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plus de soumission que les Pères de Calcédoine, aux décisions et à « l'autorité du Souverain Pontife (1).

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XXVIII. En s'exprimant ainsi, l'Anonyme pensoit peu que la tournure captieuse qu'il donne à ses citations seroit exposée au grand jour; il s'adresse aux Ecclésiastiques Français, qui aujourd'hui, pour la plupart dépourvus de livres, et trop vertueux pour soupçonner l'artifice, s'étonnent néanmoins de la Doctrine toute nouvelle que l'Anonyme appuie sur des autorités imposantes. Quoi! disent-ils, les besoins de l'Eglise ont exigé la convocation de plus de six cents Evêques, et on ne les rassemble de toutes les parties du monde que pour ouïr humblement la leçon que viennent leur faire les Légats du Pape ! Pas la moindre remontrance n'est admise. Obéissez, disent les Légats; sinon, nous nous retirons. Pas la moindre délibération n'est soufferte. Souscrivez, disent les Légats; sinon, le Concile est transféré ailleurs. Enfin, s'il y a des mécontens, qu'ils dissimulent; ou qu'ils aillent à Rome subir le Jugement du Pape, Romam ambulent. L'Anonyme a raison: il n'est pas possible, je ne dis pas à un Concile Ecuménique, mais au moindre Fidèle, d'avoir pour le Pape une soumission plus profonde et plus aveugle que n'en ont montré, selon lui, les Peres de Calcédoine. Ils y arrivent, comme jadis on entroit dans le parvis d'un Temple, pour y attendre la réponse de l'Oracle; ils y restent pour être mus passivement par les Légats du Pape, comme le bâton dans la main du vieillard. Tout cela est trop fort, même au gré des Ultramontains, et il faut absolument rectifier les traits confus et difformes du tableau qu'a tracé l'Anonyme.

XXIX. Les Evêques Paschasin et Lucence, et le Prêtre Boniface, Légats de Saint Léon, présidèrent en son nom au Concile de Calcédoine; il paroît qu'ils durent leur préséance aux circonstances extraordinaires où se trouvoit l'Eglise. Ni eux, ni Saint Léon, n'ont cru que ce fût un droit inhérent au Saint Siége d'attribuer à ses Légats la présidence des Conciles, malgré le rang inférieur qu'ils occupent per

(1) Dissert. Hist., p. 40, 41.

sonnellement dans la hiérarchie de l'Eglise. Cela est si vrai, que, deux ans avant le Concile de Calcédoine, le même Saint Léon avoit au second Concile d'Ephèse les Légats Jules et Hilaire, qui y signaenvoyé lèrent leur fermeté lorsqu'il dégénéra en conciliabule, sans néanmoins disputer un seul instant au Patriarche Dioscore le droit d'y présider.

Les événemens désastreux qui signalèrent le brigandage d'Ephèse avoient laissé l'Eglise d'Orient dans une étrange confusion. Dioscore, Patriarche d'Alexandrie, étoit évidemment indigne d'occuper la première place. Maxime, Patriarche d'Antioche, avoit lui-même besoin, dit M. Tillemont, « d'une grande indulgence pour être conservé dans « l'Episcopal, où il n'étoit entré que par la déposition de Domnus, << reconnue de tout le monde pour injuste (1). » Etienne d'Ephèse étoit du nombre des persécuteurs de Saint Flavien, et, en outre, usurpateur de l'Episcopat, tellement qu'il fut déposé dans la neuvième Session du Concile de Calcédoine (2). Anatole, Patriarche de Constantinople, pouvoit, à raison de son Siége, demander la préséance : son élection avoit été Canonique, son innocence n'étoit pas attaquée ; mais ayant été l'Apocrisiaire de Dioscore, et récemment consacré par lui, il y avoit lieu de craindre qu'il ne le favorisât aux dépens de la Foi (3).

Dans ces circonstances, le bien de la paix, le bon ordre du Concile exigeoient que les droits légitimes ou douteux que chacun des Patriarches auroit allégués pour occuper le premier rang, ne fissent l'abord un sujet de division à Calcédoine. Or, la prééminence du pas dès Saint-Siége, favorisée surtout par l'autorité impériale du religieux Marcieu, pouvoit seule faire taire les divers concurrens, en les excluant tous sans distinction. C'est pour cela que Saint Léon écrivit au Concile qu'il seroit à la tête de l'Assemblée, en la personne de ses Légats. Il manda plus nettement à Marcien, comme le rapporte M. de Tillemont, « qu'il étoit à propos que Paschasin présidât au Concile << en son nom, à cause qu'il y avoit quelques Evêques qui n'avoient

(1) Tillem., t. XV, p. 644.

(2) Ibid, p. 691.

(3) Ibid, p. 6'44.

<< pas eu assez de fermeté contre les efforts du mensonge (1). » Il étoit à propos ! dit Saint Léon dans sa Lettre à Marcien. C'étoit donc une dérogation au droit commun des Patriarches, dérogation légitimée par des circonstances nouvelles et impérieuses. Ce n'étoit donc pas un un droit appartenant aux Légats du Souverain Pontife, que réclamoit ce Saint Pape; et dans le fait, l'exemple des deux Conciles récemment tenus à Ephèse, eût démontré la chimère d'une telle prétention, sans qu'il fût besoin de remonter plus avant dans l'Antiquité. Saint Léon étoit même si éloigné d'usurper les droits des Patriarches, ou de chercher à dominer par ses Légats dans un Concile Ecuménique, que sa Lettre au dernier Concile d'Ephèse donne simplement pouvoir aux Légats qu'il y envoie pour occuper le second rang, << d'ordonner en commun avec le Concile ce qui sera agréable à « Dieu (2). >>

XXX. Examinons à présent le premier Discours de Paschasin au Concile de Calcédoine. Je ne comprends pas trop pourquoi l'Anonyme s'en prévaut, afin d'exalter l'autorité absolue du Souverain Pontife sur six cent trente-six Evêques assemblés synodalement, puisque ce n'est pas à eux que le Légat du Pape adresse la parole. Les mots Vestra Magnificentia, dont se sert Paschasin, montroient suffisamment à ce Dissertateur que la Sommation du Légat, pour l'expulsion de Dioscore, ne s'adressoit pas aux Evêques, mais uniquement aux Officiers de l'Empereur. Au moins il ne devoit pas dissimuler le peu de succès qu'eut cette Sommation impérieuse, malgré la volonté connue de Marcien et de Pulchérie, pour que Saint Léon exerçát la plus grande influence, comme nous l'apprend le Lecteur Théodore dans ses Fragmens, recueillis par Henri de Valois (3). En effet, les Officiers de Marcien répondirent à Paschasin de manière à le faire souvenir des

(1) Tillem., t. XV, p. 644.

(2) Hist. Eccl. de Fleury, 1. XXVII, n. 36. — Qui vice meå Sancto Conventui Vestræ Fraternitatis intersint, et communi vobiscum sententiâ quæ Domino sunt placitura constituant. (Epist. Leon. ad Syn. Eph.)

(3) Tillem, tom. XV, p. 644.

fonctions qu'il avoit à remplir au Concile, et de la modestie que doit toujours conserver le style Sacerdotal.

Aut ille egrediatur, aut nos eximus, disent les Légats. « Mais quel << est le crime particulier qu'on impute à Dioscore plutôt qu'à d'au« tres? » demandent les Officiers de l'Empereur. Gloriosissimi Judices dixerunt: Quid specialiter ingeritur Dioscoro? « Il a présumé, ré<< pondent les Légats, de rendre un Jugement contre l'autorité du « Siége Apostolique, et il doit répondre sur ce chef d'accusation : » Judicii sui necesse est eum reddere rationem. » Mais il faudroit, ré<< pliquent les Officiers, exposer spécialement en quoi il a failli: » Convenit vos specialiter quid erraverit exponere. « Lucence, un des << Légats, prend la parole, et avance que ce seroit une honte de voir <<assis parmi les Evêques un homme qui étoit là pour être jugé»: Non patimur tantam injuriam nec Vobis fieri nec Nobis, ut iste sedeat qui judicandus advenit. Sur quoi les Officiers de l'Empereur observent avec grande raison à Lucence que « si lui-même veut remplir la fonc«<tion de Juge, il ne doit pas poursuivre Dioscore comme accusa«teur : Si Judicis obtines personam, non ut accusator debes prosequi (1).

Telle fut la conclusion de ce Dialogue court et raisonné qui diminue un peu la majesté du rôle que prête à Paschasin le récit de l'Anonyme.

Les Légats ne répliquèrent rien à la judicieuse et canonique remarque des Officiers de l'Empereur, qui prouve évidemment que, malgré la faveur du Prince et la révérence due au Saint-Siége, la volonté du Pape ne suffisoit pas seule à Calcédoine pour tenir lieu de toute règle. Comme néanmoins cette volonté n'étoit pas arbitraire, mais fondée sur la notoriété des crimes de Dioscore, lorsque Eusèbe de Dorylée se porta pour son accusateur, lui et Dioscore eurent ordre de s'asseoir au milieu du Concile. Alors les Légats parurent satisfaits, quoique le Cardinal Baronius pense qu'ils demandoient formellement que Dioscore sortit de l'assemblée, afin de n'y être introduit que quand on l'ap

(1) Conc. Chalced. Act. I.

pelleroit pour comparoître (1). Et, dans le fait, le style absolu des Lé gats justifie pleinement l'opinion de ce savant Cardinal: Aut ille egrediatur, aut nos eximus.

XXXI. « Les Légats ayant lu la Sentence de déposition, poursuit « l'Anonyme, le Concile rendit son Décret. » Les choses se passèrent ainsi, on ne sauroit le nier; mais nous allons voir, par les Actes du Concile, si en effet les Pères de Calcédoine n'ont exercé que des fonctions passives et secondaires, comme le suppose l'Anonyme.

Après quelques jours de délais, Dioscore fut cité trois fois de la part du Concile, et refusa obstinément de comparoître, n'alléguant que de misérables subterfuges pour s'en dispenser.

Sur quoi Paschasin, s'adressant aux Pères de Calcédoine, dit : « Nous << désirons d'apprendre ce qu'il plaît à Votre Sainteté d'ordonner. « L'Evêque Lucien propose de se conformer à la Sentence portée à

Ephèse contre Nestorius. Paschasin insiste : Votre Piété ordonne<< t-elle que nous employions la sévérité Ecclésiastique? Y consentez<< vous ? Nous y consentons tous, répond le Saint Synode. Paschasin « répète sa première demande, et reçoit la même réponse. Puis il << ajoute: Encore une fois que plaît-il à Votre Béatitude de décider? « Maxime, Evêque de la grande ville d'Antioche, dit: Nous nous «< conformons d'avance à ce que Votre Sainteté réglera.» Alors Paschasin, après une longue énumération des crimes de Dioscore, prononca la Sentence au nom du Pape et au nom du Saint Concile, et priva le coupable de la dignité Episcopale, ainsi que « de tout minis«tère appartenant au sacerdoce. » Anatole, Archevêque de Constantinople, jugeant à son tour, et motivant son jugement sur la violation des Canons, dit : « Qu'il étoit du même avis que les Légats. » Maxime, Evêque d'Antioche, déclare « qu'il soumet le désobéissant Dioscore à << la Sentence Ecclésiastique, comme l'ont fait le bienheureux Arche«vêque et Père Léon, et le très-Saint Anatole.» Etienne d'Ephèse accède à la condamnation de Dioscore, « et définit qu'il est privé de « toute dignité sacerdotale. » Les autres Evêques prononcent en se

(1) Baron. ann. 451, § 69.

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