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magnifique tableau de la religion; qui, par la force seule du raisonnement, venoit de courber tous les esprits sous le joug de la foi, n'avoit pas besoin de rappeler ces détails simples et familiers, s'il n'eût pas jugé que leur simplicité même étoit plus propre à persuader et à toucher. C'est Bossuet lui-même qui nous en avertit. «* Je me plais dit-il, à répéter toutes ces paroles, malgré les » oreilles délicates; elles effacent les discours les » plus magnifiques, et je voudrois ne parler plus » que ce langage. »

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Ce ne fut que long-temps après; et lorsqu'on n'étoit plus familiarisé avec un tel langage, qu'on affecta de rougir pour Bossuet de sa pieuse simplicité. Cependant une réflexion qui devoit se présenter assez naturellement, auroit pu dispenser de cette singulière compassion pour Bossuet. Il est certain que la princesse PALATINE étoit une personne d'un esprit supérieur. Il est également certain que l'abbé de Rancé, à qui elle avoit confié ses pensées et ses sentimens, étoit un homme de beaucoup d'esprit. Quant à Bossuet, on croiroit le dégrader en parlant de son esprit. Lorsque trois têtes aussi fortes se réunissent pour attacher une grande importance à un événement singulier, on peut penser qu'il y a bien de la grandeur dans une telle simplicité.

* Ibid.

Nous devons faire observer que Bossuet, dans cette oraison funèbre, rend à la princesse PALATINE un témoignage qui a un grand poids dans sa bouche, et qui confirme ce que nous avons déjà dit de ses opinions sur cette matière. « Sa foi

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(de la princesse PALATINE) ne fut pas moins simple que vive. Dans les fameuses questions qui ont troublé en tant de manières le

repos de » nos jours, elle déclaroit hautement qu'elle n'a» voit d'autre part à y prendre, que celle d'obéir » à l'Eglise.

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L'oraison funèbre de la princesse PALATINE est peut-être de toutes les oraisons funèbres de Bossuet, celle qui atteste le plus la force et la fécondité de son génie. Si elle n'a pas l'éclat, la pompe que l'on admire dans celles de la reine d'Angleterre, de MADAME HENRIETTE et du grand CONDÉ, c'est parce qu'on ne doit point les y chercher. Mais elle offre plus qu'aucune autre de vastes sujets de méditation aux ames religieuses, et même à celles qui désirent de fixer leurs pensées incertaines sur les fondemens de la religion. En un mot, on peut dire avec M. de la Harpe, que cette oraison funèbre est le plus sublime de tous les sermons (1).

(1) La princesse PALATINE mourut au palais du Luxembourg le 6 juillet 1684; et ce ne fut que le 9 août de l'année suivante, que

Il y avoit à peine cinq mois que Bossuet venoit de prononcer l'oraison funèbre de la princesse PALATINE, qu'il se vit encore forcé par des considérations puissantes sur son cœur à rendre les mêmes honneurs à la mémoire d'un homme qui lui avoit rendu des services importans dans sa jeunesse, et dont le fils avoit également des droits à sa reconnoissance. Le chancelier le Tellier (1) avoit été un des premiers auteurs de l'élévation de Bossuet par ces témoignages indirects, qu'un ministre est à portée de rendre sans compromettre ni user son crédit, et qui souvent ont plus de succès que des sollicitations éclatantes. Sans sortir de la circonspection naturelle de son caractère, il avoit accoutumé de bonne heure l'oreille de Louis XIV à entendre le nom de Bossuet comme celui de l'un des ecclésiastiques de son royaume qui devoit le plus honorer le discernement et le choix d'un monarque digne d'apprécier son génie et ses talens. Les sermons de Bossuet à la Cour avoient ensuite fixé l'opinion personnelle de ce prince, qui avoit l'esprit aussi

Bossuet prononça son oraison funèbre dans l'église des Carmélites du faubourg Saint-Jacques.

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(1) Le chancelier le Tellier mourut le 28 octobre 1685, et Bossuet prononça son oraison funèbre dans l'église paroissiale de Saint-Gervais le 25 janvier 1686.

III. Bossuet pro

juste que les sentimens élevés. On a vu que l'archevêque de Reims, fils du chancelier, avoit également rendu un service très-important à Bossuet encore jeune, à l'occasion de son procès pour le prieuré de Gassicourt. Depuis cette époque, l'archevêque de Reims s'étoit toujours honoré du titre d'ami de Bossuet, et plus souvent encore de celui de son admirateur.

Un amour-propre assez naturel faisoit vivement désirer à l'archevêque de Reims, que l'homme le plus éloquent de son siècle fût l'historien et le panégyriste de son père. Bossuet ne put refuser à l'amitié et à la reconnoissance un témoignage qu'on lui demandoit comme une grâce, et qui lui parut un devoir. L'archevêque de Reims ne fut trompé ni dans ses conjectures, ni dans ses espérances; et le chancelier le Tellier est resté plus connu par l'oraison funèbre de Bossuet, que par son ministère.

Cette oraison funèbre est une belle histoire; et nonce l'orai- Bossuet s'y montre en beaucoup d'endroits le rison funèbre val de Tacite; il inspire même plus de confiance

du chance

lierle Tellier. que Tacite. Il juge les événemens et les hommes

1686.

sans amertume, comme sans amour et sans haine. On ne le voit jamais tourmenté de l'étude pénible de peindre les hommes encore plus pervers qu'ils

ne le sont, et de supposer au crime plus de génie

qu'il

qu'il n'en a eu, peut-être même qu'il ne peut en avoir. Bossuet est toujours simple, parce qu'il est toujours vrai; mais il sait allier cette simplicité à une finesse d'observation, à une profondeur et à une connoissance des hommes qui étonne toujours dans un homme qui passa la plus grande partie de sa vie dans son cabinet.

Bossuet rapporte comment le Tellier entra dans le ministère, et comment Desnoyers, son prédécesseur, fut dupe de ses propres artifices. << *Le secrétaire d'Etat chargé des ordres de la

>>

* Oraison

funèbre du

» guerre, ou rebuté d'un traitement qui ne ré- chancelier pondoit pas à son attente, ou déçu par la dou- le Tellier. » ceur apparente du repos qu'il crut trouver dans » la solitude, ou flatté de la secrète espérance » de se voir plus avantageusement rappelé par la » nécessité de ses services, ou agité de ces je ne » sais quelles inquiétudes dont les hommes ne » savent pas se rendre raison à eux-mêmes, se >> résolut tout-à-coup à quitter cette grande charge. >>

*

Le Tellier étoit alors à Turin; il fut nommé en son absence, « et le rapide moment d'une con» joncture imprévue, loin de donner lieu aux » sollicitations, n'en laissa pas même aux désirs.... » Lorsqu'on se voit tout-à-coup élevé aux places » les plus importantes, et que je ne sais quoi nous BOSSUET. Tome III.

3

* Ibid.

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