Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

l'opposée est également probable, dans la crainte de les exposer au danger de beaucoup de péchés formels. Je m'efforcerai, avec l'aide de Dieu, de marcher dans la voie plus parfaite; mais obliger tous les hommes à s'écarter, dans la pratique, de toute opinion moins sûre qui n'est pas moralement certaine, et leur refuser l'absolution s'ils ne le font pas, je crois que cela ne peut être exigé avant que l'Église l'ait décidé (1). »

[ocr errors]

k

[ocr errors]

100. Voici ce que dit à cet égard l'auteur du Prêtre sanctifié : « Quand il s'agira de décider si une chose est permise, et que vous << trouverez deux sentiments opposés, appuyés tous les deux de « l'autorité des docteurs; gardez-vous bien de vous déclarer telle«<ment pour l'un d'eux, qu'après avoir rejeté l'autre vous pré« tendiez non-seulement conseiller le plus sévère, mais encore l'imposer à vos pénitents comme une obligation indubitable et <«< certaine, tandis que ce sentiment est combattu par des auteurs << respectables. Je me croirais bien présomptueux, si je faisais à «< mes pénitents une obligation certaine d'éviter une chose qu'un « ou plusieurs auteurs recommandables disent être permise. Dans « beaucoup de ces controverses, l'Église connait fort bien la diver«sité des opinions; cependant elle garde un profond silence : et moi qui ne suis qu'un simple confesseur, j'irais décider, et m'établir ⚫ le juge des docteurs, jusqu'à prétendre que ceux qui ne pensent << pas comme moi aient tort, et se trompent, et que mon propre « jugement doive prévaloir, et produire une obligation certaine et grave! Et comment pourrais-je allier cette arrogance avec la « basse opinion que, par humilité chrétienne et très-probable, je «< dois avoir de moi-même et de mes propres sentiments, et la con«< cilier avec l'estime et le respect que je dois avoir pour ces person<< nages si pieux et si éclairés qui soutiennent l'opinion contraire? « Je puis bien dire : Je préfère ce sentiment, je puis le suggérer « à d'autres comme conseil, et pour le mieux; mais en faire une << obligation jusqu'à refuser l'absolution à quiconque veut faire le contraire, c'est ce que je ne pourrai jamais; d'autant plus que je ne a vois pas pourquoi j'obligerais toujours à ce qui est plus sévère et plus parfait, tandis qu'il y a des auteurs recommandables qui le «< combattent. Car serait-ce pour m'attirer la réputation d'un << homme de morale saine et sévère? Mais je serais bien misérable, << si cette fumée de gloire mondaine était la règle de ma conduite dans la direction des âmes. Il n'y a donc que le désir de la plus

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

(1) Dissert. sur l'usage modéré du probabilisme, etc.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

<< grande gloire de Dieu, et du plus grand bien des fidèles, qui « puisse me décider de cette sorte. Mais c'est ici précisément qu'en « voulant faire le docteur, et le docteur plus prudent que les autres, « j'agis en médecin bien peu expérimenté dans la connaissance de la « nature humaine. Car si on éprouve déjà tant de répugnance à remplir les obligations claires, certaines et déclarées telles par les « docteurs ; si l'on voit de si fréquentes transgressions des divins préceptes; combien n'aurait on pas plus de peine à se soumettre à << des obligations très-difficiles, obscures, et combattues par d'autres « docteurs? Combien n'est-il pas à craindre que les pénitents aux « quels on aura intimé ces obligations ne s'y soumettent pas ? Et « dans ce cas, que devez-vous prévoir en habile médecin? Qu'ob<< tiendrez-vous par votre rigueur? Rien, sinon qu'au lieu d'un mál qui, étant fait par ignorance ou de bonne foi, ne serait tout au plus qu'un mal matériel et même incertain, à raison de l'opi«nion contraire, il s'ensuive un mal, un péché formel et très-certain, parce qu'on agira contre sa conscience. Dans le premier cas, « Dieu n'aurait reçu aucune offense, ni l'âme aucune blessure, vu qu'il n'y aurait qu'une erreur de l'esprit, et que la volonté serait « demeurée soumise à son Créateur; tandis que, dans le second, « Dieu voit une mauvaise volonté qui, en dépit des lumières, ne << veut point se soumettre à lui: par conséquent il sera méprisé, et <«<l'âme deviendra criminelle, coupable non pas peut-être d'un seul « péché, mais d'une longue série de péchés graves, de péchés cer«tains et formels (1). ›

[ocr errors]

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

>>

101. Il est dangereux, dit Gerson, de décourager les fidèles en donnant certaines actions ou certaines omissions comme autant de péchés mortels, surtout sur les points controversés : « Ne doctores « sint faciles asserere actiones aliquas aut omissiones esse peccata « mortalia... fit quandoque ut per tales assertiones publicas nimis « duras, generales et strictas, præsertim in non certissimis, ne« quaquam eruantur homines e luto peccatorum, sed in illud pro« fondius, quo desperatius, immergantur (2). »

102. Quand il s'agit d'une question controversée parmi les théologiens, que les deux opinions sont plus ou moins probables, mais vraiment probables et réputées telles, un confesseur, quel que soit son système sur l'usage des probabilités, ne peut refuser l'absolution à un pénitent qui tient à l'opinion moins sûre. Saint Alphonse

(1) Le prêtre sanctifié par la juste, charitable et discrète administration de la pénitence, par le P. Palavicini, no 48. (2) Gerson, de Vita spirituali, lect. 4. corollar. II.

[ocr errors]
[ocr errors]

de Liguori réprouve comme injuste, comme outrée, la sévérité du confesseur qui inquiéterait un pénitent, au point de lui refuser l'absolution dans le cas dont il s'agit : « Hic est rigor ille quem «< immoderatum et injustum procul dubio reputo et reprobo; cum « austeritas hæc causa esse potest ut plures animæ damnentur (1). Quelle que soit notre manière de voir sur une controverse de l'école, nous ne devons point inquiéter un pénitent qui, de deux opinions réputées probables, adopte l'opinion moins sûre, ou par principe, ou sur l'avis de quelque docteur, d'un directeur éclairé ou qui passe pour tel à ses yeux. Le traiter comme s'il était indigne de l'absolution, ce serait évidemment aller contre l'esprit de l'Église ; ce serait en quelque sorte vouloir condamner ce qu'elle ne condamne point. Cependant, appartient-il à un simple prêtre de faire la loi ?

103. Pour le choix des opinions au sujet desquelles les théologiens ne s'accordent pas, les simples fidèles peuvent s'en rapporter à la décision d'un docteur, d'un confesseur qu'ils jugent digne de leur confiance, qu'ils regardent comme dépositaire de la science. Quelle que soit cette décision, elle ne compromettra ni leur salut, ni la morale; puisque, comme on le suppose, il ne s'agit que des questions qu'on ne peut décider ni par l'Écriture sainte, ni par la tradition, ni par la pratique générale de l'Église, ni par aucun décret des conciles ou du saint-siége.

104. Quant aux confesseurs, ils doivent examiner les raisons intrinsèques d'une opinion, à moins qu'ils ne présument prudemment qu'elle ait été mûrement examinée par les auteurs graves qu'ils consultent. << Indoctus sequi potest opinionem datam a doctis; doctus « tamen tenetur examinare rationes, nisi prudenter præsumat ab <«< illis examinatas (2). » En effet, on n'est point obligé d'examiner les raisons qu'on peut alléguer en faveur de l'opinion de quelque grand docteur, dont les écrits sont reçus comme orthodoxes. « Possumus sequi opinionem doctoris quæ non adversetur Scripturæ vel « Ecclesiæ auctoritati. Et revera si ego minus doctus sequerer sen<< tentiam divi Thomæ contra rationem, quæ mihi probabilior videretur, quis neget quod prudentius agerem, si, mea opinione « suspensa, tantæ auctoritati deferrem? » Ainsi s'exprime saint Alphonse de Liguori (3), qui cite à l'appui saint Thomas lui-même,

[ocr errors]

(1) De Conscientia, Morale systema. Voyez aussi la Justification de la Théologie de ce saint docteur, ch. vi; Collet, de Conscientia, cap. v. concl. 11. (2) S. Alphonse de Liguori, Dissert. de usu moderato probabilismi, etc. (3) Ibidem.

dont voici le texte

[ocr errors]

Aliquis parvæ scientiæ magis certificatur de « eo quod audit ab aliquo scientifico, quam de eo quod sibi secun<«< dum suam rationem videtur (1). » C'est aussi le sentiment de saint Antonin : (( Quilibet potest, dit l'archevêque de Florence, sequi quamcumque opinionem, dummodo alicujus doctoris magni opinionem sequatur (2). »

«

[ocr errors]

"

105. Au reste, nous pensons que, pour sortir des perplexités qu'on éprouve dans l'exercice des fonctions saintes, soit à raison de la diversité des opinions de l'école, soit au sujet des dispositions du pénitent, pour lequel on a épuisé toutes les ressources de la charité, le confesseur peut, sans danger, se déclarer pour le parti de l'indulgence, en formant sa conscience par la considération qu'il vaut mieux avoir à rendre compte à Dieu pour trop d'indulgence que pour trop de sévérité : « Melius est Domino rationem reddere de nimia misericordia quam de nimia severitate. » C'est la pensée de saint Chrysostome (3), de saint Thomas (4), de saint Antonin (5), de saint Raymond de Pegnafort (6), de saint Odilon, abbé de Cluny (7). C'était aussi l'esprit de saint Grégoire de Nazianze : « Quod si res <«< dubia est, vincat humanitas, ac facilitas (8). » Quand il y a différentes opinions sur une question, toutes choses égales d'ailleurs, on doit, dit saint Bernardin, préférer la plus douce, la plus indulgente: « Quando diversæ sunt opiniones, cæteris paribus, huma«nior præferenda est (9).

106. Mais il ne faut pas perdre de vue que le prêtre n'est que le ministre de Jésus-Christ, que le dispensateur de ses dons, et qu'il ne peut lier ni délier à volonté, contre l'ordre établi de Dieu : « Non potest ligare et solvere ad arbitrium, dit saint Thomas, sed « tantum sicut a Deo præscriptum est (10). »

(1) Sum. part. 2. 2. quæst. 4. art. 8.. (2) Voyez la Dissertation de S. Alphonse de Liguori, de Usu moderato, etc. (3) Ou de l'auteur de l'Opus imperfectum in Mattheum, etc. (4) Opuscul. 65. § 4. — (5) Sum. part. 2. tit. iv.

c. 5. (6) Sum. lib. III. tit. 34. (7) Voyez Acta sanctorum, t. I. p. 72. (8) Orat. 39. (9) Tom. I. feria 2 post. dominicam Quinquages. serm. 3. art. 2.

1

[ocr errors]

· (10) Sum. part. 3. quæst. 18. art. 3 et 4.

[ocr errors]

TRAITÉ DES LOIS.

CHAPITRE PREMIER.

Notion de la Loi en général.

107. Les lois sont la règle extérieure et éloignée des actes humains; une action est objectivement bonne ou mauvaise, suivant qu'elle est conforme ou contraire à la loi qui la régit: « Lex, dit << saint Thomas, quædam regula est et mensura actuum, secundum << quam aliquis inducitur ad agendum vel ab agendo retrahitur (1).» Suivant saint Alphonse de Liguori, la loi est la raison de nos devoirs : « Recta agendorum aut omittendorum ratio (2). » Mais on la définit plus communément : un précepte général, juste et permanent, publié dans l'intérêt d'une société, par celui qui a le droit de gouverner: « Lex nihil aliud est quam quædam rationis ordinatio «< ad bonum commune, ab eo qui curam communitatis habet pro« mulgata (3). >>

108. Premièrement, la loi est un précepte. Il peut y avoir des préceptes qui n'aient pas le caractère de la loi; mais il n'y a pas de loi sans précepte. Soit qu'elle commande, soit qu'elle défende, il est de l'essence d'une loi proprement dite de lier les sujets à l'égard du législateur; elle est, de sa nature, un règlement obligatoire. Ainsi la loi diffère essentiellement du conseil, qui n'oblige pas.

[ocr errors]

Secondement, la loi est un précepte général : « Jura non in singulas personas, sed generatim constituuntur (4). » Néanmoins il n'est pas nécessaire qu'une loi soit commune à tous les membres d'une société, de l'Église, par exemple; il suffit qu'elle concerne généralement tous ceux qui appartiennent au corps pour lequel ele est portée; car il y a des lois, de vraies lois qui sont propres aux différents états. Telles sont, par exemple, les lois qui regardent les clercs, les religieux, les magistrats, les militaires.

109. Troisièmement, la loi est un précepte juste. Une loi in

(1) Sum. part. 1. 2. quæst. 90. art. 1. (2) De Legibus, no 9. (3) S. Thomas, Sum. part. 1. 2. quæst. 90. art. 4. — (4) L. vIII. § de Legibus.

« ZurückWeiter »