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serviraient qu'à prouver qu'on n'a rien ici innové par son propre « esprit (1). »

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132. Une autre objection: Si les variantes qui se trouvent dans les anciens manuscrits du Pentateuque ne portent point atteinte à son intégrité, il ne peut en être de même des trois systèmes de chronologie que nous offrent le texte hébreu, le texte samaritain et la version grecque dite des Septante. Cette différence est de plusieurs siècles, tant pour le premier âge du monde, depuis la création jusqu'au déluge, que pour le second âge, c'est-à-dire, depuis le déluge jusqu'à la vocation d'Abraham (2); or, une si grande variété, une contradiction si importante est, dit-on, une preuve évidente de l'altération des écrits de Moyse. Et qui nous répondra qu'ils n'ont pas essuyé d'autre altération peut-être plus considérable?

133. Cette objection peut paraître spécieuse à quelques esprits, mais elle n'en sera pas pour cela plus convaincante ni plus sérieuse; la variété des systèmes chronologiques sur l'histoire sainte ne peut nuire à l'intégrité de cette histoire, dont elle respecte la substance. Qu'importe aux Juifs, aux chrétiens, à la société, que le monde ait quelques siècles de plus ou de moins d'antiquité? L'histoire des Grecs, des Romains, des Francs et des autres peuples sera-t-elle incertaine pour les faits, parce que les chronologistes ne s'accordent pas sur les dates? Non, évidemment. Pourquoi donc n'en serait-il pas de même pour l'histoire des Hébreux, si, quoique différant entre eux sur quelques points de chronologie, tous les textes et toutes les anciennes versions sont d'ailleurs d'accord pour les mêmes faits, les mêmes miracles, les mêmes dogmes et la même loi? En quoi, nous le demandons, une chronologie exacte en tout, depuis la création jusqu'à nous, pourrait-elle servir à perfectionner nos croyances et nos mœurs? Dès que nous sommes assurés que Dieu a créé le monde, qu'il a fait l'homme à son image, que notre premier père lui a désobéi, et qu'il a été puni avec toute sa postérité; qu'un libérateur a été promis au genre humain ; que, toute chair ayant corrompu sa voie, la terre a été purifiée par un déluge universel, et repeuplée par une famille miraculeusement sauvée des eaux; dès qu'il est certain que Moyse, le législateur

(2) La durée

(1) Discours sur l'histoire universelle, part. 1, chap. xxvi. du premier âge, depuis la création du monde jusqu'au déluge, est de 1656 ans, selon le texte hébreu et la Vulgate; de 1307 ans, selon le texte samaritain, et de 2242 ans, selon la version des Septante. Pour le second âge, c'est-à-dire, depuis le déluge jusqu'à la vocation d'Abraham, l'hébreu compte 367, le samaritain 1017, et le grec 1197 ans.

des Hébreux, était l'envoyé du Très-Haut; que Dieu a suscité des prophètes parmi les Juifs pour leur annoncer ses desseins et renouveler ses promesses; et qu'au temps marqué il a envoyé son Fils sur la terre pour le salut des hommes : que nous importe alors l'époque précise de ces événements? Une connaissance parfaite de la chronologie des temps primitifs nous rendrait-elle meilleurs ? Qu'on soit de bonne foi, et l'on reconnaîtra qu'il y a une différence essentielle entre l'altération du texte original ou des anciennes versions du Pentateuque, pour ce qui regarde la chronologie, et les interpolations qui auraient changé l'histoire et la constitution religieuse des Juifs.

134. Enfin, si la diversité des leçons de ce livre, par rapport aux dates, est une preuve de l'altération dans le nombre des années du premier et du second àge du monde, la conformité qu'on y observe à l'égard des autres parties du même livre doit être regardée comme une preuve non moins certaine de leur intégrité substantielle. Et qu'on ne dise pas que si le Pentateuque a pu être altéré quant à la chronologie, il a pu l'être également sur d'autres points; car la connaissance de la chronologie n'intéresse qu'un petit nombre de savants, tandis que les faits rapportés dans les livres de Moyse intéressaient toute la nation.

ARTICLE II.

Les autres livres de l'Ancien Testament ne sont pas moins intègres que le Pentateuque.

135. Nous n'insisterons point sur l'intégrité des écrits des prophètes et des autres livres du peuple de Dieu : elle est prouvée par les mêmes raisons qui établissent la pureté des livres de Moyse. Nous avons de part et d'autre la foi publique et constante de toute la nation, qui révère ces livres comme autant de titres sacrés de son histoire, de sa croyance et de son culte. D'ailleurs, tous ces livres se tiennent les uns aux autres, comme ils tiennent au Pentateuque; on y trouve partout le même fond, le même esprit, les mêmes coutumes. Jamais un faussaire n'aurait pu altérer ces livres, sans chercher à altérer en même temps le Pentateuque; comme il n'aurait jamais pu altérer le Pentateuque sans altérer les autres livres de l'Ancien Testament, sans bouleverser toute l'histoire des Juifs. Les mêmes considérations qui rendaient impossible l'altération du Pentateuque, rendaient également impossible celle des

livres de Josué, des Juges, des Rois, de David, de Salomon, des Prophètes.

ARTICLE III.

De l'intégrité des livres du Nouveau Testament.

136. Les livres du Nouveau Testament sont parvenus jusqu'à nous dans toute leur intégrité, sans avoir souffert aucune altération essentielle : ce qui se prouve par la foi publique, générale et constante des Églises chrétiennes, et par l'impossibilité qu'ils aient été altérés substantiellement.

§ I. Preuve tirée de la foi publique des Églises chrétiennes.

137. De tout temps les chrétiens ont montré la plus grande vénération pour les Évangiles et les autres livres du Nouveau Testament, les regardant comme l'ouvrage des premiers disciples de Jésus-Christ, comme des livres divins, dictés par Dieu lui-même; comme des livres contenant la règle de leur foi, de leur conduite et de leur culte. Dès les premiers siècles, cette vénération se manifestait par des actes extérieurs, au point que les païens demandaient aux martyrs quels étaient les livres qu'ils lisaient et qu'ils adoraient, quos adorantes legitis (1). Pendant la persécution de Dioclétien, on voulut anéantir les livres des chrétiens; mais les fidèles aimèrent mieux s'exposer à la mort que de livrer les Ecritures; c'était à leurs yeux une espèce d'apostasie, que de racheter leur vie ou leurs biens par la remise des exemplaires qu'ils avaient entre les mains; et ceux à qui la crainte ou les tourments avaient arraché cet acte de faiblesse, n'étaient admis à la communion qu'après une longue et sévère pénitence. Or, ce respect dont les chrétiens ont toujours été pénétrés pour les livres saints, a dû les rendre extrêmement attentifs à la conservation du texte primitif.

138. En effet, au commencement du quatrième siècle, un évêque nommé Triphillius ayant cru pouvoir, dans un sermon, remplacer un mot de l'Evangile, qui lui paraissait bas et trivial, par un terme synonyme, mais plus distingué, Spiridon, autre évêque, qui était présent, indigné de cette substitution, qui n'était cependant point proprement une altération, lui demanda publiquement s'il se croyait

(1) Voyez ci-dessus le n° 61.

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plus habile que celui qui avait employé le mot qu'il mettait de côté; et, à la vue de tout le peuple, il se leva de son siége et s'en alla (1). Théodoret rapporte un fait qui lui était personnel: Tatien, chef des Encratites, avait composé une concordance des quatre Évangiles, connue sous le nom de Diatesseron, retranchant des livres sacrés ce qui lui paraissait contraire à ses erreurs. Plusieurs fidèles, ne s'apercevant pas de la fraude, lisaient cet ouvrage avec simplicité, comme un abrégé des Évangiles. Mais Théodoret l'ayant remarqué, supprima tous les exemplaires du Diatesseron, et leur substitua les quatre Évangiles tels qu'ils étaient reçus dans l'Église (2).

139. Saint Jérôme, chargé par le pape Damase de la correction des livres saints, craint de l'entreprendre, prévoyant qu'il va soulever les réclamations de tous les fidèles. Quel est, dit-il, celui « qui, prenant ma traduction en main, et s'apercevant de la diffé«rence de ce qu'il lira et de ce qu'il a, pour ainsi dire, sucé avec le lait, ne s'écrie aussitôt, et ne me traite de faussaire et de sacrilége, m'accusant d'avoir osé faire quelques changements, quel«ques additions et retranchements dans les exemplaires (3)? »

Aussi, saint Augustin, dans une de ses lettres à saint Jérôme, nous apprend le mauvais effet que cette version avait produit parmi les fidèles : un évêque l'ayant lue dans son église, on remarqua dans la prophétie de Jonas quelque chose qui différait de ce qu'on avait coutume d'entendre et de chanter, et il se fit un grand tumulte dans l'assemblée; les Grecs surtout accusèrent l'évêque de falsifier le texte : alors l'évêque, craignant d'être abandonné de son troupeau, se rétracta comme s'il avait fait une faute (4). C'est pourquoi saint Augustin ne faisait point lire à l'église la version de saint Jérôme : il craignait, disait-il, de paraître proposer quelque chose de nouveau et de scandaliser les peuples; ne tanquam novum aliquid proferentes magno scandalo perturbemus plebes Christi (5). Tel était l'esprit des chrétiens touchant les Écritures, qu'ils ne croyaient pas qu'on pût y changer un seul mot, même

(1) Triphillius, citant ces paroles de Notre-Seigneur, Tolle grabatum tuum et ambula, avait substitué le mot scimpodium au mot grabatum. Sozomène, Hist. Eccl., liv. 1, ch. xi. — (2) Théodoret, Compendium des fables hérétiques, ch. xx. — (3) Quis doctus pariter vel indoctus, cum in manus volumen assumpserit, et a saliva quam semel imbibit, viderit discrepare quod lectitat, non statim erumpat in vocein me falsarium, me clamitans esse sacrilegum, qui audeam aliquid in veteribus libris addere, mutare, corrigere? Præf. in quatuor Evangelia.—(4) Lettre LXXI. (5) Lettre LXXXII.

sous prétexte de correction, et lorsque le sens ne devait pas en souffrir. Or, ce respect pour les livres saints, et particulièrement pour les livres du Nouveau Testament, cette vénération pour le dépôt de notre foi, cette espèce de culte que les martyrs, les évêques, les prêtres, les simples fidèles, avaient pour les Évangiles, n'est-il pas une garantie plus que suffisante de leur intégrité? Y a-t-il dans le monde un livre quelconque, et de quelque nature que ce soit, dont l'altération ait été, nous ne disons pas plus difficile, mais aussi difficile que celle des livres évangéliques? Non, il n'a pas été possible d'en altérer la substance. Cependant continuons.

§ II. Preuve tirée de l'impossibilité de toute altération substantielle.

140. Le respect des chrétiens pour les livres du Nouveau Testament a dû nécessairement en multiplier les copies à l'infini. Nonseulement les évêques, les prêtres, les lecteurs qui étaient chargés d'office de certaines lectures publiques, mais les simples fidèles eux-mêmes, en général, avaient une connaissance assez distincte des saintes Écritures. Ils les avaient dans leurs familles ; ils les lisaient habituellement; ils les portaient avec eux en voyage, et les méditaient jour et nuit. Ceux d'entre eux qui ne pouvaient en faire une étude particulière, les connaissaient au moins par l'usage où l'on était de les lire publiquement au peuple assemblé pour la célébration des saints mystères. Cette lecture a toujours été, dès les premiers siècles, comme une partie essentielle de la liturgie sacrée, de l'office divin. Saint Justin nous en parle comme d'une chose qui se pratiquait de son temps dans toute l'Église, comme d'un usage par conséquent dont l'origine remonte au berceau du christianisme. Écoutez ce qu'il dit : « Le jour du soleil (le dimanche), tous ceux qui se trouvent à la ville ou à la campagne s'as« semblent en un même lieu, suivant que le temps le permet; on << lit les commentaires des Apôtres et les écrits des prophètes. Quand le lecteur a fini, celui qui préside fait un discours au

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peuple, pour l'exhorter à imiter de si belles choses. Puis nous nous

« levons tous ensemble pour faire nos prières; après quoi on offre « le pain et le vin (1) pour la consécration eucharistique. »

(1) Solis die, omnium sive urbes sive agros incolentium in eumdem locum fit conventus, et commentaria Apostolorum aut scripta prophetarum leguntur,

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