Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

pour condescendre aux prières de son fils, lui aurait ouvert par trois fois les mains, en lui disant, mon fils, je Vous émancipe et vous mets hors de mes liens et puissante paternelle, et ensuite lui aurait remis le chapeau sur la tête, de quoi les parties ont requis l'acte respectif Signé Fontanil juge et Muraz, greffier. Sa famille de Moûtiers n'a brillé qu'un instant, elle s'est éteinterapidement par la mort prématurée de son fils aîné alors procureur impérial dans sa ville natale, et de son petit-fils déjà avocat, il n'est resté qu'une petite fille qui s'est mariée avec un M. Augier, alors receveur principal des contributions indirectes dans cette ville et qui après les évènements de 1815 s'est retirée avec ses enfants à Charpieux près de Lyon, où elle est morte depuis plusieurs années.

Dans une note que je lui avais demandée sur notre compatriote qu'il avait encore vu et connu, notre ancien et bienveillant vice-président, M. Avet, dont le souvenir nous est cher et précieux à plus d'un titre s'exprimait ainsi au sujet du docteur Abondance :

« Je crois le voir encore avec sa belle et vénérable << figure, son chapeau tricorne d'ou s'échappait une abon<< dante chevelure blanche comme la neige: sa toilette <«< était celle d'un vieillard, car à cette époque déjà bien «< éloignée de nous, chaque âge se distinguait par un <«< costume << adopté aux années de celui qui le por<«< tait, et à la gravité qu'elles apportent ou doivent « donner. Le sien était toujours d'une propreté irré<«<prochable qui est en quelque sorte la pudeur des

<«< vieillards. Je l'ai vu souvent remplir son ministère <«< dans ma famille, et ai moi-même été soigné par <<< lui dans une maladie très grave. Quand il << entrait, il rendait l'espérance au malade, et le courage « à toute la famille qui l'entourait par la confiance qu'il << savait si bien inspirer; on le regardait presque comme «la Providence qui tenait entre ses mains la vie des <<< malades qui lui étaient confiés. Il était souvent le gué<«<risseur, mais toujours le consolateur...

<< En rapprochant du lit du malade, il avait le don << d'embellir encore sa respectable figure par une expression rassurante de douce et affectueuse gaité. Ce « n'était pas par des demandes sur les détails du cours « de la maladie qu'il inaugurait sa visite, mais par des <«< récits souvent gais et toujours attachants qu'il entre« mêlait de demandes médicales, de vérifications de la << langue et du pouls, auxquelles il procédait comme à des << actes qui n'avaient aucune urgence et n'étaient nulle«ment imposés par la gravité de la maladie. Tout en «faisant ces investigations, il mùrissait ses appréciations « sur le traitement à prescrire et continuait ses char<<< mantes causeries dont personne plus que lui ne con<«< naissait le secret. En partant il laissait le calme et «<l'espérance là ou il n'avait trouvé que la souffrance et « le désespoir. Il était d'ailleurs aussi désintéressé que << généreux à l'égard des malades peu aisés à qui il ne << se contentait pas de prodiguer les bienfaits de la <«< science. Au reste, riche ou pauvre, tout malade était

« l'objet de sa sollicitude la plus dévouée, car il possé<< dait à un haut degré la plus noble qualité d'un médecin, «<l'amour de l'humanité. »

Je n'ajouterai rien à ce témoignage si éloquent et si vrai qui pari d'un noble cœur et qui fait autant d'honneur à son auteur qu'à celui qui en fut l'objet, car je craindrai d'en affaiblir, les accents pénétrants, ou plutôt j'aurai l'appréhension que la similitude de profession que j'ai l'honneur de suivre ne laissât croire à trop d'indulgence de ma part pour mon héros qui fut après tout, un savant médecin, un homme de bien, et un excellent citoyen, vir bonus, curandi peritus.

Cette belle et utile existence fut brisée le 10 avril 1809, à six heures du soir; elle avait duré 78 ans, comptant près de 50 ans de service au profit de l'humanité souffrante.

La foule immense qui se pressait aux funérailles du docteur Joseph Abondance, la consternation qui se peignait sur tous les visages, les députations qui étaient venues des points les plus reculés de notre pays pour rendre un dernier hommage à sa dépouille mortelle, indiquaient bien que la Tarentaise venait de perdre un de ses enfants les mieux doués dont j'ai essayé, non sans orgueil, je vous l'avoue, de retracer le portrait.

Il est bon, Messieurs, au milieu des tristesses du présent, de se retremper de temps en temps dans les souvenirs d'une belle vie passée; c'est d'ailleurs un honneur et un

devoir pour une province de cultiver la mémoire des citoyens qui se sont distingués par leur science et leur dévouement à la Patrie. L'Académie de La Val d'Isère qui constitue pour ainsi dire la province scientifique de la Tarentaise et qui a pour devise ces deux beaux mots: Deus et Patria, accueillera, je l'espère, avec indulgence, cette courte notice sur le docteur Joseph Abondance, qui, s'il avait vécu de notre temps, en aurait certainement fait partie et en aurait été une illustration.

(Novembre 1884.)

C. LAISSUS, Docteur.

NOTES COMPLÉMENTAIRES

SUR

LA SUZERAINETÉ DES ARCHEVÈQUES DE TARENTAISE
DANS LA VALLÉE DE BOZEL (SAVOIE).

(Mémoire lu à l'Académie par M. le curé J. Garin,
dans la séance du 20 novembre 1884.)

Monseigneur et Messieurs,

Dans un Mémoire inséré au compte-rendu du Congrès des Sociétés Savantes tenu à Moûtiers en 1881 (1), j'ai essayé de démontrer que la suzeraineté des archevêques de Tarentaise sur la vallée de Bozel avait été paternelle, libérale, toujours respectueuse des droits de l'humanité, et peu onéreuse pour nos populations au point de vue financier. Cette thèse est absolument incontestable pour quiconque connaît l'esprit de justice et de dévouement paternel qui a toujours animé la généralité des Prélats catholiques, spécialement envers les petits et les faibles.

Elle est cependant mise en doute, et même vivement contestée par des écrivains qui osent affirmer « qu'il y a «< incompatibilité absolue entre les principes catholiques <«<et la véritable civilisation; que les gens d'église sont << essentiellement hostiles au progrès et à toutes les liber<«<tés populaires (2). » De là, il leur est facile de conclure

(1) Compte-rendu, p. 131 et suiv. (2) Le Tarin, novembre 1884.

« ZurückWeiter »