Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

n'y mettaient obstacle? Mais il est encore quelque chose que les hommes savants dans l'antique discipline, et amoureux de ce Siége suprême, voudraient voir rétablir. Par exemple, qu'on fit, de l'avis des évêques, des réponses fréquentes, faciles et exemptes d'ambiguïté. Il conviendrait que de toutes les nations catholiques indifféremment, on se réunît à Rome. Car dans cette Eglise, comme dans un centre où toutes les lignes se réunissent, il faudrait qu'on trouvât un abrégé de l'Eglise universelle, et pour ainsi dire un concile permanent. Je voudrais que les écoles romaines de théologie fussent si florissantes, qu'elles surpassassent de beaucoup toutes les autres, même celles de France, et dans l'exposition des principes d'une vraie théologie et dans l'exploration de la tradition. Je voudrais que la science, la modestie, la pureté des mœurs, le mépris du faste mondain, brillent dans le clergé romain à un tel point qu'il fût notre modèle et notre exemple, comme il est notre chef'.

1 Si l'on ne partageait pas toutes les idées que Fénelon vient d'émettre dans ce chapitre, on admirera, du moins, cette sainte fusion de la liberté dans l'obéissance qui est le caractère propre de l'ultramontanisme. C'est son amour de l'unité, son respect, sa soumission envers le Saint-Siége qui le portent à présenter ces remarques. Et, certes, après son admirable obéissance au jugement qui le frappa, on ne saurait suspecter la pureté et le désintéressement de ses conseils. - Voy. aussi la note pag. 118, chapitre XXVI.

CHAPITRE XLII.

La puissance spirituelle se conservera entière, si elle ne se veut pas mêler du pouvoir temporel 1.

Il n'est rien que cette bonne mère, le Siége apostolique ne puisse obtenir de ses enfants, pourvu qu'il ne semble s'arroger sur eux aucun genre de puissance

On pourrait croire, de prime abord, qu'il y a dans ce seul titre et dans les matières qui sont traitées dans ce chapitre, une sorte de contradiction avec ce qui est dit dans les chapitres XXVII et XXXIX. Mais il n'en est rien. Fénelon pense, ainsi que plusieurs grands saints, que la puissance temporelle, le maniement des affaires d'un Etat peuvent être, pour la Papauté, une source de tristes embarras, et une cause de malheureuse dépendance comme une occasion de la détourner de son office principal, qui est la conversion des âmes; mais de ce que le gouvernement temporel peut entraver la mission spirituelle, de ce qu'il serait peut-être à désirer que la papauté fût débarrassée de ses entraves qui l'assimilent trop aux autres puissances caduques de ce monde; de ce qu'enfin il serait mieux de se souvenir de cette maxime si sage de l'Apôtre, que ce qui est permis n'est pas toujours expédient, il ne s'ensuit nullement qu'on ne puisse soutenir que la papauté doit être, comme elle est en effet, le seul pouvoir vivifiant dans le monde, le pouvoir à l'abri duquel se maintiennent et s'exécutent les grands principes de vérité et de justice par lesquels les peuples se conservent et se sauvent! Or, il suffit à la papauté d'exercer sa puissance morale, la plus haute et la seule qui fut jamais, pour accomplir cette sublime mission. Cette distinction explique suffisamment les vues de Fénelon

temporelle. Qu'on éloigne seulement ce malheureux soupçon, et tout nous reste. Mais lorsque les princes craignent que l'Eglise ne veuille se soumettre à la principauté séculière, eux, ils usurpent insensiblement, sous divers prétextes, les choses spirituelles. Autrefois, dans les conciles, l'Eglise et les rois donnèrent avec un merveilleux accord les règles d'une discipline mixte de la religion et de létat. Ainsi furent publiés les édits de Charlemagne, connus sous le nom de Capitulaires. Ainsi, dans d'autres conciles, nous voyons les princes destitués par les deux pouvoirs. Mais bientôt de là découle peu à peu celte dangereuse coutume des rois, de statuer çà et là dans leurs édits sur des matières de discipline ecclésiastique en même temps que les règles de police, et de commander aux évêques touchant aux fonctions purement épiscopales. Voulez-vous bien comprendre combien est nuisible ce mélange de la puissance spirituelle et de la puissance séculière; voyez, je vous prie, l'Eglise florissante à l'ère des Martyrs1. Certes, alors elle exerça librement toute la juridiction dans les chapitres que nous venons de rappeler, et nous croyons qu'il ne veut pas faire ressortir d'autre pensée ici.

1 Ce que dit en cet endroit Fénelon a été exprimé par les Pères du dernier concile de Baltimore dans leur lettre synodale de 1848 «Nous savons bien, disent ces Pères, que si un » jour il plaisait à Dieu de souffrir qu'il fût (le Pape) défini>>tivement dépouillé de tout pouvoir civil, il garderait, par >> protection divine, le libre exercice de son autorité spirituelle » comme ce fut le cas dans les trois premiers siècles, sous le >> règne des empereurs païens, où les évêques de Rome dé» ployèrent une énergie apostolique partout sentie et partout

[merged small][ocr errors]

spirituelle sur les ames, et on ne la vit pas s'arroger la moindre part d'autorité temporelle. Oh ! si des temps semblables revenaient aujourd'hui pour l'Epouse du

» respectée. Eu égard à la principauté bien autrement excellente » attachée dès le commencement à l'Eglise de Rome, comme » fondée par les glorieux apôtres Pierre et Paul, chaque église » particulière, c'est-à-dire tous les chrétiens dans chaque » partie du monde, se sentait obligée de s'harmoniser dans la >> foi avec cette antique et illustre Eglise et de chérir inviola>>blement sa communion. Le successeur de Pierre, même » dans des circonstances si défavorables, veillait sur les in>> térêts de la religion en Asie et en Afrique, aussi bien qu'en » Europe, et proscrivait avec autorité toute erreur opposée à » la révélation divine et tout usage renfermant un danger » pour son intégrité.

[ocr errors]

» L'office pontifical est d'institution divine et tout-à-fait indépendant de toutes les vicissitudes auxquelles la princi>> pauté temporelle est sujette. Quand le Christ Notre-Seigneur » promit à Pierre qu'il bâtirait son Eglise sur lui comme sur » un roc, il lui donna l'assurance que les portes de l'enfer, » c'est-à-dire les puissances des ténèbres, ne prévaudraient >> point contre elle; ce qui implique nécessairement que son >> office est fondamental et essentiel à l'Eglise, et doit conti» nuer jusqu'à la fin des temps. Pierre fut constitué Pasteur » des agneaux et des brebis, c'est-à-dire du troupeau entier » du Christ, lequel, par lui, forme un seul bercail sous un » seul berger. Notre Seigneur, à sa dernière cène, pria pour » que ses diciples et ceux qui, par leur ministère, croiraient » en lui, ne fussent qu'un, comme son Père et lui ne sont » qu'un, et attendu qu'il est toujours exaucé, nous ne pou>>vons douter que cette unité ne soit un caractère inséparable » de l'Eglise; par conséquent l'office du Pasteur suprême, par lequel l'unité est maintenue, ne saurait jamais cesser.... » Ce sont là, en effet, des principes dont nous devons être certains. Voilà ce qu'il y a de foi, et, comme le disent les Pères de Baltimore, le successeur de Pierre n'ayant de droit

[ocr errors]

2

Christ, comme elle se dépouillerait avec bonheur de ses biens, de ses richesses, des viles dignités de ce monde ! Alors, nue et libre, elle reprendrait les pécheurs avec tout empire', elle établirait une discipline céleste, elle rappellerait les mœurs d'or de son premier âge, et elle jugerait le monde avec les apôtres. Alors, intrépide, elle dirait au Maître de la terre avec Tertullien : « Nous ne te renversons pas, parce que nous ne te craignons pas........... Nous révérons l'empereur, comme cela nous est permis et tout autant qu'il le puisse exiger, comme un homme placé là par Dieu. » Alors l'Epouse dirait avec l'Epoux: « Je ne suis pas venue pour être servie, mais pour servir 3 ; et encore: Mon royaume n'est pas de ce monde *. L'Epouse, avec divin aucun domaine temporel, on peut croire, sans blesser aucune vérité, que le gouvernement temporel des Papes est appelé peut-être à subir des transformations providentelles, sans que pour cela la haute suprématie, l'autorité protectrice et directive de la Papauté soient le moins du monde altérées, bien au contraire !...

Tit. cap. II, 15.

2 Ad Scapul., cap. 11.

3 S. Matth., cap. xx,

28.

3

4 Si, le royaume de Jésus-Christ est de ce monde : seulement il n'en était pas au moment où le divin Sauveur parlait; mais après qu'il fut remonté vers son Père, son règne s'établit sur la terre, la famille de ses enfants fidèles se forma, s'étendit de plus en plus, et son royaume fut la société chrétienne telle qu'elle est constituée, ayant à sa tête le Vicaire de Jésus-Christ, puis les successeurs des apôtres, puis les prêtres et tous les fidèles qui forment l'Eglise: Christus vincit, Christus regnat, Christus imperat. Mais, dans le texte sacré que cite en cet endroit Fénelon, les traducteurs comme les commentateurs oublient le

[ocr errors]
« ZurückWeiter »