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dont une dernière lettre en date du 27 décembre est encore sur mon bureau, annotée pour une réponse si tristement inutile, je regarde comme un devoir de vous retracer quelques lignes de cette existence laborieuse et grande, telle que je l'ai connue par les confidences de l'amitié, et par d'autres renseignements, notamment par ceux qui viennent de me parvenir dans une lettre de M. de Niebauer, secrétaire du défunt.

M. de Hock était né à Prague le 18 mars 1808 d'une famille israélite. Il se convertit jeune au catholicisme, et devint docteur en droit et en philosophie. Dans cette première période de sa vie, il écrivit entre autres compositions la vie de notre célèbre pape Sylvestre II, qui a été traduite en italien et en français.

Il fut quelque temps après attaché à l'Observation de Vienne. Mais en 1830, il entra au service de l'Etat et fut successivement nommé inspecteur des finances à Salzbourg, et directeur de la douane à Trieste.

Bientôt des articles économiques insérés dans la Gazette universelle d'Augsbourg appelèrent sur lui l'attention du prince de Metternich, qui le fit venir à Vienne et eut souvent recours à sa plume.

Après la Révolution de 1848, il fonda la Gazette du Danube, le seul journal viennois, m'écrit-on, qui dans une époque tourmentée ne perdit jamais de vue le but d'un libéralisme modéré et raisonnable.

En 1849, M. de Bruck éleva M. de Hock au poste de directeur des Affaires commerciales de son ministère. En cette qualité il négocia presque toutes les conventions douanières et commerciales de l'Autriche avec les nations ésrangères. Il reçut le titre de baron comme accessoire d'une de ces décorations autrichiennes qui confèrent la noblesse.

Je fis sa connaissance à Vienne en septembre 1865, lorsqu'après avoir été quelque temps directeur général des contributions indirectes et de l'enregistrement, il venait de recevoir sa nomination comme membre du conseil d'Etat, institution restreinte en Autriche, et qui n'occupait qu'un très-petit nombre d'hommes, à peu près comme une section isolée de notre conseil d'Etat français. Sans le savoir nous avions cu tous deux dans l'histoire du célèbre pape Gerbert, étudiée à des degrés inégaux, un point de contact ancien et singulier, qui nous rendait à demi compatriotes.

M. de Hock embrassa vivement les espérances de réformes monétaires dont je lui fis part, lorsque je venais moi-même d'être appelé à l'honneur de discuter les bases d'un accord avec la Belgique, la Suisse et l'Italie pour l'harmonie de la législation monétaire des quatre Etats, accord qui eut lieu le 23 décembre 1865.

Depuis lors je n'ai pas eu de collaborateur et d'ami plus instruit, plus sympathique et plus constant. Il a joué un rôle très-influent dans la conférence monétaire internationale de 1867, dont les membres ne perdront

jamais le souvenir de son intervention éclairée et ferme. Nous avons signé lui et moi, le 31 juillet 1867, une convention monétaire préliminaire entre la France et l'Autriche, et je n'en crois pas les principes absolument oubliés ou perdus pour la société économique de l'Europe.

Le conseil d'Etat ayant été supprimé à Vienne, M. de Hock fut nommé successivement membre de la Chambre des seigneurs et directeur président de la Cour des comptes de l'empire austro-hongrois.

Gravement atteint dans la nuit du 19 au 2 janvier, il reçut les sacrements de l'Eglise et fut enlevé à son pays dans la soirée du 2 janvier par une attaque d'apoplexie que diverses fatigues avaient précédée. Il ne me reste plus de sain que la tête, m'écrivait-il dans sa dernière lettre du 27 décembre.

Quelque considérable qu'ait été cette existence officielle, graduellement élevée par tous les échelons de la bureaucratie autrichienne, les travaux du publiciste ne lui sont pas inférieurs.

Un ouvrage savant sur l'administration des finances en France, traduit par M. Legentil, et qui a trouvé faveur dans notre pays, un autre livre sur les dépenses publiques et les impôts, une publication très-étendue sur les finances des Etats-Unis, ouvrage dont j'ai pu rendre compte à l'Académie des sciences morales et politiques de France, n'avaient point épuisé la vive et savante curiosité de M. de Hock.

Chaudement attaché à l'institution du conseil d'Etat qu'il avait vu dissoudre, il se consolait ou se vengeait en écrivant l'histoire d'un corps administratif dont il avait regretté la suppression. On a trouvé sur son bureau les épreuves d'une livraison de cette histoire dont les premières pages avaient été dès le milieu de l'an dernier envoyées à ses amis.

Préoccupé de la poursuite de sa noble carrière et de l'éducation de ses enfants. M. H. de Hock semblait peu compter avec les fatigues de l'âge, et j'ose dire qu'il m'avait anxieusement surpris en me communiquant le dessein dont il était préoccupé depuis deux ans d'écrire l'histoire des Principes économiques des Romains.

Je redoutais pour lui les labeurs de pareilles recherches combinées avec des travaux officiels dont de fréquentes mutations de poste avaient augmenté pour lui le poids.

M. de Hock était fort lettré et possédait un talent épistolaire remarquable. Que de jugements fins sur la politique de son pays, quelquefois sur les circonstances intimes de nos affaires monétaires en France, j'ai trouvé depuis trois ans dans son affectueuse correspondance, datée tantôt de Vienne, tantôt du Fliederbachschlosschen qu'il habitait l'été, dans la verte et incomparable vallée de Salzbourg.

Je serai très-sincère en disant que c'était une des plus fortes intelligences qu'il m'ait été donné de rencontrer et d'apprécier. Il eût suivant moi rendu les services les plus éminents à l'Autriche si les circonstances

l'avaient rapproché plus tôt des sommités du gouvernement. Il était trèsbien placé pour ces rapprochements scientifiques entre l'Allemagne et la France qui me paraissent devoir contribuer si utilement aux progrès de notre civilisation moderne. Les personnages les plus éminents de la politique et de la science à Vienne, MM. de Beust, de Schmerling, le prince de Hohenlohe, grand maître de la cour, les représentants de l'université à laquelle il avait appartenu, ayant suivant l'usage viennois le pas sur la famille même du défunt dans les cérémonies funèbres, se sont fait remarquer aux obsèques du baron de Hock. D'après les habitudes autrichiennes aucun discours n'a été prononcé sur sa tombe.

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Laissez-moi compter, M. le secrétaire perpétuel et cher collègue, sur votre intermédiaire pour faire parvenir ces courts renseignements et l'expression de ces vifs regrets aux amis de la science économique, par lesquels plus que par tous autres la perte d'un homme aussi considérable que M. le baron de Hock mérite d'être sentie.

Recevez l'assurance, etc.

E. DE PARIEU,

Vice-Président du Conseil d'Etat,
Membre de l'Institut.

BULLETIN

LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA FRANCE

(Rapport du ministre des finances)

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SOMMAIRE. L'emprunt. - La dette flottante. Le budget de 1867. - Le budget de 1868. Le budget de 1869. — Le budget ordinaire de 1870. Le budget extraor dinaire de 1870. L'amortissement. L'enquête sur la circulation fiduciaire. — La situation générale.

Sire, le conseil d'État a terminé ses travaux relatifs au budget de 1870. Tout porte à croire que le projet de loi pourra être déposé à la première séance du Corps législatif, et que le volume des documents sera distribué le même jour.

Je me propose de faire connaître à Votre Majesté la situation actuelle des budgets qui sont en cours de liquidation ou d'exercice, et d'indiquer sommairement les prévisions qui formeront en dépenses et en recettes les bases de celui de 1870.

Mais je crois utile, avant tout, de résumer les actes qui ont été accomplis depuis la dernière session, en exécution de la loi du 1 août dernier, au sujet de la négociation d'un emprunt de 429 millions et de

la réduction de la dette flottante du Trésor. Cette loi ne pouvait avoir la puissance de transformer instantanément nos difficultés financières en un état de choses florissant, et de dispenser les pouvoirs publics de leur devoir de vigilance et d'économie.

Mais elle nous permet de liquider le passé; elle débarrasse les budgets de leurs entraves et les rend à leur marche naturelle; elle ouvre devant nous la voie des améliorations successives.

Je pourrai, dans le cours de ce rapport, signaler à Votre Majesté quelques progrès déjà réalisés.

EMPRUNT

Au commencement de 1868, nous étions en présence de trois nécessités de premier ordre auxquelles il était urgent de pourvoir.

Les événements politiques de 1867 avaient surélevé la charge de la dette flottante qui exigeait un prompt soulagement.

D'un autre côté, nous ne pouvions pas rester, pour nos armements de terre et de mer, au-dessous de la science moderne et en arrière des au

tres pays.

Enfin, le commerce et l'industrie réclamaient, avec une juste insistance, pour l'exécution des travaux d'utilité générale, une accélération devenue indispensable.

Il est raisonnable de ne demander aux budgets que les sacrifices qu'ils peuvent supporter, sans quoi on s'exposerait à prolonger indéfiniment les embarras et la gêne. Un recours au crédit est certainement une mesure extrême. Mais l'expérience prouve qu'il n'y a, en général, aucun profit à ajourner trop longtemps les remèdes nécessaires et qui peuvent être décisifs.

De là la pensée, partagée par le gouvernement et par la Chambre, d'émettre un emprunt de 429 millions, et d'en répartir le produit, en raison des causes qui l'avaient motivé, de la manière suivante:

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plus un supplément de 21,500,000 fr. pour payer les frais de négocia

tions et une année d'arrérages.

La loi qui autorise cet emprunt fut promulguée le 1er août dernier. La souscription fut ouverte le 6 et terminée le 13. J'ai déjà fait connaître à Votre Majesté les conditions et les résultats de l'opération. Je me bornerai à rappeler ici que le prix de la négociation, fixé à 69 fr.25, d'après la moyenne des six mois précédents, fut ratifié par le concours

empressé de plus de 830,000 souscriptions, et qu'il a été confirmé depuis lors sur le marché des fonds publics. Un fait digne de remarqué, c'est que les principales valeurs, à la différence de l'effet produit par les précédents emprunts, se sont élevées et maintenues, malgré des fluctuations inévitables, au-dessus de leur niveau antérieur (tableau n° 1). Ce fait est dû sans aucun doute à l'abondance exceptionnelle des capitaux et à la confiance de plus en plus générale dans le maintien de la paix (1).

La liquidation de la souscription a été faite avec l'esprit d'équité qui doit toujours guider le gouvernement dans ses rapports avec le public. A aucune autre époque l'échange des titres, le payement du dixième de garantie, le versement des termes échus, le classement des titres n'ont été réalisés avec plus de rapidité et de régularité.

Le 1er janvier, le Trésor avait encaissé 196 millions; le surplus est payable en quatorze termes, conformément à la loi.

DETTE FLOTTANTE.

Lorsque les recettes des budgets ne sont pas assez élevées pour couvrir les dépenses, le Trésor, comme administrateur des finances de l'État, et afin de maintenir toujours la plus grande ponctualité dans les payements, est obligé de suppléer au déficit par ses avances, et, en outre, d'entretenir constamment dans les caisses de ses comptables un fonds de roulement suffisant pour le service journalier.

Les découverts successifs appartenant à tous les régimes, jusques et y compris l'exercice 1866, avaient été réduits, par diverses consolidations, à la somme de 727 millions.

L'année 1867, en raison des circonstances extraordinaires dont j'ai parlé, devait ajouter à cette somme une nouvelle insuffisance de 175 millions, ce qui a porté à 902 millions les avances faites par le Trésor pour le service des budgets.

Le Trésor y a pourvu, ainsi qu'à l'alimentation de ses encaisses, au moyen des fonds de ses correspondants et de ceux qu'il s'est procurés par la négociation des bons du Trésor. Il est évident qu'il est obligé d'emprunter lui-même les sommes qu'il fournit aux budgets; comme ces sommes sont remboursables les unes à volonté, les autres à court

(1) On a parlé d'une pression qui aurait été exercée sur quelques établissements de crédit pour les déterminer à placer en rente leur fonds de réserve. Tout ce qu'on a dit à ce sujet est controuvé et directement contraire aux actes et aux principes de l'administration des finances et de son chef, qui professent le plus grand respect pour la liberté des transactions, et particulièrement de celles de la Bourse.

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