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dans vos églises, et prononcez contre eux une sentence d'excommunication. S'ils sont clercs, chanoines réguliers ou moines, suspendez-les, privez-les de leur bénéfice, qu'ils ne puissent en appeler nulle part, et ne levez votre sentence que lorsqu'ils auront pleinement réparé les torts qu'ils auront causés aux frères. Si des laïques ou des clercs séculiers les avaient frappés, ne levez pas l'interdit qu'ils ne soient venus eux-mêmes à Rome, avec des lettres favorables de leur évêque. ». L'excommunication était toujours l'arme accoutumée dont se servaient les prélats et les abbés pour arrêter la dévastation de leurs propriétés et les vexations envers leurs personnes, arme toute spirituelle qui, rappelant l'homme à sa conscience, tendait à le rendre meilleur.

justificatives.

L'année suivante, 1235, le même Pape écrivit Voyez pièces à l'abbé et aux religieux de Pontigny une lettre pleine de force contre les spoliateurs de leur monastère; il s'exprime ainsi : « Amalech poursuit encore Israël; des hommes cupides et avares emploient, non-seulement la force ouverte, mais encore la ruse et la fourberie, pour inquiéter, en mille manières, de simples religieux, dont toute l'ambition tend à s'unir à Dieu par la contemplation. Nous qui remplissons, malgré notre indignité, les fonctions du vrai Moïse, nous devons prévenir leurs machinations et réprimer leurs tentatives coupables, afiņ qu'on ne dise pas que nous souffrons que les pécheurs étendent impunément leur verge sur les justes. Vous nous marquez que certains laïques, et même des clercs, vous intentent des procès injustes,

Ibid.

avec des intentions tellement criminelles, qu'ils en
veulent plus à vos personnes qu'à vos biens ; ils vous
traînent malicieusement devant les tribunaux, et à
différentes reprises, en vous montrant de fausses
lettres apostoliques; ils espèrent, qu'étant fatigués
de faire des démarches et des dépenses, vous aban-
donnerez les procès ou que vous souscrirez à des
arrangemens ruineux. Nous savons, par expérience,
combien il est amer d'être distrait de la contem-
plation pour suivre des procès odieux afin donc
que la sagesse soit victorieuse du mal, nous allons
pourvoir à votre tranquillité, autant que nous le
pouvons, avec le secours de Dieu. Nous vous auto-
risons, par nos lettres apostoliques, à ne paraître
que
deux fois devant les tribunaux pour chacun de
vos biens. >> On voit, par les canons du grand con-
cile de Latran, et par ceux du premier concile de
Lyon, à quels excès était montée la subtilité des
plaideurs pour éluder toutes les lois et les faire ser-
vir de prétexte à l'injustice. Or, les avocats et les
praticiens en qui dominait cet esprit de chicane,
étaient le plus souvent des clercs, car ils étaient
alors les seuls qui étudiassent la jurisprudence civile
ou canonique, L'avidité du gain faisait oublier l'es-
prit de l'Evangile, qui n'est que sincérité, candeur,
charité et désintéressement.

Une bulle du pape, datée de Lyon, en 1249, nous apprend une coutume singulière, qui avait prévalu dans nos pays pour obtenir justice. Avait-on un sujet de plainte contre quelqu'un? si celui-ci ne vou lait pas donner satisfaction, on enlevait une personne de sa maison, son bétail, ou toute autre chose, et

on ne restituait, que lorsqu'on avait obtenu justice à son gré. L'abbé de Pontigny avait écrit au pape qu'on enlevait jusqu'à des moines et des frères convers. On peut juger combien de tels procédés devaient occasionner de violences. Un homme audacieux devait tout oser contre ses voisins, et surtout contre des religieux, s'il se croyait lésé. Le pape blâme cette coutume, et dit qu'il n'y a pas de loi qui permette de se faire justice soi-même, et que ces violences ne peuvent être tolérées plus longtemps; en conséquence, il ordonne, avec cette autorité apostolique qui avait tant de poids, que cette manière de se faire justice cesse totalement. C'est toujours la lutte entre la matière et l'intelligence, les intérêts temporels et les idées religieuses, qui durera autant que le monde, sans que jamais il ne puisse y avoir ni de trève, ni de paix. C'est un spectacle vraiment beau de voir les papes, par le seul ascendant de la vertu, tenir en échec l'orgueil féodal, et dicter des lois à des hommes puissans, qui ont à leur disposition les forces militaires. Les papes étaient alors plus forts que les empires, parce que les forces brutales étaient obligées de céder devant les croyances catholiques, représentées si vivement aux yeux des peuples par la vie de tant d'hommes d'une sainteté si grande et d'un si noble caractère.

221.

Les lois civiles ne tardèrent pas à reprendre de T. II, p. 218 et la vigueur et à punir les malfaiteurs avec sévérité, comme on le voit par le jugement rendu contre les habitans de Villeneuve-sous-Buchin. En 1285, l'abbé de Pontigny leur avait retiré un droit d'usage, qu'ils

Hist. ms. de l'ég.d'Aux., t. III et IV.

Cart. de Pont.,

s'étaient arrogé, dans le bois de Revisy (1). N'ayant point de titres à présenter pour appuyer leurs réclamations dans cette forêt, ils résolurent de s'en venger par la force à la première occasion. Sur ces entrefaites, un moine, un frère convers et le célérier, viennent à passer dans leur village; plusieurs habitans se jettent sur eux, et les maltraitent tellement, qu'à peine peuvent-ils regagner le monastère. L'affaire parut aux assises de Villeneuve-leRoy, des témoins furent entendus (2), et les habitans se virent condamnés solidairement à soixante livres d'amende, et à se trouver en braies, en chemises, nuz piez et sans coifes à trois processions, savoir à Pontigny, le jour de l'Assomption; à Héry, le jour de Notre-Dame de septembre, et à Venousse, le jour de la Toussaint. Au commencement de chacune de ces processions, ils doivent faire amende honorable à l'abbaye, en déclarant que deci en avant,

:

(1) Ce lieu, appelé anciennement Revisiacum, Rivisiacum, était une terre de franc-alleu, située, selon une ancienne charte, sur les limites du comté de Sens, sur la rivière de Serain, dans Viol., ms. un lieu appelé aujourd'hui les Vieux-Moulins, au-dessous de Leb., Mém., Rouvray. Vers l'an 879, il est fait mention du village de Revisy t. II, pr., P. 250. et de celui de Sarmoise, voisins l'un de l'autre. Pierre, diacre de t. II. p. 19 et 121 la cathédrale d'Auxerre, laissa en mourant les maisons, les terres et les vignes qu'il possédait à Revisy, pour son anniversaire, in pago senonico in villa quæ dicitur Revisiacum. En 1114, l'abbaye de Pontigny possédait à Revisy un domaine, faisant partie de la grange de sainte Porcaire. Il ne reste aujourd'hui aucune trace de ces deux villages. On voyait encore, à Revisy, au treizième siècle, deux moulins, l'un à blé l'autre à foulon. Le canton a retenu le nom de Revisy.

T. III, p. 223,

(2) Pour la décision d'une affaire civile,, les coutumes de Champagne exigeaient, au treizième siècle, le témoignage uniforme de trois laïques ou de deux prêtres.

ils ne feront, ne souffriront à faire doumage à tort là où ils le puissent oter, à l'église de Pontigny, ne aus biens, ne aus personnes.

Voyez pièces

En 1244, le pape avait renouvelé les exemptions déjà accordées à l'abbaye de Pontigny. Comme justificatives. il n'était permis de communiquer en aucune manière avec les excommuniés, les religieux pouvaient se trouver abandonnés et dans un entier isolement, si les campagnes qui les environnaient tombaient dans l'excommunication. C'est pourquoi le pape déclare qu'une sentence d'excommunication ne pourra frapper, ni les religieux, ni leurs serfs, ni leurs amis, ni ceux qui vont à leurs moulins ou à leurs fours bannaux.

Le même pape, ayant appris que certains prélats se rendaient à l'abbaye avec une suite nombreuse, et qu'ils exigeaient impérieusement l'hospitalité, leur écrivit qu'ils n'étaient pas tenus à ces réceptions dispendieuses. C'est, leur dit-il, notre sollicitude paternelle qui nous presse de vous écrire ces lignes, afin de pourvoir à votre tranquillité.

JACQUES.

AUSSITÔT que Jacques eut pris possession du gouvernement de l'abbaye, il fit voir qu'il sortait de sa vocation. Il s'engagea dans des affaires qu'il ne connaissait pas; des hommes sans pudeur abusèrent de son ignorance; des religieux même le trompèrent ęt commirent des dilapidations. Le désordre du

T. I, p. 22.

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