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Ah! puissent nos deux noms tracés
Sur l'agate blanche et polie,

Par Vénus être un jour placés
Sous les ombrages d'Idalie,
Parmi les chiffres enlacés

Et de Tibulle et de Délie!

Dans l'art de plaire et d'être heureux,
Ils nous ont servi de modèles;
Soyons encor plus amoureux,
Hélas! et surtout plus fidèles!

PORTRAIT D'EUCHARIS.

REGARDEZ Eucharis, vous qui craignez d'aimer,

Et vous voudrez mourir du feu qui me dévore; Vous, dont le cœur éteint ne peut plus s'enflammer, Regardez Eucharis, vous aimerez encore !

Il faut brûler, quand, de ses flots mouvans, La plume ombrage, en dais, sa tête enorgueillie; Il faut brûler, quand l'haleine des vents Disperse ses cheveux sur sa gorge embellie! Un air de négligence, un air de volupté, Le sourire ingénu, la pudeur rougissante! Les diamans, les fleurs, l'hermine éblouissante, Et la pourpre et l'azur, tout sied à sa beauté.

Que j'aime à la presser! quand sa taille légère
Emprunte du sérail les magiques atours;
Ou qu'à mes sens ravis sa tunique étrangère
D'un sein voluptueux dessine les contours!
L'Amour même a poli sa main enchanteresse ;
Ses bras semblent formés pour enlacer les dieux :
Soit qu'elle ferme ou qu'elle ouvre les yeux,
Il faut mourir de langueur ou d'ivresse.
Il faut mourir, lorsqu'au milieu de nous
Eucharis, vers le soir, nouvelle Terpsichore,
Danse, ou, prenant sa harpe entre ses beaux genoux,
Mêle à ce doux concert sa voix plus douce encore.
Que de légèreté dans ses doigts délicats!

Tout l'instrument frémit sous ses deux mains errantes;
Et le voile incertain des cordes transparentes,
Même en les dérobant, embellit ses appas.

Tel brille un astre pur dans le mobile ombrage;
Telle est Diane aux bains, ou telle on peint Cypris
Dans Amathonte, à ses peuples chéris,

Se laissant voir à travers un nuage!

O vous qui disputez le prix,

Le prix des talens et des charmes,

Je n'ai qu'à montrer Eucharis,

Vous rougirez, et vous rendrez les armes. On parle de Théone, on vante tour-à-tour Euphrosine et Zulmé, ces deux sœurs de l'Amour; Aglaure, Issé, Corine, et Glicère et Julie,

Et mille autres beautés, ornemens de la cour;

Eucharis est plus belle, et cent fois plus jolie.
Lorsqu'elle parut, l'autre soir,

Dans le temple de Melpomène,

On lui battit des mains, on la prit pour la reine;
Et tout Paris charmé se leva pour la voir.
L'aimer, lui plaire enfin, est mon unique envie;
A posséder son cœur je borne tous mes vœux :
Eh! qui voudrait donner un seul de ses cheveux
Pour tous les trésors de l'Asie?

LE DÉLIRE.

QUE

UE peut demander aux dieux
L'amant qui baise tes yeux,
Et qui t'a donné sa vie?
Il ne voit rien sous les cieux

Qu'il regrette ou qu'il envie.

Qu'un autre amasse en paix les épis jaunissans
Que la Beauce nourrit dans ses fertiles plaines;
Qu'il range sous ses lois vingt troupeaux mugissans;
Que la pourpre de Tyr abreuve encor ses laines;
Long-temps avant l'aube du jour,

Que l'avide marchand s'éveille,

Et quitte, sans pitié, le maternel séjour,
Amoureux des travaux qu'il détestait la veille;

Qu'il brave et les sables brûlans

Et les glaces hyperborées;

Qu'il fatigue les mers, qu'il enchaîne les vents,
Pour boire le tokai dans des coupes dorées;
J'aime mieux du soleil éviter les chaleurs
Sous l'humble coudrier soumis à ma puissance.
Périssent les trésors, plutôt que mon absence,
O ma chère Eucharis, fasse couler tes pleurs!
Que me faut-il à moi? des routes incertaines
Sous un ombrage frais, de limpides fontaines,
Un
gazon toujours vert, des parfums et des fleurs.
Oui, ma divine maîtresse,

Pourvu que sur mon cœur je presse tes appas,
Qu'importe que la gloire, accusant ma paresse,
Agite le laurier qui m'attend sur ses pas?

Loin du tumulte et des alarmes,

Je vivrais avec toi dans le fond des forêts:
Ce bras n'a jusqu'ici manié que des armes;
Mais disciple, avec toi, de la blonde Cérès,
Je ne rougirais pas de dételer moi-même
Des bœufs fumans sous l'aiguillon,

De reprendre, le soir, un pénible sillon,
Et de suivre, à pas lents, le soc de Triptolême.
Je ne rougirais pas, sous mes doigts écumans,
De presser, avec toi, le nectar des abeilles,
D'écarter les voleurs et les oiseaux gourmands,
Ou de compter les fruits qui rompent tes corbeilles.
Avec toi, d'un front plus riant

J'accueillerais une aimable indigence, Que si des dieux, sans toi, la barbare indulgence Mettait à mes genoux l'Europe et l'Orient. Que m'importe l'Euphrate et son luxe superbe? Que m'importe Paris et son art dangereux? Si tous deux enfoncés dans l'épaisseur de l'herbe, Ou dans ces blés flottans, dont l'or, sur tes cheveux, Ornement importun, vient se courber en gerbe, Je te trouve plus belle, et moi plus amoureux? Ah! loin des faux plaisirs dont la richesse abonde, Crois-moi, l'amant heureux qui, seul au fond du bois, Te caresse au doux bruit et des vents et de l'onde, Est au-dessus des rois qui gouvernent le monde, Est au-dessus des dieux qui gouvernent les rois.

LA JALOUSIE.

MAIS pourquoi donc ce rival odieux
Rôde-t-il sans cesse à ta porte?
Pourquoi ces billets qu'on t'apporte
Avec un soin mystérieux?

Que veut cette foule idolâtre

De papillons dorés, d'insectes orgueilleux,

Elégies.

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