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celle du télescope, sont dues au moine Roger Ba con; d'autres attribuent la découverte de la poudre au moine allemand Berthold Schwartz; les bombes ont été inventées par Galen, évêque de Munster; le diacre Flavio de Gioia, Napolitain, a trouvé la boussole; le moine Despina, les lunet

semble et de perfection qu'on n'avoit point eues | L'invention de la poudre à canon, et peut-être jusqu'alors. Julien de Médicis, frère de Léon X, ayant été ploclamé citoyen romain, cette proclamation fut accompagnée de jeux publics; et, sur un vaste théâtre, construit exprès dans la place du Capitole, on représenta pendant deux jours une comédie de Plaute, dont la musique et l'appareil extraordinaire excitèrent une admirates; et Pacificus, archidiacre de Vérone, ou le tion générale. »

pape Silvestre II, l'horloge à roues. Que de savants, dont nous avons déjà nommé un grand nombre dans le cours de cet ouvrage, ont illustré les cloîtres, ou ajouté de la considération aux chaires éminentes de l'Église! Que d'écrivains célèbres! que d'hommes de lettres distingués! que d'illustres voyageurs! que de mathématiciens, de naturalistes, de chimistes, d'astrono

Les successeurs de Léon X ne laissèrent point s'éteindre cette noble ardeur pour les travaux du génie. Les évêques pacifiques de Rome rassembloient dans leurs villa les précieux débris des âges. Dans les palais des Borghèse et des Farnèse le voyageur admiroit les chefs-d'œuvre de Praxitèle et de Phidias; c'étoit des papes qui achetoient au poids de l'or les statues de l'Hercule et de l'A-mes, d'antiquaires ! que d'orateurs fameux! que pollon; c'étoit des papes qui, pour conserver les ruines trop insultées de l'antiquité, les couvroient du manteau de la religion. Qui n'admirera la pieuse industrie de ce pontife qui plaça des images chrétiennes sur les beaux débris des Thermes de Dioclétien? Le Panthéon n'existeroit plus s'il n'eût été consacré par le culte des apôtres, et la colonne Trajane ne seroit pas debout si la statue de saint Pierre ne l'eût couronnée.

d'hommes d'État renommés! Parler de Suger, de Ximenes, d'Alberoni, de Richelieu, de Mazarin, de Fleury, n'est-ce pas rappeler à la fois les plus grands ministres et les plus grandes choses de l'Europe moderne?

Au moment même où nous traçons ce rapidé tableau des bienfaits de l'Église, l'Italie en deuil rend un témoignage touchant d'amour et de reconnoissance à la dépouille mortelle de Pie VI1. La Cet esprit conservateur se faisoit remarquer capitale du monde chrétien attend le cercueil du dans tous les ordres de l'Église. Tandis que les pontife infortuné qui, par des travaux dignes dépouilles qui ornoient le Vatican surpassoient d'Auguste et de Marc-Aurèle, a desséché des males richesses des anciens temples, de pauvres re- rais infects, retrouvé le chemin des consuls roligieux protégeoient dans l'enceinte de leurs mo- mains, et réparé les aquéducs des premiers monastères les ruines des maisons de Tibur et de narques de Rome. Pour dernier trait de cet amour Tusculum, et promenoient l'étranger dans les des arts, si naturel aux chefs de l'Église, le sucjardins de Cicéron et d'Horace. Un chartreux cesseur de Pie VI, en même temps qu'il rend la vous montroit le laurier qui croit sur la tombe paix aux fidèles, trouve encore, dans sa noble de Virgile, et un pape couronnoit le Tasse au indigence, des moyens de remplacer par de nouCapitole. velles statues les chefs-d'œuvre que Rome, tuAinsi depuis quinze cents ans l'Église proté-trice des beaux-arts, a cédés à l'héritière d'Ageoit les sciences et les arts; son zèle ne s'étoit ralenti à aucune époque. Si dans le huitième siècle Après tout, les progrès des lettres étoient inle moine Alcuin enseigne la grammaire à Char- séparables des progrès de la religion, puisque lemagne, dans le dix-huitième un autre moine c'étoit dans la langue d'Homère et de Virgile que industrieux el patient' trouve un moyen de dé-les Pères expliquoient les principes de la foi: le

rouler les manuscrits d'Herculanum : si en 740

Grégoire de Tours décrit les antiquités des Gaules, en 1754 le chanoine Mozzochi explique les tables législatives d'Héraclée. La plupart des découvertes qui ont changé le système du monde civilisé ont été faites par des membres de l'Église.

1 BARTHÉLEMY, Voyage en Italie.

thènes.

sang des martyrs, qui fut la semence des chrétiens, fit croître aussi le laurier de l'orateur et du

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religion. Si Rome comprend bien sa position, jamais elle n'a eu devant elle de plus grandes espérances et de plus brillantes destinées. Nous disons des espérances, car nous comptons les tribulations au nombre des désirs de l'Église de Jésus-Christ. Le monde dégénéré appelle une seconde publication de l'Évangile, le christianisme se renouvelle, et sort victorieux du plus terrible des assauts que l'enfer lui ait encore livrés. Quisait si ce que nous avons pris pour la chute de l'Église n'est pas sa réédification! Elle périssoit dans la richesse et dans le repos; elle ne se souvenoit plus de la croix : la croix a reparu, elle sera sauvée

plit toutes les conditions de sa destinée, et semble | fermer, et qui demandent tous les baumes de la véritablement la Ville éternelle. Il viendra peut être un temps où l'on trouvera que c'étoit pourtant une grande idée, une magnifique institution que celle du trône pontifical. Le père spirituel, placé au milieu des peuples, unissoit ensemble les diverses parties de la chrétienté. Quel beau rôle que celui d'un pape, vraiment animé de l'esprit apostolique! Pasteur général du troupeau, il peut ou contenir les fidèles dans les devoirs, ou les défendre de l'oppression. Ses États, assez grands pour lui donner l'indépendance, trop petits pour qu'on ait rien à craindre de ses efforts, ne lui laissent que la puissance de l'opinion; puissance admirable quand elle n'embrasse dans son empire que des œuvres de paix, de bienfaisance et de charité.

Le mal passager que quelques mauvais papes ont fait a disparu avec eux ; mais nous ressentons encore tous les jours l'influence des biens immenses et inestimables que le monde entier doit à la cour de Rome. Cette cour s'est presque toujours montrée supérieure à son siècle. Elle avoit des idées de législation, de droit public; elle connoissoit les beaux-arts, les sciences; la politesse, lorsque tout étoit plongé dans les ténèbres des institutions gothiques : elle ne se réservoit pas exclusivement la lumière, elle la répandoit sur tous; elle faisoit tomber les barrières que les préjugés élèvent entre les nations: elle cherchoit à adoucir nos mœurs, à nous tirer de notre ignorance, à nous arracher à nos coutumes grossières ou féroces. Les papes parmi nos ancêtres furent des missionnaires des arts envoyés à des Barbares, des législateurs chez des Sauvages. « Le règne seul de Charlemagne, dit Voltaire, eut une lueur de politesse, qui fut probablement le fruit du voyage de Rome. »

C'est donc une chose assez généralement reconnue, que l'Europe doit au saint-siége sa civilisation, une partie de ses meilleures lois, et presque toutes ses sciences et ses arts. Les souverains pontifes vont maintenant chercher d'autres moyens d'être utiles aux hommes: une nouvelle carrière les attend, et nous avons des présages qu'ils la rempliront avec gloire. Rome est remontée à cette pauvreté évangélique qui faisoit tout son trésor dans les anciens jours. Par une conformité remarquable, il y a des gentils à convertir, des peuples à rappeler à l'unité, des haines à éteindre, des larmes à essuyer, des plaies à

CHAPITRE VII.

AGRICULTURE.

C'est au clergé séculier et régulier que nous devons encore le renouvellement de l'agriculture en Europe, comme nous lui devons la fondation des colléges et des hôpitaux. Défrichements des terres, ouverture des chemins, agrandissements des hameaux et des villes, établissements des messageries et des auberges, arts et métiers, manufactures, commerce intérieur et extérieur, lois civiles et politiques; tout enfin nous vient originairement de l'Église. Nos pères étoient des barbares à qui le christianisme étoit obligé d'enseigner jusqu'à l'art de se nourrir.

La plupart des concessions faites aux monastères dans les premiers siècles de l'Église, étoient des terres vagues, que les moines cultivoient de leurs propres mains. Des forêts sauvages, des marais impraticables, de vastes landes, furent la source de ces richesses que nous avons tant reprochées au clergé.

Tandis que les chanoines prémontrés labou roient les solitudes de la Pologne et une portion de la forêt de Coucy en France, les bénédictins fertilisoient nos bruyères. Molesme, Colan et Citeaux, qui se couvrent aujourd'hui de vignes et de moissons, étoient des lieux semés de ronces et d'épines, où les premiers religieux habitoient sous des huttes de feuillages, comme les Américains au milieu de leurs défrichements.

Saint Bernard et ses disciples fécondèrent les vallées stériles que leur abandonna Thibaut, comte de Champagne. Fontevrault fut une véritable colonie, établie par Robert d'Arbrissel, dans un pays désert, sur les confins de l'Anjou

et de la Bretagne. Des familles entières cherchè | fonde solitude: lorsque saint Benoît s'y retira, le rent un asile sous la direction de ces bénédictins : pays changea de face en peu de temps, et l'abbaye il s'y forma des monastères de veuves, de filles, nouvelle devint si opulente par ses travaux, qu'elle de laïques, d'infirmes et de vieux soldats. Tous fut en état de se défendre, en 1057, contre les devinrent cultivateurs, à l'exemple des pères, Normands, qui lui firent la guerre. qui abattoient eux-mêmes les arbres, guidoient la charrue, semoient les grains, et couronnoient cette partie de la France de ces belles moissons qu'elle n'avoit point encore portées.

La colonie fut bientôt obligée de verser au dehors une partie de ses habitants, et de céder a d'autres solitudes le superflu de ses mains laborieuses. Raoul de la Futaye, compagnon de Robert, s'établit dans la forêt du Nid-du-Merle, et Vital, autre bénédictin, dans les bois de Savigny. La forêt de l'Orges, dans le diocèse d'Angers; Chaufournois, aujourd'hui Chantenois, en Touraine; Bellay, dans la même province; la Puie, en Poitou; l'Encloître, dans la forêt de Gironde; Gaisne, à quelques lieues de Loudun; Luçon, dans les bois du même nom; la Lande, dans les landes de Garnache; la Madeleine, sur la Loire; Bourbon, en Limousin; Cadouin, en Périgord; enfin, Haute-Bruyère, près de Paris, furent autant de colonies de Fontevrault, et qui, pour la plupart, d'incultes qu'elles étoient, se changèrent en opulentes campagnes.

Nous fatiguerions le lecteur si nous entreprenions de nommer tous les sillons que la charrue des bénédictins a tracés dans les Gaules sauvages. Maurecourt, Longpré, Fontaine, le Charme', Colinance, Foici, Bellomer, Cousanie, Sauvement, les Épines, Eube, Vanassel, Pons, Charles, Vairville, et cent autres lieux dans la Bretagne, l'Anjou, le Berry, l'Auvergne, la Gascogne, le Languedoc, la Guyenne, attestent leurs immenses travaux. Saint Colomban fit fleurir le désert de Vauge; des filles bénédictines même, à l'exemple des pères de leur ordre, se consacrèrent à la culture; celles de Montreuil-les-Dames « s'occupoient, dit Hermann, à coudre, à filer et à défricher les épines de la forêt, à l'imitation de Laon et de tous les religieux de Clairvaux 1. »

En Espagne, les bénédictins déployèrent la mème activité. Ils achetèrent des terres en friche au bord du Tage, près de Tolède, et ils fondèrent le couvent de Venghalia, après avoir planté en vignes et en orangers tout le pays d'alentour. Le Mont-Cassin, en Italie, n'étoit qu'une pro

' De Miracul., lib. m, cap.xvII.

Saint Boniface, avec les religieux de son ordre, commença toutes les cultures dans les quatre évêchés de Bavière. Les bénédictins de Fulde défrichèrent, entre la Hesse, la Franconie et la Thuringe, un terrain du diamètre de huit mille pas géométriques, ce qui donnoit vingt-quatre mille pas, ou seize lieues de circonférence; ils comptèrent bientôt jusqu'à dix-huit mille métairies, tant en Bavière qu'en Souabe. Les moines de Saint-Benoît-Polironne, près de Mantoue, employèrent au labourage plus de trois mille bœufs.

Remarquons, en outre, que la règle, presque générale, qui interdisoit l'usage de la viande aux ordres monastiques vint sans doute, en premier lieu, d'un principe d'économie rurale. Les sociétés religieuses étant alors fort multipliées, tant d'hommes qui ne vivoient que de poissons, d'œufs; de lait et de légumes, durent favoriser singulièrement la propagation des races de bestiaux. Ainsi nos campagnes, aujourd'hui si florissantes, sont en partie redevables de leurs moissons et de leurs troupeaux au travail des moines et à leur frugalité.

De plus, l'exemple, qui est souvent peu de chose en morale, parce que les passions en détruisent les bons effets, exerce une grande puissance sur le côté matériel de la vie. Le spectacle de plusieurs milliers de religieux cultivant la terre, mina peu à peu ces préjugés barbares, qui attachoient le mépris à l'art qui nourrit les hommes. Le paysan apprit, dans les monastères, à retourner la glèbe et à fertiliser le sillon. Le baron commença à chercher dans son champ des trésors plus certains que ceux qu'il se procuroit par les armes. Les moines furent donc réellement les pères de l'agriculture, et comme laboureurs euxmêmes, et comme les premiers maîtres de nos laboureurs.

Ils n'avoient point perdu, de nos jours, ce génie utile. Les plus belles cultures, les paysans les plus riches, les mieux nourris et les moins vexés, les équipages champêtres les plus parfaits, les troupeaux les plus gras, les fermes les mieux entretenues se trouvoient dans les abbayes. Ce n'étoit pas là, ce nous semble, un sujet de reproches à faire au clergé.

CHAPITRE VIII.

généreux moines, prit bientôt le nom de Bon-pas,
qu'il porte encore aujourd'hui. C'est cet ordre qui
a bâti le pont du Rhône à Avignon. On sait que
les messageries et les postes, perfectionnées par
Louis XI, furent d'abord établies par l'université
de Paris.

seurs de ponts. Ils s'obligeoient, par leur institut, à prêter main-forte aux voyageurs, à réparer les VILLES ET VILLAGES, PONTS, GRANDS CHEMINS, ETC. chemins publics, à construire des ponts, et à loMais si le clergé a défriché l'Europe sauvage, ger des étrangers dans des hospices qu'ils élevèil a aussi multiplié nos hameaux, accru et embellirent au bord des rivières. Ils se fixèrent d'abord nos villes. Divers quartiers de Paris, tels que ceux sur la Durance, dans un endroit dangereux, apde Sainte-Geneviève et de Saint-Germain l'Auxer-pelé Maupas on Mauvais-pas, et qui, grâce à ces rois, se sont élevés en partie, aux frais des abbayes du même nom'. En général, partout où il se trouvoit un monastère, là se formoit un village: la Chaise-Dieu, Abbevile, et plusieurs autres lieux, portent encore dans leurs noms la marque de leur origine. La ville de Saint-Sauveur, au pied du Mont-Cassin, en Italie, et les bourgs environnants, sont l'ouvrage des religieux de Saint-Benoft. A Fulde, à Mayence, dans tous les cercles ecclésiastiques de l'Allemagne; en Prusse, en Pologne, en Suisse, en Espagne, en Angleterre, une foule de cités ont eu pour fondateurs des ordres monastiques ou militaires. Les villes qui sont sorties le plus tôt de la barbarie sont celles même qui ont été soumises à des princes ecclésiastiques. L'Europe doit la moitié de ses monuments et de ses fondations utiles à la munificence des cardinaux, des abbés et des évêques.

Sur une rude et haute montagne du Rouergue, couverte de neige et de brouillards pendant huit mois de l'année, on aperçoit un monastère, bâti vers l'an 1120, par Alard, vicomte de Flandre. Ce seigneur, revenant d'un pèlerinage, fut attaqué dans ce lieu par des voleurs ; il fit vœu, s'il se sauvoit de leurs mains, de fonder dans ce désert un hôpital pour les voyageurs, et de chasser les brigands de la montagne. Étant échappé au péril, il fut fidèle à ses engagements, et l'hôpital d'Abrac ou d'Aubrac s'éleva in loco horroris et vastæ solitudinis, comme le porte l'acte de fonn'attes-dation. Alard y établit des prêtres pour le service de l'église, des chevaliers hospitaliers pour escorter les voyageurs, et des dames de qualité pour laver les pieds des pèlerins, faire leurs lits et prendre soin de leurs vêtements.

Mais on dira peut-être que ces travaux tent que la richesse immense de l'Église. Nous savons qu'on cherche toujours à atténuer les services : l'homme hait la reconnoissance. Le clergé a trouvé des terres incultes; il y a fait croitre des moissons. Devenu opulent par son propre travail, il a appliqué ses revenus à des monuments publics. Quand vous lui reprochez des biens si nobles, et dans leur emploi et dans leur source, vous l'accusez à la fois du crime de deux bienfaits. L'Europe entière n'avoit ni chemins ni auberges; ses forêts étoient remplies de voleurs et d'assassins: ses lois étoient impuissantes, ou plutôt il n'y avoit point de lois; la religion seule, comme une grande colonne élevée au milieu des ruines gothiques, offroit'des abris, et un point de commu

nication aux hommes.

Sous la seconde race de nos rois, la France étant tombée dans l'anarchie la plus profonde, les voyageurs étoient surtout arrêtés, dépouillés et massacrés aux passages des rivières. Des moines habiles et courageux entreprirent de remédier à ces maux. Ils formèrent entre eux une compagnie, sous le nom d'Hospitaliers pontifes ou fai

Histoire de la ville de Paris.

Dans les siècles de barbarie, les pèlerinages étoient fort utiles; ce principe religieux, qui attiroit les hommes hors de leurs foyers, servoit puissamment au progrès de la civilisation et des lumières. Dans l'année du grand jubilé', on ne reçut pas moins de quatre cent quarante mille cinq cents étrangers à l'hôpital de Saint-Philippe de Néri, à Rome; chacun d'eux fut nourri, logé et défrayé entièrement pendant trois jours.

Il n'y avoit point de pèlerin qui ne revînt dans son village avec quelque préjugé de moins et quelque idée de plus. Tout se balance dans les siècles: certaines classes riches de la société voyagent peut-être à présent plus qu'autrefois; mais, d'une autre part, le paysan est plus sédentaire. La guerre l'appeloit sous la bannière de son seigneur, et la religion, dans les pays lointains. Si nous pouvions revoir un de ces anciens vassaux que nous nous représentons comme une espèce d'esclave stupide,

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peut-être serions-nous surpris de lui trouver plus de bon sens et d'instruction qu'au paysan libre d'aujourd'hui.

Avant de partir pour les royaumes étrangers, le voyageur s'adressoit à son évêque, qui lui donnoit une lettre apostolique avec laquelle il passoit en sûreté dans toute la chrétienté. La forme de ces lettres varioit selon le rang et la profession du porteur, d'où on les appeloit formatæ. Ainsi, la religion n'étoit occupée qu'à renouer les fils sociaux que la barbarie rompoit sans cesse.

En général, les monastères étoient des hôtelleries où les étrangers trouvoient en passant le vivre et le couvert. Cette hospitalité, qu'on admire chez les anciens, et dont on voit encore les restes en Orient, étoit en honneur chez nos religieux : plusieurs d'entre eux, sous le nom d'hospitaliers, se consacrèrent particulièrement à cette vertu touchante. Elle se manifestoit, comme aux jours d'Abraham, dans toute sa beauté antique, par d'Abraham, dans toute sa beauté antique, par le lavement des pieds, la flamme du foyer et les douceurs du repas et de la couche. Si le voyageur étoit pauvre, on lui donnoit des habits, des vivres, et quelque argent pour se rendre à un autre monastère, où il recevoit les mêmes secours. Les dames montées sur leur palefroi, les preux cherchant aventures, les rois égarés à la chasse, frappoient, au milieu de la nuit, à la porte des vieilles abbayes, et venoient partager l'hospitalité qu'on donnoit à l'obscur pèlerin. Quelquefois deux chevaliers ennemis s'y rencontroient ensemble, et se faisoient joyeuse réception jusqu'au lever du soleil, où, le fer à la main, ils maintenoient Fun contre l'autre la supériorité de leurs dames et de leurs patries. Boucicault, au retour de la croisade de Prusse, logeant dans un monastère avec plusieurs chevaliers anglois, soutint seul contre tous qu'un chevalier écossois, attaqué par cux dans les bois, avoit été traîtreusement mis à

mort...

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monastère en monastère, peignant des tableaux d'autel pour prix de l'hospitalité qu'il recevoit, et renouvelant ainsi chez les peintres l'aventure d'Homère.

CHAPITRE IX.

ARTS ET MÉTIERS, COMMERCE.

Rien n'est plus contraire à la vérité historique que de se représenter les premiers moines comme des hommes oisifs, qui vivoient dans l'abondance aux dépens des superstitions humaines. D'abord cette abondance n'étoit rien moins que réelle. L'ordre, par ses travaux, pouvoit être devenu riche, mais il certain que le religieux vivoit trèsdurement. Toutes ces délicatesses du cloître, si

exagérées, se réduisoient, même de nos jours, à une étroite cellule, des pratiques désagréables, et une table fort simple, pour ne rien dire de plus. Ensuite, il est très-faux que les moines ne fussent que de pieux fainéants; quand leurs nombreux hospices, leurs colléges, leurs biblio

thèques, leurs cultures, et tous les autres services dont nous avons parlé, n'auroient pas suffi pour occuper leurs loisirs, ils avoient encore trouvé bien d'autres manières d'être utiles; ils se consacroient aux arts mécaniques, et étendoient le commerce au dehors et au dedans de l'Europe.

La congrégation du tiers ordre de Saint-Francois, appelée des Bons-Fieux, faisoit des draps et des galons, en même temps qu'elle montroit à lire aux enfants des pauvres, et qu'elle prenoit soin des malades. La compagnie des Pauvres Frères cordonniers et tailleurs étoit instituée dans le même esprit. Le couvent des Hieronymites, en Espagne, avoit dans son sein plusieurs manufactures. La plupart des premiers religieux étoient maçons aussi bien que laboureurs. Les bénédictins bâtissoient leurs maisons de leurs propres mains, comme on le voit par l'histoire des couvents du Mont-Cassin, de ceux de Fontevrault et de plusieurs autres.

Quant au commerce intérieur, beaucoup de foires et de marchés appartenoient aux abbayes, et avoient été établis par elles. La célèbre foire du Landyt, à Saint-Denis, devoit sa naissance à l'université de Paris. Les religieuses filoient une grande partie des toiles de l'Europe. Les bières de Flandre, et la plupart des vins fins de l'Ar

Dans ces hôtelleries de la religion, on croyoit faire beaucoup d'honneur à un prinee quand on Jui proposoit de rendre quelques soins aux pauvres qui s'y trouvoient par hasard avec lui. Le cardinal de Bourbon, revenant de conduire l'infortunée Élisabeth en Espagne, s'arrêta à l'hôpital de Roncevaux dans les Pyrénées; il servit à table trois cents pèlerins, et donna à chacun d'eux trois réaux pour continuer leur voyage. Le Pous-chipel, de la Hongrie, de l'Italie, de la France sin est un des derniers voyageurs qui aient profité et de l'Espagne, étoient faits par les congrégations de cette coutume chrétienne; il alloit à Rome, de religieuses; l'exportation et l'importation des

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