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s'il me

tifiez mon courage, embrasez mon âme; et, reste peu d'années, faites au moins que je les emploie à vous aimer de toute l'étendue et de toute la vivacité de mon cœur.

III. POINT.

Les premiers envoyés à la vigne murmurèrent de cette égalité; mais le père de famille leur montra l'injustice de ce murmure, en disant à l'un d'eux: Mon ami, je ne vous fais point de tort. N'êtesvous pas convenu avec moi d'un denier pour votre journée? Prenez ce qui vous appartient, et vous en allez. Pour moi, je veux donner à ce dernier autant qu'à vous: ne m'est-il pas permis de faire ce que je veux? Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers seront les derniers : car plusieurs sont appelés, et peu élus 1.

C'est ici un grand mystère, que le Sauveur nous révèle à la fin de cette parabole. Il nous apprend à ne pas approfondir le secret de la prédestination des saints; que ce n'est pas à nous de raisonner sur la préférence qu'il fait de quelques-uns dans la dispensation de ses grâces; qu'il y en a de générales, qu'il ne refuse à aucun, et de particulières, qu'il ne donne qu'au petit nombre; qu'en cela il ne fait tort à personne; que ce qui est de récompense se donne à qui le mérite, mais que ce qui est de grâce se donne à qui il lui plaît; que, s'il y en a peu de parfaits, ce n'est pas qu'il n'appelle plusieurs à la perfection, mais c'est que peu répondent à cette haute vocation; que le nombre des tièdes et des imparfaits est le plus grand; qu'il n'y a que le petit troupeau, le troupeau choisi d'âmes ferventes, qui arrive à l'heureux terme de la sainteté.

1 Matth. 20. 11.

Ceux qui paraissent être les premiers dans la maison du Père céleste sont les personnes consacrées à Dieu, et dévouées par état à son service. Les derniers sont les personnes du monde, qui n'ont pas, comme les autres, de si pressants engagements à la vertu. Combien de fois, cependant, arrive-t-il que les premiers, pour avoir été infidèles, lâches, amateurs d'eux-mêmes, sont devancés par les derniers, qui, étant dans le monde comme s'ils n'étaient pas du monde, y vivent dans le recueillement, la mortification, la pureté de cœur, et dans l'exercice de la plus sublime perfection! Quelle honte à des prêtres et à des religieux de se voir, au jour du jugement, inférieurs à de pauvres et humbles créatures, qui occuperont les premiers rangs dans le ciel, tandis qu'eux-mêmes mériteront à peine d'y arriver!

La vie tiède et imparfaite dans laquelle je languis depuis tant d'années me fait bien craindre, ô mon Sauveur, de me voir rejeté de vous parmi la foule des imparfaits. Je ne puis m'en prendre qu'à moi-même. Tout me porte, tout m'engage, tout m'anime à la sainteté. La vocation dont vous m'avez honoré, les secrets aiguillons dont vous me pressez, les exemples que vous me mettez devant les yeux, les puissants attraits que je sens de tout temps à la pureté de votre amour; votre gloire, mes intérêts, tout me parle de la sainteté, tout m'y pousse, tout m'y attire. Mon Dieu, attirez-y enfin si puissamment mon cœur, qu'il ne résiste plus à vos bontés.

LUNDI DE LA SEPTUAGÉSIME

Des principales circonstances de la Passion
de Notre-Seigneur.

La représentation de chaque mystère de la Passion servira toujours de premier prélude; et pour le second, on demandera au Saint-Esprit la grâce de recueillir de la méditation tout le fruit que le Sauveur lui-même veut qu'on en tire.

I. POINT.

Contemplons qui est Celui qui souffre, ce qu'il souffre, et pour qui il souffre. C'est un Agneau sans tache, qui n'a commis aucun péché, en la bouche duquel on ne trouva jamais aucune tromperie 1. C'est le Saint des saints, le Verbe éternel, le Fils de Dieu fait homme pour nous, Celui en qui sont renfermés tous les trésors de la sagesse divine 2, qui ne fit jamais que du bien à tout le monde, ayant employé sa vie à assister les misérables, et à délivrer ceux qui étaient sous la puissance du démon 3. C'est celui-là même qui, au lieu de l'amour et de l'honneur qu'il méritait, n'a reçu des hommes que les traitements les plus horribles, ayant souffert de leur part tout ce que la haine la plus envenimée, et tout ce que la rage la plus violente peut inventer d'opprobres et de supplices.

Mais le croirions-nous, si la foi ne l'enseignait, que ce Saint par excellence, que cet aimable

1 Isai. 53. 9.

2 Coloss. 2. 3.

T. I.

3 Act. 10. 38.

15

bienfaiteur, que cet amant passionné des hommes a bien voulu endurer toutes ces peines pour le salut de ses ennemis, et qu'il a donné son sang pour ceux mêmes qui le répandaient? Il a souffert les douleurs et les ignominies de sa Passion pour tous les hommes en général, et pour chacun d'eux; tous leurs noms étaient écrits dans sa mémoire et gravés dans son cœur, tandis que son corps était tout couvert de blessures. Il connaissait en détail leurs péchés et leurs misères; et le salut du dernier des hommes lui était si cher, qu'il s'immolait pour lui avec autant d'affection que s'il n'y eût point eu d'autres pécheurs à racheter. C'est pourquoi je dois dire, avec les plus tendres sentiments de mon cœur, ce que disait le grand Apôtre : Il m'a aimé, et s'est livré à la mort pour moi 1.

O mon âme, si tu savais la place que tu tenais dans le cœur de Jésus pendant qu'il souffrait de si horribles tourments, y pourrais-tu penser sans être pénétrée de la plus vive douleur, de la plus tendre compassion, et du regret le plus amer d'avoir offensé un Dieu si bon?

O mon Jésus, qui méritez de recevoir les hommages du ciel et de la terre, comment avez-vous permis que de vils esclaves vous traitassent avec tant d'indignité! Les ignominies et les douleurs conviennent-elles à Celui qui doit être honoré, glorifié, servi par les anges et par les hommes? O que nos péchés sont dignes de haine, d'avoir été les causes de vos souffances! et que vous êtes digne d'amour, d'avoir bien voulu les endurer pour sauver des pécheurs ingrats! O que les plaies de mon âme étaient

1 Galat. 2. 20,

dangereuses, puisqu'il a fallu que vous fussiez blessé pour les guérir! O mon Sauveur, que bénies soient à jamais votre charité et votre miséricorde !

II. POINT.

Considérons ensuite avec quel amour NotreSeigneur a souffert pour nous de si grands tourments. Ce ne fut ni par nécessité ni malgré lui qu'il les endura; c'est qu'il le voulut bien 1, comme remarque le Prophète. Le motif qui le porta à souffrir des excès si terribles, c'est le désir de nous sauver et de nous réconcilier avec son Père. Ce désir ardent qu'il a eu de notre salut, lui a fait aimer les souffrances. Il ne parlait que de sa Passion, il se fâchait lorsqu'on voulait l'en détourner; il s'affligeait de la voir différée; il était dans une espèce d'impatience que le temps de l'endurer arrivât. Je dois recevoir un baptême, disait-il à ses disciples: ah! qu'il me tarde que je l'aie reçu 2!

As-tu jamais conçu, ô mon âme, ce prodige d'amour? Ce n'était pas un baptême d'eau que désirait ton Sauveur; c'était un baptême de sang, et de sang que d'impitoyables bourreaux devaient tirer de ses veines à force de supplices. Il a voulu le verser tout entier; son amour n'a jamais dit : C'est assez, qu'il ne l'ait répandu jusqu'à la dernière goutte.

O plût à Dieu qu'il me fût permis d'entrer dans votre cœur, aimable Jésus, pour mesurer la longueur, la largeur, la hauteur et la profondeur de votre charité! Pourrais-je y voir tout le feu dont vous brûlez pour moi, sans en être embrasé! Sor

1 Isai. 53. 7.

2 Luc. 12. 50.

3 Ephes. 3. 18.

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