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battants de la porte étaient de bois sculpté, et couverts de trente figures en relief. Au-dessus du portail on voyait les figures en pierre de la Vierge et de deux anges. Les derniers degrés du grand escalier, l'espace compris entre les deux tours, au-devant du portail, et le portail lui-même, étaient recouverts d'un lambris peint, qui les défendait des injures de l'air.

Tout l'intervalle entre les deux tours, au-dessus du portail et du lambris peint, était rempli par une grande rose romane, de 30 pieds de diamètre, en pierre de grès finement taillée et sculptée. Elle se composait de 20 branches qui naissaient d'une autre rose plus petite, formant le centre de la première. L'encadrement de la rose et tous les ornements accessoires étaient romans et à plein cintre. Elle était surmontée de la figure d'un moine bénédictin, en aube, l'encensoir à la main.

Par le portail on pénétrait dans une espèce d'immense vestibule. Ce n'était pas pourtant cet atrium fort commun dans les grandes églises primitives, et que l'on voit encore à SaintAmbroise de Milan, à la cathérale de Salerne ; cet atrium antique, formé sur un plan quadrilatère, laissait libre et ouvert au ciel l'espace intermédiaire. Le vestibule de l'église de Cluny, entièrement fermé comme un temple ordinaire, était bien plutôt une sorte de première église qu'un véritable vestibule. C'était déjà en effet un vaste temple. Il avait 110 pieds de longueur, 81 pieds de largeur, et se divisait en une nef principale et deux collatéraux,

L'intérieur de ce vestibule, ou, pour mieux parler, de cet avant-nef, était orné de trois étages d'architecture. Le premier se composait d'un grand arc ogive supporté par des pilastres cannelés qui décoraient les quatre côtés de 8 piliers énormes. Du chapiteau des pilastres montait un faisceau de 4 colonnes légères qui s'arrêtaient à une large frise, un peu plus haut que la pointe de l'ogive. De cette frise, jusqu'à la naissance de la voûte, on voyait s'élancer une autre colonne, saillante des deux tiers et flanquée elle-même de deux colonnettes. A peu près à moitié de la hauteur de ces trois dernières colonnes, et passant sur elle par un ressaut, une corniche soutenue par des

consoles, courait le long de la grande nef. Au-dessus de cette corniche s'ouvrait une seule fenêtre par chaque travée, et audessous une galerie composée de quatre arcades cintrées, enfermées deux à deux par un plus grand cintre. Les corniches, les couronnements, les frises de ces divers étages, les chapiteaux des colonnes et des pilastres étaient décorés de fleurs, d'oiseaux, de feuillages et de figures capricieuses d'animaux monstrueux. La grand voûte, en bonnet carré, avait près de 100 pieds d'élévation.

Il n'est pas facile de déterminer quel a pu être l'usage de cette première église, éclairée par 22 vitraux, presque égale en étendue à Notre-Dame de Dijon, et telle que bien souvent les étrangers qui venaient visiter Cluny croyaient, en entrant dans l'avant-nef, avoir vu toute l'église du monastère. L'usage de ce vestibule est encore plus hypothétique lorsqu'on trouve qu'il n'a point été construit originairement, et en même temps que la grande église entreprise par saint Hugues, mais que cette partie antérieure du gigantesque monument ne fut élevée qu'en 1220, sous le vingtième abbé de Cluny, Roland Ier. L'a-t-on bâti parce que la grande église ne suffisait point encore aux cérémonies du monastère dans les grandes solennités? a-t-on voulu, au contraire, le destiner à contenir les serviteurs de l'abbaye, la suite des grands personnages qui la visitaient, la multitude des campagnes ou des villes environnantes, afin de réserver la basilique aux moines et à des fidèles séparés? Je ne sais. On peut aussi conjecturer que, malgré l'immense étendue de la basilique, il a fort bien pu arriver qu'à certaines époques, par exemple, dans le temps des chapitres généraux, de la visite des papes ou des rois, l'église ne suffit plus aux empressements de la foule, et qu'on eût ainsi voulu donner un nouvel espace au zèle ou à la curiosité des catholiques, qui surpassaient encore les colossales dimensions de l'édifice.

Mais voici la supposition qui me semblerait la plus naturelle. Dans les temps anciens, il arrivait quelquefois, surtout à l'époque du carême, qu'il n'était pas permis aux pénitents de pénétrer trop avant dans l'intérieur de l'église, et de s'appro

cher du sanctuaire. Dans une pareille circonstance, l'usage de l'église de Rouen était de rapprocher la chaire du prédicateur le plus possible du portail, pour donner aux fidèles repentis la facilité d'entendre la parole de Dieu, sans entrer trop profondément dans le temple. Quelquefois même on construisait des autels dans le vestibule, pour que les pénitents pussent assister au saint sacrifice. Un autel de cette espèce se voyait autrefois dans la cathédrale de Noyon. Enfin, dans l'ancien pontifical de Châlons-sur-Saône, si voisin de Cluny, on lisait : In quibusdam ecclesiis sacerdos in aliquo altari foribus proximiori celebrat missam, jussu episcopi, pœnitentibus ante fores ecclesia constitutis. « Dans quelques églises, le prêtre, par ordre de l'évê» que, célèbre la messe sur un autel très-rapproché des portes >> du temple, pour les pénitents placés devant le portail de » l'église.» La destination du vestibule de Cluny ne seraitelle point indiquée dans ces paroles? Au dix-huitième siècle, on ne voyait plus, il est vrai, dans l'avant-nef de Cluny, d'autel et de chaire à prêcher; mais les temps étaient bien changés, cet autel et cette chaire temporaires avaient pu disparaître, parce qu'ils n'étaient plus nécessités par les nouveaux usages. Il n'était resté, à gauche de la porte d'entrée, qu'une table de pierre, de quatre pieds de long sur deux pieds et demi de large, conservant assez la forme d'un petit autel : son emploi paraissait ignoré. Seulement les mères et les nourrices avaient conservé la superstitieuse habitude d'y apporter leurs enfants, afin de les empêcher de pleurer. Elles nommaient cette table la table de saint Criard, et tous les efforts du monastère n'avaient pu déraciner cette crédulité populaire.

Au fond du vestibule se présentait le portail véritable et primitif de la basilique. Ce portail, devenu intérieur, avait 20 pieds de hauteur et 16 de largeur. Ses jambages étaient décorés de 8 colonnes, quatre de chaque côté, dont les intervalles étaient remplis par des ornements riches et variés : trois étaient d'un seul bloc. La première était taillée en réseau, la deuxième en vis, la troisième chargée de rosaces placées dans les cannelures, la quatrième nue et sans ornements. Les bat

tants de la porte avaient été recouverts de peintures. C'est audessus de cette porte qu'était placée cette énorme pierre, que saint Hugues avait pu seul soulever et placer mystérieusement pendant la nuit.

Cette fameuse pierre servait d'imposte à tout le portail, elle était d'un seul bloc de 3 pieds d'épaisseur. 23 figures y avaient été taillées en relief. Les ouvriers qui construisaient l'église avaient remarqué au milieu d'eux un homme merveilleux qui les surveillait sans cesse, travaillait avec eux et ne partageait jamais leur nourriture; ils ne doutaient pas que ce fut un ange qui présidait à l'édification de la maison de Dieu; mais d'autres croyaient y reconnaître saint Hugues lui-même, qui ne quittait les ouvriers qu'à l'heure des repas, ou bien pour les exercices du chœur.

Au-dessus de la pierre miraculeuse, et dans le tympan du portail, dominait une majestueuse figure assise, tenant un livre de la main gauche, et de la droite donnant sa bénédiction. A ses côtés étaient représentées les figures symboliques des quatre évangélistes, et quatre anges, portés sur des nuages, embrassant et comme supportant le médaillon ovale dans lequel le trône du Christ était enfermé. La première archivolte qui couronnait le bas-relief se composait d'une suite de petits cintres, sous chacun desquels étaient des anges en adoration, hors dans celui du milieu, qu'occupait le Père éternel. Deux autres archivoltes concentriques à la précédente présentaient, la première des feuillages, et la seconde des médaillons d'où sortaient des têtes toutes variées d'expression.

Plus haut régnait une suite d'arcades légères, supportées par des pilastres. Celle du milieu servait à éclairer une chapelle de saint Michel, placée derrière, et suspendue dans la grande nef comme les orgues de nos jours; les deux voisines présentaient des niches vides; le fond des huit autres était rempli de figures peintes d'abbés et de saints personnages. Sur la muraille, comprise entre cette galerie supérieure et les cintres du portail, on avait sculpté en bas-relief quatre statues d'apôtres, d'environ 5 pieds de grandeur.

En franchissant le portail intérieur, on était enfin dans le temple principal; on avait descendu quarante degrés. Mais les précautions des architectes avaient habilement écarté toute humidité par la distribution de longs canaux souterrains qui allaient se décharger, à l'orient, dans les beaux jardins de l'abbaye.

Au-dessus de la porte d'entrée, dans l'intérieur de la basilique, on ne remarquait pas, sans une vive curiosité, cette chapelle de saint Michel dont nous venons de parler, renfermée, en grande partie, dans l'intérieur de la muraille massive qui séparait l'avant-nef de la nef principale, mais débordant de six pieds, et se terminaut en cul-de-lampe, dans l'église. Par un double escalier en escargot caché dans la muraille, on montait à cette chapelle, dont l'autel regardait l'orient.

La grande basilique avait plus de 410 pieds de long. Bâtie en forme de croix archiepiscopale, elle avait ainsi deux croisées; la première longue de près de 200 pieds, large de 30; la deuxième longue de 110 pieds, et plus large que la première. La largeur moyenne de l'église était de 110 pieds. Elle se partageait en cinq nefs.

Trente-deux piliers massi's, de 7 pieds et demi de diamètre, portaient la voûte principale, plus élevée encore que celle du vestibule. Ces piliers étaient flanqués, de trois côtés, de colonnes engagées qui ne montaient pas plus haut que la naissance des voûtes des collatéraux ; et du côté de la grande nef, c'étaient des pilastres au lieu de colonnes. Cependant on remarquait une disposition différente dans les croisées, où les colonnes s'élançaient d'un jet jusqu'à la grande voûte, avec les piliers eux-mêmes qu'elles entouraient. Sur 28 autres piliers de la même dimension que ceux de la nef du milieu, s'appuyaient deux autres nefs de 55 pieds d'élévation, et les bascôtés hauts seulement de 37. L'édifice entier reposait donc sur 60 piliers sans parler du vestibule, et sur 68 en y comprenant le vestibule. Si l'on ajoute la longueur de cette avant-nef à celle de l'église, jusqu'à l'extrémité du chœur, on trouve 520 pieds,

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