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lui une source de mérites, car la tranquillité de son âme n'en fut point troublée. Il oubliait tout ce qui lui était personnel; il comparait les tribulations à un lait que Dieu préparait pour la nourriture de son âme. C'était surtout dans la prière et dans la contemplation que Dieu se plaisait à lui faire goûter ses douceurs ineffables. Tant d'éminentes qualités étaient jointes à une grande affabilité. Il recevait tout le monde avec bonté. Sa table était servie avec décence, et il pratiquait, en particulier, les mortifications que lui dictait l'esprit de Dieu.

Les exactions du roi vinrent augmenter ses peines. Il s'appropria le revenu des évêchés et des abbayes qu'il laissait vacans, malgré saint Edme, ou bien il y faisait entrer des sujets indignes. Le saint archevêque, craignant de conniver à des abus qu'il ne pouvait réprimer, passa secrètement en France, fut très-bien reçu de saint Louis. Ensuite il se rendit à l'abbaye de Pontigny.

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Après y avoir passé deux ans, épuisé d'abstinence et consumé d'affliction, il tomba grièvement malade pendant les chaleurs de l'été. Les médecins déclarèrent qu'il devait changer d'air; il obéit, et se retira au prieuré de Soissy, près de Provins. Pour consoler les moines de Pontigny, affligés de son départ, il leur promit de revenir chez eux à la fête de saint Edmond, martyr, c'est-à-dire, le 20 novembre. Sa maladie, qui était une dyssenterie, augmenta de telle sorte à Soissy, qu'il connut que son dernier jour était proche. Alors il demanda à recevoir le saint viatique, et dit en présence du Saint-Sacrement: « J'ai cru en vous, Seigneur; vous m'êtes témoin

que je n'ai désiré que vous sur la terre, et vous voyez que mon cœur ne désire autre chose que l'accomplissement de votre sainte volonté. » Il passa le reste du jour dans une ferveur admirable, et on aurait dit, à la sérénité de son visage, qu'il ne sentait plus de mal. Le lendemain, il reçut l'extrême-onction : depuis ce moment, il voulut toujours avoir un crucifix à la main, et il ne cessait de baiser amoureusement les plaies du Sauveur. La dévotion qu'il avait eu pour le nom sacré de Jésus semblait redoubler à chaque instant. Enfin, il expira doucement, à Soissy, le 16 novembre 1242. On enterra ses entrailles à Provins, et son corps fut reporté à Pontigny, où il arriva le jour de saint Edmond, selon sa prédiction. Sept jours après, on l'inhuma dans le sanctuaire, devant le grand autel, avec beaucoup de solennité (1).

Comme la mémoire de saint Edme était demeurée en grande vénération, les peuples qu'il avait instruits, et édifiés pendant sa vie, vinrent prier sur son tombeau. Le bruit des miracles qui s'y opéraient, franchit bientôt les limites de la province. On s'occupa de sa canonisation. Six ans après, elle fut terminée, et sa translation annoncée pour le 9 juin 1247. Dès la veille, on vit arriver à Pontigny une foule considérable des pays voisins, attirée par la nouveauté de cette grande cérémonie. Tous les nobles

(1) Voyez Vie des Saints, de Godescard, t. x1, p. 208, édit. in-12. On y trouve aussi les auteurs contemporains qui ont écrié sa vie. On a de saint Edme un traité de piété qui a pour titre le Miroir de l'Eglise, qu'il composa pour l'édification des moines de Pontigny.

d'alentour, les ecclésiastiques de tous les rangs, concoururent à l'éclat de cette imposante journée. Comme il était impossible de loger tant de monde dans le hameau de Pontigny, la plupart campèrent dans les champs, autour de l'Eglise. Le roi saint Louis s'y trouva avec la reine Blanche, sa mère, les princes, ses frères; Robert, comte d'Artois; Alphonse, comte de Poitiers; Charles, depuis comte de Provence et d'Anjou, et roi de Sicile; Isabelle de France, sœur de saint Louis. Après la famille royale, on remarquait le cardinal Pierre, évêque d'Albe; le cardinal Eude, évêque de Frescati, légat du Saint-Siége; ensuite, les archevêques de Sens, de Bourges, de Bordeaux et d'Armagh; saint Richard, évêque de Chichester, et plusieurs autres prélats et abbés. Depuis le concile d'Héry, c'est l'assemblée la plus célèbre et la plus imposante qui ait été tenue dans nos pays. Lorsque le sépulcre fut ouvert, le corps fut trouvé dans le même état que le jour de sa mort. Le roi et les princes l'ayant considéré, l'évêque d'Auxerre, Guy de Mello, le porta sur l'autel pour le faire voir au peuple, ensuite il le déposa dans un sépulcre de pierre. La nuit suivante, une discussion s'éleva entre l'abbé et les frères du monastère : ceux-ci blàmaient l'abbé sur la simplicité du nouveau sépulcre, disant que le monument qu'il avait fait élever n'était pas digne de renfermer cette sainte relique; on consulta les évêques, et surtout le disciple bien-aimé de saint Edme, et on convint que le corps demeurerait provisoirement dans le mausolée préparé par l'abbé, et qu'on lui éleverait, plus tard, un tombeau plus honorable. En

effet, deux ans après, à pareil jour, le même évêque d'Auxerre, accompagné de l'évêque d'Orléans et de deux évêques anglais, celui de Norwich et celui de Chichester, le déposa dans une châsse, couverte d'or, qu'il plaça derrière le grand autel, sur quatre colonnes de cuivre. La reine Blanche et Marguerite de Provence, présentes à cette seconde translation, firent de riches présens, parmi lesquels était une main d'or, garnie de pierres précieuses, pour placer le bras de saint Edme, que l'on avait détaché du corps à la jointure du coude. Le roi d'Angleterre, la reine, sa femme, et le comte Richard, avaient aussi adressé de riches présens à l'abbaye de Pontigny, à l'occasion de la première ouverture du tombeau. On ne doit pas s'étonner après cela, que cette abbaye, honorée des marques de confiance des papes et des rois, se soit élevée si haut dans l'esprit et dans le respect des peuples.

On commença dès-lors à rendre de grands honneurs aux reliques de saint Edme. Henri III, roi d'Angleterre, donna, en 1252, vingt marcs sterling de rente, pour entretenir quatre cierges allumés, le jour et la nuit, autour de la relique du saint. Les guerres de l'Angleterre avec la France suspendirent pour un temps cette donation, mais la charité des religieux y suppléa. Richard II, roi d'Angleterre, envoya, en 1396, la somme accoutumée, et voulut que les quatre cierges fussent allumés comme auparavant. Cette fondation dura jusqu'en 1532, époque à laquelle l'Eglise perdit ses monastères en Angleterre. Nos rois, successeurs de saint Louis, sont venus plusieurs fois déposer leurs vœux et leurs of

frandes au pied du tombeau de saint Edme, et implorer le bonheur et la gloire en faveur de leur peuple. Quelle est triste aujourd'hui, qu'elle est solitaire et silencieuse, cette belle basilique, où l'on voit encore les autels qui ont recueilli les vœux et les hommages des rois!

Après l'inhumation de saint Edme, l'abbé de Pontigny fit un voyage en Espagne, où il fonda l'abbaye de Bonnefond, en 1245. On pense qu'il mourut en 1249. Il était docteur en théologie. Comme il avait été témoin oculaire de la vie de saint Edme, il la fit écrire par Bertrand, religieux de Pontigny, qui avait suivi le Saint dans son exil, et qui avait été son secrétaire.

L'éclat de la canonisation de saint Edme relentit dans toute la France, et attira dans l'abbaye de Pontigny des pélerins de toutes parts, même de la cour de nos rois. Les dons que cette maison recevait des seigneurs voisins, sont aussi une preuve de la confiance qu'elle continuait à leur inspirer.

Mahaut ou Mathilde de Courtenay, veuve d'Hervey T., p. 358.` de Donzy, comte d'Auxerre, de Nevers et de Ton

nerre, donna aussi, pour la rémission de ses péchés, cinquante arpens dans la forêt de Bar, et demanda qu'a

près sa mort ses restes mortels fussent portés à Pon- Leb. Mmé., tigny, où reposait déjà son premier mari, Hervé de t. II, p. 149. Donzy. En 1256, la même comtesse donna dix livres tournois de rente, monnaie de Nevers, à prendre sur ses revenus de Chichée, pour fonder son anniversaire, celui de son mari, de pieuse mémoire, et celui de tous ses parens. Elle prie son vénérable père, monseigneur l'évêque de Langre, d'excommu

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