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joug si doux par sa grâce, que ceux qui semblent en être chargés sont obligés d'avouer que rien n'est si agréable et si aisé que de servir un si bon Maître.

Malheureux mille fois les enfants de Babylone, qui, séduits par la trompeuse lueur des biens présents, préférèrent le règne tyrannique du démon à la douceur de votre empire, aimable Seigneur ! Ah! quelle confusion pour eux au jour du jugement d'avoir fait un si mauvais choix! Quand vous élèverez sur la nue le glorieux étendard de votre croix, quel désespoir à eux d'en avoir été les ennemis par leur orgueil et par leur sensualité! Ah! qu'il vaut beaucoup mieux l'avoir aimée, l'avoir portée pendant sa vie, par un renoncement fidèle à toute la corruption du siècle! C'est à quoi mon cœur est tout à fait déterminé, Seigneur. J'aime mieux être crucifié avec vous, que d'être sans vous dans les plaisirs. Je souscris de toute mon âme à cet oracle sorti de votre bouche sacrée, que celui qui voudra sauver sa vie la perdra; et celui qui la perdra pour l'amour de vous, la sauvera 1.

MERCREDI DE LA IVe SEMAINE

APRÈS L'ÉPIPHANIE

Des différentes dispositions de ceux qui veulent suivre le Sauveur, et se sauver en le suivant.

I. POINT.

Les premiers, à la vérité, ont quelque envie de se mettre à la suite du Sauveur, et de faire leur

1 Luc. 9. 24.

T. I.

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salut; mais les moyens nécessaires pour parvenir à ce but leur paraissent si difficiles, qu'ils n'ont pas le courage de se résoudre à les pratiquer. Ils voudraient bien suivre Jésus-Christ; mais ils ne sauraient gagner sur eux ni d'abandonner les biens du siècle, ni d'en dégager leurs coeurs semblables à un malade qui voudrait bien guérir, mais qui ne peut entendre parler de remèdes. Comme celui-ci espère en vain sa guérison, ceux-là se flattent ainsi vainement de faire leur salut, le ciel étant le prix des bonnes œuvres, et non pas de quelques désirs stériles et imparfaits. On peut même dire qu'ils n'ont pas la volonté de se sauver, n'ayant pas celle d'en prendre les moyens : tel est le paresseux dont parle le Saint-Esprit, qui veut, et ne veut pas 1.

C'est la disposition de beaucoup de gens; mais n'est-ce pas aussi la mienne? Si je m'en rapporte à ma langue, je veux suivre Jésus-Christ, j'aspire après le ciel; car je n'ai rien plus souvent à la bouche que cette parole: Je veux être sauvé. Mais, si je viens à consulter mon cœur, j'y trouve tant d'éloignement des maximes de Jésus-Christ, tant de lâcheté dans son service, un si grand vide de bonnes œuvres, que je n'en puis rien conclure, sinon que je n'ai guère d'ardeur ni pour JésusChrist ni pour mon bonheur éternel.

Voilà la situation déplorable où je me trouve, et je viens, les larmes aux yeux, vous la confesser, ô mon Dieu. Je me suis trompé mille fois moimême, en me flattant d'être dans la volonté de vous obéir, et de remplir les devoirs essentiels de mon état. Mais pouvais-je vous en imposer, Seigneur,

1 Prov. 13. 4.

et dérober à vos yeux les déguisements de mon mauvais cœur? Vous en sondez la profondeur, et vous en voyez à découvert toute la malice. Cependant, l'oserai-je dire? au moins ne sera-ce pas. pour m'excuser; ce ne sera que pour attirer votre compassion: mon cœur, tout mauvais qu'il est, a encore plus de faiblesse que de malice. Il voudrait vous servir, vous aimer, vous sacrifier tout: mais c'est une volonté malade, qu'il n'appartient qu'à vous de guérir. Vous le pouvez si aisément; il ne faut que lui appliquer une goutte de votre sang précieux, pour en faire une volonté sainte, efficace et généreuse. C'est ce que j'espère de votre infinie miséricorde.

II. POINT.

Les seconds ont une meilleure volonté de répondre à la vocation de Jésus-Christ, et de travailler à leur salut. Ils prennent des mesures pour cela tout leur mal est de vouloir faire eux-mêmes le choix de certains moyens, au lieu de s'attacher à ceux qui leur sont marqués par la volonté de Dieu en quoi ils ressemblent à ces malades qui ont envie de guérir, qui ne refusent pas absolument les remèdes, mais qui les veulent choisir, tâchant de faire tomber les médecins dans leurs sentiments. Le souverain médecin des âmes, qui sait parfaitement les infirmités spirituelles de chacun, ordonne à tous d'avoir dans le cœur le détachement des biens de la terre; mais il en prescrit à certains le renoncement effectif, prévoyant qu'ils ne les conserveront jamais sans y avoir une affection déréglée. L'inspiration divine les presse d'en venir à ce dépouillement; ils ne peuvent s'y résoudre, et ils voudraient que le Seigneur se contentât du dégagement inté

rieur, qu'ils présument d'accorder avec la jouis

sance.

Hélas! combien y a-t-il de ces sortes de gens dans le monde! de personnes jeunes, douées d'excellentes qualités, qui ont des dispositions admirables pour la vertu, et que Dieu élèverait à une haute sainteté, s'ils avaient le courage de fouler aux pieds la vaine fortune du siècle! Ils y sont retenus par des parents, par de faux amis. On leur fait entendre qu'on peut se sanctifier dans le monde, et qu'il n'est pas nécessaire, pour suivre Jésus-Christ, d'entrer en religion. Cela est vrai absolument; mais cela ne s'accomplira jamais en eux; Dieu les veut totalement et sans partage. Voilà ce qu'ils ne peuvent goûter, à l'exemple de ce jeune homme fort riche, qui se retira tout affligé parce que NotreSeigneur lui avait dit : Si vous voulez être parfait, allez, vendez tout ce que vous avez 1. Qui m'a dit que cet infortuné n'est pas devenu méchant, pour avoir refusé d'être parfait? Qui peut m'assurer qu'il n'en sera pas de même de moi, et que les richesses auxquelles je fais difficulté de renoncer ne seront pas pour moi des occasions de grandes chutes, et ⚫ des chaînes qui m'entraîneront au malheur éternel?

Que je vous ai d'obligation, Seigneur, de m'avoir efficacement appelé à ce parfait renoncement! d'avoir vous-même rompu les liens qui m'attachaient au monde! et de m'avoir conduit comme par la main dans l'heureux séjour de la véritable liberté ! Mais pour être saint, vous le savez, ô mon Dieu, il ne suffit pas d'être en un lieu saint; il faut y vivre saintement dans l'accomplissement de

1 Matth. 19. 21.

vos volontés, et accomplir tous mes devoirs. Que me servirait de m'être dépouillé des biens du siècle, si j'en conservais encore l'amour? J'ai beau être pauvre, si je ne suis pas chaste, et, quand je le serais, si je nourris l'orgueil dans mon cœur, de quel usage me peuvent être une pauvreté et une chasteté orgueilleuses? Il faut être tout à vous, Seigneur, il faut y être sans réserve : c'est là ce que je désire ardemment, et ce que je vous demanderai jusqu'au dernier soupir de ma vie.

III. POINT.

Les troisièmes ont une volonté sincère de suivre Jésus-Christ partout où il voudra les conduire; de tendre à la perfection par toutes les voies qu'il lui plaira de leur montrer, et enfin de se conformer en toutes choses à son bon plaisir à l'exemple de ces malades qui, dans l'impatience de recouvrer la santé, s'abandonnent tout à fait entre les mains du médecin, résolus de prendre indifféremment tous les remèdes qu'il jugera leur être les plus utiles.

O l'excellente disposition, qui est la source, non seulement d'une sublime perfection, mais d'une profonde tranquillité et de la joie la plus solide! C'est dans ce parfait abandon qu'on trouve ce fleuve de paix, et cette justice aussi étendue que la mer1, que promet le Saint-Esprit par la bouche du Prophète. Charmés d'un état si saint et si heureux, jetons-nous donc aux pieds du Seigneur, et disonslui, comme Saul nouvellement converti : Seigneur, que voulez-vous que je fasse 2? Voilà votre serviteur qui ne demande qu'à vous suivre et qu'à vous

1 Isai. 48. 18.

2 Act. 9. 6.

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