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MATHIEU DE MÉGRIGNY.

Né à Paris, frère du premier président du parlement d'Aix, de Mégrigny fut reçu docteur de la faculté de théologie de Paris étant religieux de Clairvaux. Il avait fait ses cours avec distinction. Il soutint dans une thèse publique qu'un simple prêtre pouvait, avec la permission du Saint-Siége, ordonner des diacres et des sous-diacres, et que l'abbé de Citeaux et les quatre premiers pères de l'ordre pouvaient non-seulement donner la tonsure et les quatre ordres mineurs à leurs propres religieux (pouvoir dont tous les abbés peuvent user), mais encore ordonner des sous-diacres et des diacres, même depuis le concile de Trente.

En 1636, il eut l'abbaye de Quincy par la résignation de son oncle Louis de Mégrigny, fondateur des Chartreux d'Orléans. Il rétablit l'église de ces religieux, qui tombait en ruines. Sept ans après, il fut élu abbé de Pontigny. Il voulut conserver sa première abbaye en commende; mais le chapitre général de Cîteaux lui proposa le choix de se démettre de l'abbaye de Pontigny ou de celle de Quincy. Alors il résigna cette dernière à un de ses neveux, se réservant deux mille livres de rente. It fit un tort considérable à cette maison, qui est toujours restée en commende.

Pendant qu'il était abbé de Pontigny, de Mégrigny fut atteint d'une maladie qu'il garda jusqu'à la

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mort, ce qui fut regardé comme un secret jugement de Dieu. Il se trouvait à Paris lorsque la mort l'enleva en 1650. Son corps fut déposé dans le chœur de l'église du collège de l'ordre. Les biens de son abbaye se trouvaient alors dans un délabrement pitoyable. Les maisons, les enclos, les fermes, tout tombait en ruines; les revenus étaient saisis par les créanciers et se consumaient en frais, tandis que les religieux manquaient du nécessaire. Le roi, informé de ce désordre, nomma François Chassin bailly de Saint-Florentin, économe, avec ordre de faire un relevé des sommes dues et un devis des réparations à faire. Il était dû soixante et treize mille six cent quarante livres. Le devis des réparations montait à quatre-vingt-huit mille trois cent soixante et quinze livres.

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Les Mémoires de Georges Viole se terminent à cet abbé, qu'ils placent le quarante-quatrième, et les auteurs de la Gaule chrétienne le quarante-huitième.

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LOUIS MARTEL.

LE siége abbatial vacquait depuis un an, lorsque Louis Martel, religieux de la Noe, docteur de Paris et prieur de Pontigny, fut élu abbé en 1651. Dom le Grand, homme sans jugement, d'une humeur inquiète et orgueilleuse, forma une cabale pour s'opposer à son élection. Les choses allèrent si loin, qu'il fallut un arrêt du parlement pour annuler son opposition. Louis Martel prit possession le jour de

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saint Barthélemi, après avoir été bénit par l'abbé de Citeaux, dans l'église des Jésuites de Dijon.

Louis Martel était bon prédicateur, très-versé dans la connaissance des Écritures. Sa taille était élevée, son tempérament robuste, sa physionomie prévenante. On le jugea capable de réparer les pertes que l'abbaye avait éprouvées. En effet, il acquitta considérablement de dettes ; il répara les lieux réguliers. Sur la fin de ses jours, son esprit s'affaiblit, de sorte qu'il se laissait conduire par ses domestiques. Ce mal, qui lui était particulier, devenait grand pour l'abbaye; mais de la Varande, qui était alors prieur, continua de diriger les affaires de l'abbaye avec une rare habileté, il recueillit le dernier soupir de Louis Martel, qui mourut le 6 mars 1672, après vingt ans d'administration. Il repose dans le sanctuaire.

JACQUES LE BOURGEOIS DE LA VARANDE.

DEPUIS plus d'un siècle les Mémoires de l'abbaye s'étendent sur les souffrances de l'administration temporelle; il semble que les malheurs publics ont absorbé toute l'attention, et qu'on néglige le bien spirituel des religieux. L'abbaye avait en effet perdu de sa ferveur et de sa régularité. Ce ne sont plus ces moines occupés uniquement comme autrefois à servir Dieu et les pauvres, ces saintes âmes purifiées par les macérations et élevées par les méditations contemplatives, ne connaissant rien des bruits et des déréglemens du monde, servant de modèles de

la piété chrétienne, et de médiateurs entre le ciel et la terre. Les guerres du quinzième siècle, celle des Huguenots, celle de la Ligue, avaient dispersé les religieux dans les villes et dans les châteaux. Les visites annuelles et les chapitres généraux avaient été suspendus; la discipline en souffrit, et le relâchement s'introduisit dans l'abbaye. Le commerce des religieux avec le monde durant leur dispersion leur avait fait oublier peu à peu les devoirs de leur élat. Ces maux furent de trop longue durée pour ne pas laisser des traces profondes. Plusieurs papes, malgré leurs soins, ne purent faire revivre qu'imparfaitement l'amour de la retraite et les vertus qui avaient long-temps distingué l'Ordre. Ce n'est pas tout: trois abbés commendataires de suite, qui ne laissent que l'exemple de la profusion et du luxe; l'abbaye cédée, léguée comme un bien de famille; ses revenus, qui devaient être le patrimoine des pauvres, la subsistance des religieux, recherchés par des hommes qui les troublent jusque dans leur retraite, c'est là ce qui affligeait l'Église entière. Durant ces orages, les supérieurs ne se conservèrent pas plus purs que leurs subordonnés; ils furent agités par des intérêts personnels qui absorbaient la pensée de leurs devoirs les plus pressans. On a vu l'abbé de Citeaux essayer de se soustraire à la surveillance des quatre premiers pères. Clément IV, en 1265; Benoît XII, en 1335, réprimèrent les projets des ambitieux ; mais, pendant les troubles, on vit renaître ces anciennes querelles. Les passions ayant ainsi succédé au zèle du bien public et à la charité, il n'était pas facile de rétablir la discipline intérieure, je parle de

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l'ordre de Citeaux en général, voilà ce qui amena la réforme.

En 1615, quelques abbés français demandèrent la réforme à grands cris. Ils étaient appuyés du cardinal de la Rochefoucault et de tous les gens de bien. L'abbé de Citeaux et les quatre premiers pères n'eurent d'autre parti à prendre que de se mettre à la tête de l'entreprise, s'ils ne voulaient pas s'exposer à la honte de rester seuls dans le relâchement.

Il s'éleva d'abord de grandes difficultés : ceux qui demandaient la réforme, voulaient tout ramener à l'ancienne sévérité, rétablir surtout l'abstinence de la viande. L'abbé général et les pères croyaient devoir accorder quelque tempérament à l'influence des siècles et au changement de mœurs, de peur que les religieux ne vinssent à briser un joug devenu trop pesant. Enfin, après cinquante ans de contestations sur le plus ou le moins d'austérités, tout fut pacifié par un bref d'Alexandre VII, en 1666. Il fut permis à la plupart des communautés de refuser l'abstinence de la viande; c'est ce qu'on appela la commune observance. Les autres se soumirent à l'abstinence, et se nommèrent les réformés. Parmi ces derniers, la Trappe et Sept-Fonts embrassèrent, en 1663, l'observance primitive dans toute sa rigueur. L'abbaye de Pontigny resta de la commune observance.

Jacques de la Varande pouvait seul soutenir l'abbaye dans ces circonstances difficiles. Il fut élu huit mois après la mort de l'abbé Martel. Son affabilité, son zèle pour procurer la gloire de Dieu, lui gagna la pluralité des suffrages. Il était de Nor

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