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Dans ce métier funeste à qui veut s'enrichir,

Qui l'eût cru? que pour moi le sort dût se fléchir? 1
Mais du plus grand des rois la bonté sans limite,
Toujours prête à courir au-devant du mérite,
Crut voir dans ma franchise un mérite inconnu,
Et d'abord de ses dons enfla mon revenu.
La brigue ni l'envie à mon bonheur contraires,
130 Ni les cris douloureux de mes vains adversaires,
Ne purent dans leur course arrêter ses bienfaits.
C'en est trop mon bonheur a passé mes souhaits. "
Qu'à son gré désormais la fortune me joue;

On me verra dormir au branle de sa roue."

3

1. Ponctuation de 1674 à 1701. Elle nous paroît préférable à la virgule mise depuis 1713. (BERRIAT-SAINT-PRIX.)

Racine, Andromaque, I, 1:

Qui l'eût cru qu'un rivage à mes vœux si funeste
Présenteroit d'abord Pylade aux yeux d'Oreste.

2. Le roi ayant donné une pension de deux mille livres à l'auteur, un seigneur de la cour, qui n'aimoit pas M. Despréaux, s'avisa de dire que bientôt le roi donneroit des pensions aux voleurs de grand chemin. Le roi sut cette réponse et en fut irrité. Celui qui l'avoit faite fut obligé de la désavouer. (SAINT-MARC.) Cizeron-Rival, Anecdotes littéraires, p. 177, dit, d'après Brossette, que c'est le duc de Montausier.

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La fortune ennemie et me berce et me joue.

(REGNARD, le Légataire (1708), acte IV, scène VIII.)

Parny a dit avec moins de bonheur :

Je regarde avec un souris

Cette fortune qui se joue

135 Si quelque soin encore agite mon repos,

C'est l'ardeur de louer un si fameux héros.
Ce soin ambitieux me tirant par l'oreille,

La nuit, lorsque je dors, en sursaut me réveille; Me dit que ces bienfaits, dont j'ose me vanter, 140 Par des vers immortels ont dû se mériter.

C'est là le seul chagrin qui trouble encor mon âme. Mais si, dans le beau feu du zèle qui m'enflamme, Par un ouvrage enfin des critiques vainqueur Je puis sur ce sujet satisfaire mon cœur, 145 Guilleragues, plains-toi de mon humeur légère, Si jamais, entraîné d'une ardeur étrangère,

Ou d'un vil intérêt reconnoissant la loi,

Je cherche mon bonheur autre part que chez moi.

En tourmentant ses favoris;
Et j'abaisse un œil de mépris
Sur l'inconstance de sa roue.

(Ma Retraite, élégie III.)

ÉPITRE VI.'

A M. DE LAMOIGNON 2

AVOCAT GÉNÉRAL.

Oui, Lamoignon, je fuis les chagrins de la ville, 3
Et contre eux la campagne est mon unique asile.
Du lieu qui m'y retient veux-tu voir le tableau?

3

1. Composée en 1677. Cf. HORACE, livre II, satire VI. M. Sainte-Beuve la caractérise ainsi : « Il devait donner peu après la riante épître à M. de Lamoignon. Boileau était allé passer une partie de l'été à la campagne. Il y reçut une lettre de M. l'avocat général de Lamoignon qui lui reprochait sa trop longue absence de Paris et l'exhortait à y revenir prompte

ment.

2. Chrétien-François de Lamoignon de Basville, depuis président à mortier (1698), fils de Guillaume de Lamoignon, premier président du parlement de Paris. (BOILEAU, 1713.) - Il était né à Paris le 26 de juin 1644 et mourut le 7 d'août 1709. On n'a imprimé de lui qu'une Lettre sur la mort du P. Bourdaloue, à la fin du IIIe volume du Carême de ce prédicateur; et Plaidoyer pour Girard Vanopstal, un des recteurs de l'Académie royale de peinture et de sculpture. Paris, Cramoisy, 1668, in-4o; il avait aussi écrit la vie de son père, le premier président Guillaume de Lamoignon. (M. CHÉRON.)

3. Regnard nous explique ce que c'est que ces chagrins de la ville, qu'il fuit, lui aussi, dans sa maison au bout de la rue de Richelieu; il dit :

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1

C'est un petit village ou plutôt un hameau, 5 Bâti sur le penchant d'un long rang de collines,

D'où l'œil s'égare au loin dans les plaines voisines. La Seine, au pied des monts que son flot vient laver, Voit du sein de ses eaux vingt îles s'élever, Qui, partageant son cours en diverses manières, D'une rivière seule y forment vingt rivières. * Tous ses bords sont couverts de saules non plantés, Et de noyers souvent du passant insultés. " Le village au-dessus forme un amphithéâtre : L'habitant ne connoît ni la chaux ni le plâtre; /5 Et dans le roc, qui cède et se coupe aisément, Chacun sait de sa main creuser son logement.

1. Hautile, petite seigneurie près de la Roche-Guyon, appartenant à mon neveu, l'illustre M. Dongois, greffier en chef du parlement. (BOILEA!, 1713.) — Aujourd'hui Haute-Isle, département de Seine-et-Oise, arrondissement de Mantes, canton de Magny, 195 habitants. (M. CHÉRON)

C'est de ce neveu que Voltaire a dit :

Chez ton neveu Dongois je passai mon enfance,

Bon bourgeois, qui se crut un homme d'importance.

D'Alembert s'étonne de ce nom d'illustre donné à un homme qui « n'avait rien fait de plus mémorable que de signer des arrêts. » Illustre ne veut rien dire ici que renommé en y ajoutant l'idée de louange et de mérite.

2. Ausone, dans la Description de la Moselle, lui fait un mérite du contraire :

3.

Exstantes medio non æquore terras
Interceptus habes justi ne demat honorem
Nominis, exclusum si dividat insula flumen.

(Mosella, 36.)

Nux ego, juncta viæ, cum sim sine crimine vitæ,
A populo saxis prætereunte petor.

(OVIDE, de Nuce.)

4. Ce roc est une espèce de craie blanche très-tendre. Il existe encore quelques édifices de ce genre, mais le plus remarquable est l'église creusée en entier dans le même roc aux frais de Dongois et de son épouse, seigneurs du lieu. (BERRIat-Saint-Prix.) - Ce qu'atteste une inscription qui existe encore entière, sauf quelques mots effacés en 1794. Cette ceinture de craie qui entoure le bassin de Paris commence à se montrer à nu de ce côté, vers la Roche-Guyon, et se prolonge ainsi jusqu'à Rouen. (M. CHÉRON.)

La maison du seigneur, seule un peu plus ornée,'
Se présente au dehors de murs environnée.

Le soleil en naissant la regarde d'abord,

Et le mont la défend des outrages du nord.

C'est là, cher Lamoignon, que mon esprit tranquille Met à profit les jours que la Parque me file. Ici, dans un vallon bornant tous mes désirs, J'achète à peu de frais de solides plaisirs.

25 Tantôt, un livre en main, errant dans les prairies,
J'occupe ma raison d'utiles rêveries: 3

Tantôt, cherchant la fin d'un vers que je construi,‘
Je trouve au coin d'un bois le mot qui m'avoit fui;
Quelquefois, aux appas d'un hameçon perfide,

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1. En 1785 il existoit à peine quelques vestiges de la maison habitée par Dongois. (SAINT-SURIN.)

2.

Ut veniens dextrum latus adspiciat sol.

(HORACE, liv. I, ép. XVI, v. 6.)

3. Suivant Brossette, Boileau lisait alors les Essais de Montaigne. Cela n'est pas nécessaire à supposer pour expliquer le mot de réveries.

4. Nous avons déjà parlé de cette manière d'écrire la première personne des verbes qui se terminent aujourd'hui par s à cette même personne; c'était une liberté qui rappelait l'ancienne conjugaison française où l's caractérisait la seconde personne.

5. Texte de 1683 à 1713. (BERRIAT-SAINT-PRIX.) - On lit dans beaucoup d'éditions modernes appâts; c'est sous cette forme que M. Littré cite ce vers. Voici ce qu'il dit de ce mot: « Appas est le pluriel de appát. L'ancienne orthographe était appast; au pluriel, appasts ou appas. La faute a été de faire de ce mot unique deux mots différents. De là toute sorte d'irrégularités qu'on trouve dans les auteurs; d'abord la plus forte de toutes, qui est appas au singulier. « Qui dort en sûreté sur un pareil appas. » (MOL., École des Femmes.) Puis appas, dit pour appâts, mais ceci n'est qu'une affaire d'orthographe... « Ce blé couvroit d'un lacs les menteurs et traîtres <appas.» (LA FONTAINE, Fables, IX, 2.) Enfin l'emploi de appas pour exprimer les attraits qu'un homme peut avoir... Le seul remède aujourd'hui à apporter à la confusion serait d'assigner à appas, substantif pluriel, le sens spécial de beautés qui attirent; puis cela fait, de ne voir aucune différence entre appas et appâts, au pluriel, pour signifier ce qui amorce, ce qui charme,

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