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265 Vier d'une victoire aussi miraculeuse, il s'en alla du même endroit, fraca nu-pieds, accompagné de l'armée et des évêques, jusqu'à l'église de nure e Muret, pour remercier le Dieu des armées. Il vendit en même celi- temps son cheval de bataille et son armure, et en donna le prix aux it pas pauvres. On admirait en lui un autre Judas Machabée, délivrant le Les peuple du Seigneur de l'oppression de ses ennemis. Les évêques et les abbés annoncèrent à tous les fidèles l'issue de cette mémorable journée. Jacques, enfant de six ans et unique héritier du roi Pierre, était resté à Carcassonne sous la surveillance de Simon, qui le fit tans élever comme l'eût fait un père. L'année suivante 1214, sur les Take ordres du Pape, il le remit au cardinal de Bénévent, qui le remet we aux états d'Aragon, où il est proclamé roi1.

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• Pierre de Vaulx-Cernai. Hist. des Albig. Guill. de Puy-Laurens. Hist. des at Albig., t. 19. Rer. Franc. Scriptores. Croisade contre les Albig. (Par un poète contemporain). Paris, imprimerie royale, 1837, in-4°.

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Pendant que Simon de Montfort, sous l'étendard de la croix, montrait en sa personne le modèle accompli d'un héros chrétien se dévouant pour la cause du Christ et de l'humanité chrétienne, un héros d'un autre genre, sous le même étendard de la croix, recrutait et formait une milice tout entière, pour défendre la même cause, combattre les mêmes ennemis, mais d'une manière plus spirituelle, plus radicale et plus efficace. C'est ici un grand mystère: le mystère du ciel, de la terre et de l'enfer.

<< Le plus grand ennemi de Dieu est l'orgueil. En effet, demande Bossuet, n'est-ce pas l'orgueil qui a soulevé contre lui tout le monde? L'orgueil est premièrement monté dans le ciel où est le trône de Dieu, et lui a débauché ses anges; il a porté jusque dans son sanctuaire le flambeau de rébellion : après, il est descendu dans la terre, et, ayant déjà gagné les intelligences célestes, il s'est servi d'elles pour dompter les hommes. Lucifer, cet esprit superbe, conservant sa première audace, même dans les cachots éternels, ne conçoit que de furieux desseins. Il médite de subjuguer l'homme, à cause que Dieu l'honore et le favorise; mais sachant qu'il n'y peut réussir tant que les hommes demeureront dans la soumission pour leur créateur, il en fait premièrement des rebelles, afin d'en faire après cela des esclaves. Pour les rendre rebelles, il fallait aupara¬ vant les rendre orgueilleux. Il leur inspire donc l'arrogance qui le possède ; de là l'histoire de nos malheurs ; de là cette longue suite de maux qui affligent notre nature opprimée par la violence de ce tyran.

> Enflé de ce bon succès, il se déclare publiquement le rival de Dieu; il abolit son culte par toute la terre; il se fait adorer en sa place par les hommes qu'il a assujétis à sa tyrannie. C'est pourquoi le Fils de Dieu l'appelle « le prince du monde', » et l'apôtre encore plus énergiquement « le dieu de ce siècle 2. » Voilà de quelle sorte l'orgueil a armé le ciel et la terre, tâchant d'abattre le trône de Dieu. C'est lui qui est le père de l'idolâtrie; car c'est par l'orgueil que les hommes, méprisant l'autorité légitime, et devenus amoureux d'eux-mêmes, se sont fait des divinités à leur mode.

'Joan, 12, 13.22. Cor., 4. 4.

1

Ils n'ont point yonlu de dieux que ce qu'ils faisaient; ils n'ont plus adoré que leurs erreurs et leurs fantaisies; dignes, certes, d'avoir des dieux de pierre et de bronze, et de servir aux créatures inonimées, eux, qui se lassaient du culte du Dieu vivant, qui des avall formés à sa ressemblance. Ainsi toutes les créatures, agitées de l'esprit d'orgueil qui dominait partout l'univers, faisaient laguerre à leur créateur avec une rage impuissante. >

Comment le Seigneur renversera-t-il cet enemi?

< C'est honorer l'orgueil que d'aller contre lui par la force; il faut que l'infirmité même le dompte. Ce n'est pas assez qu'il sucrcombe, s'il n'est contraint de reconnaîtreson impuissance; il faut le renverser par ce qu'il dédaigne le plus. Tu t'es élevé, ô Satan, tu t'es élevé contre Dieu de toute ta force: Dieu descendra contre toi armé seulement de faiblesse, afin de montrer combien il se rit de tes téméraires projets. Tu as voulu être le dieu de l'homme : un homme sera ton Dieu; tu as amené la mort sur la terre : la 15 mort ruinera tes desseins; tu as établi ton empire en attachant les

hommes à de faux honneurs, à des richesses mal assurées, à des plaisirs pleins d'illusion : les opprobres, la pauvreté, l'extrême mi sère, la croix, en un mot, détruiront ton empire de fond en comble. O puissance de la croix de Jésus!

» Les vérités de Dieu étaient bannies de la terre, tout était obscurci par les ténèbres de l'idolâtrie. Chose étrange, mais très→ véritable! les peuples les plus polis avaient les religions les plus ridicules; ils se vantaient de n'ignorer rien, et ils étaient si misérables que d'ignorer Dieu. Ils réussissaient en toutes choses jusqu'au miracle. Sur le fait de la religion, qui est le capital de la vie humaine, ils étaient entièrement insensés. Qui le pourrait croire, que les Egyptiens, les pères de la philosophie; les Grecs, les maîtres des beaux-arts; les Romains si graves et si avisés, que leur vertu faisait dominer par toute la terre; qui le croirait, qu'ils eussent adoré les bêtes, les éléments, les créatures inanimées, des dieux parricides et incestueux; que non-seulement les fièvres et les maladies, mais les vices les plus infames et les plus brutales des passions eussent leurs temples dans Rome! Qui ne serait contraint de dire en ce lieu, que Dieu avait abandonné à l'erreur ces grands, mais superbes esprits, qui ne voulaient pas le reconnaître, et qu'ayant quitté la véritable lumière, le dieu de ce sièclebles a aveuglés pour ne pas voir des choses si manifestes?

» Et le monde et les maîtres du monde, le diable les tenait captifs et tremblants sous de serviles religions, desquelles néanmoins ils étaient jaloux, non moins que de la grandeur de leur répu

blique. Qu'y avait-il de plus méchant que leurs dieux? Quoi de plus superstitieux que leurs sacrifices? Quoi de plus impur que leurs profanes mystères? Quoi de plus cruel que leurs jeux, qui faisaient parmi eux une partie du culte divin? jeux sanglants et dignes de bêtes farouches, où ils soûlaient leurs faux dieux de spectacles barbarese t de sang humain. Cependant tant de philosophes, tant de grands esprits que le bel ordre du monde forçait à reconnaître l'unique divinité qui gouverne toute la nature, encore qu'ils furent choqués de tant de désastres, ils n'ont pu persuader aux hommes de les quitter. Avec leurs raisonnements si sublimes, avec leur éloquence toute puissante, ils n'ont pu désabuser les peuples de leurs ridicules cérémonies et de leur religion mons

trueuse.

› Mais sitôt que la croix de Jésus a commencé de paraître au monde, sitôt que l'on a prêché la mort et le supplice du Fils de Dieu, les oracles menteurs se sont tus, le règne des idoles a été peu à peu ébranlé, enfin elles ont été renversées : et Jupiter, et Mars, et Neptune, et l'égyptien Sérapis, et tout ce qu'on adorait sur la terre a été enseveli dans l'oubli. Le monde a ouvert les yeux pour reconnaître le Dieu créateur, et s'est étonné de son ignorance. L'extravagance du christianisme a été plus forte que la plus sublime philosophie. La simplicité de douze pêcheurs sans secours, sans éloquence, sans art, a changé la face de l'univers. Ces pêcheurs ont été plus heureux que ce fameux Athénien à qui la fortune, ce lui semblait, apportait les villes prises dans des rets. Ils ont pris tous les peuples dans leurs filets, pour en faire la conquête de Jésus-Christ, qui ramène tout à Dieu par sa croix3. »

L'orgueil suscite contre la croix de Jésus trois sortes d'ennemis principaux les Juifs, pour qui elle est un scandale; les païens, pour qui elle est une folie ; les hérétiques, qui, pour diminuer cette folie et ce scandale, anéantissent le mystère de la croix, en disant, ou que le Christ n'a pas souffert, ou qu'il n'a souffert qu'en apparence, ou qu'il n'est pas vraiment homme, ou qu'il n'est pas vraiment Dieu. De ce nombre sont les manichéens. Un Dieu fait homme, un Dieu pauvre, humilié, souffrant et mourant pour expier le péché de l'homme : c'est ce qui révolte leur orgueil. Ils aimeront mieux inventer un dieu méchant, pour l'accuser et le charger de tous leurs crimes, et se donner à eux-mêmes pleine carrière de faire tout ce qui leur plairait.

'Timothée, fils de Conon. Bossuet. Sermon sur la vertu de la croix de JésusChrist, t. 14, édit. Lebel.

3

Quant aux excès publics de ces furieux, il était juste que l'autorité publique les réprimât par la puissance du glaive; quant à leur ignorance, il était juste, il était nécessaire que l'Eglise y remédiât par des instructions plus fréquentes et mieux faites. Mais quant à l'orgueil, qui était le principe de leur séduction, il fallait un remède spécial. Jésus, qui est avec son Eglise tous les jours jusqu'à la consommation des siècles et qui lui a donné l'Esprit-Saint pour être avec elle éternellement, lui suscita ce remède dans un homme qui mit ses richesses dans la pauvreté, ses délices dans les souffrances et sa gloire dans la bassesse.

C'est là un mystère que beaucoup d'hommes ne comprennent pas, non plus que beaucoup d'historiens. Dans l'Eglise de Dieu, ils ne voient que des hommes: ils ne voient pas l'Esprit divin qui anime ce grand corps, qui y convertit les esprits et les cœurs, qui y forme des saints, qui, quand tout paraît humainement désespéré, fait sentir son action divine par des voies inattendues. C'est comme le souffle du printemps, qui, sans bruit et sans effort, ranime la nature entière. Des hommes qui ne se doutent pas de cette vie toujours ancienne et toujours nouvelle de l'Eglise, s'imaginent que l'hiver, dont ils ressentent le froid, y sera éternel. En conséquence ils prédiront que l'Eglise sera tout-à-fait morte, telle année, tel jour. Ce qui n'est pas nouveau, ni même bien hardi. Dioclétien et Néron ont fait bien plus : ils ont constaté par des épitaphes officielles et publiques, que le christianisme était non-seulement mort, mais enterré. Cependant ce mort, décédé et enterré si officiellement, survit depuis dix-huit siècles à tous ses enterreurs.

Ce mystère de la vie divinement impérissable dans l'Eglise, le protestant Hurter paraît n'en avoir aucune idée. Dans l'histoire, d'ailleurs si remarquable d'Innocent III, il ne dit pas un mot du

saint illustre, que Dieu suscitait alors pour renouveler avec un

autre, la face de la terre. Homme de bien, mais seulement homme, Hurter semble ne voir dans l'Eglise qu'une institution humaine. De là un sentiment de désespoir qui étonne, même dans un ministre protestant. A la vue des efforts impies que font les manichéens anciens et modernes pour détruire toute autorité civile et religieuse, Hurter prévoit avec anxiété l'extinction possible du christianisme. Homme de peu de foi, pourquoi avez-vous douté de Dieu et de sa parole? Que le protestantisme périsse, il est fait pour cela; mais c'est une preuve de plus qu'il n'est pas cette Eglise divine qui a vécu et qui vivra tous les siècles.

Voilà ce que nous écrivions au commencement de 1843. Hurter était encore protestant. Devenu catholique en 1844, il a maintenant

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