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De ton heureux printemps craint de troubler la paix ;
Il défend aux Amours de te lancer leurs traits.
Quand sa rigueur m'opprime, il semble te sourire :
Au bonheur de ton sort ici bas tout conspire:
Au plus léger péril qui vient te menacer
Tu vois autour de toi les mortels s'empresser;
On te donne un soutien lorsque dans sa furie
L'impétueux Borée a menacé ta vie.

Tu ne connus jamais l'injure des saisons;
De chaume enveloppé, tu braves les glaçons;
Et lorsque, ramenant l'ardente canicule,
Apollon en courroux de ses rayons nous brûle;
Que la triste naïade, au milieu des roseaux,
Pour éteindre sa soif, a trop peu de ses eaux,
Une onde salutaire, à tes pieds épanchée,
Abreuve autour de toi la terre desséchée.

L'épouse du Zéphir, t'accablant de faveurs,
Dès tes plus jeunes ans te couronne de fleurs.
Dans un âge plus mûr tu nous combles de joie :
Les présens que par toi Pomone nous envoie
Te font chez les humains une foule d'amis.
Mais nous, dès la jeunesse aux passions soumis,
L'orgueil, l'ambition, nous forgent mille entraves.
Fiers des préjugés vains qui nous tiennent esclaves,
Sans trouver le bonheur au bout de nos travaux,
Nous n'avons pour amis qu'un peuple de rivaux.
Chacun de nos instans compte plus d'un orage,
Et chaque jour pour toi s'écoule sans nuage.

Moins passager que nous, bravant l'aile du Temps,
Tu ne vois la vieillesse avancer qu'à pas lents;
Et, dans cet âge encore exempt de nos misères,
Tu sembles nous donner des avis salutaires :
Tu nous fais souvenir que le héros, le roi,
Malgré cent noms pompeux, vieilliront avant toi;
Que tout passe ici bas; mais sur nous la vieillesse
Attire les mépris de la folle jeunesse :

A nos sages conseils nous la voyons s'aigrir.
Nous voyons nos enfans à leur perte courir,
Sans que de nos erreurs la triste expérience
Les sauve des écueils où périt l'imprudence.

Le voile de la mort nous dérobe le jour,
Et, par l'affreux tombeau dévorés sans retour,
Nous ne laissons bientôt qu'une cendre stérile.
Mais après son trépas l'arbre est encore utile :
Quand le Zéphir s'enfuit, chassé par les hivers,
Qu'aux noirs enfans du Nord il livre l'univers,
Près de l'arbre enflammé nous bravons leur furie:
La cabane du pauvre avec l'arbre est bâtie;
L'arbre soutient aussi le faîte des palais;
Et l'arbre qui long-temps régna sur les forêts,
En vaisseau transformé, va régner sur les ondes;
Et, vainqueur de Neptune, il unit les deux mondes.
Heureux arbre! pour toi les destins moins cruels
Sont avares des maux prodigués aux mortels.
Ah! ton sort est trop beau! tu vis, tu meurs tranquille;
Toujours aimé de nous, quoique toujours utile,
Elégies.

16

Toi seul fais des heureux sans faire des ingrats.
Ton ombre au dieu du jour dérobe les appas
Qu'à son jeune vainqueur abandonne une belle :
Après ses doux transports, de ton ombre fidèle
Qui couvrit ses plaisirs et voile son secret,
L'amant ne t'a jamais reproché le bienfait.
Tu n'as pas vu non plus, dans le cours de ta vie,
De mortel insensé dont la sombre folie

Osât te reprocher ou tes fruits ou tes fleurs :
Le bonheur est pour toi, quand pour moi sont les pleurs.
A tes pieds dès long-temps mon amante inhumée,
Bel arbre, en ta substance est déjà transformée.
Tes rameaux orgueilleux brillent de ses attraits,
Mais ton aspect sans cesse irrite mes regrets:
Le fruit qui t'enrichit, la fleur qui te décore
Me rappellent, hélas! de mon Éléonore
Les attraits enchanteurs et la rare bonté.
Ah! que bientôt du jour je perde la clarté ;
A mon amante uni, qu'à la saison nouvelle,
Mon arbre, dans tes fleurs je renaisse avec elle!
G. DE LA MADELAINE, fils.

L'ARBRE MOURANT.

CITOYENS, qui voyez étendus sur la terre
Ces rameaux, ces tristes débris,
Ma chute, qui vous a surpris,

Ne vient point des feux du tonnerre.
Hélas! apprenez mon destin:
J'ombrageais le tertre voisin

Du lieu qu'habitait Galathée;
L'ingrate s'en est écartée:

J'ai langui; j'ai perdu ma séve et mes couleurs.
Je n'ai plus goûté l'avantage

De parer son jardin, de garantir ses fleurs,
Et de la voir sous mon ombrage.

Tout m'a quitté : l'oiseau qu'attirait mon feuillage
Portait ailleurs ses chants, me laissant mes douleurs,
Et me privait de son ramage.

La douleur de ne plus vous voir,
Galathée, a causé mon dernier désespoir.
Les vents, les aquilons partent de ces collines
Qui touchent aux plaines voisines;

Je les ai conjurés de terminer mon sort.

Les vents m'ont écouté; j'ai senti leur effort,
Et vous contemplez mes ruines.

Si quelque voisin plus heureux

Peut s'attacher à vous d'une ardeur aussi vive,
Sur mon exemple, hélas! favorisez ses vœux,
Et n'ordonnez pas qu'il me suive.

BERNARD.

L'ARBRE RENVERSÉ.

PIÈCE IMITÉE DE L'ESPAGNOL, DE MELENDEZ.

Roi du vallon, antique peuplier,

Qu'est devenu l'honneur de ton feuillage?
Où sont tes verts rameaux jadis chargés d'ombrage?
Pourquoi n'entends-je plus frémir ton front altier
Sous l'aile du zéphir volage?

Tu naquis sur ces bords: ce paisible ruisseau
Qui baigne la rive voisine,

Du libre tribut de son eau

Nourrissait ta verdure, abreuvait ta racine;
Et bientôt dans les airs, où ton ombre domine,
Ta tête enorgueillie avait fui son berceau.
Prêt à bâtir son nid, l'industrieux oiseau

A ton branchage aimait à se suspendre;
Et quand l'Aurore, au visage riant,
De ses premiers rayons colorait l'orient,
A la voix de l'Amour, fidèles à se rendre,

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