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que laisse après elle l'année 1868 : c'est de la hausse des valeurs de Bourse qu'il s'agit, de cette hausse qui, si souvent vaincue et écrasée précédemment, s'est relevée enfin avec éclat, sayamment conduite au triomphe par des hommes forts, usant de moyens qui ont fait merveille à la Bourse, comme les fusils Chassepot à Mentana. On n'oubliera pas de sitôt certaines liquidations de 1868, qui, par les désastres jetés dans le camp des baissiers, et portés aussi, malgré les impuissantes barrières du monopole, jusques à travers les rangs de la phalange sacrée des agents de change, rappellent douloureusement une autre liquidation, de funeste mémoire aussi, celle du mois de juillet 1866.

La hausse de juillet 1866, aussi imprévue que l'événement politique qui l'occasionnait, avait été rapide, violente, irrésistible, semant des ruines d'un côté, pendant que d'un autre elle édifiait, comme si la baguette d'un magicien eût passé par là, quelques fortunes improvisées, bâties sur le sable de la spéculation, et qu'un vent contraire emporterait promptement. La baisse, en effet, survint; et on peut dire que, paraissant s'accentuer tous les jours davantage, elle s'est maintenue, presque sans discontinuation, jusques à l'année 1868, qui, enfin, par un brusque retour, est venue nous apporter la hausse. Mais de cette hausse de 1868, que 1869, à en juger par ce qui se passe, semble vouloir continuer, qu'adviendra-t-il, en définitive? Qu'est-elle au fond, cette hausse, et que signifie-t-elle? Il convient tout d'abord, on le conçoit, de constater mathématiquement les résultats acquis; et, pour cela, nous comparons aux cours qui avaient été cotés au 31 décembre 1867, ceux de la dernière liquidation de l'année 1868. Il va de soi que nous nous sommes attaché à prendre précisément les mêmes valeurs qui avaient déjà trouvé leur place dans nos tableaux ci-dessus relatifs aux variations mensuelles, afin de compléter ceux-ci, en quelque sorte, par de nouveaux chiffres, que voici:

3 0/0 français....
Rente italienne..
6 0/0 américain

Emprunt autrichien, 1852

5 0/0 turc.......

3 0/0 espagnol intérieur..

Au 31 déc. Balance en plus ou

en moins pour 1868.

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Au 31 déc.

1867.

1868.

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32.90

39.30

...

341/2

30

99 1/2

92

925/8

+ 5/8

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41/2 0/0 belge

30/0 anglais.....

Banque de France.

Mobilier français.

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142.50

Suez,

Ce parallèle des cours, quoiqu'il ne porte que sur un nombre limité de valeurs, est néanmoins très-suffisant, nous le croyons, pour que, d'un coup d'œil, en l'examinant, on se fasse une idée exacte de l'étendue des progrès qu'en somme, à travers les fluctuations que nos premiers tableaux retracent mois par mois, la hausse a obtenus pendant la durée de l'exercice écoulé. A l'exception d'un petit nombre de titres, que des circonstances particulières, telles que l'impôt de 16 0/0 en Autriche ou la Révolution de l'Espagne, pour les fonds de ces pays, et encore la stagnation des affaires commerciales à l'égard de la Banque de France, une capitalisation trop élevée sur les Omnibus, etc., empêchaient de prendre part au mouvement, tout le reste a monté, et monté dans des proportions formidables, qui ne sont souvent pas moindres de 20 0/0, et qui même, pour quelques valeurs plus spécialement favorisées par la spéculation, permettraient de constater des écarts beaucoup plus considérables encore si, à leur égard, on prenait pour termes de comparaison, non pas les chiffres cotés seulement à la fin des deux exercices 1867 et 1868, mais, d'une part, le plus bas chiffre, et, de l'autre, le plus haut dans les cours de l'année 1868 seule.

Tous comptes faits, en définitive, comme l'ont calculé plusieurs journaux (1), les améliorations acquises, du 31 décembre 1867 au 31 décembre 1868, sur l'ensemble des valeurs de la cote officielle, ne se chiffrent, en total, guère au-dessous de 2 milliards de francs. Les valeurs

(1) L'Industrie et le Journal des Débats.

admises à la cote officielle représentent, on le sait, taux d'émission, 25 milliards de francs au moins c'est là-dessus que travaille la Bourse, sans compter, en outre, les valeurs non cotées ou valeurs dites négociées en banque, dont le capital est très-considérable aussi, sans qu'il soit, du reste, facile ou même possible de le déterminer avec quelque précision. Les 25 milliards de la cote officielle, quand les cours de la Bourse étaient tenus en hausse, par exemple en 1863, valaient, à coup sûr, nominalement plus de 28 milliards de francs. Mais, à partir de 1865, et surtout en 1866 et 1867, la dépréciation fut telle que nous pouvions, il y a un an, à cette même place (1), constater, comme résultat, de la baisse persistante qui avait dominé le marché, un déficit de plus de 2 milliards de francs, non pas sur les 28 milliards des époques de hausse, mais sur les 25 milliards réellement souscrits et versés aux émissions. Avec la hausse qui vient d'être obtenue en 1868, on le voit, ce déficit est reconquis et les 25 milliards de nos émissions se retrouvent, non pas, hélas ! pour tous les individus isolément, et pour toutes les valeurs, car il en est qui perdent beaucoup et même tout, quand d'autres, par contre, gagnent considérablement. Mais, laissant de côté aussi bien les chances favorables échues aux particuliers que les infortunes qu'ils ont subies, on peut assurément et on doit ne prendre la situation que dans son ensemble, au point de vue de la généralité des intérêts et de la fortune du pays lui-même. Et alors, toutes compensations gardées, est-ce qu'il ne sera pas vrai de dire, comme d'aucuns l'ont écrit, que l'année 1868 a été surtout une année réparatrice ? »

Oui, incontestablement, l'année 1868, financièrement parlant, a réparé quelque chose; elle a même réparé beaucoup, à ne considérer que ce beau chiffre de 2 milliards de francs d'accroissement sur 1867, dans le prix total des valeurs de la Bourse. Mais entendons-nous. C'est la spéculation qui avait fait le mal, lorsque le jeu des baissiers, de 1866 à 1868, amenait la dépréciation, plus factice souvent que réelle, de toutes les valeurs du marché; et, en 1868, une spéculation contraire relève ces mêmes valeurs, et les surélève peut-être, voilà tout affaire de jeu, de stratégie à la Bourse, de réaction aussi et d'entraînement quelquefois. Sur quel fonds tout cela repose-t-il? La fortune du pays, en réalité, gagne-t-elle quelque chose à ces coups de la spéculation? Notre bienêtre, nos revenus, le capital productif de la France, s'en trouvent-ils accrus ou améliorés, et les affaires sérieuses facilitées d'autant?

C'est qu'il faut bien que l'on sache comment la hausse de 1868 s'est produite. Le gouvernement la voulait à cause de son emprunt à émettre, et il l'a conseillée (on comprend ce que cela veut dire); les syndicats de

(1) Voir le Journal des Economistes, numéro de janvier 1868.

banquiers ne le désiraient pas moins, ayant, eux aussi, presque tous à ouvrir des souscriptions, qui ne réussissent, on ne l'ignore pas, qu'en temps de hausse. Il est, en effet, à remarquer, circonstance caractéristique, que jamais peut-être il n'avait été adressé autant d'appels réitérés au Crédit : pas un seul mois de l'année 1868 ne s'est écoulé sans qu'il y ait eu, à Paris, quelque emprunt, et, rien que dans le mois d'août, on n'en compte pas moins de six; le montant des sommes ainsi obtenues, en 1868, du public français, y compris les 429 millions de l'emprunt du gouvernement, est évalué par la Semaine financière à 1 milliard 435 millions de francs, dont plus de 500 millions à destination de l'étranger, comme si pourtant les mésaventures des chemins portugais, espagnols, italiens, et des emprunts tunisiens ou autres, n'étaient pas pour nous d'assez rudes leçons!

Le public a donc couru aux souscriptions, surtout à celles des valeurs à lots, le great attraction du jour; mais ce même public a-t-il pris part aussi à la hausse de la Bourse? Non, il a regardé faire; et encore aujourd'hui il se contente d'observer, n'achetant pas, mais, au contraire, profitant même des hauts prix pour vendre. De là l'impossibilité de franchir certains cours; et de là encore un marché au comptant toujours en retard, faible, sans aucun essor, et qui n'est soutenu, tant bien que mal, que parce qu'il alimente de titres le marché à terme, tandis que c'est l'inverse qui devait avoir lieu, si la situation était normale, puisqu'en réalité il est dans le rôle du marché à terme, marché de la spéculation, ne gardant pas les titres, de les envoyer au marché du comptant, qui est celui de l'épargne et du capital, celui où les valeurs se placent et où elles trouvent leur classement définitif. Aussi est-il à remarquer que même l'emprunt de 429 millions, parce qu'il a été apporté sur la place et par les spéculateurs à 5 francs d'une part, et de l'autre par les banquiers millionnaires, mal émis et mal souscrit, quoique souscrit 34 fois, n'est pas le moins du monde classé; pour le soutenir et pour soutenir en même temps la rente qui fléchissait, il a fallu, sur les conseils du gouvernement, l'intervention active de nos principales institutions de crédit et même, ce qui ne s'était jamais vu, de la Banque de France, en dépit de ses statuts. Voilà des titres achetés, mais pour être revendus plus tard; ils reviendront un jour ou l'autre sur le marché: ce sont donc autant de valeurs qui restent à classer. Et, à coup sûr, tant que le public se tient ainsi à l'écart, le dernier mot de la situation n'est pas dit.

En outre, pour qu'une hausse à la Bourse soit un signe de prospérité publique, pour que, dans les résultats mathématiques qu'elle fournit, il y ait véritablement lieu de constater une augmentation corrélatíve de la fortune nationale, est-ce qu'une double condition ne lui est pas nécessaire? Cette double condition, c'est que la hausse dont il s'agit corresponde et à un état politique devenu plus satisfaisant, qui rende

les populations confiantes, et en même temps à une reprise au moins de l'activité industrielle et commerciale. En sommes-nous là? C'est douteux. Car, à l'égard du commerce et de l'industrie, comme aussi de l'agriculture, tout démontre, au contraire, leur atonie persistante : la preuve de leur malaise est péremptoirement fournie, surtout par les bilans de la Banque de France, qui, en regard d'un portefeuille de moins de 500 millions de francs, nous montrent 1,200 millions à l'encaisse non compris encore près de 400 millions en comptes-courants improductifs.

Quant à la politique, il n'est que trop manifeste que, si même elle n'a pas reculé, elle n'a du moins pas avancé depuis l'année dernière, et qu'aucune des grandes questions pendantes en Europe n'a été résolue; les difficultés sont donc simplement ajournées, et on ne désarme ni en France, ni en Prusse, ni en Russie; on continue bien plutôt à armer encore en vue d'éventualités possibles.

La sécurité relative dont l'année 1868 nous a fait jouir peut, à la rigueur, suffire lorsqu'il s'agit d'opérations de Bourse, qui, en général, se nouent et se dénouent tous les mois, quelquefois du jour au lendemain; mais pour le commerce, pour l'agriculture, pour l'industrie, ce n'est pas seulement cela qu'il faut, c'est tout un long avenir sans ⚫ points noirs. »>

THEUREAU.

NÉCROLOGIE.

M. DE HOCK

Lettre de M. DE PARIEU, Vice-Président du Conseil d'État, à M. JOSEPH GARNIER, Secrétaire perpétuel de la Société d'Economie politique.

Mon cher collègue, c'est hier de votre bouche que j'ai appris, à la réunion des Economistes (1), la nouvelle de la mort du baron de Hock, une nouvelle douloureuse pour les amis de la science, du progrès, et en particulier de l'unification monétaire.

Vivement ému par cette perte d'un ami et correspondant précieux,

(1) 5 janvier 1868, v. p.

3 SÉRIE, T. XIII. — 15 janvier 1869.

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