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pár eux dans les bois, avoit été traîtreusement mis à mort.

Dans ces hôtelleries de la religion, on croyoit faire beaucoup d'honneur à un prince, quand on lui proposoit de rendre quelques soins aux pauvres qui s'y trouvoient par hasard avec lui. Le cardinal de Bourbon, revenant de conduire l'infortunée Elisabeth en Espagne, s'arrêta à l'hôpital de Roncevaux, dans les Pyrénées. Il servit à table trois cents pélerins, et donna, à chacun d'eux, trois réaux, pour continuer leur voyage. Le Poussin est un des derniers voyageurs qui ait profité de cette coutume chrétienne. Il alloit à Rome de monastère en monastère, peignant des tableaux d'autel pour prix de l'hospitalité qu'il recevoit renouvellant ainsi chez les peintres l'aventure d'Homère.

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CHAPITRE I X.

Arts et Métiers, Commerce.

RIEN n'est plus contraire à la vérité historique, que de se représenter les premiers moines comme des hommes oisifs, qui vivoient dans l'abondance aux dépens des superstitions humaines. D'abord cette abondance n'étoit rien moins que réelle. L'ordre, par ses travaux, pouvoit être devenu riche, mais il est certain que le

religieux vivoit très-durement. Toutes ces délicatesses du cloître, si exagérées, se réduisoient, même de nos jours, à une étroite cellule, des pratiques désagréables, et une table fort simple, pour ne rien dire de plus. Ensuite il est trèsfaux que les moines ne fussent que de pieux fainéans quand leurs nombreux hospices, leurs colléges, leurs bibliothèques, leurs cultures, et tous les autres services dont nous avons parlé, n'auroient pas suffi pour occuper leurs loisirs, ils avoient encore trouvé bien d'autres manières d'être utiles. Ils se consacroient aux arts mécaniques, et étendoient le commerce au-dehors et au-dedans de l'Europe.

La congrégation du tiers-ordre de SaintFrançois, appelée des Bons- Fieux, faisoit des draps et des galons, en même temps qu'elle montroit à lire aux enfans des pauvres, et qu'elle prenoit soin des malades.La compagnie des Pauvres Frères cordonniers et tailleurs étoit instituée dans le même esprit. Le couvent des Hiéronymites, en Espagne, avoit dans son sein plusieurs manufactures. La plupart des premiers religieux étoient maçons, aussi bien que labou reurs. Les Bénédictins bâtissoient leurs maisons de leurs propres mains, comme on le voit par l'histoire des couvens du Mont - Cassin, de ceux de Fontevraud, et de plusieurs autres.. Quant au commerce intérieur, beaucoup

de foires et de marchés appartenoient aux abbayes, et avoient été établies par elles. La célèbre foire du Landyt, à Saint-Denys, devoit sa naissance à l'Université de Paris. Les religieuses filoient une grande partie des toiles de l'Europe, les bierres de Flandres et la plupart des vins fins de l'Archipel, de la Hongrie, de l'Italie et de l'Espagne, étoient faits par les congrégations religieuses. L'exportation et l'importation des grains, soit pour l'étranger, soit pour les armées, dépendoient encore en partie des grands propriétaires ecclésiastiques. Les églises faisoient valoir le parchemin, la cire, le lin, la soie, les marbres, l'orfévrerie, les manufactures en laine, les tapisseries et les matières premières d'or et d'argent. Elles seules, dans les tems barbares, procuroient quelque travail aux artistes, qu'elles faisoient venir exprès de l'Italie et jusques du fond de la Grèce. Les religieux eux-mêmes cultivoient les beaux-arts, et étoient les peintres, les sculpteurs et les architectes de l'âge gothique. Si leurs ouvrages nous paroissent grossiers aujourd'hui, n'oublions pas qu'ils forment l'anneau où les siècles antiques viennent se rattacher aux siècles modernes; que sans eux la chaîne de la tradition des lettres et des arts, eût été totalement interrompue : il ne faut pas que la délicatesse de notre goût nous mène à l'ingratitude.

A l'exception de cette petite partie du Nord,

comprise dans la ligue des villes anséatiques, le commerce extérieur se faisoit tout autrefois par la Méditerranée. Les Grecs et les Arabes nous apportoient les marchandises de l'Orient, qu'ils chargeoient à Alexandrie. Mais les croi sades firent passer entre les mains des Francs cette source de richesses. « Les conquêtes » des croisés, dit l'abbé Fleury, leur assu» rent la liberté du commerce pour les mar>chandises de la Grèce, de Syrie et d'Égypte, » et par conséquent pour celles des Indes, » qui ne venoient point encore en Europe par » d'autres routes (1).

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Le docteur Robertson, dans son excellent ouvrage sur le commerce des anciens et des modernes aux Indes orientales, confirme , par les détails les plus curieux, ce qu'avance ici l'abbé Fleury. Gênes, Venise, Pise, Florence et Marseille durent leurs richesses et leurs puissances à ces entreprises d'un zèle exagéré, que le véritable esprit du christianisme a condamnées depuis long-temps (2). Mais enfin on ne peut se dissimuler que la marine et le commerce modernes soient nés de ces fameuses expéditions. Ce qu'il y eut de bon en elles, appartient à la religion, le reste aux passions humaines. D'ailleurs, si les croisés ont eu tort

(1) Hist. eccl. tom. XVIII, sixième disc. p. 20. (2) Vid. Fleury, loc. cit.

de vouloir arracher l'Égypte et la Syrie aux Sarrazins, ne gémissons donc plus quand nous voyons ces belles contrées en proie à ces Turcs, qui semblent arrêter la peste et la barbarie sur la patrie des Phidias et des Euripide. Quel mal y auroit-il si l'Égypte étoit une colonie de la France, et si les descendans des chevaliers françois régnoient à Constantinople, à Athènes, à Damas, à Tripoli, à Carthage, à Tyr, à Jérusalem ?

Au reste, quand le christianisme a marché seul aux expéditions lointaines, on a pu juger que les désordres des croisades n'étoient pas venus de lui, mais de l'emportement des hommes. Nos missionnaires nous ont ouvert des sources de commerce, pour lesquelles ils n'ont versé de sang que le leur, dont ils ont été prodigues. Nous renvoyons le lecteur à ce que nous avons dit sur ce sujet au livre des Missions.

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