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par des théologiens fort recommandables, n'en est pas à nos yeux plus solide.

Les théologiens de l'école absolutiste, comme nous le savons déjà par les paroles citées du cardinal de la Luzerne, enseignent donc que toute la juridiction externe dans l'épiscopat découle uniquement et exclusivement, par le droit divin, du Siége apostolique. Ces théologiens distinguent avec raison trois sortes de puissance spirituelle dans le Souverain Pontife et les autres évêques. La première est celle de l'ordre, c'est-à-dire celle qui a pour objet la confection et l'administration des divins sacrements. La seconde est celle de la juridiction interne, qui se rapporte au gouvernement du peuple chrétien dans le for intérieur de la conscience. La troisième enfin, qui consiste dans ce même gouvernement du peuple fidèle au for extérieur. Ce gouvernement extérieur comprend tout l'exercice extérieur de l'autorité spirituelle l'enseignement, le pouvoir législatif, administratif, judiciaire. Bellarmin affirme que, dans la controverse entre les théologiens catholiques, il ne peut être question de la première espèce de puissance, qui, de l'aveu universel, vient immédiatement de Dieu, et ne peut venir que de lui. La plupart des théologiens pensent aussi que la seconde espèce de puissance, qui, au fond, n'est que l'exercice de la première dans le for intérieur, vient aussi immédiatement de Dieu. Mais ils ajoutent, et avec vérité, que l'exercice de cette juridiction interne est et doit toujours être subordonné à la juridiction

externe. Ainsi le prêtre qui a reçu immédiatement de Dieu, dans son ordination, le pouvoir divin de remettre les péchés et de diriger les âmes dans le tribunal de la pénitence, ne peut exercer ce pouvoir qu'autant qu'il a reçu la mission du supérieur ecclésiastique.

Toute la discussion se concentre donc dans la

troisième espèce de puissance spirituelle, la juridiction externe qui embrasse les pouvoirs déjà mentionnés. D'après l'école absolutiste, la collation de ces pouvoirs appartient, de droit divin, exclusivement au Siége apostolique'. Il est vrai que cette école ne nie pas et ne peut pas nier que l'institution des évêques n'ait été attribuée, dès l'origine de l'Église et pendant plus de mille ans, aux conciles provinciaux, aux métropolitains, aux patriarches. Mais cette discipline, qui a régné pendant les siècles les plus glorieux de l'Église, n'existait, selon cette école, que par une concession gracieuse de la Papauté. La légitimité de cette discipline reposait uniquement sur le consentement exprès ou tacite des Souverains Pontifes. Et quand, par la force et la nécessité des circonstances, l'ancienne discipline a dû se transformer; quand les conciles, les métropolitains et certains patriarches ont perdu les droits qu'ils exerçaient depuis tant de siècles, l'école absolutiste n'a voulu voir, dans ces mémorables révolutions, que la réintégration des droits exclusifs du Saint-Siége. Il n'a

1 Voir BELLARMIN, De Romano Pontifice, lib. IV, cap. xxII.

11. Notion

précise

du système.

fait que reprendre, dit-elle, ce qu'il avait donné, ce qui lui appartenait exclusivement.

Les conséquences de cette manière d'envisager l'origine, la nature de l'épiscopat et les transformations disciplinaires qui se sont accomplies dans l'Église, sont d'une incomparable gravité. Source unique de la juridiction des évêques et de leur pouvoir de gouvernement, soit en dehors des conciles, soit dans les conciles eux-mêmes, le Pape, pour l'école extrême, devient le maître absolu de la juridiction épiscopale. Seul législateur véritable, il reste toujours supérieur aux lois disciplinaires qu'il porte; et il peut, sans être tenu par aucune prescription légale, et en ne consultant que sa conscience, ce qui revient quelquefois à n'agir que selon son gré, donner ou refuser l'institution canonique; étendre ou limiter l'autorité épiscopale; modifier les circonscriptions diocésaines; créer de nouveaux évêchés; transférer, juger, suspendre, déposer les évêques même sans cause. En un mot, il peut tout sur l'épiscopat, sinon licitement, au moins validement, excepté de décréter son abolition complète.

Toutes ces conséquences sont acceptées et prouvées, à leur manière, par des théologiens extrêmes. Nous allons examiner le principe fondamental sur lequel elles reposent1.

En entrant dans cette grave discussion, nous nous sentons pressé de déclarer de nouveau que, par la grâce de Dieu, nous n'avons pas le moindre dessein

1 On peut voir toutes ces theses dans le Traité De episcopo de M. l'abbé BouIX. Paris, 1859.

de contester ou d'affaiblir les divines prérogatives du Siége apostolique, et les droits certains qu'il possède sur l'épiscopat. Nous regardons ces priviléges comme des fruits précieux des mystères de Jésus-Christ; et, avec l'aide de Dieu, nous aurions le courage de les cimenter par notre sang, si ce témoignage était encore nécessaire. Mais une étude attentive de la divine constitution de l'Église, et des monuments les plus authentiques de son histoire, ne nous permet pas de souscrire à toutes les assertions de l'école absolutiste; et il en est que nous regardons comme entièrement fausses et attentatoires à la sainte majesté de l'Église catholique.

On ne doit pas oublier que la question que nous abordons a été agitée avec une extrême ardeur au concile de Trente. Les théories absolutistes s'y produisirent avec éclat ; mais elles furent vigoureusement combattues par les évèques espagnols et par les évêques français. Le concile, dans sa sagesse, ne crut pas devoir porter aucune décision sur une question si délicate, si grosse de conséquences, et si disputée. Elle reste donc toujours libre parmi les catholiques, et doit être traitée scientifiquement.

La célèbre question se posait à Trente dans ces termes : Les évêques reçoivent-ils leur juridiction immédiatement de Dieu, ou seulement par l'intermédiaire du Pape? La juridiction des évêques est-elle immédiatement de droit divin?

1 Voir le discours de Laynes, Histoire du concile de Trente, par PALLAVICIN, liv. xvm, ch. xv; voir aussi les livres XVIII, XIX, XXI.

IV. Liberté de la

discussion.

V. Vrai point de la

question.

Cette question se trouve intimement liée à celle de l'institution même des évêques. Toutefois, ces deux questions sont liées sans être identiques; car on conçoit fort bien que l'institution des évêques pût appartenir exclusivement au Pape, sans que, pour cela, la question de la nature et de l'origine de la juridiction épiscopale se trouvât résolue.

L'institution des évêques par le Pape pourrait n'être que la condition et non pas la source de la juridiction épiscopale. Cette juridiction serait conférée par Dieu à la condition de l'institution pontificale; de même que la juridiction suprême du Pape ne lui est donnée qu'à la condition de son élection par les cardinaux. Quoique les cardinaux élisent le Pape, personne n'a jamais imaginé que la puissance pontificale émanât des cardinaux. Sans assimiler entièrement l'élection des évêques par le Pape à celle du Pape par les cardinaux, il est cependant évident qu'il ne répugne point en soi que l'institution des évêques par le Pape, comme l'élection du Pape lui-même par le Sacré Collége, ne soit que la condition et non la source de la juridiction épiscopale.

Mais s'il était historiquement démontré que l'institution des évêques n'a pas appartenu exclusivement au Siége apostolique, et qu'il y a eu, dans l'Église, un pouvoir d'institution des évêques, non pas indépendant, à Dieu ne plaise! de celui du Souverain Pontife, mais distinct du sien; s'il était prouvé qu'il y a eu, dans l'Église, pendant de longs siècles, de nombreux évêques parfaitement légitimes, qui cepen

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