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Observe une police, obéit à des lois.

Il est vrai. Mais pourtant sans lois et sans police,
Sans craindre archers, prévôt, ni suppôt de justice,
125 Voit-on les loups brigands, comme nous inhumains,
Pour détrousser les loups courir les grands chemins??
Jamais, pour s'agrandir, vit-on dans sa manie
Un tigre en factions partager l'Hyrcanie ?3

L'ours a-t-il dans les bois la guerre avec les ours?

4

1. Ce mot police, qui vient du grec nohtɛía, exprimait, au temps de Boileau, l'ensemble des mesures qui assurent le bon ordre dans un Etat. « Dieu dicta à Moise... ce qu'il y a de plus beau les règles des bonnes mœurs, la police et le gouvernement de son peuple élu.» (BOSSUET, Histoire universelle, 1re partie, chap. iv.)

2.

Neque hic lupis mos, nec fuit leonibus

Unquam nisi in dispar, feris...

(HORACE, épod. VII, v. 11-12.)

Sed jam serpentum major concordia: parcit
Cognatis maculis similis fera. Quando leoni
Fortior eripuit vitam leo? quo nemore unquam
Expiravit aper majoris dentibus apri?

Indica tigris agit rabida cum tigride pacem
Perpetuam. Sævis inter se convenit ursis.
Ast homini ferrum lethale, etc.

(JUVENAL, satire XV, v. 159-165.)

PLINE LE NATURALISTE : « Denique cætera animalia in suo genere probe degunt; congregari videmus et stare contra dissimilia... At Hercules! homini plurima ex homine sunt mala. » (Livre VII, in prooem.) HOBBES : • Homo homini lupus. - On a essayé de réfuter cette déclamation poétique; c'était bien inutile. On ne doit y voir qu'une boutade du satirique.

3. Province de Perse, sur les bords de la mer Caspienne. (BOILEAU, 1713.) 4. Jusqu'en 1674 ce vers étoit ainsi :

L'ours fait-il dans les bois la guerre avec les ours?

M. de Brienne, La Fontaine, Racine remarquèrent que l'on ne disoit pas « faire la guerre avec quelqu'un, » mais « à quelqu'un; » on s'efforça de corriger ce vers, mais personne n'y put réussir. Enfin, après plusieurs éditions, Boileau trouva le moyen de le rectifier par le changement d'un seul mot :

L'ours a-t-il dans les bois la guerre avec les ours?

On fut étonné qu'une correction si facile eût été si difficile à trouver par de si habiles gens. (BROSSETTE.)

t

130 Le vautour dans les airs fond-il sur les vautours?
A-t-on vu quelquefois dans les plaines d'Afrique,
Déchirant à l'envi leur propre république,
«Lions contre lions, parents contre parents,
« Combattre follement pour le choix des tyrans?"
135 L'animal le plus fier qu'enfante la nature,
Dans un autre animal respecte sa figure,
De sa rage avec lui modère les accès,

Vit sans bruit, sans débats, sans noise, sans procès.
Un aigle, sur un champ prétendant droit d'aubaine,
440 Ne fait point appeler un aigle à la huitaine;

145

Jamais contre un renard chicanant un poulet

3

Un renard de son sac n'alla charger Rolet; '
Jamais la biche en rut n'a, pour fait d'impuissance,
Traîné du fond des bois un cerf à l'audience:

Et jamais juge, entre eux ordonnant le congrès,'

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1. Parodie. Il y a dans le Cinna, Romains contre Romains, etc. (BoiLEAU, 1713):

Romains contre Romains, parents contre parents
Combattre seulement pour le choix des tyrans.

(CORNEILLE, Cinna, acte I, scène xIII.)

2. C'est un droit qu'a le roi de succéder aux biens des étrangers qui meurent en France et qui n'y sont pas naturalisés. (BOILEAU, 1713 ) — Il a été supprimé en 1819. L'étymologie de ce mot est ce terme de basse latinité : albanus, albaneias, aubena (albinatus ? ou advena).

3. Voir la satire Ire. On était dans l'usage de rassembler en un même sac toutes les pièces d'un procès.

4. Cet usage fut aboli sur le plaidoyer de M. le président de Lamoignon, alors avocat général. (BOILEAU, 1713.) — Sur le congrès, voir Bayle, article: Quellenec, et les Mémoires de Jean Rou. Ces deux vers, qui frappèrent M. le président de Lamoignon, ne contribuèrent pas peu à faire abolir l'usage du congrès. En effet, depuis la publication de cette satire, toutes les fois qu'il se présenta au parlement quelques contestations au sujet du congrès, ce sage magistrat se déclara contre cette épreuve. M. de Lamoignon, son fils, avocat général, portant la parole en 1674 dans une cause de cette espèce, témoigna la juste horreur que l'on devoit avoir de cet usage odieux. Enfin, en 1677, M. le premier président prononça un arrêt

De ce burlesque mot n'a sali ses arrêts.

On ne connoît chez eux ni placets ni requêtes,1
Ni haut, ni bas conseil, ni chambre des enquêtes.
Chacun l'un avec l'autre, en toute sûreté,

150 Vit sous les pures lois de la simple équité.

L'homme seul, l'homme seul, en sa fureur extrême,
Met un brutal honneur à s'égorger soi-même.
C'étoit peu que sa main, conduite par l'enfer,
Eût pétri le salpêtre, eût aiguisé le fer:
Il falloit que sa rage, à l'univers funeste,
Allât encor de lois embrouiller un Digeste;"

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en forme de règlement, qui abolit pour toujours l'épreuve incertaine et infâme du congrès, qui, depuis plus d'un siècle, décidoit publiquement de la validité du mariage. (BROSSEtte.)

1. Placet, prière qu'on présente aux rois, aux ministres, aux juges pour leur demander quelque grâce ou quelque audience. Ce mot vient du latin, placeat, parce qu'on le commence par plaise au roi, à Mgr le président, etc. »> (Dictionnaire de Trévoux.) M. Littré donne à ce mot une autre étymologie: lat. placet, il plaît, qui constitue la formule par laquelle la pétition est accordée. Aussi le sens propre de placet est-il autorisation; c'est par abus qu'il a pris celui de pétition. « Ils ne peuvent être adjournez pardevant juges ecclésiastiques, sans préalable permission ou placet du prince ou du conseil provincial. » (Nouv. coust. gener., t. II, p. 340.)

2.

Ast homini ferrum lethale incude nefanda
Produxisse parum est...

(JUVENAL, satire XV, v. 165-166.)

3. Digeste, nom du recueil des décisions des jurisconsultes, composé par l'ordre de l'empereur Justinien, qui lui donna force de loi. Le Digeste, qu'on nomme aussi les Pandectes, est divisé en cinquante livres. L'étymologie est digesta, participe passif neutre pluriel, les choses mises en ordre (de digerere). Ce nom vient de ce que cet ouvrage est composé par ordre de matières. Boileau dit dans le Lutrin:

Du Digeste et du Code ouvre-nous le dédale,
Et montre-nous cet art connu de tes amis,
Qui, dans ses propres lois, embarrasse Thémis.

Un poëte latin a dit aussi :

Strictæ jurgia legis.

(STAT., Sylv., liv. III, v. 87.)

Cherchât pour l'obscurcir des gloses, des docteurs,
Accablât l'équité sous des monceaux d'auteurs,
Et pour comble de maux apportât dans la France
160 Des harangueurs du temps l'ennuyeuse éloquence.
Doucement! diras-tu, que sert de s'emporter?
L'homme a ses passions, on n'en sauroit douter;
Il a comme la mer ses flots et ses caprices :
Mais ses moindres vertus balancent tous ses vices.
N'est-ce pas l'homme enfin dont l'art audacieux
Dans le tour d'un compas a mesuré les cieux ??
Dont la vaste science, embrassant toutes choses,
A fouillé la nature, en a percé les causes?3
Les animaux ont-ils des universités?

170 Voit-on fleurir chez eux des quatre facultés?

Y voit-on des savants en droit, en médecine,
Endosser l'écarlate et se fourrer d'hermine?5

4

1

1. La Harpe cite les vingt-six vers qu'on vient de lire, et il ajoute : « Est-ce là écrire froidement ? Remarquez ce dernier trait contre le fastidieux babil de la plaidoirie, qu'il met avec un sérieux si comique au-dessus de tous les maux que produit la chicane. N'est-ce pas là le cachet de la satire ? »

2.

Descripsit radio totum qui gentibus orbem...

(VIRGILE, églogue III, v. 41.)

(VIRGILE, Géorgiques, II, v. 490.)

3. Felix qui potuit rerum cognoscere causas!

4. L'Université est composée de quatre facultés, qui sont les Arts, la Théologie, le Droit et la Médecine. Les docteurs portent dans les jours de cérémonie des robes rouges fourrées d'hermine. (BOILEAU, 1713.)

5. Fourrure faite avec de la peau d'hermine; c'est le nom vulgaire de la martre blanche. Étymologie : provençal, ermini; espagnol, armioño; italien, armellino, ermellino; du latin, armenius, arménien, parce que cette sorte de fourrure venait d'Arménie. « Nos magistrats ont bien connu ce mystère (le pouvoir de l'imagination); leurs robes rouges, leurs hermines dont ils s'emmaillottent en chats fourrés, les palais où ils jugent, les fleurs de lis, tout cet appareil auguste étoit fort nécessaire; et si les médecins n'avoient des soutanes et des mules, et que les docteurs n'eussent des bonnets carrés

175

Non, sans doute; et jamais chez eux un médecin
N'empoisonna les bois de son art assassin.

Jamais docteur armé d'un argument frivole

Ne s'enroua chez eux sur les bancs d'une école.
Mais, sans chercher au fond si notre esprit déçu

Sait rien de ce qu'il sait, s'il a jamais rien su,

Toi-même réponds-moi : Dans le siècle où nous sommes 18 Est-ce au pied du savoir qu'on mesure les hommes ? Veux-tu voir tous les grands à ta porte courir?

Dit un père à son fils dont le poil va fleurir; 1 Prends-moi le bon parti: laisse là tous les livres. Cent francs au denier cinq combien font-ils ?-Vingt livres." 185 C'est bien dit. Va, tu sais tout ce qu'il faut savoir.3

et des robes trop amples de quatre parties, jamais ils n'auroient dupé le monde qui ne peut résister à cette montre si authentique. » (PASCAL, Pensées, édit. Havet, article III.)

1. Fleurir, au propre, pousser des fleurs, être en fleur, se dit par extension de la barbe d'un jeune homme qui commence à pousser. Il y a là une métaphore tirée du latin :

Tum mihi prima genas vestibat flore juventa.

(Eneide, livre VIII, v. 160.)

Quant à ce mot poil, il était fort usité au XVIe siècle pour désigner la barbe, et ne déparait pas les endroits les plus nobles.

Entre les deux partis Calchas s'est avancé

L'oeil farouche, l'air sombre et le poil hérissé.

(RACINE, Iphigénie, acte V, scène vi.)

2. On désignait ainsi l'intérêt d'une somme d'un capital. Le denier cinq, dix, vingt, l'intérêt valan! le cinquième, le dixième, le vingtième du capital, c'est-à-dire 20, 10, 5 pour 100. Ces locutions ne sont plus en usage, elles sont remplacées par celles-ci : 5 pour 100, etc.

3.

Romani pueri longis rationibus assem
Discunt in partes centum diducere. Dicat
Filius Albini, si de quincunce remota est
Uncia, quid superat? Poteras dixisse.
Rem poteris servare tuam. Redit uncia, quid fit?
- Semis, etc.

- Triens. Heus !

(HORACE, Art poétique, v. 325–330.)

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