait le des<«< sein qu'avait M. Pascal de travailler sur la re<«< ligion, l'on eut un très-grand soin après sa mort

Un vol. in-12, chez Desprez, à Paris. L'impression en avait été achevée le 2 janvier. · Du reste, nous avons trouvé, sous le même millésime de 1670, trois éditions princeps, identiques quant au format et quant au texte, mais n'ayant pas le même nombre de pages, et provenant évidemment de trois impressions successives, ou peutêtre simultanées.

2

Voyez, quant au véritable auteur de la préface, une lettre de madame Perier au docteur Vallant. Appendice, no X.

<« de recueillir tous les écrits qu'il avait faits sur

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« La première manière qui vint dans l'esprit, <<< et celle qui était sans doute la plus facile, était <«< de les faire imprimer tout d'une suite dans le <«< même état qu'on les avait trouvés. Mais l'on ju<<< gea bientôt que de le faire de cette sorte, c'eût « été perdre presque tout le fruit qu'on en pouvait

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espérer; parce que les pensées plus parfaites, plus suivies, plus claires et plus étendues, étant <«< mêlées, et comme absorbées parmi tant d'au<< tres imparfaites, obscures, à demi digérées, et quelques-unes même presque inintelligibles à « tout autre qu'à celui qui les avait écrites, il y <<< avait tout sujet de croire que les unes feraient <<< rebuter les autres, et que l'on ne considérerait «< ce volume, grossi inutilement de tant de pen«<sées imparfaites, que comme un amas confus, << sans ordre, sans suite, et qui ne pouvait servir << à rien.

«< Il y avait une autre manière de donner ces <<< écrits au public, qui était d'y travailler aupa<< ravant, d'éclaircir les pensées obscures, d'a<«< chever celles qui étaient imparfaites, et, en << prenant dans tous ces fragments le dessein de « M. Pascal, de suppléer en quelque sorte l'ou<< vrage qu'il voulait faire. Cette voie eût été as«< surément la plus parfaite; mais il était aussi «< très-difficile de la bien exécuter. L'on s'y est

<< néanmoins arrêté assez longtemps, et l'on avait << en effet commencé à y travailler '. Mais enfin <«<l'on s'est résolu de la rejeter aussi bien que la

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première, parce que l'on a considéré qu'il était « presque impossible de bien entrer dans la pen«sée et dans le dessein de l'auteur, et surtout <«< d'un auteur mort, et que ce n'eût pas été don<<< ner l'ouvrage de M. Pascal, mais un ouvrage << tout différent.

<«< Ainsi, pour éviter les inconvénients qui se << trouvaient dans l'une et l'autre de ces manières « de faire paraître ces écrits, l'on en a choisi une << entre deux qui est celle que l'on a suivie dans <«< ce recueil. L'on a pris seulement, parmi ce grand nombre de pensées, celles qui ont << paru les plus claires et les plus achevées, et on les donne telles qu'on les a trouvées, sans y « rien ajouter ni changer; si ce n'est que, au lieu qu'elles étaient sans suite, sans liaison et disper«sées confusément de côté et d'autre, on les a

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mises dans quelque sorte d'ordre, et réduit sous «< les mêmes titres celles qui étaient sur les «< mêmes sujets, et l'on a supprimé toutes les au« tres qui étaient ou trop obscures ou trop imparfaites. >>

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On peut voir combien est inexacte cette as

'Il est probable que le travail, dont parle ici Étienne Perier, était celui auquel s'était particulièrement livré le duc de Roannez, et que madame Perier appelait un grand commentaire.

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