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P. 370.

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roi Philippe-le-Bel. Comme elle traînait en longueur,
on convint, pour le bien de la paix, de s'en rap-
porter au jugement de deux arbitres. La comtesse
prit Robert, duc de Bourgogne, et l'abbé de Ponti-
gny, prit Thibault, abbé de Citeaux. Il fut con-
venu que toute espèce de juridiction, tant pour
instruire les causes, que pour rendre les jugemens
et les faire exécuter, surtout dans les terres de Sainte-
Porcaire, du Beugnon, de Beauvais et d'Aigremont,
appartiendrait entièrement à l'abbaye de Pontigny;
que la garde des plaines, des terres, des bois, des
chemins, des sentiers domaniaux, qui se trouvaient
dans la circonscription de ces granges, serait aussi
en toute propriété aux religieux de Pontigny. Cepen-
dant, on excepta les cas criminels, d'après lesquels,
selon les coutumes du comté de Tonnerre, un
'homme, une femme, une bête, pouvaient être con-
damnés à être pendus, à avoir un membre coupé,
ou à être exilés à perpétuité (1). Ce droit de haute.

(1) On condamnait alors une chèvre, un porc à être pendu, à avoir un membre coupé, ou à l'exil. Pro quibus (criminibus) *secundum consuetudinem comitatús Tornodori, homo, nulier aut bestia judicari potest, et debet suspendi, sive mori, corpus perdere, sive membrum, aut banniri in perpetuum duntaxat. Qui casus nobis ac successoribus nostris remanebunt. C'est la comtesse de Tonnerre qui parle ainsi. Laissant à part le ridicule de ces condamnations juridiques du bétail, cetle loi avait pour but d'obliger les serfs à veiller de près sur leur bétail, sous peine de se voir enlever tous ceux de leurs animaux qui auraient blessé les hommes ou endommagé les propriétés; car il y avait beaucoup à craindre de ces gros troupeaux que l'habitude de fréquenter les bois avaient rendus à demi-sauvages. C'est de l'application d'une loi semblable qu'est venu le nom de rue du Chien-Pendu, que l'on trouve à Héry et à Hauterive

justice fut accordé à la comtesse et à ses successeurs, ainsi que celui de passer librement par les terres de ces granges. S'il survenait une affaire criminelle dans l'une de ces terres, l'exécution du coupable devait avoir lieu au-dessous du chemin de l'Ordonois, sur les terres des religieux, non loin du bois des habitans de Ligny. La comtesse s'obligea à ne dresser de fourches patibulaires sur aucun autre endroit des terres de l'abbaye, et à n'y faire exécuter aucun malfaiteur dont le crime aurait été. commis ailleurs que sur leurs terres.

La comtesse approuve que le lit de la rivière soit détourné pour passer dans l'abbaye, et que l'on conservé l'écluse qui existe. L'eau de la fontaine de Ligny-la-Ville pourra aussi être détournée au gré des religieux, pourvu qu'ils ne portent de préjudice à personne. La même comtesse défend expressément d'élever de nouvelles forteresses; elle ne s'oppose point à la conservation des meurtrières qui sont dans les murs de la grange de Sainte-Porcaire, les religieux pourront même réparer toutes celles qui sont dans leurs autres terres, et construire de nouvelles portes, s'ils le jugent à propos.

Quant à la justice de l'abbaye de Pontigny, dont la cause en particulier avait été portée au tribunal de Philippe-le-Bel, les arbitres voulurent que l'on gardât le silence sur cette question, sauf aux religieux à porter leurs plaintes auprès du roi, s'ils éprouvaient quelques vexations. Pour le droit de chasse, que les religieux avaient ou pouvaient avoir dans le bois de Contest, dan's ceux des environs, et dans le territoire de la grange de Sainte-Porcaire,

il appartient désormais à la comtesse de Tonnerre et à ses successeurs, sans toutefois nuire à la justice de l'abbaye. La comtesse ne fera plus de haies pour chasser dans les bois; elle sera libre d'employer des chiens, des furets ou des filets pour chasser dans les vignes et dans les jardins,, pourvu qu'elle ne fasse point de dommage. S'il arrivait que l'on trouvât une bête fauve sur le territoire de la grange de Sainte-Porcaire, on doit la lui donner. Les bergers ou les pâtres qui gardent le bétail dans le canton de Sainte-Porcaire, prêteront serment à elle, à ses successeurs, ou à leur fondé de pouvoir, dans l'église. de Ligny-le-Châtel, qu'ils ne laisseront pas courir leurs chiens après une grosse bête fauve. Ce serment prêté, ils pourront conduire leurs chiens sans laisse. Le prévôt de Ligny-le-Châtel, ses sergens, les gardes forestiers, prêteront aussi serment dans la même église, qu'ils n'exerceront aucune juridiction sur les lieux dont la justice appartient aux moines, Dans le cas, dit la comtesse, où la châtellenie de Ligny-le-Châtel serait détachée du comté de Tonnerre, je veux, pour le bien de l'abbaye, que son ressort soit toujours à Tonnerre. Ces détails nous font connaître les mœurs des grands à la fin du treiziéme siècle. La vaine prérogative d'un droit de justice ou d'un droit de chasse, qu'ils n'avaient quelquefois jamais occasion d'exercer, suffisait pour exciter des procès énormes, ou pour soulever des guerres désastreuses. Nous allons, bientôt voir le comte de Tonnerre revenir sur l'accord de la comtesse Marguerite, et remporter une funeste victoire.

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ÉTIENNE DURAND.

Le choix des moines dans l'élection du nouvel, T. 1, p. 25. abbé, en 1293, tomba sur le plus humble et le plus vertueux des frères. Ce choix éclairé fait l'éloge de la communauté qui vivait alors. Durand, abîmé dans la contemplation, mort depuis long-temps aux choses de ce monde, sentit qu'on le faisait sortir de sa vocation. Il assembla les religieux dans le chapitre, leur exposa son indignité, et les supplia de jeter les yeux sur un autre plus capable que lui, pour les diriger dans la voie du salut. Il fallut céder à ses instances. Alors on élut Symon, qui vécut peu d'années. Après sa mort, les regards se tournèrent encore sur Durand, qui fut élu d'un consentement unanime. Pour obéir à la voix de Dieu, qui l'appelait au gouvernement de l'abbaye, il accepta; mais bientôt, effrayé du fardeau qu'on lui avait imposé, il donna sa démission pour la seconde fois, et mourut dans une heureuse vieillesse, laissant aux frères l'exemple d'une humilité rare et d'un parfait religieux. Son corps fut déposé dans le chapitre du côté gauche en entrant, avec une épitaphe qui renferme l'éloge de ses vertus (1).

(1) Hac Stephanus Felix Durandus clauditur urná

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T. II, p. 492.

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Guillaume de Dissangy, chevalier; Fauca, sonépouse, et Guillemin, leur fils, demandèrent, en 1291, à être inhumés à Pontigny, et dressèrent un acte notarié, de peur qu'on ne changeât leur dernière intention. Considérant, disent-ils, que les. biens spirituels vont toujours croissant dans cette maison, et qu'ils s'y accroîtront de plus en plus, avec la grâce de Dieu. Comme nous désirons pourvoir au salut de nos âmes, nos dernières volontés sont d'y être inhumés. » Ils firent, à cette occasion, une donation de quatre-vingts livres de rente.

La même année, Guy, sire de Maligny, s'exprime ainsi dans une donation qu'il fait à l'abbaye : Pour la devocion que je et mi devencier havons touz jours heu au diz religieux, je lor otroi, conferme et admortis à touz jours, toutes les terres et toutes les rentes -que li diz religieux hont et tiennent de moy et de mes devantiers, soit en fié, rière-fié, justice, seignorie, aumone ou en héritaige.

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T. I, p. 25.

SYMON.

SYMON fut trouvé digne de remplacer Etienne, après sa démission; il joignait, à la science des. saints, toute l'habileté que demande la direction. d'une maison conventuelle. Les religieux, qu'il conduisait avec autant de zèle que de douceur et de charité, marchaient à grands pas dans les voies de la perfection. Pour lui, il jouissait de cette paix, de Voyez pièces cette tranquillité qu'une âme fidèle trouve dans la

justificatives.

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