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compétentes. Ils célébreront au moins une fois par an le synode, pour corriger les excès de leurs subordonnés, chanoines, clercs et religieux, sans haine, sans acception, sans crainte pour personne 1.

Au mois d'août 1215, le même cardinal de Courçon, dans un concile provincial, fit et publia, par ordre du Pape, un règlement pour réformer les écoles de Paris. Voici pour l'enseignement. Personne n'enseignera les arts, qu'il n'ait atteint l'âge de vingt-un ans, et qu'il n'ait étudié les arts au moins pendant six ans. Et quand il voudra enseigner, il sera examiné selon la forme contenue dans l'écrit du seigneur Pierre, évêque de Paris, touchant la paix entre le chancelier et les écoliers. On expliquera ordinairement dans les écoles, les livres d'Aristote de la dialectique, tant ancienne que nouvelle. On lira aussi les deux Prisciens, au moins l'un des deux. Les jours de fête on n'expliquera que des philosophes, des rhétoriciens, les mathématiques et la grammaire ; et, si l'on veut, la morale et le quatrième des topiques. On ne lira point les livres d'Aristote sur la métaphysique et la physique, ni leur abrégé, ni rien de la doctrine de David de Dinant, de l'hérétique Amauri, ou de l'Espagnol Maurice. Quant aux théologiens, personne n'enseignera qu'à l'âge de trente-cinq ans, et après avoir étudié huit ans pour le moins. Personne ne sera reçu à Paris pour faire des leçons publiques, ou pour prêcher, qu'il ne soit éprouvé pour les mœurs et pour la science aucun ne sera tenu pour écolier, qu'il n'ait un maître certain.

Le surplus du règlement concerne les thèses publiques, le costume des maîtres, l'exercice de leur juridiction, ce qui doit se faire à leurs funérailles. Aux assemblées des maîtres et aux thèses des écoliers, il ne devait plus y avoir de repas; mais les présents qu'on avait coutume d'y faire, de vêtements et autres choses, on exhorte à les continuer, à les augmenter même, surtout envers les pauvres 2.

Après la bataille de Bouvines, en 1214, une trève de cinq ans ayant été conclue entre les rois de France et d'Angleterre, par la médiation du Saint-Siége, le prince Louis, fils aîné de PhilippeAuguste, accomplit, l'année suivante, le vœu qu'il avait fait dès l'an 1213, de marcher en Languedoc contre les manichéens. Le comte Simon de Montfort, après sa glorieuse victoire de Muret, lui avait écrit pour lui en faire part et pour le prier de venir prendre

'Mansi. Conc., t. 22, col. 839-844. - 2 Du Boulai. Hist. univ. Paris, t. 3, p. 81 et 82.

possession de Toulouse '. Mais Louis en fut empêché jusqu'en 1215, - par la guerre qui éclata entre l'Angleterre et la France.

Dans l'intervalle, la cause des catholiques continua à prospérer dans le Languedoc. Au commencement de l'année 1214, un nouveau légat, le cardinal Pierre de Bénévent, arriva en Provence. D'après les ordres du Pape, il se fit remettre le prince Jacques, fils da roi Pierre d'Aragon, que le comte de Montfort tenait encore en ôtage, et il le remit aux états d'Aragon, qui le proclamèrent roi à la place de son père, tué à la bataille de Muret.

Dans le moment même, c'était au mois d'avril, que le nouveau légat arriva dans l'Albigeois, y arriva aussi de France une recrue des croisés, conduite par l'évêque de Carcassonne. Ce prélat avait passé en France toute l'année précédente à prêcher la croisade contre les hérétiques; en quoi il avait été secondé par quelques autres, principalement par le docteur Jacques de Vitri. Le cardinal-légat Robert de Courçon, et Guillaume, archidiacre de Paris, amenèrent aussi des croisés. Car, encore que le cardinal fût principalement chargé de prêcher la croisade pour la Terre-Sainte, il se laissa persuader de la laisser aussi prêcher contre les manicléens, et prit lui-même la croix sur la poitrine : ce qui était la marque de cette croisade. Le rendez-vous général fut à Béziers, pour la quinzaine de Pâques. D'ailleurs Eudes III, duc de Bourgogne, excité par l'archevêque de Narbonne, vint au secours du comte de Montfort, accompagné des archevêques de Lyon et de Vienne.

Pendant le carême de cette année 1214, le comte Baudouin, frère du comte de Toulouse, mais qui tenait pour les catholiques, fut pris en trahison et conduit dans un château tenu par ses gens. Comme il ne voulait pas en faire rendre la tour, les routiers de son frère, qui le tenaient captif, le laissèrent deux jours sans manger, au bout desquels il fit venir un prêtre, lui fit sa confession et lui demanda la communion. Comme le prêtre apportait le Saint-Sacrement, il survint un routier, jurant et protestant que le comte Baudouin ne boirait ni ne mangerait jusqu'à ce qu'il rendît un autre routier qu'il tenait aux fers. Cruel! dit le comte, je ne demande pas de la nourriture corporelle, mais seulement le divin mystère pour le salut de mon âme. Et comme on continua de lui refuser, il dit: Qu'on me le montre, au moins! et il l'adora dévotement. On le mena ensuite à Montauban, où le comte de Toulouse, son frère, étant venu, on en tira Baudouin par son ordre, et on lui mit la corde au cou pour le pendre. Il demanda encore la confession et le

Scriptor. rer. Franc., t. 19, p. 154.

viatique, mais on lui refusa l'un et l'autre. I prit Dieu à témoin qu'il voulait mourir pour la défense de la religion; et aussitôt le comte de Foix, ainsi que son fils et un chevalier aragonais l'enlevèrent de terre, et, avec la corde qu'ils lui avaient mise au cou, ils le pendirent à un noyer. C'est ainsi que le comte de Toulouse, malgré tous ses serments et ses protestations de catholicisme, fit mourir son propre frère, parce qu'il était pour les catholiques.

Le nouveau légat, Pierre de Bénévent, après avoir eu une conférence avec Simon, comte de Montfort, vint à Narbonne. Et aussitôt vinrent à lui le comte de Comminges, le comte de Foix et plusieurs autres qui avaient été privés de leurs terres à cause de l'hérésie, et ils le prièrent de les leur rendre. Le légat les réconcilia tous à l'Eglise; mais il prit d'eux ses sûretés, non-seulement par le serment qu'ils firent d'obéir à l'Eglise et à son chef, mais en se faisant livrer des forteresses qui leur restaient. Quant au comte de Montfort, aidé des croisés de France, il prit plusieurs châteaux dans le pays de Cahors et d'Agen, entre autres Mauriac, où l'on trouva sept hérétiques de la secte des Vaudois. Comme ils demeurèrent opiniâtres, ils furent livrés aux flammes. Le comte de Montfort prit ensuite Chasseneuil, dans l'Agenois, ainsi que plusieurs châteaux d'hérétiques et de petits tyrans dans le Périgord, le Limousin, le Rouergue, et finit par rétablir la paix dans ces provinces 1.

Au commencement de l'année suivante 1215, et dans la quinzaine de Noël, le légat Pierre assembla un concile à Montpellier, où se trouvèrent les cinq archevêques de Narbonne, d'Auch, d'Embrun, d'Arles et d'Aix, avec vingt-huit évêques et plusieurs barons du pays. Le comte Simon de Montfort n'y était point, parce qu'il était trop odieux aux habitants de Montpellier, aussi bien que tous les Français, en sorte qu'ils ne lui permettaient point l'entrée de leur ville. Il demeura donc pendant le concile dans un château voisin appartenant à l'évêque de Maguelone, et il se rendait tous les jours à la maison des Templiers, hors des murailles de la ville, où les évêques venaient lui parler, quand il était besoin. Le légat fit l'ouverture du concile par un sermon, dans l'église de NotreDame; puis il fit venir les prélats à son logement, et leur dit : Je vous conjure, par le jugement de Dieu et par l'obéissance que vous devez à l'Eglise romaine, de me donner un conseil fidèle sur le choix de celui à qui doivent être données la ville de Toulouse et les autres

'Pierre de Vaulx-Cernai. Hist. des Albigeois. Scriptor. rer. Franc., t. 49, n. 77-80.

places conquises par les croisés. Les prélats délibérèrent long-temps, chacun avec les abbés de son diocèse et les clercs de sa confiance; et enfin ils s'accordèrent tous à choisir le comte de Montfort. Aussitôt ils prièrent instamment le légat de lui donner toutes les terres dont il s'agissait; mais, ayant eu recours à la commission du légat, on trouva qu'il ne pouvait le faire sans consulter le Pape. C'est pourquoi, d'un commun avis, on envoya à Rome Bernard, archevêque d'Embrun, avec des lettres du légat et des prélats, pour supplier le Pape de leur accorder pour seigneur le comte Simon de Montfort 1.

Le concile de Montpellier fit quarante-six canons, dont les premiers regardent le costume et la tonsure des évêques et clercs qui, par leur négligence à cet égard, s'attiraient le mépris des laïques. Les évêques doivent porter l'habit long, avec le rochet par-dessus, quand ils sortent à pied de chez eux, et même dans la maison, quand ils donnent audience à des étrangers. Défense aux clercs de porter des habits rouges ou verts. Les chanoines réguliers porteront toujours le surplis. Défense aux évêques d'avoir des oiseaux pour la chasse, ou de les porter sur le poing. Défense aux chapitres de recevoir des laïques pour chanoines ou confrères, ou de leur donner la prébende ou la distribution canonique du pain et du vin. On ne donnera point de cures à de jeunes garçons ou à des clercs qui n'ont que les ordres mineurs. Défense à tout religieux d'avoir rien en propre, même avec la permission des supérieurs, puisque ceuxci n'ont pas pouvoir de la donner. On ne donnera pas même à un religieux une certaine somme pour son vestiaire. Les restes de leurs portions seront donnés aux pauvres. Défense de faire profession en deux communautés, si ce n'est pour passer à une observance plus étroite. Les prieurés qui ne peuvent entretenir trois religieux seront réunis à d'autres. Les derniers canons de ce concile regardent principalement la paix, c'est-à-dire la sûreté publique, que l'on faisait jurer à tout le monde, sous peine d'en être exclus et excommunié 2.

Cette même année 1215, le prince Louis, fils du roi de France, se trouvant libre par la trève que son père avait faite avec le roi 'd'Angleterre, accomplit le vœu qu'il avait fait trois ans auparavant. Il vint, accompagné d'un grand nombre de seigneurs et des deux sévêques de Beauvais et de Carcassonne; car ce dernier, à la prière du comte de Montfort, était allé en France peu de temps aupara

1 Pierre de Vaulx-Cernai. Hist. des Albigeois. Scriptor. rer. Franc., t. 19, n. 81. Labbe, t. 11, p. 103-107. 2 Labbe, t. 11, p. 107 et seqq.

vant pour les affaires de la croisade. Le rendez-vous était à Lyon pour le jour de Pâques, qui, cette année, était le dix-neuvième d'avril. Le comte de Montfort vint au-devant du prince Louis, son seigneur, jusqu'à Vienne, et le légat Pierre de Bénévent, jusqu'à Valence. Suivant Pierre de Vaulx-Cernai, historien contemporain de la guerre des Albigeois, ce légat avait absous secrètement les Toulousains, les Narbonnais, ainsi que d'autres ennemis du comte de Montfort, et pris sous sa protection Toulouse, Narbonne et d'autres places des hérétiques en Albigeois. Or, il craignait que Louis, comme fils aîné du roi de France, seigneur souverain de tout le pays, ne voulût se saisir de ces places et les démolir : c'est pourquoi l'on croyait que l'arrivée de ce prince ne lui était point agréable. Car, disait-il, ce pays étant infecté d'hérésie, le roi de France a été souvent requis de l'en purger, ce qu'il n'a point fait; par conséquent, ce pays ayant été conquis par le Pape avec le secours des croisés, il ne me paraît pas que Louis doive rien entreprendre contre mes ordres, d'autant plus qu'il est croisé, et qu'il vient en qualité de pélerin. Louis, qui était un prince très-doux, répondit au légat qu'il se conformerait à sa volonté et à son conseil.

De Valence, le prince Louis vint à Saint-Gilles. Comme il y était avec le comte de Montfort, arrivèrent les députés du concile de Montpellier au Pape, apportant des lettres par lesquelles il donnait au comte de Montfort la garde de toutes les conquêtes faites par les croisés, jusqu'à ce qu'il en fût plus amplement ordonné par le concile général, qui devait se tenir la même année au mois de novembre. La lettre adressée au comte de Montfort était du second d'avril, et contenait de grands éloges de ce seigneur. Le Pape ly exhortait à continuer dans le service du Christ, et témoignait avoir ordonné à tous les barons et tous les consuls du pays, de lui obéir en tout ce qui regardait la paix et la foi. En exécution de cet ordre du souverain Pontife, le légat Pierre, étant quelque temps après à Carcassonne avec le prince Louis, assembla dans la maison épiscopale les évêques présents et la noblesse de la suite du prince, et donna au comte de Montfort, qui était aussi présent, la garde du pays jusqu'au concile général. Ensuite ils vinrent à Toulouse, et en firent abattre les murailles; de là le prince Louis et les pélerins, ayant accompli les quarante jours de leur vou, s'en retournèrent en France. Le légat Pierre de Bénévent, ayant aussi exécuté sa commission, retourna à Rome 1.

Pendant l'automne 1214, après avoir fait sa trève de cinq ans avec

'Pierre de Vaulx-Cernai, n. 82.

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