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TRADUCTION

DE LA I.re ÉLÉGIE DE TIB ULLE.

QU'UN autre, poursuivant la gloire et la fortune,

Troublé d'une crainte importune,

Empoisonne sa vie et perde son sommeil;
Que, dévouant à Mars sa pénible carrière,
La trompette sinistre et le cri de la guerre

Retentissent à son réveil;

Pour moi, qui des grandeurs n'ai point l'âme frappée,
Puissé-je, sans rien craindre et sans rien envier,
Cacher tranquillement, près d'un humble foyer,
Ma pauvreté désoccupée!

Que, souriant à mes loisirs,
Toujours la flatteuse espérance

M'offre, dans le lointain, la champêtre abondance
Ornant l'étroit enclos qui borne mes désirs!
Que des biens que j'attends l'agréable promesse

Suffise à mes amusemens!

Je soignerai ma vigne et mes arbres naissans;
Armé de l'aiguillon, de mes boeufs indolens
J'irai gourmander la paresse.

Qu'avec plaisir souvent j'emporte dans mon sein
L'agneau s'égarant sur la rive,

Le chevreau qu'en courant sa mère inattentive
A délaissé sur le chemin !

J'offrirai de mes biens les rustiques prémices
Aux dieux de la vendange, aux dieux du laboureur.
Divinités des champs, qui l'êtes du bonheur,
Vous recevez toujours mes premiers sacrifices.
J'épanche le lait pur en l'honneur de Palès;
Je présente des fruits sur l'autel de Pomone;
Et des épis que je moissonne

J'assemble et forme une couronne

Que ma main va suspendre au temple de Cérès.
Vous, jadis les gardiens d'un plus ample héritage,
Avant que des destins j'eusse éprouvé l'outrage,
Mais de ma pauvreté devenus protecteurs,
O Pénates consolateurs!

Jadis le sang d'une génisse

Vous payait le tribut de mon nombreux troupeau; Aujourd'hui le sang d'un agneau

Est mon plus riche sacrifice.

Vous l'aurez, cet agneau, le plus beau de mes dons.
Vous verrez du hameau la folâtre jeunesse,
Autour de la victime exprimant l'allégresse,
Demander, en chantant, des vins et des moissous.
Ah! prêtez à leurs chants une oreille facile,
Et ne dédaignez pas notre simplicité.

Le premier vase aux dieux autrefois présenté,
Fut pétri d'une simple argile.

Je n'ai point regretté le bien de mes aïeux;

Content de mon champêtre asile,
Content de reposer sur la couche tranquille
Où le sommeil ferme mes yeux,
Oh! qu'il est doux, lorsque la pluie
A petit bruit tombe des cieux,

De céder à l'attrait d'un sommeil gracieux !
Qu'il est plus doux encor, la nuit, près de Délie,
De se sentir pressé dans ses bras amoureux,
Et d'entendre mugir l'aquilon en furie!

Ce sont là les plaisirs que je demande aux dieux.
Qu'il soit riche, celui que des travaux sans nombre
Ont comblé de trésors si chèrement payés;

Je suis pauvre, et je vais chercher le frais et l'ombre,
Assis près d'un ruisseau qui murmure à mes pieds.
Ah! périsse tout l'or de la superbe Asie,
Si, pour l'aller ravir, il faut quitter Délie ;
S'il faut lui coûter quelques pleurs!

Que Messala prétende aux lauriers des vainqueurs,
Et que des ennemis les dépouilles brillantes
Ornent de son palais les portes triomphantes;
Moi, je suis dans les fers d'une jeune beauté;
Je vis sous les lois de Délie.

Pourvu que je te voie, maîtresse chérie !
Je renonce à la gloire, à la postérité;

Il n'est point d'honneurs que j'envie;
Rien ne vaut mon obscurité.

Oui, j'irais avec toi, sur un mont solitaire,
Conduire un troupeau sur tes pas;

Je consens à n'avoir d'autre lit que la terre,
Pourvu que tu sois dans mes bras.

Ah! d'un lit somptueux l'éclatante parure
N'en écarte pas les ennuis;

La pourpre et le duvet, les eaux et leur murmure,
Ne font pas la douceur des nuits.

Qu'importe à nos désirs la couche la plus belle,
Lorsqu'on y veille dans les pleurs ;
Lorsqu'on appelle en vain la maîtresse infidèle
Qui porte ses amours ailleurs?

Hélas! sans les amours, comment souffrir la vie?
Quel cœur, quel cœur d'airain, ô ma chère Délie !
Goûtant le bonheur d'être à toi,

Pourrait te préférer une gloire frivole?
Les triomphes du Capitole

Valent-ils un regard que tu jettes sur moi?
Ah! que ma paupière mourante

Se tourne encor vers toi dans mon dernier moment;
Que, par un dernier mouvement,

Je presse encor tes mains de ma main défaillante!
Tu pleureras, sans doute, auprès de mon bûcher;
Tes yeux,
ces yeux si pleins de charmes,
Répandront sur moi quelques larmes :

Tu n'as pas un cœur de rocher!

Tu pleureras, Délie ; et l'amant jeune et tendre,

Et l'amante, objet de ses vœux

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Te verront honorer ma cendre,

Et s'en retourneront les larmes dans les yeux.

Mais garde d'outrager ta belle chevelure,
De blesser de ton front l'ivoire ensanglanté !
Aux manes d'un amant c'est faire trop d'injure,
Que d'attenter à ta beauté.

Hâtons-nous : dérobons à la Parque inflexible
Le moment de jouir, d'aimer et d'être heureux :
Le temps entraîne tout dans sa course insensible:
La mort viendra bientôt, de son voile terrible,

Couvrir nos amours et nos jeux.

Le temps n'épargne point les amans et les belles,
Et l'amour ne sied pas au déclin de nos ans;
Il ne repose point ses inconstantes ailes

Sur une tête à cheveux blancs.

Je suis encore à lui; je vis sous sa puissance :
Content du peu qui m'est resté,

Je coule en paix mes jours, sans chercher l'opulence,
Et sans craindre la pauvreté.

LA HARPE.

LES FUNÉRAILLES D'ADONIS.

IMITATION DE BION.

P

LEURONS tous Adonis, Adonis et ses charmes! Tu meurs, bel Adonis! Amours, fondez en larmes. Réveille-toi, Vénus; sors des bras du repos;

Change en tristes cyprès les myrtes de Paphos!

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