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en déguiser l'absence, ne conviennent qu'à des femmes perdues; et il n'y en a point qui soient plus envieuses de se parer que celles qui l'ont été moins de conserver leur honneur. Nous en avons la preuve dans nos livres saints, ce code sacré que Dieu lui-même nous a donné pour notre instruction; nous y avons une peinture d'une cité débauchée, étudiée dans ses parures, et condamnée à périr avec ses ajustements, ou plutôt à cause de ses ajustements mêmes: L'un des sept anges qui avaient les sept coupes, s'approcha de mo et me dit: Je vous montrerai la condamnation de la grande prostituée, qui est assise sur la multitude des eaux, avec laquelle les rois de la terre se sont corrompus, et qui a enivré du vin de sa prostitution les habitants de la terre. Alors il me transporta en esprit dans le désert, et je vis une femme assise sur une béte de couleur écarlate, et cette femme était vétue de pourpre et d'écarlate, toute brillante d'or, de pierres précieuses et de perles, et elle tenait à la main un vase d'or plein des abominations et des impuretés de sa prostitution'.

Que nos chastes vierges éloignent donc de leurs personnes ces livrées de prostitution, ces manifestes d'impudicité, ces coupables parures dont la débauche seule fait ses enseignes et ses ornements. Sous l'inspiration de l'Esprit saint qui le pénètre, Isaïe crie aux filles de Sion, pour leur reprocher ces riches tissus d'or et d'argent dont se couvre la dépravation des mœurs, ces dangereuses superfluités qui éloignent de Dieu par le charme des fausses délices du siècle. Écoutez comme il parle : Parce que les filles de Sion se sont élevées, qu'elles ont marché la téte haute en

'Apoc. xvII, 1-4.

T. I.

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faisant des signes des yeux et des gestes des mains, qu'elles ont mesuré tous leurs pas et étudié toutes leurs démarches, le Seigneur rendra chauve la tête des filles de Sion, et il fera tomber leurs cheveux. En ce jourlà le Seigneur leur ótera ces parures dont elles sont si fières, leurs croissants d'or, leurs colliers, leurs filets de perle, leurs bracelets, leurs coiffes, leurs rubans de che veux, leurs jarretières, leurs chaines d'or, leurs boîtes de parfum, leurs pendants d'oreilles, leurs bagues, leurs pierreries qui leur pendent sur le front, leurs robes magnifiques, leurs écharpes, leurs beaux linges, leurs poinçons de diamants, leurs miroirs, leurs chemises de grand prix, leurs bandeaux et leurs habillements légers qu'elles portent en été, et leur parfum sera changé en puanteur, leur ceinture d'or en une corde, leurs cheveux frisés en une téte nue et sans cheveux1.

Tout cela criminel aux yeux de Dieu, tout cela aliment de corruption que repousse la virginité, et qui ne saurait s'allier avec le vrai culte que Dieu réclame. Pour vouloir s'élever on tombe; au lieu de se parer on se dégrade; on se revêt de pourpre et de soie, et l'on se dépouille de Jésus-Christ; on veut briller par l'or et les pierreries, et l'on perd les vrais ornements de l'âme voilà les filles de Sion. Eh! qui n'éprouve pas de l'horreur et de l'aversion pour ce qu'il sait avoir été funeste aux autres? Qui peut rechercher et employer à son usage ce qui a été dans d'autres mains un instrument de mort? Si quelqu'un mourait après avoir pris tel breuvage, vous ne douteriez pas qu'il ne

Isaï, m, 16-24.-Voyez, sur ce texte, les notes de Vitringa dans son savant Commentaire sur Isaïe, ou celles de Jean Fell dans son édition de saint Cyprien, pag. 71.

fût empoisonné; vous n'auriez garde d'en courir les chances après en avoir vu les conséquences. Quelle ignorance, quelle démence n'est-ce donc pas de désirer ce qui a toujours été nuisible, et de croire que vous ne périrez pas là où vous savez que les autres ont péri? Dieu n'a pas donné à la toison de la brebis la couleur de la pourpre, ni à l'herbe du pâturage dont elle se nourrit, la vertu de teindre sa laine de leurs propres nuances. Ces bandelettes somptueuses, ces bracelets opulents, ces lourdes guirlandes de diamants qui s'entrelacent sur votre tête ou alentour de votre cou, ce n'est pas là l'ouvrage du Créateur; ou, s'il les a faits, ce n'est pas pour vous servir à masquer le visage qu'il vous a donné, et à faire apercevoir ce que le démon revendique pour être de son invention. Est-ce le Seigneur qui vous a appris à déchirer les oreilles tendres et délicates de vos enfants pour y suspendre ces futiles bijoux qui se paient si cher? Qui les a faits, si ce n'est les anges rebelles, après que, précipités du ciel, ils vinrent sur la terre apporter avec eux leurs perfides arts a? Ce sont eux qui ont introduit l'usage de déguiser les yeux en teignant en noir les paupières, les joues en les couvrant de vermillon pour en dissimuler la pâleur, les cheveux pour leur imprimer une teinte mensongère; en un

a Quæ omnia peccatores et apostatæ angeli suis artibus prodiderunt, quando ad terrena contagia devoluti a cœlesti vigore recesserunt. Cette opinion était fondée sur le texte mal interprété du livre de la Genèse : « Les enfants de Dieu, voyant que les filles des hommes étaient belles, prirent pour leurs femmes celles d'entre toutes ces filles qui leur avaient plu. » (Gen., vi, 2.) Elle fut adoptée par Tertullien: Illi scilicet angeli qui ad filias hominum de cœlo ruerunt (de Cultu fœmin., lib. 1, c. 2); par Lactance, Eusèbe de Césarée et saint Augustin luimême (de Civ. Dei, lib. 15, c. 23).

mot dénaturer frauduleusement toute sa personne en substituant l'œuvre de l'artifice à l'œuvre de la nature.

Je crois devoir ici donner non pas seulement aux vierges et aux veuves, mais à toutes les personnes du sexe, sans distinction, cette instruction, qu'il ne leur est pas permis d'emprunter aucune de ces couleurs étrangères, propres à altérer sur leurs personnes l'ouvrage sorti des mains de Dieu. Je le dois, et comme chrétien, parce que notre foi m'en fait craindre les dangers, et comme pasteur, parce que l'intérêt du salut de mes frères m'en commande la déclaration. Le Seigneur a dit : Faisons l'homme à notre image et à notre ressemblance1; et l'on vient changer et intervertir ce que Dieu a fait? C'est s'attaquer à Dieu même que d'entreprendre de réformer son ouvrage. On oublie que tout ce qui vient dans le monde, c'est Dieu qui l'a fait; tout ce que l'on change, œuvre du démon. Dites-moi : Voici un portrait sorti des mains d'un peintre excellent, où l'art, rival de la nature, a parfaitement exprimé les traits de son original; son ouvrage achevé, si un autre s'avisait d'y porter le pinceau sous le prétexte de le corriger et de le perfectionner, ne serait-ce pas faire au premier un sensible affront contre lequel on aurait droit de témoigner son indignation? Et vous, vous croyez pouvoir retoucher à l'image de Dieu sans qu'il vous punisse d'une si étrange témérité ? Vous ne violez pas les lois de la pudeur, vous ne cherchez pas à tendre

1 Gen., I, 26.

a

a Cette prosopopée est citée par saint Augustin dans son livre de a Doctrine chrétienne, comme exemple de l'éloquence qu'il nomme sublime (liv. 4, ch. 21), ainsi que dans son sermon 247 de Tempore.

:

les piéges de la séduction; mais vous corrompez, vous violez ce que Dieu a fait c'en est assez pour être mise au rang des adultères. Ces prétendus ornements, cette parure étrange, accusent l'œuvre de Dieu et mentent à la vérité. C'est une maxime de l'Apôtre : Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une páte toute nouvelle, comme étant vous-mêmes des pains azimes; car Jésus-Christ est notre agneau pascal qui a été immolé pour nous; c'est pourquoi célébrons la páque, non avec le vieux levain ni avec le levain de la malice et de l'iniquité, mais avec les azimes de la sincérité et de la vérité'.

Y a-t-il de la franchise et de la vérité à gâter par un alliage étranger les traits de la nature, à transformer les choses et à les changer par de fausses apparences? Votre maître a dit: Vous ne pouvez faire qu'un seul de vos cheveux soit blanc ou noir2; et vous, comme si vous valicz mieux que Dieu, vous donnez un démenti à sa parole. Par un mépris sacrilége de ses saintes ordonnances, vous peignez vos cheveux, vous leur donnez une couleur de flammes".

Ne craignez-vous donc point qu'au jour de la résurrection votre Créateur ne vous reconnaisse plus, et qu'il ne vous rejette de sa présence, quand vous viendrez réclamer ses promesses et ses récompenses; qu'avec l'autorité sévère d'un juge irrité, il ne vous

'I Cor., V, 7-8.-2 Matth., v, 36.

a Comme un présage de ce qui doit leur arriver un jour. C'est-à-dire (ajoute le traducteur Lombert), vous les faites blonds, vous péchez par la tête, c'est-à-dire par la plus noble partie de votre corps; et au lieu qu'il est écrit de Notre-Seigneur que sa tête et ses cheveux étaient blancs comme de la laine ou de la neige (Apoc., 1, 14), vous haïssez dans vos cheveux une couleur qui les rend semblables à ceux de Notre Seigneur.

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