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prises toutes les classes de la société les unes avec les autres, et armer toutes les passions et toutes les haines. Son vou fut rempli; le sang coula dans toute l'Europe, et ses disciples furent si fanatiques par la crainte d'être superstitieux, qu'ils finirent par faire monter sur l'échafaud un roi protestant, pour une légère différence dans les habits et les cérémonies ecclésiastiques.

Comment pouvoir convenir d'un principe commun de décision avec des hommes qui établissoient en principe, que nulle autorité n'avoit droit de juger et de soumettre leurs opinions. Les succès qui avoient couronné leur audace, exaltoient leurs prétentions et leur présomption; et ils parloient de leur foi et de leur doctrine avec une confiance et une fierté qu'ils empruntoient du grand nombre de leurs disciples.

Jusqu'à Bossuet, la plus grande partie des controverses agitées entre les théologiens catholiques et les théologiens protestans, n'avoient porté que sur des points particuliers. Bossuet lui-même s'étoit borné à satisfaire les doutes et à résoudre les objections, que des protestans incertains et sincères étoient venus soumettre à ses lumières. Son bel ouvrage de l'Exposition de la foi catholique n'étoit qu'une simple apologie du concile de Trente. Les catholiques se trouvant en possession

de la doctrine et de la discipline qu'ils avoient reçues de leurs pères, avoient cru qu'il devoit leur suffire d'en montrer l'exacte conformité avec la doctrine et la discipline de tous les siècles qui les avoient précédés.

Ce systême de défense avoit été inspiré par un sentiment estimable de modération; il paroissoit laisser aux protestans de bonne foi plus de facilité pour se désabuser des préventions dont on les avoit nourris. Ces préventions s'étoient transmises de génération en génération depuis cent cinquante ans, sans examen et sans discussion. La plupart des protestans, contemporains de Bossuet, ignoroient eux-mêmes l'histoire des motifs, ou des prétextes qui avoient provoqué une séparation si violente et entraîné tant de calamités, Ils se représentoient leurs premiers réformateurs comme des sages exempts de toutes les passions humaines, uniquement inspirés par l'amour de la vérité et invariablement attachés à la doctrine antique et pure des beaux jours du christianisme naissant, qu'ils avoient eu le bonheur de dégager des nuages dont la superstition des siècles suivans l'avoient enveloppée.

Bossuet vient détruire leur illusion. Il se présente tout-à-coup l'Histoire des variations à la main.

Il dit aux luthériens et aux calvinistes : « Quï » étes-vous? d'où venez-vous? Vous parlez de » votre foi et de votre doctrine! Avez-vous une » FOI et une DOCTRINE? Non, vous n'en avez pas. » La Foi qui change n'est point une For; elle n'est » point la parole de Dieu, qui est immuable. Si » vous en avez une, elle doit se trouver dans vos » SYMBOLES et dans vos PROFESSIONS DE FOI. Les » voici : j'y ai cherché ce que vos pères ont dit » et enseigné; ils ne l'ont pas su eux-mêmes; ils » ont dit et enseigné les dogmes les plus opposés. J'y cherche ce que vous pensez et ce que vous » professez aujourd'hui; vous ne le savez pas » vous-mêmes. Vous vous dites disciples de Lu»ther; vous vous dites disciples de Calvin; et » vous frémissez d'horreur, lorsqu'on vous rap» pelle les axiomes barbares qu'ils ont donnés pour

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fondement de leur doctrine. Vous les abjurez » hautement; vous protestez qu'ils sont aujour» d'hui désavoués par tous les luthériens et tous » les calvinistes. Vous ne voulez pas que je vous » attribue les torts et les erreurs personnelles de » vos premiers chefs; j'y consens. Qu'étes - vous » donc ? Où irois-je chercher les règles et les » principes de votre croyance? Ce sera, dites» vous, dans le recueil des SYMBOLES et des PRO»FESSIONS DE FOI que nous avons promulgués nous

» mêmes. Eh bien! les voici; c'est de vos mains » que je les ai pris et reçus. Je ne prétends fairé » valoir contre vous ni les jugemens de nos papes » et de nos évêques, ni les décrets de nos conciles

généraux, ni douze cents ans d'une tradition » invariable. Vos chefs vous ont dit que de telles » autorités ne méritoient aucun égard. Je ne veux » discuter avec vous que les actes que vous pré» sentez vous-mêmes comme l'expression fidèle » de votre FOI et de votre DOCTRINE, comme le » résultat des profondes méditations de vos plus, » grands théologiens et des longues discussions » de vos COLLOQUES et de vos SYNODÉS GÉNÉraux. » Vous les avez acceptés comme la règle de la » croyance commune de tous les membres de » votre communion. Vous leur avez donné le titre » imposant de PROFESSION DE FOI, pour leur impri»mer le caractère le plus auguste et le plus inva»riable en matière de religion. Vous ne pouvez » plus ni les désavouer, ni les rejeter. Ils sont lé » seul lien qui vous réunit sous la forme d'une >> COMMUNION CHRÉTIENNE. Otez ces SYMBOLES ex» térieurs, vous n'êtes plus que des particuliers » plus ou moins recommandables par vos vertus, » vos talens, vos lumières et vos connoissances. » Mais vous n'offrez plus ni l'idée, ni l'autorité » d'une réunion d'hommes professant la même

II.

De l'His

riations.

» doctrine et le même culte. Je vous invite à par» courir avec moi cette longue suite de vos PRO»FESSIONS DE FOI; et nous verrons si vous êtes » en droit d'interroger l'Eglise romaine sur sa » croyance, vous, qui ne savez pas même encore » ce que vous croyez et ce que vous devez croire. » Ces paroles que nous avons osé nous permettre de placer dans la bouche de Bossuet, nous ont paru rendre la pensée, l'intention et le plan de l'HISTOIRE DES VARIATIONS.

C'étoit en 1688 que Bossuet composoit son toire des va- Histoire des variations des églises protestantes, l'un des ouvrages les plus étonnans de l'homme qui excite le plus l'étonnement et l'admiration.

1688.

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La pensée d'un tel ouvrage et son exécution demandoient à la fois le concours du génie et les connoissances les plus profondes dans l'histoire, la religion et la politique.

Il falloit réunir sous un seul point de vue, dans un tableau historique dont le cadre étoit nécessairement circonscrit, le récit des révolutions religieuses et politiques qui avoient ébranlé en même temps toutes les parties de l'Europe chrétienne, lorsque du fond de la Saxe Luther donna le signal de ces terribles discordes qui ravagèrent pendant cent cinquante ans les plus belles contrées du monde civilisé.

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