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LE

CORRESPONDANT

REVUE MENSUELLE.

RELIGION, PHILOSOPHIE, POLITIQUE,

SCIENCES,

LITTERATURE, BEAUX-ARTS.

TOME PREMIER.

BIBI

PARIS

V.-A. WAILLE, LIBRAIRE-ÉDITEUR,

RUE CASSETTE, 8.

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LE

CORRESPONDANT.

DE L'ÉTAT ACTUEL

DE LA RELIGION CATHOLIQUE

EN FRANCE.

En 1833 on nous disait : « Le catholicisme est mort. Ce que vous appelez sa vie, ce n'est plus que la pompe de ses funérailles. » Et nous répondions : « Prenez patience; attendez dix ans, revenez et jugez (1). »

Les dix ans touchent à leur terme. Où en sont les choses?

Certes, nous pouvons le dire avec gloire, les oracles des faux prophètes ont été mensongers; certes, le christianisme vit et marche; certes, l'Eglise catholique est debout et vivante, et elles n'ont pas encore commencé, ces funérailles que l'on prophétise en vain depuis soixante ans.

Croirons-nous cependant le monde tout entier prêt à se faire chrétien? Exagérerons-nous les premiers et précieux symptômes d'un temps meilleur pour notre foi? Nous en tiendrons-nous à ces termes indéfinis de mouvement catholique, de réaction religieuse, termes dangereux parce qu'ils sont vagues?

Chez les incrédules et chez les catholiques, chez ceux qui se découragent comme chez ceux qui espèrent, il me semble découvrir le germe commun d'une erreur assez fréquente: on

(1) Voir la Revue européenne du 10 octobre 1833.

cherche dans le passé un idéal qui sert à décrier le présent et à exagérer l'avenir; on veut trouver l'époque normale de la vie de l'Église on s'accorde à rêver un siècle où elle gouvernait sans dispute, triomphait sans résistance, enseignait sans contradiction; où une foi naïve (combien ce mot a été répété !) amenait à ses pieds le roi et le pâtre, le serf et le gentilhomme, tous poussés par la persuasion moins que par l'instinct, tous frappés de la grandeur et de la puissance traditionnelle de l'Église, plus qu'instruits de sa mission sainte et de sa divine autorité. Ce temps auquel le chrétien donne ses regrets, l'incrédule se réjouit d'en avoir vu le terme. Parfois aussi lui-même il se prendra à le regretter, et demandera ce qu'est devenue l'heureuse simplicité de ses pères, cette enfance des peuples, cette facile domination d'un pouvoir qu'une raison audacieuse n'avait pas encore sommé de produire les titres douteux de sa mission. Il gémira volontiers sur son propre triomphe; il pleurera ces vertus d'un autre âge, sous la condition expresse qu'elles ne renaîtront pas.

Car aujourd'hui il n'en est plus ainsi : l'homme ne naît pas naturellement chrétien; la foi, quoique donnée d'en haut, coûte à acquérir, coûte à garder; le chrétien pour demeurer chrétien, l'Église pour demeurer l'Église, a besoin de combattre. Aussi: la raison a triomphé, dit l'incrédule, cette foi naïve est éteinte. Le christianisme n'était qu'une vérité locale, temporaire, insuffisante au besoin de l'humanité devenue mûre. L'homme fait ne redeviendra pas enfant. » Et le chrétien, à son tour, semble prêt à dire «Toute foi est perdue; il n'y a plus pour l'Église que revers à essuyer, combats à soutenir; nulle paix, nulle liberté, nulle puissance. Les temps sont venus, ces temps annoncés par l'Esprit saint, où un dernier vestige de la foi se montrera à peine parmi les hommes. »

Mais si, tout à coup, au milieu des douleurs de l'Église, Dieu vient à lui donner, comme il lui a donné en tous les siècles, quelque signe de son éternelle présence au milieu d'elle; si le christianisme, que l'infidèle déclarait mort, comme le fils de la veuve, se lève et parle : «N'en doutons plus! s'écrient aussitôt quelques chrétiens tout pleins d'espérance, la grande ère va renaître; l'Église va régner de nouveau. Le monde vient à nous, le monde va nous appartenir. Ce deuil d'un jour, ces ombres passagères seront bientôt dissipées!»

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