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toujours des misérables que le prêtre alloit ainsi visiter sur la paille, combien ces oraisons chrétiennes paroissent encore plus divines!

Tout le monde connoît les belles prières des Agonisans. On y lit d'abord l'oraison PROFICISCERE: Sortez de ce monde, ame chrétienne. Ensuite cet endroit de la Passion: En ce temps-là, Jésus étant sorti, s'en alla à la montagne des Oliviers, etc. puis le pseaume Miserere met; puis cette lecture de l'Apocalypse: En ces jours-là j'ai vu des morts, grands et petits, qui comparurent devant le trône; etc. enfin, la fameuse vision d'Ezéchiel: la main du Seigneur fut sur moi, et m'ayant mené dehors par l'esprit du Seigneur, elle me laissa au milieu d'une campagne qui étoit toute couverte d'ossemens. Alors le Seigneur me dit: prophétise à l'esprit; fils de l'homme, dites à l'esprit : Venez des Quatre-Vents, et soufflez sur ces morts, afin qu'ils revivent, etc.

Pour les incendies, pour les pestes, pour les guerres, pour toutes sortes de calamités, il y avoit des prières marquées. Nous nous souviendrons toute notre vie d'avoir entendu lire, pendant un naufrage où nous nous trouvions nous-mêmes engagés, le pseaume Confitemini Domino : « Confessez le Seigneur, parce qu'il >> est bon.

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« Il commande, et le souffle de la tempête

» s'est élevé, et les vagues se sont amoncelées... » Alors les mariniers crient vers le Seigneur, » dans leur détresse, et il les tire de danger. » Il arrête la tourmente, et la change en » calme, et les flots de la mer s'appaisent.

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Vers le temps de Pâque, Jérémie, avec toutes ses plaintes, sortoit de la poudre de Sion pour pleurer le Fils de l'homme. L'église empruntoit ce qu'il y a de plus beau et de plus mélancolique dans les Pères, et dans l'Ancien et le Nouveau Testament afin d'en composer les chants de cette Semaine, consacrée au plus grand des mystères qui est aussi la plus grande des douleurs. Il n'y avoit pas jusqu'aux litanies qui n'eussent des cris ou des élans admirables, témoin ces versets des litanies de la Providence:

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Providence de Dieu, consolation de l'ame pélerine. » Providence de Dieu, espérance du pécheur délaissé. » Providence de Dieu, calme dans les tempêtes. » Providence de Dieu, repos du cœur etc.

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Enfin, nos vieux cantiques gaulois, les noëls même de nos bons aïeux, avoient aussi leur mérite; on y sentoit la naïveté, et comme la fraîcheur de la Foi. Pourquoi dans nos missions de campagne, étoit-on tout attendri, lorsque des laboureurs venoient à chanter au salut:

Adorons tous, ô mystère ineffable !
Un Dieu caché, etc.

C'est qu'il y avoit dans ces voix champêtres un accent irrésistible de vérité et de conviction. Les noëls qui peignoient les scènes rustiques, avoient un tour plein de grâce dans la bouche de la paysanne : quand le bruit du fuseau accompagnoit ses chants, que ses enfans, appuyés sur ses genoux, écoutoient, avec une grande attention, l'histoire de l'Enfant-Jésus et de sa crêche; on auroit en vain cherché des airs plus doux, et une religion plus convenable à une mère.

CHAPITRE I V.

DES SOLEMNITÉS DE L'EGLISE.

Du Dimanche.

Nous avons déja fait remarquer (1) la beauté de ce septième jour, qui correspond à celui du repos du Créateur, cette division du temps fut connue de la plus haute antiquité. Il importe peu de savoir à présent si c'étoit une obscure tradition de la création, transmise au genre humain par les enfans de Noé, ou si les pasteurs retrouvèrent cette division par l'observation des planètes; mais il est du moins certain qu'elle est la plus parfaite qu'aucun législateur ait employée. Indépendamment de ses justes relations avec

(1) Première partie, liv. 2, chap. I.

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la force des hommes et des animaux, elle a ces grandes harmonies géométriques que les anciens cherchoient toujours à établir entre les loix particulières et les loix générales de l'univers elle donne le six pour le travail, et le six, par deux simples multiplications, engendre les trois cent soixante jours de l'année antique, et les trois cent soixante degrés de la circon. férence. On pouvoit donc trouver magnificence et philosophie dans cette loi religieuse, qui divisoit le cercle de nos labeurs, ainsi que le cercle que les astres parcourent dans leur révolution; comme si l'homme n'avoit d'autre terme de ses fatigues que la consommation des siècles, ni de moindres espaces à remplir de ses douleurs, que tous les temps.

Le calcul décimal peut convenir à un peuple mercantile; mais il n'est ni beau, ni commode dans les autres rapports de la vie, et dans les grandes équations célestes. La nature l'emploie rarement, il gêne l'année et le cours du soleil, et la loi de la pesanteur, ou de la gravitation, (peut-être l'unique loi de l'univers), s'accomplit par le quarré, et non pas par le quintuple des distances. Il ne s'accorde pas davantage avec la naissance, la croissance et le développement des espèces : presque toutes les femelles portent par le trois, le neuf, le douze, qui appartiennent au calcul seximal (1). (1) Vid. Buffon.

On sait maintenant, par expérience, que le cinq est un jour trop près, et le dix un jour trop loin pour le repos. La terreur qui a pu tout en France, n'a jamais pu forcer le paysan à remplir la décade, parce qu'il y a impuissance absolue dans les forces humaines, et même, comme on l'a on l'a remarqué, dans les forces des animaux. Le bœuf ne peut labourer neuf jours de suite; au bout du sixième, ses mugissemens semblent demander les heures marquées par le Créateur, pour le repos général de la nature (1).

Le dimanche réunissoit tous les avantages, car il étoit à-la-fois un jour de plaisir et de religion. Il faut, sans doute, que l'homme se délasse de ses travaux; mais comme il ne peut être atteint dans ses loisirs par la loi civile, le soustraire en ce moment même à la loi religieuse, c'est le délivrer de tout frein c'est le replonger dans l'état de nature, et lâcher tout-à-coup une espèce de sauvage au milieu de la société. C'étoit pour prévenir ce

(1) Les paysans disoient : « Nos boeufs connoissent le dimanche, et ne veulent pas travailler ce jour-là.»

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