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dans la conviction. Un raisonnement n'est fort, un poëme que n'est divin, une peinture n'est belle, que parceque l'esprit ou l'œil qui en juge est convaincu d'une certaine vérité cachée dans ce raisonnement, ce poëme, ce tableau. Un petit nombre de soldats persuadés de l'habileté de leur général peuvent enfanter des miracles. Trente-cinq mille Grecs suivent Alexandre à la conquête du monde; Lacédémone se confie en Lycurgue, et Lacédémone devient la plus sage des cités; Babylone se présume faite pour les grandeurs, et les grandeurs se prostituent à sa foi mondaine : un oracle donne la terre aux Romains, et les Romains obtiennent la terre; Colomb, seul de tout un monde, s'obstine à croire à un nouvel univers, et un nouvel univers sort des flots. L'amitié, le patriotisme, l'amour, tous les sentiments nobles, sont aussi une espèce de foi. C'est parcequ'ils ont cru que les Codrus, les Pylade, les Régulus, les Arie, ont fait des prodiges. Et voilà pourquoi ces cœurs qui ne croient rien, qui traitent d'illusions les attachements de l'ame, et de folie les belles actions, qui regardent en pitié l'imagination et la tendresse du génie, voilà pourquoi ces cœurs n'achèveront jamais rien de grand, de généreux : ils n'ont de foi que dans la matière et dans la mort, et ils sont déja insensibles comme l'une, et glacés comme l'autre.

Dans le langage de l'ancienne chevalerie, bailler sa foi, étoit synonyme de tous les prodiges de l'honneur. Roland, du Guesclin, Bayard, étoient de féaux chevaliers, et les champs de Roncevaux, d'Auray, de Bresse, les descendants des Maures, des Anglois, des Lombards, disent encore aujourd'hui quels étoient ces hommes qui prêtoient foi et hommage à leur Dieu, leur dame et leur roi. Que d'idées antiques et touchantes s'attachent à notre seul mot de foyer, dont l'étymologie est si remarquable! Citeronsnous les martyrs, « ces héros qui, selon saint Ambroise, sans armées, sans légions, ont vaincu les tyrans, adouci les lions, ôté au feu sa violence, et au glaive sa pointe1? » La foi même, envisagée sous ce rapport, est une force si terrible, qu'elle bouleverseroit le monde, si elle étoit appliquée à des fins perverses. Il n'y a rien qu'un homme, sous le joug d'une persuasion intime, et qui soumet sans condition sa raison à celle d'un autre homme, ne soit capable d'exécuter. Ce qui prouve que les plus éminentes vertus, quand on les sépare de Dieu, et qu'on les veut prendre dans leurs simples rapports moraux, touchent de près aux plus grands vices. Si les philosophes avoient fait cette observation, ils 1 Ambros., de Off., cap. xxxv.

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ne se seroient pas tant donné de peine pour fixer les limites du bien et du mal. Le christianisme n'a pas eu besoin, comme Aristote, d'inventer une échelle, pour y placer ingénieusement une vertu entre deux vices; il a tranché la difficulté d'une manière sûre, en nous montrant que les vertus ne sont des vertus qu'autant qu'elles refluent vers leur source, c'est-à-dire vers. Dieu.

Cette vérité nous restera assurée, si nous appliquons la foi à ces mêmes affaires humaines, mais en la faisant survenir par l'entremise des idées religieuses. De la foi vont naître les vertus de la société, puisqu'il est vrai, du consentement unanime des sages, que le dogme qui commande de croire en un Dieu rémunérateur et vengeur est le plus ferme soutien de la morale et de la politique.

Enfin, si vous employez la foi à son véritable usage', si vous la tournez entièrement vers le Créateur, si vous en faites l'œil intellectuel par qui vous découvrez les merveilles de la cité sainte, et l'empire des existences réelles, si elle sert d'ailes à votre ame pour vous élever au-dessus des peines de la vie, vous reconnoîtrez que les livres saints n'ont pas trop exalté cette vertu, lorsqu'ils ont parlé des prodiges qu'on peut faire avec elle. Foi céleste! foi consolatrice! tu fais plus que de transporter les montagnes, tu soulèves les, poids accablants qui pèsent sur le cœur de l'homme !

CHAPITRE III.

De l'Espérance et de la Charité.

L'ESPÉRANCE, seconde vertu théologale, a presque la même force que la foi: le desir est le père de la puissance; quiconque desire fortement obtient. « Cherchez, a dit Jésus-Christ, et vous trouverez; frappez, et l'on vous ouvrira. Pythagore disoit, dans le même sens La puissance habite auprès de la nécessité; car nécessité implique privation, et la privation marche avec le desir. Père de la puissance, le desir ou l'espérance est un véritable génie; il a cette virilité qui enfante, et cette soif qui ne s'éteint jamais, Un homme se voit-il trompé dans ses projets, c'est qu'il n'a pas desiré avec ardeur; c'est qu'il a manqué de cet amour qui saisit tôt ou tard l'objet auquel il aspire, de cet amour qui, dans la Divinité, embrasse tout et jouit de tous les mondes, par une immense espérance toujours satisfaite, et qui renaît toujours.

Il y a cependant une différence essentielle entre la foi, et l'es⚫pérance considérée comme force. La foi a son foyer hors de nous;

Voyez la note 4, à la fin du volume.

elle nous vient d'un objet étranger; l'espérance, au contraire, naît au dedans de nous, pour se porter au dehors. On nous impose la première, notre propre desir fait naître la seconde ; celle-là est une obéissance, celle-ci un amour. Mais comme la foi engendre plus facilement les autres vertus, comme elle découle directement de Dieu, que par conséquent étant une émanation de l'Éternel, elle est plus belle que l'espérance, qui n'est qu'une partie de l'homme, l'Église a dû placer la foi au premier rang.

Mais l'espérance offre en elle-même un caractère particulier : c'est celui qui la met en rapport avec nos misères. Sans doute elle fut révélée par le Ciel, cette religion qui fit une vertu de l'espérance! Cette nourrice des infortunés, placée auprès de l'homme, comme une mère auprès de son enfant malade, le berce dans ses bras, le suspend à sa mamelle intarissable, et l'abreuve d'un lait qui calme ses douleurs. Elle veille à son chevet solitaire, elle l'endort par des chants magiques. N'est-il pas surprenant de voir l'espérance, qu'il est si doux de garder, et qui semble un mouvement naturel de l'ame, de la voir se transformer, pour le chrétien, en une vertu rigoureusement exigée? En sorte que, quoi qu'il fasse, on l'oblige de boire à longs traits à cette coupe enchantée, où tant de misérables s'estimeroient heureux de mouiller un instant leurs lèvres. Il y a plus (et c'est ici la merveille), il sera récompensé d'avoir espéré, autrement d'avoir fait son propre bonheur. Le fidèle, toujours militant dans la vie, toujours aux prises avee l'ennemi, est traité par la religion, dans sa défaite, comme ces généraux vaincus que le Sénat romain recevoit en triomphe, par la seule raison qu'ils n'avoient pas désespéré du salut final. Mais si les anciens attribuoient quelque chose de merveilleux à l'homme que l'espoir n'abandonne jamais, qu'auroient-ils pensé du chrétien qui, dans son étonnant langage, ne dit plus entretenir, mais pratiquer l'espérance?

Quant à la Charité, fille de Jésus-Christ, elle signifie, au sens propre, grace et joie. La religion, voulant réformer le cœur humain, et tourner au profit des vertus nos affections et nos tendresses, a inventé une nouvelle passion: elle ne s'est servie pour l'exprimer, ni du mot d'amour, qui n'est pas assez sévère, ni du mot d'amitié, qui se perd au tombeau, ni du mot de pitié, trop voisin de l'orgueil; mais elle a trouvé l'expression de charitas, charité, qui renferme les trois premières, et qui tient en même temps à quelque chose de céleste. Par là, elle dirige, nos penchants vers le ciel, en les épurant et les reportant au Créateur;

par là, elle nous enseigne cette vérité merveilleuse, que les hommes doivent, pour ainsi dire, s'aimer à travers Dieu qui spiritualise leur amour, et n'en laisse que l'immortelle essence, en lui servant de passage.

Mais si la charité est une vertu chrétienne, directement émanée de l'Éternel et de son Verbe, elle est aussi en étroite alliance avec la nature. C'est à cette harmonie continuelle du ciel et de la terre, de Dieu et de l'humanité, qu'on reconnoît le caractère de la vraie religion. Souvent les institutions morales et politiques de l'antiquité sont en contradiction avec les sentiments de l'ame. Le christianisme, au contraire, toujours d'accord avec les cœurs, ne commande point des vertus abstraites et solitaires, mais des vertus tirées de nos besoins et utiles à tous. Il a placé la charité comme un puits d'abondance dans les déserts de la vie. « La charité est patiente, dit l'Apôtre; elle est douce, elle ne cherche à surpasser personne, elle n'agit point avec témérité, elle ne s'enfle point.

« Elle n'est point ambitieuse; elle ne suit point ses intérêts; elle ne s'irrite point; elle ne pense point le mal.

«Elle ne se réjouit point dans l'injustice; mais elle se plaît dans là vérité.

<< Elle tolère tout, elle croit tout, elle espère tout, elle souffre tout'. »

CHAPITRE IV.

Des lois morales, ou du Décalogue.

IL est humiliant pour notre orgueil de trouver que les maximes de la sagesse humaine peuvent se renfermer dans quelques pages. Et dans ces pages encore, combien d'erreurs! Les lois de Minos et de Lycurgue ne sont restées debout, après la chute des peuples pour lesquels elles furent érigées, que comme les pyramides des déserts, immortels palais de la Mort.

Lois du second Zoroastre.

Le temps sans bornes et incréé est le créateur de tout. La parole fut sa fille; et de sa fille naquit Orsmus, dieu du bien, et Arimhan, dieu du mal.

Invoque le taureau céleste, père de l'herbe et de l'homme.
L'œuvre la plus méritoire est de bien labourer son champ,
Prie avec pureté de pensée, de parole et d'action'.

Enseigne le bien et le mal à ton fils âgé de cinq ans',

'S. Paul., ad Corinth., cap. xu, v. 4 et seq.

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Que la loi frappe l'ingrat'.

Qu'il meure, le fils qui a désobéi trois fois à son père.

La loi déclare impure la femme qui passe à un second hymen. Frappe le faussaire de verges.

Méprise le menteur.

A la fin et au renouvellement de l'année, observe dix jours de fêtes.

L'univers est Wichnou.

Lois indiennes.

Tout ce qui a été, c'est lui; tout ce qui est, c'est lui; tout ce qui c'est lui.

sera,

Hommes, soyez égaux.

Aime la vertu pour elle; renonce au fruit de tes œuvres. Mortel, sois sage; tu seras fort comme dix mille éléphants. L'ame est Dieu.

Confesse les fautes de tes enfants au soleil et aux hommes, et purifie-toi dans l'eau du Gange”.

Lois égyptiennes.

Cnef, Dieu universel, ténèbres inconnues, obscurité impénétrable.

Osiris est le dieu bon; Typhon le dieu méchant.

Honore tes parents.

Suis la profession de ton père.

Sois vertueux; les juges du lac prononceront après ta mort sur tes œuvres.

Lave ton corps deux fois le jour, et deux fois la nuit.

Vis de peu.

Ne révèle point les mystères 3.

Lois de Minos.

Ne jure point par les dieux.

Jeune homme, n'examine point la toi.

La loi déclare infame quiconque n'a point d'ami.

Que la femme adultère soit couronnée de laine et vendue.

Que vos repas soient publics, votre vie frugale, et vos danses guerrières 4.

(Nous ne donnerons point ici les lois de Lycurgue, parcequ'elles ne font en partie que répéter celles de Minos.)

› Xenoph., Cyr. - Pr. des Br. Hist. of Ind. Diod. Sic., etc.

3 Hérod., liv. 1; Plat., de Leg.; Plut., de Is. ct Os. — 4 Arist., Pol, ; Plat., de Leg.

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