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pouvoir spécial de demander au Pontife la couronne impériale, avec ses bonnes graces. Ils lui présentèrent aussi le décret d'élection. Sur quoi le Pape déclara qu'il reconnaissait Henri pour roi des Romains, et promit de le couronner empereur à Saint-Pierre de Rome, le jour de la Purification prochaine en deux ans, c'est-à-dire le second de février 1512, disant qu'il ne le pouvait plus tôt, à cause du concile général qu'il devait tenir. Ensuite, le samedi, vingt-sixième de juillet, dans un consistoire public et solennel, où se trouvaient le Pape, les cardinaux, avec des archevêques, des évêques, des abbés, des prélats et autres personnes tant ecclésiastiques que séculières en grand nombre, les ambassadeurs prêtèrent le serment qui suit :

«Nous, Siffrid, évêque de Coire; Amédée, comte de Savoie; Jean, dauphin de Vienne et comte d'Albon; Gui de Flandre; Jean, comte de Sarrebruck et Simon de Manulle, trésorier de Metz, nonces et procureurs du sérénissime prince Henri, roi des Romains, ayant de lui, pour tout ce que dessous, plein, général et libre pouvoir et spécial mandat, comme il conste par ses lettres patentes qui viennent d'être lues: à vous, très-saint Père et seigneur, seigneur pape Clément V, au nom et à la place du roi, notre maître, nous promettons et jurons sur son âme, par le Père, le Fils et le Saint-Esprit, par ces saints évangiles de Dieu, par ce bois de la croix vivifiante et par ces reliques des saints, que jamais, de sa volonté, de son consentement, de son conseil ou de son exhortation, vous ne perdrez ni la vie, ni les membres, ni l'honneur que vous avez; que, dans Rome, il ne fera nul plaid ni ordonnance, sur rien. de ce qui vous intéresse, vous ou les Romains, sans votre conseil et consentement: tout ce qui, de la terre de l'Eglise, est venu ou viendra en son pouvoir, il vous le rendra le plus tôt possible; toutes les fois qu'il enverra quelqu'un en Lombardie et en Toscane pour administrer ses terres et ses droits, il le fera jurer d'être votre aide pour défendre la terre de saint Pierre et l'Eglise romaine selon son pouvoir; et si, par la permission du Seigneur, ledit roi, notre maître, vient à Rome, il exaltera suivant son pouvoir la sainte Eglise romaine, et vous, son pasteur, ainsi que vos successeurs; et quand il devra être couronné par vous à Rome ou ailleurs, il renouvellera en personne ce serment, et l'autre qui a coutume de se faire 1. » Tel fut le serment que les ambassadeurs de Henri de Luxembourg, autrement Henri VII, prêtèrent en son nom au pape Clément V, vingt-sixième de juillet 1509.

Apud Raynald., 1309, n. 12.

le

Peu de jours après, le même Pape couronna le nouveau roi de Naples, Robert. Charles II ou le Boiteux mourut à Casenove, le cinquième de mai 1309, âgé de soixante-trois ans, après en avoir régné vingt-quatre. Robert, son fils aîné, lui succéda au royaume de Naples ou de Sicile en-deçà du Phare, et au titre de roi de Jérusalem. Il vint à Avignon, où, le vingt-sixième d'août, il prêta au Pape foi et hommage pour le royaume de Sicile, que le Pape reçut aux mêmes conditions de la concession faite à Charles, son aïeul; il lui remit de plus généreusement toutes les sommes qu'il devait à l'Eglise romaine, montant, disait-on, à trois cent mille onces d'or. Ensuite le Pape le couronna le jour de la Nativité de NotreDame, huitième de septembre; il régna près de trente-quatre

ans

Henri de Luxembourg, après avoir confié l'administration de l'empire à son fils Jean, devenu récemment roi de Bohême, s'avança jusqu'à Lausanne, dans l'été de 1510, pour s'y préparer à passer en Italie. Là il fit un serment solennel au pape Clément, de défendre la foi catholique, d'exterminer les hérétiques, de ne faire aucune alliance avec les ennemis de l'Eglise, de protéger le Pape et de conserver tous les droits de l'Eglise romaine. Il confirma de plus et renouvela tous les priviléges et toutes les donations qu'elle a reçues de Constantin, de Charlemagne, de Henri, d'Otton IV, de Frédéric et des autres empereurs. Ce serment, dont nous avons encore l'acte, fut fait le onzième d'octobre 1310, entre les mains de l'archevêque de Trèves, Baudouin de Luxembourg, frère du roi, et de Jean de Molans, écolâtre de l'église de Toul, commis l'un et l'autre par le Pape pour cet effet 2.

Dans la même ville de Lausanne, Henri reçut des ambassadeurs de presque tous les états italiens. Les chefs des factions dominantes voulaient, avec son appui, conserver leur pouvoir; les exilés s'adressaient à lui, au contraire, pour qu'il les aidât à rentrer dans leur patrie; les Guelfes, comme les Gibelins, croyaient avoir des droits à sa protection, puisqu'il était allié du Pape. En effet, Clément V. écrivit en sa faveur aux Génois, aux Florentins, aux Milanais et aux autres peuples d'Italie, et chargea le cardinal Arnaud de Pélegrue, légat, de l'aider dans son entreprise. Comme Henri annonçait en même temps l'intention de pacifier l'Italie et de faire rentrer les émigrés dans toutes les villes, il y fut généralement bien reçu, quoiqu'il eût d'abord avec lui peu de troupes. Il passa deux mois en Piémont, y réforma le gouvernement de toutes les villes,

1 Apud Raynald., 1309, n. 18 et seqq.

2 Ibid., 1310, n. 5 et seqq.

établit partout des vicaires impériaux pour réndre la justice en son nom, abaissa les tyrans, et rappela dans toutes les cités les exilés et les émigrés. Une conduite aussi belle le fit également bien recevoir à Milan, où il fut couronné roi de Lombardie, le six janvier 1311. Tous les députés. des villes, dit un témoin oculaire, l'évêque de Botront, dans la relation de ce voyage qu'il adressa au pape Clément, tous les députés prêtèrent.serment de fidélité, sauf les Génois et les Vénitiens, qui dirent beaucoup de choses, que j'ai mal retenues, pour expliquer pourquoi ils ne juraient pas, quoiqu'ils reconnussent le roi des Romains pour leur seigneur. De quoi je ne sache aucune bonne raison, si ce n'est qu'ils sont d'une cinquième essence, et qu'ils ne veulent reconnaître ni Dieu, ni Eglise, ni empereur, ni mer, ni terre, qu'autant qu'il leur plaît; voilà ce qu'in-1 sinuaient leurs raisonnements 1.

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Dans le mois qui suivit son couronnement, Henri pacifia, sans distinction de parti, toutes les villes qui s'étaient soumises à lui. Mais Henri était pauvre, et n'avait en quelque sorte formé son armée que d'aventuriers titrés, de princes et de seigneurs qui avaient abandonné leurs petits états dans l'espérance de faire, à la suite de l'empereur, une rapide et brillante fortune. La nécessité de satisfaire à leur avidité mettait Henri dans un état de gêne continuel, et le força bientôt à mécontenter des peuples que personnellement il était digne de gouverner. Une contribution imposée à la ville de Milan, sous le nom de don gratuit, provoqua une sédition: ce fut un signal contagieux pour les autres villes ; presque toutes se révoltèrent; il fallut employer la voie des armes pour les ramener à la soumission; les murailles de Crémone furent rasées, ses principaux citoyens jetés en prison, les autres livrés au pillage; Brescia résista plus long-temps; de cruelles représailles se commirent de part et d'autre pendant le siége, un frère du roi fut tué dans une sortie, les habitants obtinrent, par l'entremise des cardinaux, une capitulation honorable, mais qui ne fut guère bien observée.

Le Pape avait promis d'aller à Rome donner à Henri, de sa main, la couronne impériale; mais ensuite il en donna la commission à cinq cardinaux, trois évêques et deux diacres. La bulle de leur commission commence ainsi : Jésus-Christ, le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, a honoré de bien des prérogatives la reine, son épouse, savoir, la sainte Eglise, qu'il a rachetée par son sang et s'est unie par une alliance indissoluble. Il lui a conféré sur tout une telle plénitude de puissance, qu'aux personnes les plus émi

Baluz. Pap. aven., t. 2, p. 1161.

1

nentes elle peut conférer un nouveau degré de puissance et de gloire. Car le dominateur du ciel, le Très-Haut, qui seul a la puissance dans l'empire des hommes, et qui y suscite ce qu'il veut, lui a donné sur cet empire la puissance, l'honneur et la royauté; puissance éternelle qui ne lui sera point enlevée, royauté qui ne sera point détruite, afin que les empereurs, les rois et les juges de la terre apprennent salutairement en elle et par elle à servir et à obéir avec crainte à celui qui commande aux vents et à la mer. Car tout ce qu'il y a au ciel et sur la terre est à lui, à lui est le royaume, il est sur tous les princes; à lui les richesses et la gloire, lui qui domine sur tout; en sa main sont la force et la puissance, la grandeur et l'empire de toutes choses, lui sous qui se courbent ceux qui portent l'univers. Car c'est par lui que les rois règnent et que les législateurs décrètent ce qui est juste, lui qui a écrit sur sa cuisse: Le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs; lui au commandement duquel l'aigle s'élevera et posera son aire sur les hauteurs escarpées.

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Après avoir ainsi, avec les paroles mêmes de l'Ecriture, rappelé la souveraineté éternelle du Christ, et montré son empire réalisé dans l'Eglise, le pape Clément dit comment il a confirmé l'élection du roi Henri et promis de le couronner empereur. Mais, ajoute-t-il, ce prince, étant rentré en Italie, nous a envoyé des ambassadeurs, qui nous ont prié d'avancer le terme du couronnement et de le fixer à la Pentecôte alors prochaine, pour être fait par quelques cardinaux, puisque nous ne pouvons le faire en personne, à cause du concile général que nous devons tenir au premier d'octobre, et de plusieurs autres affaires pressantes qui nous retiennent en-deçà des monts. Ensuite le roi est convenu de proroger le terme de son couronnement jusqu'à l'Assomption de la sainte Viergé, pour recevoir l'onction et la couronne impériale dans l'église de Saint-Pierre, à la manière accoutumée. C'est pourquoi nous vous ordonnons de vous trouver à Rome ce jour-là, auquel vous, évêque d'Ostie, célébrerez la messe et donnerez au roi l'onction sacrée, et les quatre autres lui donneront la couronne impériale, le sceptre, la pomme, l'épée et le reste. Le Pape prescrit ensuite aux cardinaux tout le détail de cette cérémonie, suivant le formulaire gardé dans les archives de l'Eglise romaine. La bulle est du dix-neuvième de juin 13111.

Le roi Henri, ayant passé l'hiver à Gênes, vint par mer à Pise, puis à Rome, où il arriva le dimanche avant l'Ascension, dernier

↑ Raynald, 1311, n. 6 et seqq.

jour d'avril 1312. Il prétendait se faire couronner empereur à SaintPierre par les cardinaux auxquels le Pape en avait donné commission, et qu'il amenait avec lui. Mais il trouva dans Rome le prince d'Achaïe, Jean, frère de Robert, roi de Naples, qui, avec des troupes et soutenu par la faction des Ursins, s'opposait à son couronnement. Henri ne laissa pas d'entrer dans la ville, ayant pour lui les Colonne, et se logea au palais de Latran; mais, quand il voulut s'ouvrir un chemin pour passer à Saint-Pierre, il fut obligé de combattre les troupes de Naples, dans Rome même, le vingtsixième de mai. Le combat fut sanglant, les Allemands y furent battus, plusieurs seigneurs tués, entre autres l'évêque de Liége..

Le roi Henri, voyant donc qu'il ne pouvait se faire couronner à Saint-Pierre, résolut de le faire à Saint-Jean de Latran; mais les cardinaux y résistaient, s'attachant à la coutume et aux termes de leur commission, qui portait expressément que ce serait à SaintPierre. Les opinions étaient partagées sur ce point; le peuple, voyant que la ville de Rome se détruisait par la guerre qui conti• nuait au dedans, priait les cardinaux d'en avoir pitié. Ils en vinrent même à la sédition et attaquèrent le roi Henri dans son logis, où les cardinaux étaient avec lui. Ceux-ci craignirent la fureur du peuple, et, n'ayant point de réponse du Pape, auquel ils avaient envoyé un courrier, ils résolurent de contenter le roi et de le couronner à Saint-Jean de Latran. Des cinq cardinaux nommés dans la commission du Pape, il en était mort deux; les trois restants étaient Arnaud, évêque de Sabine, légat; Nicolas, évêque d'Ostie, et Luc de Fiesque, nonces. Les trois donc couronnèrent l'empereur Henri VII le jour de Saint-Pierre, jeudi, vingt-neuvième de juillet 1512, et lui firent renouveler et confirmer le serment qu'il avait fait à Lausanne le onzième d'octobre 1510, avant que d'entrer en Italie.

Ensuite les cardinaux reçurent une lettre du Pape, où il les chargeait de procurer la paix entre l'empereur et le roi Robert, ou du moins de leur ordonner une trève, disant entre autres choses que ces deux princes, étant engagés à l'Eglise par serment de fidélité, devaient être les plus disposés à la défendre, et qu'il pouvait les obliger à faire la trève. Sur quoi l'empereur consulta les plus habiles jurisconsultes de Rome, qui répondirent: Nous ne trouvons ni dans le droit canonique ni dans le droit civil que le Pape puisse ordonner une trève entre l'empereur et son vassal, parce que, si le Pape avait une fois ce pouvoir, il l'aurait toujours, même dans le cas que le vassal fût coupable de lèse-majesté; ainsi l'empereur ne pourrait jamais en faire justice: ce qui est contre le droit naturel et le droit divin. De plus, l'empereur et le roi Robert ne sont

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