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jouissaient, ainsi que l'usage dans toute la forêt d'Othe, dans les bois qui appartiennent à l'archevêque de Sens et à l'évêque de Troyes.

La vaste forêt d'Othe, dont il a déjà été parlé plusieurs fois, s'étendait depuis Joigny jusqu'à Troyes; elle rappelle ces époques où les Gaules, peu habitées, étaient couvertes de bois. Chaque contrée avait un nom particulier, comme Franquil ou Francœur, vers Sormery; Valgomer ou Vaugomer (1), du côté de Joigny; le bois du chasseur, du château Witton, de Saint-Etienne, de SaintPierre, de Saint-Loup. Elle prit aussi le nom des villages qui l'avoisinaient; plusieurs même se sont formés en reculant les limites de cette forêt, et en ont tiré leurs surnoms, comme: Aix-en-Othe, Bercenay, Bligny, Bussy, Nogent, Paroy et Séant-enOthe. L'archevêque de Sens, l'évêque de Troyes, les établissemens religieux de ces deux villes, les comtes, les seigneurs voisins, l'abbaye de Pontigny et celle de Dilo, possédaient cette forêt dans toute son étendue (2). Le peu de parti que l'on tirait de

(1) Fallis Gomeri.

(2) Léothéric, archevêque de Sens, donna la partie vers Arces à l'abbaye de Saint-Pierre de Sens en 1006. Hugues-leChasseur permit, en 1140, aux habitans de Bours, de mettre en culture ce qu'ils voudraient de la forêt d'Othe, les tenant quittes de toute rétribution. Henri, dit le Sanglier, archevêque de Sens, avait accordé la même permission à l'abbaye de Dilo en 1127. Erard de Brene vendit deux mille arpens de cette forêt à Gaulthier Cornut, archevêque de Sens (1241); celui-ci, en mourant, en laissa les trois quarts aux archevêques ses successeurs, et le reste aux chanoines de sa cathédrale. Seguin de Saint-Florentin et Reine, son épouse,* possédaient dans cette

de France.

Legendre, Hist. ces grandes propriétés, a fait dire à un de nos historiens que les grands de ce temps-là fondaient des abbayes sans qu'il leur en coûtât beaucoup : ils cédaient à des moines autant de terres incultes qu'ils pouvaient en mettre en valeur. Ces troupes pénitentes ne s'étant point données à Dieu pour mener une vie oisive, travaillaient de toutes leurs forces

forêt, vers Chailley, du fer, c'est-à-dire des forges, des abeilles, du bois et des plaines. Ils accordèrent à l'abbaye de Pontigny la permission d'arracher le bois et de mettre en culture tout ce qui lui conviendrait. Alpace, mère de Seguin, et Garmon son frère, avaient déjà accordé de semblables permissions. Thibault V, comte de Champagne, seigneur suserain d'une vaste contrée de la forêt d'Othe, permit aux moines de Pontigny, pour le salut de son âme et pour le salut de celles de ses prédécesseurs, de disposer à leur volonté de ce qui lui appartenait dans cette forêt; de couper du bois, d'en vendre ou d'en donner à qui ils voudraient ; de mettre du terrain en culture, d'y bâtir, d'y faire des cendres et d'y prendre de l'écorce pour faire du tan. Si les chiens de ceux qui gardent le bétail des religieux, dit le comte, prennent du gibier, ou s'il s'en trouve que personne ne réclame, ils pourront l'emporter pour ceux des frères qui seront malades (1199 et 1220)..

A la suite de tant de concessions, cette immense forêt se trouva réduite insensiblement et resserrée entre les villages qui se formèrent autour d'elle. En 1789, les chapitres et les couvens la possédaient presque en entier par suite d'achats, d'échange et de donations. L'abbaye de Pontigny y possédait peu de bois. Ces établissemens ayant alors été supprimés, la forêt passa dans le domaine de l'état.

Plusieurs de nos historiens ont fait mention de la forêt d'Othe: Froissard, t. 1; Loup de Ferrière, épît. 25; Nitard, liv. 11; Camusat, Prompt., p. 35; les Cartulaires de Pont. en vingt endroits différens, et le Gall. chr., t. xi, p. 35. Quelques antiquaires en ont fait une retraite de Druides, en leur assignant Aix-en-Othe pour château-fort, avec un vaste domaine. On en fait aussi un canton appelé Pagus Uttensis. Cette forêt est appelée dans les chartes latines Otta, Ota, Hota, Horta, Utta, Otha.

Voyez pièces

a dessécher, à défricher, à bâtir, à planter, moins pour être plus à leur aise que pour soulager les pauvres, car ils vivaient dans une grande frugalité. justificatives. En 1159, l'abbé Guichard écrivit au pape Alexandre III, pour le supplier de prendre sous sa protection l'abbaye de Pontigny, dont les biens temporels commençaient à exciter l'envie des seigneurs voisins. Il le pria, en même temps, d'employer son autórité pour arrêter la légèreté de certains moines, qui ne pouvaient se fixer nulle part. Le pape lui répondit qu'il se faisait une joie d'accéder à toutes les dêmandes qui lui étaient adressées pour le bien de ta religion, et que, se rendant à ses désirs, il prenait sous sa protection et sous celle de saint Pierre le monastère de Pontigny, en souhaitant que l'ordre qui y a été établi, fleurisse à perpétuité dans la crainte de Dieu et l'observance de la règle de saint Benoit'.

Le pape approuve ensuite les possessions de l'abbaye; il cite en particulier les granges dont il a déjà été parlé; il défend à qui que ce soit d'exiger des dimes des biens que les moines cultivent de leurs propres mains, ou qu'ils font cultiver, ainsi que du bétail qu'ils nourrissent. Il termine en disant qu'aucun religieux ne se permette de sortir du monastère par légèreté ou sans en avoir auparavant obtenu la permission du prieur ou de l'abbé. Si cependant il quitte l'abbaye, il défend à toute autre maison religieuse de le recevoir, à moins qu'il ne soit muni de certificats en bonne forme. Dans le nombre de ceux qui accouraient à Pontigny pour se ranger sous la bannière des moines, il s'en trouvait dont la

vocation n'était pas assez éprouvée, et qui, pour s'affranchir de l'observance, quittaient le monastère et allaient se présenter à d'autres maisons.

Lorsque le Pape parle des moines qui cultivaient leur champs de leurs propres mains, on doit l'entendre des frères convers que l'on envoyait dans les fermes. La règle de saint Benoît commandait le travail des mains: il eut lieu en effet tant que les moines ne firent point partie du clergé proprement dit; mais aussitôt qu'ils furent admis aux ordres sacrés, il devint sinon impossible, au moins difficile que le travail manuel ne souffrit pas de notables modifications. On attachait trop de respect aux sciences et aux occupations cléricales, pour que l'opinion des peuples souffrit que les hommes du sacerdoce remplissent leur vie de travaux matériels, qui n'étaient alors que le partage des serfs.

Ces vastes travaux, qui avaient signalé les commencemens de la vie cénobitique, lorsque les moines défrichaient les forêts, cultivaient leurs déserts et leurs solitudes, ne pouvaient continuer long-temps. Des villages, des bourgs, des villes, remplis de serfs, de cultivateurs, s'étant formés successivement autour des monastères, les abbés abandonnèrent à ces agglomérations croissantes le soin de cultiver le patrimoine monastique. Bientôt les princes et les rois s'arrêtent dans les monastères avec leur suite; et au moyen-âge, ces demeures hospitalières accueillent les pèlerins, les voyageurs, et leur rendent tous les services que nous trouvons dans nos hôtelleries modernes. Comment pourraient-elles encore s'accommoder des occupations rustiques des pre

miers solitaires? Les moines ne travaillent plus que dans l'enclos du monastère; ils se partagent tour-àtour les soins du jardin, de la cuisine, du pain, de l'infirmerie, de l'église et de toutes les nécessités domestiques de leur habitation. Le soin de copier des livres, les prières, les chants de l'église, les lectures, les méditations, remplaçaient efficacement le travail des mains.

On compte douze établissemens fondés du temps de l'abbé Guichard, parmi lesquels on cite Cercamp, le Pin, l'Estrée, l'Etoile, Trisay, Saint-Martin-deViterbe et Notre-Dame de l'Isle de Rhé. Ainsi c'est encore cent quarante-quatre religieux qui sortirent successivement de Pontigny pour aller porter au loin la bonne odeur de Jésus-Christ. Ebro de Macoléon écrivit à l'abbé Guichard des lettres pleines de sentiment au sujet de la fondation du monastère de NotreDame de l'Isle de Rhé. Il promit tout ce qu'on pourrait désirer pour l'établissement des moines. « C'est le vœu général, dit-il, que vous fondiez ici une maison selon les statuts de votre ordre; c'est pourquoi nous vous conjurons affectueusement de nous envoyer, le plus tôt possible, des religieux qui puissent honorer notre pays et inspirer l'amour de la retraite et de la vertu ».

Le temps était déjà venu que la petite église, bâtie dès l'origine, ne suffisait plus au nombre des moines et à la splendeur du monastère. Thibault-leGrand, comte de Champagne, de Blois et de Chartre, père de la reine Adèle, épouse de Louis VII, dit le Jeune, se chargea d'en construire une autre plus appropriée à l'état présent de l'abbaye et à la majesté

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