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La Justice passa, la balance à la main.

45 Devant elle à grand bruit ils expliquent la chose.
Tous deux avec dépens veulent gagn
La Justice, pesant ce droit litigieux,
Demande l'huître, l'ouvre, et l'avale
Et par ce bel arrêt terminant la batail
50 Tenez, voilà, dit-elle, à chacun une é
Des sottises d'autrui nous vivons au p
Messieurs, l'huître étoit bonne. Adieu.

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1. D'Alembert et Chamfort ont comparé cette taine, 1. IX, fabl. IX. Ils n'ont pas eu de peine à notre grand fabuliste sur Boileau. La pièce de La détails ingénieux, pittoresques et dramatiques. Ce peu sèche; mais l'un est à son aise dans un genre l'autre, sans entreprendre de rivaliser avec un adve plus brièvement une leçon de morale. Il serait compte de cette différence. C'était si bien l'intenti sait, selon Brossette, La Fontaine de manquer de j dans sa fable qu'un juge sous le nom de Perrin-D sont tous les gens de justice qui causent des frais plus savoir gré à Boileau d'avoir dénoncé les ab chicane. Il y reviendra avec plus de force dans l

ÉPITRE III.1

A M. ARNAULD

DOCTEUR DE SORBONNE.2

Oui, sans peine, au travers des sophismes de Claude,3 Arnauld, des novateurs tu découvres la fraude,

1. Composée en 1673.

2. De 1674 à 1694, ce titre est omis dans les éditions de Boileau. « Il fallut attendre la mort d'Arnauld pour lui donner un titre qu'il avait tant illustré par ses écrits.» (BERRIAT-SAINT-PRIX.) Ce fut en 1668 que le premier président de Lamoignon mit en relation le poëte et le docteur de Sorbonne. A cette première rencontre, « ils se sentirent d'abord l'un pour l'autre cette espèce d'inclination qui produit l'amitié. Celle qu'ils contractèrent ensemble fut en effet des plus étroites, et, nonobstant une séparation de plusieurs années, dura jusqu'à la mort. » (SAINT-MARC.) — Antoine Arnauld naquit à Paris, le 6 février 1612, il fut reçu de la maison de Sorbonne en 1643, après bien des obstacles; il était docteur depuis 1641. Grammaire, belles-lettres, géométrie, logique, physique, métaphysique, théologie, droit civil et canonique, tout était de son ressort. Il se rendit redoutable aux protestants; devenu suspect à la cour, il se retira dans les Pays-Bas et mourut à Bruxelles en 1694.

3. Il étoit alors occupé à écrire contre le sieur Claude, ministre de Charenton. (BOILEAU, 1713.) Jean Claude, le plus célèbre des controversistes protestants et qui discuta contre Bossuet, Arnauld et Nicole, naquit à la Sauvetat (Lot-et-Garonne), en 1619, et mourut à la Haye, où il s'était réfugié après la révocation de l'édit de Nantes, le 13 de janvier 1687. Ses œuvres, toutes de controverse, n'ont pas été réunies. Sa manière d'écrire est exacte et serrée, l'on trouve dans ses ouvrages un grand fonds d'érudition, une grande justesse d'esprit, et une adresse merveilleuse à mettre en œuvre toutes les finesses de la logique.

Le livre d'Antoine Arnauld auquel Boileau fait allusion dans sa note est sans doute la Perpétuité de la foy de l'Église catholique touchant l'Eucharistie, défendue contre le livre du sieur Claude. Paris, 1669, 1672 et 1684, 3 vol. in-4o. (M. CHÉRON.)

Et romps de leurs erreurs les filets captieux, Mais que sert que ta main leur dessille les yeux 5 Si toujours dans leur âme une pudeur rebelle, Prêt d'embrasser l'Église, au prêche les rappelle? Non, ne crois pas que Claude, habile à se tromper, Soit insensible aux traits dont tu le sais frapper; Mais un démon l'arrête, et, quand ta voix l'attire, Lui dit: Si tu te rends, sais-tu ce qu'on va dire? Dans son heureux retour lui montre un faux malheur, Lui peint de Charenton 1 l'hérétique douleur;

15

Et, balançant Dieu même en son âme flottante, 2
Fait mourir dans son cœur la vérité naissante. 3

Des superbes mortels le plus affreux lien,
N'en doutons point, Arnauld, c'est la honte du bien.
Des plus nobles vertus cette adroite ennemie
Peint l'honneur à nos yeux des traits de l'infamie,

1. Lieu près de Paris, où ceux de la R. P. R. (religion prétendue réformée) avoient un temple. (BOILEAU, 1713.) L'édification d'un temple à Charenton fut autorisée par lettres patentes d'Henri IV du 1er août 1606. Ce premier temple, qui n'était qu'un bâtiment insignifiant, fut détruit en 1621 dans une émeute contre le protestantisme. Jacques de Brosse fut alors chargé de construire un véritable temple, qui disparut lors de l'édit de Louis XIV, du 18 d'octobre 1685, qui révoquait l'édit de Nantes et ordonnait la destruction de tous les temples protestants. Cf. Ch. Marty-Laveaux, Charenton au dix-septième siècle. Paris, Dumoulin, 1853, in-8°. (M. CHÉRON.)

2. Tu balançais son dieu dans son cœur alarmé.

(VOLTAIRE, Zaïre, acte V, scène x.)

3. « Claude avait plus d'esprit et de conscience qu'on ne lui en suppose là. Ce livre de la Perpétuité était moins convaincant et plus choquant pour lui et pour les siens que Boileau ne se l'imagine. » (Sainte-Beuve, Port-Royal, V, p. 333.) — Il y a dans ces vers une richesse d'expressions poétiques que les ennemis de Boileau lui ont reprochée comme autant de fautes. Desmarets, Pradon, Féraud répètent là-dessus les mots de galimatias, d'impropriétés, d'expressions ridicules; c'est mal comprendre les hardiesses heureuses d'un poëte.

Asservit nos esprits sous un joug rigoureux,

20 Et nous rend l'un de l'autre esclaves malheureux. Par elle la vertu devient lâche et timide.

Vois-tu ce libertin en public intrépide,

1

Qui prêche contre un Dieu que dans son âme il croit?
Il iroit embrasser la vérité qu'il voit;

2

25 Mais de ses faux amis il craint la raillerie,
Et ne brave ainsi Dieu que par poltronnerie.
C'est là de tous nos maux le fatal fondement.
Des jugements d'autrui nous tremblons follement ;
Et, chacun l'un de l'autre adorant les caprices,

3

1. Libertin pris dans le sens d'esprit fort. — Cizeron-Rival assure avoir trouvé cette note dans les papiers de Brossette: « Ce caractère est général. Cependant l'auteur m'a dit que M. le prince (le grand Condé), étant près de mourir (en 1686), fit appeler ses gens, et leur dit : Vous m'avez souvent oui dire des impiétés; mais dans le fond je croyois tout le contraire de ce que je disois. Je ne contrefaisois le libertin et l'athée que pour paroître plus brave.» Bossuet lui fait tenir ce langage: « Je n'ai jamais douté des mystères de la religion, quoi qu'on ait dit. »

2. « Rien n'est plus lâche que de faire le brave contre Dieu.» (PASCAL.) - « Les esprits forts savent-ils qu'on les appelle ainsi par ironie?» (LA BRUYÈRE.) Racine fait dire à Joad s'adressant aux Juifs :

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3. Tout cela est assez pauvre de philosophie et de raison, il faut en convenir cette mauvaise honte, cet affreux lien des mortels, n'est aux mains de Boileau qu'un fil très-fragile et assez court avec lequel il tâche de cheminer jusqu'au bout de son épître de quatre-vingt-dix-huit vers, et d'en nouer tant bien que mal, et plus subtilement que solidement, les trois ou quatre morceaux. Car Boileau procède volontiers par morceaux, par couplets; cela est sensible à la lecture. Il est un poëte de verve courte et saccadée, non continue. On distingue les pauses, les transitions lui coùtaient beaucoup. Il ne rejoint pas toujours très-exactement ces morceaux successifs ni par d'assez habiles soudures. » (Sainte-Beuve, Port-Royal, V, p. 333.)

30 Nous cherchons hors de nous nos vertus et nos vices. 1 Mirérables jouets de notre vanité,

Faisons au moins l'aveu de notre infirmité.

A quoi bon, quand la fièvre en nos artères brûle,
Faire de notre mal un secret ridicule?

35 Le feu sort de vos yeux pétillants et troublés,

3

2

1

Votre pouls inégal marche à pas redoublés :
Quelle fausse pudeur à feindre vous oblige?
Qu'avez-vous?-Je n'ai rien.-Mais...-Je n'ai rien, vous dis-je,'
Répondra ce malade à se taire obstiné.

% Mais cependant voilà tout son corps gangrené; "
Et la fièvre, demain se rendant la plus forte,
Un bénitier aux pieds va l'étendre à la porte. "
Prévenons sagement un si juste malheur.

5

1.

2.

3.

4.

Nec te quæsiveris extra.

(PERSE, sat. I, v. 7.)

Neu, si te populus sanum, recteque valentem
Dictitet, occultam febrem sub tempus edendi
Dissimules, donec manibus tremor incidat unctis.
(HORACE, liv. I, ép. VI, v. 21-23.)

Si dans cet instant même un feu séditieux
Fait bouillonner mon sang et pétiller mes yeux.

(Épître IX, v. 41-42.)

Heus! bone, tu palles. Nihil est. Videas tamen istud,
Quidquid id est...

(PERSE, sat. III, v. 94-95.)

5. Dans les éditions de 1683, 1685, 1694 et 1701, on lisait cangrene. Selon Vaugelas, il fallait écrire gangrené et prononcer cangrené.

6. Boileau dans ce passage imite et abrége Perse:

Sed tremor inter vina subit, calidumque triental
Excutit e manibus: dentes crepuere retecti:
Uncta cadunt laxis tunc pulmentaria labris.
Hinc tuba, candela: tandemque beatulus alto
Compositus lecto, crassoque lutatus amomo,
In portam rigidos calces extendit.

(Satire III, v. 99.)

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