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el vivaient avec leurs maîtres dans une sorte d'égalité. Quoique dans de grandes églises, lelles que celle de Reims, les prélats aient coutume de jouer avec leurs clercs, cepenJaut il me paraîtrait plus convenable qu'ils dant ne jouassent point du tout. »

Parmi les extravagances usitées à cette féle, la plus remarquable était l'élection de Tabbé ou de l'évêque des Fous. On trouve plusieurs particularités curieuses sur cette ection, dans le cérémonial manuscrit de l'église de Viviers, année 1365. On y lit que, le 1 décembre, tous les clercs s'assemblent pour élire un abbé. Après qu'il est élu, on chante le Te Deum. Les principaux électeurs eévent le prétendu prélat, et le portent sur leurs épaules dans une maison où les autres sont à boire autour d'une table. On le met à la place la plus honorable, et dans unsiege orné exprès pour lui. Lorsqu'il entre, un doit se lever, et le véritable évêque lui-mête, s'il se trouve présent. On sert l'abbé avec distinction. On lui présente à boire. Lorsqu'il a bu, il commence à chanter. Tous ceux qui sont de son côté chantent avec lui; ceux qui sont le autre côté leur répondent. Ces deux theurs, s'animant à l'envi, font retentir la maison de leurs cris confus, et s'efforcent de surpasser les uns les autres. Celui des eux chœurs qui, à force de crier, s'est at entendre par-dessus l'autre, et est deBeuré vainqueur, fait pleuvoir sur le parti vaincu une grèle de brocards, de railleries, loutes les injures bouffonnes que peuvent suggerer les fumées du vin, la chaleur du rombat et la joie licencieuse qui règne dans Ce assemblée. Les vaincus s'efforcent de -pondre; mais leur voix est toujours étouf lee par celle des vainqueurs. Après ce débat Aujant, un portier, qui fait l'office de hérault, se leve et dit à haute voix : « De par monseigneur l'abbé et ses conseillers, je vous fais à savoir que vous ayez tous à le suivre parlout où il voudra aller. » Il termine sa proclamation par la menace d'un châtiment comique et peu décent contre ceux qui désobéi. font. Ensuite l'abbé et tous les autres sorent en foule de la maison et se répandent Jans la ville. Tous ceux qui rencontrent l'abé ne manquent jamais de le saluer respecBeusement. Tous les jours, jusqu'à la vigile le Noël, l'abbé des Fous va chaque soir faire losieurs visites dans la ville; et il ne sort oint d'une maison qu'il n'en emporte quelque partie d'habillement, soit un manteau, soit une chape avec son capuce, etc.

Le même cérémonial nous apprend que, le jour de la fête des saints Innocents, on élisait avec les mêmes cérémonies un évêque des ous, qui était distingué de l'abbé. Il était porté sur les épaules des clercs, précédé d'une clochette, dans le palais épiscopal, dont toutes les portes s'ouvraient à son arrivée, soit que l'é

que véritable fût présent ou absent. On le portait devant une des fenêtres du palais, doù il donnait sa bénédiction, tourné vers la ville. L'impiété se mêlait à cette bouffonnerie: le prétendu prélat remplissait toutes les fonctions du véritable évêque: il assistait aux offi

ces dans la chaire de marbre destinée à l'évêque; et même il officiait pontificalement pendant trois jours, distribuant au peuple des bénédictions et des indulgences, accompagnées de formules impertinentes, dans lesquelles, par dérision, il souhaitait à ceux qu'il bénis sait quelque maladie ou infirmité ridicule. Enfin, pour achever de faire connaître les excès auxquels on se portait dans cette fête, il suffit de rapporter ce qu'on lit à ce sujet dans la lettre circulaire de la faculté de théologie de Paris, déjà citée: « Dans le temps même de la célébration de l'office divin, des gens, ayant le visage couvert de masques hideux, déguisés en femmes, vêtus de peaux de lion, ou bien habilles en farceurs, dansaient dans l'église d'une manière indécente, chantaient dans le chœur des chansons déshonnêtes, mangeaient de la viande sur le coin de l'autel, auprès du célébrant, jouaient aux dés sur l'autel, faisaient brûler de vieux cuirs au lieu d'encens, couraient et sautaient par toute l'église comme des insensés, et profanaient la maison du Seigneur par mille indécences. » Cette fête s'était tellement accréditée, et les clercs la regardaient comme une cérémonie si importante, qu'un clerc du diocèse de Viviers, qui avait été élu évêque des Fous, ayant refusé de s'acquitter des fonctions de sa charge, et de faire les dépeuses qui y étaient attachées, fut cité en justice. comme un prévaricateur. L'affaire fut longtemps agitée par-devant l'official de Viviers, et enfin soumise à l'arbitrage des trois principaux chanoines du chapitre. Ces graves arbitres rendirent un arrêt qui condamnait l'accusé, nommé Guillaume Raynoard, aux frais du repas qu'il devait doaner, en qualité d'évêque des Fous, et qu'il avait refusé de payer sans raison légitime, et lui enjoignait de donner ce repas à la prochaine fête de saint Barthélemy, apôtre.

« On s'est beaucoup scandalisé de ces fêtes, qui ont leur raison (et non leur excuse) dans la grossièreté de ces temps d'ignorance et dans une espèce de symbolisme ignoble, dit M. Guénebault, dans son Glossaire liturgique. On croyait témoigner sa piété par ces représentations bouffonnes de quelques-uns de nos mystères. Pour répondre aux détracteurs de l'Eglise, nous ne saurions mieux faire que de citer le passage suivant de Bergier : a On ne doit ni justifier ni excuser ces abus ; mais il n'est pas inutile d'en rechercher l'origine. Lorsque les peuples de l'Europe, asservis au gouvernement féodal, réduits à l'esclavage, traités à peu près comme des brutes, n'avaient de relâche que les jours de fêtes, ils ne connaissaient point d'autres spectacles que ceux de la religion, et n'avaient point d'autres distractions de leurs maux que les assemblées chrétiennes; il leur fut pardonnable d'y mettre un peu de gaîté, et de suspendre pour quelques moments le sentiment de leurs misères. Les ecclésiastiques s'y prêtèrent par condescendance et par commisération; mais leur charité ne fut pas assez prudente, ils devaient prévoir qu'il en naitrait bientôt des indécences et des abus. La

même raison fit imaginer la représentation des mystères, mélange grossier de piété et de ridicule, qu'il fallut bannir dans la suite, aussi bien que les fêtes dont nous parlons. >> «L'Eglise fit toujours tous ses efforts pour extirper ces vieilles superstitions. Outre l'autorité de saint Augustia et du concile de Tolède, dont nous avons déjà parlé, nous citerons comme preuve des efforts de l'Eglise pour déraciner ces indignes profanations, la lettre de Pierre de Capoue, cardinal-légat en France, qui, en 1198, ordonnait à Eudes de Sully, évêque de Paris, de les supprimer; deux ordonnances de cet évêque, de 1198 et 1199, qui établissent la fête de la Circoncision à la place de ces fêtes; le synode de Worchester, en 1240; le synode Langres, en 1404; le concile de Nantes, en 1431'; le concile de Bâle, en 1435, dont le décret fot adopté par la pragmatique-sanction, en 1438; la censure de l'Université de Paris, en 1444; le synode de Rouen, en 1445; les ordonnances de Charles VII, de la même année; le synode de Sens et de Lyon, en 1528, et celui de Vienne, en 1530. Tant d'efforts réunis, joints aussi à une civilisation plus exquise et plus raffinée, ont fait tomber toutes ces fêtes, ainsi que quelques autres, moitié civiles, moitié religieuses, telles que la Gargouille de Rouen, la Tarasque de Tarascon, etc.; il ne reste peut-être plus que les fameux jeux institués par le roi René, pour la procession de la Fête-Dieu de la ville d'Aix en Provence. Quoique déjà moins ignobles que ce qu'ils étaient au commencement, quoique même ils n'aient pas été joués en entier depuis bien longtemps, espérons qu'on les supprimera bientôt tout à fait. »

Terminons en observant, avec M. Magnin, dans son Cours de littérature étrangère, qu'on a beaucoup exagéré les désordres qui se commettaient pendant cette fête des Sous-dia. cres; qu'on a attribué au x siècle toutes les extravagances qui précédèrent immédiatement la réforme au XIV et au XVe siècle; enfin, que ces fêtes, aussi bien que celle appelée des Anes, ont été le prélude de la sécularisation du théâtre, et un acheminement à la scène française.

FOU-TAN-NA, nom chinois de la sixième espèce de démons, dans le système religieux des bouddhistes. Ce sont des génies faméliques et fetides qui président aux maladies pestilentielles. Ce mot est une corruption du sanscrit Poutana.

FOUTSOU NOUSI-NO KAMI, un des génies célestes de la mythologie japonaise; c'est lui qui fut chargé de purifier la terre et de la délivrer du joug des génies terrestres. Voyez son histoire à l'article AMA TSOU FIKO FIKO FO-NO NI NI GHI-NO MIKOTO.

FRACTION DE LA LUNE, un des plus fameux miracles de Mahomet, au dire des musulmans crédules, qui racontent ainsi cet événement extraordinaire: Les chefs de la tribu des Coréïschites, ayant résolu de le confondre aux yeux de toute la nation, avaient gagné Habib, fils de Malek. Ce prince, âgé

de 120 ans, connaissait toutes les religions, ayant été successivement juif, chrétien, mage. On somma Mahomet de comparaître devant lui. Le vieillard, entouré des princes arabes, était assis sur un trône au milieu de la campagne. Une foule de peuple l'environnait au loin. L'apôtre des musulmans s'avance avec confiance vers son juge, qui lui propose, pour prouver sa mission, de couvrir le ciel de ténèbres, de faire paraître la lune en son plein et de la forcer à descendre sur la Kaaba. Le parti est accepté. Le soleil était au plus haut de son cours; aucun nuage n'intercep tait ses rayons. Mahomet commande aux lenèbres, et elles voilent la face des cieux; it commande à la lune, d'une voix qui se fit entendre de la Mecque et de toutes les bourgades d'alentour; aussitôt, docile à sa voix, la lune apparaît dans le firmament. Puis, quittant sa route accoutumée, elle bondit dans les airs et va descendre sur le sommet de la Kaaba. Elle en fait sept fois le tour, se prosterne devant la maison sainte, salue profondement le prophète, et de là va se placer sur la montagne d'Abou-Cobais, où, s'agitant comme une épée flamboyante, elle pronone en style élégant et fleuri un discours à lá louange de Mahomet. Après quoi, elle pe nètre par la manche droite de son manteau, en sort par la gauche, puis rentra par la gauche pour ressortir par la droite; s'ins nuant ensuite par le collet de sa robe, elle descendit jusqu'à la frange d'en bas, d'on elle sortit au grand étonnement des specta teurs. A l'instant même, elle se fendit en deux parties égales; l'une des moitiés prit son essor vers l'orient, l'autre vers l'occident, puis se rapprochant insensiblement, elles se réunirent dans les cieux, et l'astre continua d'éclairer la terre.

Plusieurs pensent que ce miracle est consigné dans le Coran; en effet, on lit au premier verset du chapitre LIV : « L'heure a proche et la lune s'est fendue; mais les in dèles, à la vue des prodiges, détournent la tête et disent: C'est un enchantement pussant. Entraînés par le torrent de leurs pas sions, ils nient le miracle, etc. » Mais d'autres commentateurs pensent que ce verset est l'annonce d'un des signes du jugement dernier. En effet, les plus instruits d'entre les musulmans nient le prétendu miracle de la fraction de la lune ; et l'on sait que Mahomet ne se targuait pas de faire des miracles; il a même déclaré formellement dans le Coran qu'il n'avait pas ce don.

FRANCISCAINES, religieuses de l'ordre de Saint-François d'Assise. Il est assez singulier que saint François, ayant institué un Ordre pour les personnes du sexe, sous la direction de sainte Claire, plusieurs femmes aient prétendu faire mieux que ce saint fou dateur, en établissant des communautés cal quées sur les constitutions, les usages, les réformes, qui régissaient les congregatious d'hommes; de là, les Cordelières, les Capucines, les Récollectines, etc. Voir ces articles, et CLARISSES, FRANCISCAINS.

FRANCISCAINS, nom que l'on donne aus

communautés en congrégations fondées par saint François d'Assise. On sait que ce bienheureux patriarche a fondé trois ordres prineipaux le premier fut d'abord appelé l'ordre des Pauvres Mineurs, par opposition aux Paurres de Lyon, qui étaient des hérétiques vaudois: mais depuis ils prirent le nom de Frères Mineurs, pour n'avoir pas même sujet de se glorifier de la pauvreté dont ils faisaient profession. Cet ordre se divise en religieux Conventuels, et en religieux de l'Observance. Les premiers, contrairement à leur instituon, obtinrent de leurs généraux, peu après la mort de leur fondateur, et ensuite des papes, la faculté de recevoir des rentes et des fondations. On les appela conventuels, parce qu'ils vivaient dans de grands couvents; au fieu que ceux qui suivaient la règle dans foute sa pureté demeuraient dans des ermilages ou dans des maisons basses et paures; et ce fut ce zèle pour la règle qui les it nommer Observantins, ou Pèrès de l'Obrtance régulière. On donnait principalement ce nom à ceux qui suivaient la réforme établie conformément à leur institut primitif, et dont saint Bernardin de Sienne fut l'auteur, en 1419. Les réformes de cet ordre s'étant multipliées, Léon X, en 1517, les réduisit foules à une, sous la dénomination de Frantuscains réformés, et permit à chacune de ces eux grandes divisions d'avoir son général. Les Observantins de France ont été appelés Cordeliers, de la corde qui leur sert de ceinture. - Parmi les Observantins, quelques réformes plus sévères se sont maintenues, malré l'union faite par Léon X, ou se sont étaDes depuis. On appelle ceux-ci Observantins de litroite Observance; on distingue parmi es les Franciscains déchaussés, d'Espagne, qu'on nomme en Italie Franciscains réformés. les forment une congrégation distincte, qui a des couvents en Espagne, en Italie, au Mexique, dans les îles Philippines, etc. Citons encore les réformes des Capucins et lle des Récollets, qu'on trouvera à leurs articles respectifs.

Le second ordre de Saint-François est celui des Pauvres Clarisses, ainsi appelées de sainte Llaire, collaboratrice de saint François d'Asise. Elles subirent également plusieurs réformes, telles que celle introduite dans le V siècle par la bienheureuse Colette Boilet, celle dite des Capucines, commencée à Naples, en 1558, par la vénérable mère Maie-Laurence Longa.

Le troisième ordre de Saint-François fut nstitué par le saint lui-même, en 1221, à Poggi Bonzi en Toscane, et à Carnerio, dans a vallée de Spolète. Il était pour les persones de l'un et de l'autre sexe, engagées dans e monde et même dans le mariage, lesquelles assujettissaient à certaines pratiques de été compatibles avec leur état, mais dont ucune n'obligeait sous peine de péché. Ces xercices n'étaient que des règles de conduite ui n'emportaient ni vœu ni obligation. Après

la mort de saint François, plusieurs personnes de ce troisième ordre se sont réunies en communauté, en différents temps et en différents lieux; elles ont gardé la clôture, et ont fait les vœux solennels de pauvreté, de chasteté et d'obéissance. Elles regardent comme leur fondatrice sainte Elisabeth de Hongrie, duchesse de Turinge, qui mourut en 1231. Cet institut contient des personnes de l'un et de l'autre sexe, qui se divisent en plusieurs branches, dont quelques-unes se consacrent au service des malades dans les hôpitaux. Voyez MINEURS (Frères).

FRANC-MAÇONNERIE, association secrète qui a pris naissance en Angleterre, et qui est maintenant. répandue sur tous les points du globe. Depuis l'époque de son établissement jusqu'à nos jours on a beaucoup discuté sur le bat qu'elle se propose, sur le secret rigoureux qu'elle impose aux adeptes, sur les travaux auxquels les associés se livrent dans les loges. Les uns l'ont regardée comme une association de déistes qui avaient pour but d'abolir toutes les religions établies ; d'autres, comme une réunion politique qui ne tendait à rien moins qu'à renverser les trônes et à substituer le gouvernement populaire aux Etats monarchiques; d'autres, comme une société de libertins et de débauchés de toutes sortes de rang, d'état, de profession; d'autres enfin en ont fait des alchimistes, des souffleurs, des chercheurs de pierre philosophale. Nous croyons que ces accusations sont autant de calomnies, que le secret qu'on donne aux apprentis et aux compagnons est insignifiant, que cette société a uniquement pour but de faire, à des époques déterminées, des réunions fraternelles, et de se secourir mutuellement les uns les autres, quand quelques-uns des membres viennent à tomber dans la misère ou se trouvent dans une position fâcheuse. Il est possible qu'il y ait eu autrefois un secret important; mais nous sommes persuadé qu'il n'existe plus, ou du moins qu'il est le partage d'un très-petit nombre de hauts fonctionnaires de l'ordre. Le secret que l'on confie actuellement aux compagnons et aux adeptes n'est qu'un moyen de resserrer entre eux les liens de la fraternité. C'est donc à tort qu'on a mis sur leur compte la révolution française qui a renversé le trône et l'autel. Dans la plupart des Etats où ils ont été approuvés ou tolérés, ils ont conféré les hauts grades à des princes du sang et même aux rois; ils ont compté parmi eux des magistrats, des nobles, et même des prêtres et des évêques; et, quant à la religion, il est sévèrement défendu aux adeptes de soulever dans les loges des questions religieuses (1). La franc-maçonnerie n'en est pas moins condamnée par l'Eglise, en qualité de société secrète, parce qu'on peut sous son couvert se porter à des actes répréhensibles de divers genres, comme nous pensons que cela est arrivé plus d'une fois.

(1) Dans l'origine même il fallait être catholique pour faire partie de cette société ; et maintenant encore plusieurs contrées, l'entrée en est interdite aux Juifs,

Plusieurs francs-maçons ont voulu faire remonter l'origine de leur société à la corporation d'ouvriers établis par Hiram, roi de Tyr, de concert avec Salomon, pour la construction du temple de Jérusalem, et qui se trouve détaillée dans le troisième livre des Rois et dans le premier des Paralipomènes; d'autres regardent Noé comme le premier franc-maçon, parce qu'il n'a pu procéder à une construction aussi longue et aussi compliquée que celle de l'arche, sans établir des catégories d'ouvriers ; d'autres remontent jusqu'à la création du monde; en effet, Dieu e-tappelé dans cette so: iété, le Grand Architecte de l'univers. Enfin, il en est qui rattachent l'existence de l'ordre aux anciens mystères célébrés dans le paganisme, ou à ce x des Templiers. La vérité est que cette association, telle qu'elle est constituée maintenant, a commencé en Angleterre, dans le XVI siècle. Elle parait avoir succédé à une corporation de maçons véritab es, qui, dans le moyen âge, avaient pour ainsi dire le monopole de la construction des églises et des autres grands bâtiments d'utilité publique. Les francs-maçons ont conservé les instrun.ents propres à la construction des édifices matériels, tels que l'équerre, le compas, le niveau, la truelle, le maillet, le tablier, etc., comme emblèmes de l'édifice moral qu'ils prétendent construire dans la société et dans 'humanité tout entière. Toutefois, ils soutiennent qu'ils sont encore véritablement maçons, parce que, disent-ils, ils élèvent des temples à la gloire du Grand Architecte de l'univers, pour y vénérer son nom et lui offrir l'encens de leur reconnaissance, et pour y rendre hommage à la vérité et à la vertu.

Nous allons maintenant, pour satisfaire la curiosité du lecteur, donner d'amples détails sur plusieurs de leurs solennités; nous les empruntons à l'introduction à l'Histoire pittoresque de la franc-maçonnerie, par M. B. Clavel, en nous bornant aux rites observés principalement en France.

Initiation d'un profane au grade d'apprenti.

Le profane, qui doit être majeur, de condition libre, de mours honnêtes, de bonne réputation, et sain de corps et d'esprit, est proposé à l'initiation dans la plus prochaine tenue de la loge. Son nom, ses prénoms, son âge, sa profession, et toutes les autres désignations propres a le faire reconnaître, sont inscrits sur un bulle is, et jetés à la fin des travaux dans un sac ou dans une boite, appelé sac des propositions, qui est présenté à chacun des assistants, dans l'ordre de ses fonctions ou de son grade. Le bulletin est lu par le vénérable, ou président, à l'assemblée, qui est appelée à voter au scrutin de boules sur la prise en considération de la demande. Si toutes les boules contenues dans la ca, se sont blanches, il est donné suite à la proposition. S'il s'y trouve trois boules noires, le postulant est repoussé définitivement et saus appel. Une ou deux boules noirs font ajourner la délibération à un mois de là. Dans l'intervalle, les frères qui ont volé contre la

prise en considération sont tenus de se transjorter chez le vénérable, pour lui faire connaitre les motifs qui ont dirigé leur vote. Si ces motifs paraissent suffisants au vénérable, il le fait savoir à la loge dans la séance qui suit, et la proposition est abandonnée. Dans le cas contraire, il engage les frères à se désister de leur opposition. S'il n'y peut réussir, il rend la loge juge des raisons alléguées contre l'admission du profane; et lors que la majorité partage son avis, il est passé outre à la prise en considération.

La règle vent qu'après ce premier scrutin le vénérable donne secrètement à trois free res la mission de recueillir des renseignements sur la moralité du profane. A la tenue suivante les commissaires jettent leurs rapports écrits dans le sac des propositions, et le vénérable en donne lecture à l'assemblée. Si les renseignements obtenus sont défavorables, le profane est repoussé, sans qu'il soit nécessaire de consulter la loge; dans le cas contraire, le scrutin circule de nouveau, et, quand les votes sont unanimes, la réception du profane est fixée à un mois de là.

Le profane n'est jamais amené au local de la loge par le frère présentateur; un frère qu'il ne connaît pas est chargé de ce soin. A son arrivée, il est placé dans une chambre tapissée de noir, où sont dessinés des emblè mes funéraires. On lit sur les murs des inscriptions dans le genre de colles-ci: - Si une vaine curiosité l'a conduit ici, va-t-en.Si tu crains d'être éclairé sur tes défauts, lo n'as que faire ici. Si tu es capable de dis simulation, tremble; on te pénétrera. - Si tu tiens aux distinctions humaines, sors; on n'en connaît point ici. --Si ton âme a senti l'effroi ne vas pas plus loin. — On pourra exiger de toi les plus grands sacrifices, même celui de ta vie : y es-tu résigné?

Cette chambre est ce qu'on appelle le cal net des réflexions. Le candidat doit y rédger son testament et répondre par écrit à ces trois questions : - « Quels sont les devoint de l'homme envers Dieu ? Envers ses semblables? Envers lui-même ? » Pendant que le profane, laissé seul, médite dans le silence sur ces divers sujets, les frères, réunis dans la loge, procèdent à l'ouverture des travaus.

Ce qu'on nomme la loge est une grande salle avant la forme d'un parallelogramme, ou carré long. Les quatre côtés portent les noms des points cardinaux. La partie la plus reculée, où siége le vénérable, s'appelle l'0rient, et fait face à la porte d'entrée. Elle se compose d'une estradé élevée de trois marches au-dessus du sol de la pièce, et hordee d'une balustrade. L'antel, où bureau, place devant le trône du vénérable, porte sur un seconde estrade haute de quatre marches: qui fait sept marches pour arriver du paris à l'autel. Un dais de couleur bleu-ciel, pafsemé d'étoiles d'argent, surmonte le trône da vénérable. Au fond du dais, dans la partie supérieure, est un delta rayonnant, ou gloire, au centre duquel on lit, en caractères he braïques le nom de Jéhovah. A la gauche du dais est le disque du soleil ; à la droile,

le croissant de la lune. Ce sont les seules images admises dans la loge.

A l'occident, des deux côtés de la porte d'entrée, s'élèvent deux colonnes de bronze dont les chapiteaux sont ornés de pommes de grenades entr'ouvertes. Sur la colonne de gauche est tracée la lettre J; sur l'autre, on voit la lettre B (1). Près de la première se place le premier surveillant, et, près de la deuxième, le second surveillant. Ces deux officiers ont devant eux un autel triangulaire chargé d'emblèmes maçonniques. Ils sont les aides et les suppléants du vénérable, el, ainsi que lui, ils tiennent à la main un maillet, comme signe de leur autorité.

Le temple est orné dans son pourtour de dix autres colonnes, ce qui ea porte le nombre total à douze. Dans la frise ou architrave, qui repose sur les colonnes, règne un cordon qui forme douze nœuds en lacs d'amour. Les deux extrémités se terminent par une houppe, nommée houppe dentelée, el viennent aboutir aux colonnes J et B. Le pafond décrit une courbe, il est peint en Neu-ciel et parsemé d'étoiles. De Poient parlent trois rayons qui figurent le lever du soleil.

La Bible, un compas, une équerre, une cpée à lame torse, appelée Epée flamboyante, sont placés sur l'autel du vénérable, et trois grinds flambeaux surmontés d'un long cierge sont distribués dans la loge: l'un à l'est, au bas des marches de l'Orient; le deuxième à l'ouest, près du premier surveil lant, et le dernier au sud. Des deux côtés de la loge règnent plusieurs rangs de banquettes, où prennent place les frères non fonctionnaires. C'est ce qu'on désigne sous es noms de colonne du nord et de colonne

in midi.

Indépendamment du Vénérable et des Sureillants, qu'on appelle figurément les trois Interes, on compte dans la loge un certain nombre d'autres officiers qui, de même que les trois premiers, sont élus au scrutin, chaque année, à la Saint-Jean d'hiver. Tels sont l'Orateur, le Secrétaire, le Trésorier, l'Hospitelier, Expert, le Maitre des cérémonies, le Garde des sceaux, l'Archiviste, l'Architecte, le Maitre des banquets, et le Couvreur ou Garde du temple. La plupart de ces officiers occupent dans la loge une place déterminée, et chacun d'eux a devant lui un bureau; ils sont aussi distingués par des insignes particuliers. Dans les autres contrées, et dans les loges dites misraïmites, il y a des fonclionaires en nombre plus ou moins grand. En Angleterre et aux Etats-Unis, il y a eatre autres un chapelain chargé de prononcer les invocations et les prières dans les grandes occasions; c'est ordinairement un

nistre du culte, appartenant indifféremment à l'une ou à l'autre des communions existantes.

C'est toujours le soir que les frères se réurissent. Le temple, qui n'a point de fenêtres,

(1) Ces deux lettres sont les initiales des mots Jachin et Boozou Boaz, noms des deux colonnes placées dans le temple de Salomon. Ces colonnes et les grenades

est éclairé par un nombre déterminé de lumières ou d'étoiles. Ce nombre est de neuf, de douze, de vingt-un, de vingt-sept, de trente-six, de quatre-vingt-un, suivant la grandeur de la salle ou l'importance de la solennité.

Lorsque le vénérable veut ouvrir les travaux, il frappe plusieurs coups sur l'autel avec son maillet. Alors les frères se mettent à la place qu'ils doivent occuper; le couvreur ferme les portes. Tout le monde reste debout. Ce préalable accompli, le vénérable se place au trône, se couvre, saisit de la main gauche l'épée flamboyante, dont il appuie le pommeau sur l'autel, prend de la droite son maillet, frappe un coup que les surveillants répètent, et le dialogue suivant s'établit :

Le vénérable Frère premier surveillant, quel est le premier devoir d'un surveillant en loge?

Le premier surveillant : C'est de s'assurer si la loge est couverte.

Sur l'ordre que lui en donne le vénérable, le premier surveillant charge le second diacre de s'informer auprès du couvreur s'il n'y a point de profanes dans le parvis, et si, des maisons voisines, on ne peut ni voir ni entendre ce qui va se passer. Le couvreur ouvre la porte, visite les pas perdus, s'assure que tout est clos à l'extérieur, et vient rendre compte de cet examen au second diacre, qui en fait connaître le résultat au premier surveillant.

Le premier surveillant: Vénérable, la loge

est couverte.

Le vénérable: Quel est le second devoir? Le premier su veillant : C'est de s'assurer si tous les assistants sont maçons.

Le vénérable: Frères premier et second surveillants, parcourez le nord et le midi, et faites votre devoir. A l'ordre, mes frères.

A cet appel du vénérable, tous les frères se tournent vers l'orient et se mettent dans la posture consacrée. Les surveillants quittent leurs places, se dirigent de l'ouest vers l'est, et examinent successivement tous les assistants, qui, à leur approche, font le signe maçonnique, de manière que ceux qui se trouvent devant eux n'en puissent rien voir. Cet examen terminé, et de retour à leur poste, les surveillants informent le vénérable qu'il n'y a daus la loge aucun profane

Après avoir interrogé les diacres et la plupart des autres officiers sur la place qu'ils occup nt en loge et sur les fonctions qu'ils y remplissent, le vénérable continue ses interpellations.

Le vénérable: Pourquoi, frère second surveillant, vous placez-vous au sud ?

Le second surveillant: Pour mieux observer le soleil à son méridien, pour envoyer les ouvriers du travail à la récréation, et les rappeler de la récréation au travail, afin que le maître entire honneur et contentement. entr'ouvertes qui les surmontent sont censées représenter les organes de la génération.

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