Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

pasteur à l'égard des fidèles qui se trouveraient dans une nécessité grave, relativement au salut.

378. Sixièmement, que le temps soit opportun, l'occasion favorable ce qui a fait dire à plusieurs docteurs qu'on peut quelquefois attendre une seconde rechute, afin de faire plus utilement la correction (1).

Septièmement, enfin, il faut qu'il soit probable que le pécheur ne s'est pas corrigé, et qu'il ne se corrigera pas de lui-même. «< Si «probabile sit non emendasse, nec emendaturum, vel relapsurum; « quia eleemosyna egenti tantum danda est (2). » Quand on a vraiment lieu de craindre qu'il persévère dans le péché, on doit le reprendre, lors même qu'on n'aurait pas à craindre de nouvelles rechutes. C'est le sentiment de saint Alphonse de Liguori, sentiment qui nous paraît plus probable que le sentiment contraire : Ratio, ajoute ce saint docteur, quia frater in peccato constitutus « jam gravem patitur necessitatem, a qua teneris illum, si potes, « eripere, ideoque Christus Dominus præcepit: Si peccaverit in «te frater tuus, vade, et corripe eum (3). ›

[ocr errors]

379. A défaut de l'une de ces différentes conditions, on est excusable d'omettre la correction fraternelle; mais ces conditions une fois réunies, on ne peut l'omettre en matière grave, sans péché mortel. Cependant, ce péché peut devenir véniel à raison des circonstances. Voici ce que dit saint Thomas sur ce point : « Præter<mittitur fraterna correctio cum peccato mortali, quando scilicet « aliquis probabiliter præsumit de alieno delinquente quod posset eum a peccato retrahere; et tamen propter timorem vel cupiditatem prætermittit. Hujusmodi omissio est peccatum veniale, quando timor vel cupiditas tardiorem facit hominem ad corrigendum delicta fratris; non tamen ita quod si ei constaret quod fratrem possit a peccato retrahere, propter timorem vel cupidita« tem omitteret, quibus, in animo suo præponit charitatem fra« ternam (4). »

[ocr errors]

Pour ce qui regarde la pratique, comme d'un côté il est difficile de déterminer avec précision si, dans tel ou tel cas particulier, le précepte de la correction fraternelle oblige sub gravi; et que de l'autre les simples fidèles s'en croient facilement dispensés, les uns par timidité, les autres par un prétexte plus ou moins plausible, les confesseurs doivent être extrêmement circonspects pour le refus

(1) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 33. art. 2. - (2) S. Alph. de Liguori, Theol. moral. lib. 1. n° 39. (3) Ibidem. Voyez aussi Suarez, Lessius, Bonacina, Collet, etc. (4) Sum. part. 2. 2. quæst. 33. art. 2.

de l'absolution à l'égard de ceux qui sont en défaut sur l'article dont il s'agit.

380. Il est un ordre à suivre pour la correction fraternelle. Jésus-Christ lui-même nous l'a tracé dans son Évangile : « Si votre frère, nous dit-il, a péché contre vous, allez, et reprenez-le entre vous et lui seul; s'il vous écoute, vous aurez gagné votre frère; mais s'il ne vous écoute pas, prenez avec vous une ou deux personnes, afin que tout se passe en présence de deux ou trois témoins. S'il ne les écoute pas non plus, dites-le à l'Église : « Si peccaverit in te frater tuus, vade, et corripe eum inter te et ipsum solum; si te audierit, lucratus eris fratrem tuum. Si «< autem te non audierit, adhibe tecum adhuc unum vel duos, ut « in ore duorum vel trium testium stet omne verbum. Quod si non « audierit eos, dic Ecclesiæ (1). ›

«

[ocr errors]

D'après ce texte, lorsque le péché du prochain est secret, on doit faire la correction en particulier; s'il ne se corrige pas, il faut le reprendre en présence ou par l'intermédiaire d'une ou de deux autres personnes prudentes, et capables d'exercer une certaine autorité sur lui; s'il ne se rend pas, s'il persévère dans son péché, on est obligé d'en avertir son supérieur : Dic Ecclesiæ.

381. Cependant, il est des cas où l'on n'est point obligé de faire la correction en secret savoir, on peut recourir tout d'abord à l'intervention du supérieur : 1° quand il s'agit d'un crime qui doit porter un préjudice notable à un tiers ou au public; tel est le cas d'une trahison, d'une conspiration, d'une hérésie qu'on cherche à répandre clandestinement. On doit même s'adresser directement à l'autorité, si on ne croit pas pouvoir arrêter autrement le progrès du mal (2). 2o Quand le péché est devenu public (3). 3o Quand on a lieu de croire que le supérieur qu'on sait être modéré, prudent et discret, fera la correction d'une manière plus utile. Dans ce cas, on peut lui déclarer comme à un père, et non comme à un supérieur, la faute du prochain, sans avoir averti celui-ci en particulier; ce qui peut se pratiquer avantageusement, surtout lorsqu'il s'agit de faire connaître la conduite d'un ecclésiastique à son évêque, qui réunit tout à la fois le titre de supérieur, le titre de père, le titre d'ami : c'est dans la solennité même de l'ordination pour la prêtrise qu'il prend ce dernier titre à l'égard de ses prêtres : « Jam vos dicam amicos (4). ›

>>

(1) Matth. c. 18. v. 15, 16, 17. —(2) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 33. art. 7. — (3) Ibidem. — (4) Pontificale Romanum.

[ocr errors]

ARTICLE VI.

Des Péchés opposés à l'amour du prochain.

382. Les principaux péchés contraires à la charité, à l'amour du prochain, sont la haine, l'envie, dont nous avons parlé ailleurs (1), la discorde et le scandale.

La haine pour le prochain est directement opposée à la charité chrétienne; c'est un péché mortel en son genre. Celui qui hait son frère, dit saint Jean, demeure en état de mort; il est comme coupable d'homicide : « Qui non diligit (fratres), manet in morte. « Omnis qui odit fratrem suum, homicida est (2). ›

[ocr errors]

Mais il ne faut pas confondre la haine pour la personne avec la haine ou l'aversion qu'on éprouve quelquefois pour la conduite du prochain. Autre chose est de haïr le pécheur; autre chose, de haïr le péché. Dans le premier cas, on veut la mort de l'impie; ce qui est contraire à la charité : dans le second, on veut seulement qu'il se convertisse : « Nolo mortem impii, sed ut convertatur impius a via sua, et vivat (3).

[ocr errors]

383. La haine, l'inimitié n'est pas toujours péché mortel; elle n'est que vénielle, si elle n'a pour objet qu'une matière légère; ou si les mouvements auxquels on se livre contre quelqu'un ne sont pas suffisamment réfléchis; ou lorsqu'il s'agit de certaines imprécations auxquelles le cœur a d'autant moins de part qu'on se les permet plus facilement. C'est par la disposition du cœur qu'il faut juger de la nature du péché de parole : « Contingit verbum male«dictionis prolatum esse peccatum veniale, vel propter parvita«tem mali quod quis alteri maledicendo imprecatur, vel etiam propter affectum ejus qui profert maledictionis verba, dum ex levi motu, vel ex ludo, aut ex surreptione aliqua talia verba pro« fert : quia peccata verborum maxime ex affectu pensantur (4). La charité ne permet pas de désirer le mal du prochain, ni de se réjouir du mal qui lui arrive, ni de s'affliger de ses succès, de sa prospérité (5). 384. Le mot discorde, pris généralement, signifie toute dissension qui divise les esprits, et rompt le lien de la charité qui unit les cœurs. Mais si on le prend dans sa signification rigoureuse, il

[ocr errors]

(1) Voyez le no 273. — (2) I. Epist. c. 3. v. 14 et 15. — (3) Ezech. c. 33. v. 11. (4) Sum. part. 2. 2. quæst. 76. art 3. (5) Voyez le Traité des Péchés, n° 240, etc.

exprime la division des volontés, concernant une chose que l'un veut et qu'un autre ne veut pas. On donne le nom de contention à la contrariété des opinions, quand elle est accompagnée d'opiniâtreté, d'aigreur, et de paroles offensantes. Si on passe à l'action, la discorde dégénère en rixes, en querelles, et enfante les séditions, les guerres, les schismes. Aussi le Seigneur déteste celui qui sème la discorde parmi ses frères : « Detestatur anima ejus........... eum qui « seminat inter fratres discordias (1). » Et l'Apôtre, mettant sur le même rang l'idolâtrie, les empoisonnements, les homicides, les inimitiés, les contentions, les rixes, les dissensions, les schismes, SECTÆ, dit que ceux qui font ces choses n'obtiendront point le royaume des cieux : « Prædico vobis, sicut prædixi quoniam qui » talia agunt, reguum Dei non consequentur (2). »

385. Mais la discorde n'est pas toujours péché mortel; il faut avoir égard et à la nature des choses qui en sont l'objet, et aux suites plus ou moins fâcheuses qu'elle peut avoir, et aux dispositions des parties. Il ne faut pas non plus la confondre avec le simple défaut d'accord, qui se rencontre souvent entre différentes personnes au sujet de l'étendue ou de l'exercice d'un droit. Quand il y a bonne foi de part et d'autre, les parties peuvent, à défaut d'un arrangement à l'amiable, que la charité conseille toujours, recourir à la sentence des tribunaux, pourvu qu'on n'use d'aucun moyen contraire à l'équité ou à la morale.

Le scandale est essentiellement contraire à la charité, à l'amour du prochain; puisque, au lieu d'aider nos frères comme la charíté le prescrit, surtout en ce qui concerne le salut éternel, nous leur donnons par le scandale occasion de commettre le péché, qui détruit ou affaiblit en eux la vie de la grâce, suivant que ce péché est mortel ou véniel.

ARTICLE VII.

Du Scandale.

386. Dans le langage de l'Église, le scandale se prend pour tout ce qui peut être pour le prochain une occasion de ruine ou de chute spirituelle; et on le définit : une parole, une action ou omission, mauvaise en soi ou en apparence, donnant à un autre occasion de tomber dans le péché : «Convenienter dicitur quod dictum vel fac« tum minus rectum, præbens occasionem ruinæ, sit scandalum. » C'est la définition que nous donne saint Thomas (3).

(1) Proverb. c. 6. v. 16 et 19.- (2) Galat. c. 5. v. 20 et 21. (3) Sum. part. 2. 2. quæst. 53. art. 1.

Nous avons dit, une parole, une action ou omission: car omettre ce que l'on doit faire, c'est par là même faire ce que l'on ne doit pas faire : « Pro eodem est accipiendum dictum et non dic« tum, factum et non factum (1). »

Mauvaise en soi ou en apparence; minus rectum : car on scandalise le prochain et en faisant une chose mauvaise, et en faisant une chose qui, sans être mauvaise en elle-même, a l'apparence du mal : « Ab omni specie mala abstinete vos, » dit l'Apôtre (2); sur quoi saint Thomas ajoute : « Et ideo convenienter dicitur mi« nus rectum, ut comprehendantur tam illa quæ sunt secundum « se peccata, quam illa quæ habent speciem mali (3). »

387. Donnant occasion; le scandale est l'occasion, et non la cause du péché dans lequel tombe celui qui est scandalisé; ou il n'en est que la cause imparfaite : « Causa solum imperfecta, ali« qualiter inducens ad ruinam (4). » Aussi, pour qu'il y ait scandale, il n'est pas nécessaire que le prochain tombe dans le péché ; il suffit qu'on lui donne occasion d'y tomber, c'est-à-dire qu'on le mette dans un danger de pécher. Mais on ne se rend réellement coupable de scandale que dans le cas où, eu égard à la position de celui qui fait le mal, et aux dispositions de ceux en présence desquels on le fait, on a lieu de craindre que ceux-ci ne se laissent entraîner au péché. Ainsi, par exemple, le blasphème qui ne serait proféré qu'en présence d'un prêtre, d'un religieux, ne devrait pas ètre regardé comme péché de scandale : « Non semper est scanda« lum, dit saint Alphonse de Liguori, si peccas coram aliis, sed «< tantum quando, attentis circumstantiis tam personæ agentis, tam « coram quibus fit actus, potest probabiliter timeri ne per hunc << actum trahantur ad peccatum, qui alias peccaturi non essent (5). » Si le péché se commettait en public, on devrait alors s'en accuser comme d'un péché de scandale, à raison du danger auquel on se serait exposé de scandaliser au moins une partie de ceux qui en auraient eu connaissance.

388. On distingue le scandale actif et le scandale passif. Le scandale actif est le scandale même dont nous venons de donner la définition. Ce scandale est direct ou indirect. Il est direct, quand celui qui le commet a l'intention d'induire quelqu'un au péché. Tel est, par exemple, le scandale de celui qui sollicite un autre au crime d'adultère, à la fornication, au vol, au parjure, à la médi

(1) Sum. part. 1. 2. quæst. 71. art. 6. ·(2) I. Thessal. c. 5. v. 22. (3) Sum. 2. 2, quæst. 43. art. 6. (5) Theol. moral. lib. 11. n° 43.

(4) Ibidem.

« ZurückWeiter »