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Ce qui prévaut dans ces théories, même quand elles sont exposées par des publicistes distingués et libéraux, c'est que la liberté et l'autorité sont deux conditions également indispensables à la vie sociale, non-seulement distinctes, mais séparées et même opposées ou en lutte l'une avec l'autre, dont le rapport normal est dans un juste équilibre, variable dans ses éléments, selon le degré de civilisation atteint par les sociétés, ➡l'autorité devant s'étendre en restreignant la liberté, en raison de ce que les populations sont moins éclairées, et se restreindre en étendant la liberté, à mesure qu'elles acquiérent plus de lumières.

C'est encore, que l'autorité légitime ne serait pas simplement, comme nous le soutenons, une force instituée et entretenue par les sociétés, pour l'accomplissement de services conventionnellement déterminés; mais bien une puissance supérieure aux sociétés, une TUTELLE (c'est le mot consacré), puisant en elle-même le droit de les guider, de les régir, en tout ce qu'elles lui paraissent incapables d'accomplir librement, et ne devant se départir d'un tel droit que dans la mesure où les populations deviennent, par le bienfait de cette tutelle, plus aptes à se bien diriger elles-mêmes (1).

Nous ne remonterons pas aux sources de ces notions sur l'autorité, attribuant fort gratuitement aux hommes qui l'exercent une grande supériorité de lumières et de vertus sur la société d'où ils sortent, notions écloses sous un enseignement en tutelle, et qui se ressentent évidemment de la bonne opinion que le tuteur a toujours eue de lui-même. Il nous paraît du reste à peine nécessaire, après tout ce qui a été dit plus haut, de faire ressortir ce que de telles doctrines ont de faux et de contraire au véritable droit.

D'abord il n'est pas vrai qu'il y ait opposition, ni même séparation, entre la liberté et l'autorité légitime; lorsque celle-ci remplit sa mission nécessaire, sans la dépasser, elle ne restreint nullement la liberté; elle l'étend, au contraire, d'autant plus sûrement qu'elle parvient à mieux la garantir à tous; elle est la condition indispensable de la liberté, qui ne pourrait la répudier, ou s'en séparer, sans perdre toute garantie efficace et se détruire elle-même.

Ensuite, rien n'est plus faux et plus décevant que la notion attribuant à l'autorité légitime le caractère d'une tutelle, et lui assignant de la sorte la mission de diriger plus ou moins, selon ses vues, le développe

(1) Voir dans le Dictionnaire général de la politique, au mot AUTORITÉ, un écrit de M. Jules Simon, exposant cette théorie.

ment des facultés et de l'activité des populations, ce qu'elle ne peut faire, nous l'avons assez souvent prouvé, sans violer expressément la liberté et la propriété qu'elle est chargée de garantir. Nous répéterons ici que l'autorité légitime ne peut être qu'une force entretenue par les sociétés pour l'accomplissement de services déterminés, services toujours modifiables, ainsi et chaque fois qu'elles le désirent; et l'on ne dira pas que ce sont là des conditions irréalisables, car depuis quatrevingts ans, elles n'ont pas cessé d'être régulièrement pratiquées dans tous les États du nord de l'Union américaine. Les citoyens de ce pays ne supporteraient pas du tout qu'on les considérât comme les pupilles des hommes à qui ils confient la mission assignée à leur autorité publique, et c'est ce qui explique l'ouragan de huées déchaîné par la sotte prétention du président Johnston, osant leur parler de sa politique.

Nous sommes loin sans doute, en France, d'être arrivés à cette fière appréciation de nos droits. Y parviendrons-nous un jour ? Il faudrait en désespérer si, à l'heure qu'il est, nous étions encore assez naïfs pour attendre notre liberté et notre avancement social de la tutelle exercée sur nous par nos gouvernements.

Au surplus, d'assez vives lumières se sont produites, dans ces derniers temps, sur les sujets qui nous occupent, et les esprits qui ont pu se les assimiler ne doivent pas renoncer à l'espoir de les voir se répandre de plus en plus. Que chacun de ceux qui partageraient les convictions que nous avons exposées s'efforce de les communiquer par tous les moyens en son pouvoir; elles arriveront certainement un jour à former une opinion assez puissante pour les réaliser dans les faits. En attendant, ayons patience, et souvenons-nous que si, par la nature des choses, la lumière intellectuelle met autant de lenteur à se propager que la lumière physique y met de rapidité, elle a l'avantage, une fois acquise, de ne plus se perdre et d'amener, avec le secours du temps, le triomphe des vérités qu'elle signale sur toutes les erreurs en lutte avec elle.

Ambroise CLÉMENT.

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Les réformes les plus utiles, même lorsqu'elles sont préparées avec soin par les hommes les plus instruits et les plus habiles, ont encore besoin pour réussir d'être comprises et acceptées librement et de bon gré par les populations; surtout lorsque celles-ci doivent modifier en quelques points leurs habitudes de tous les jours. C'est pour contribuer à ce résultat, c'est pour compléter l'initiation du public et assurer son adhésion au projet de consécration légale des changements apportés ou à apporter à notre système monétaire, c'est pour améliorer ce projet, s'il est possible, que nous revenons encore aujourd'hui sur ce sujet, à l'occasion de la clôture des travaux de la Commission française, présidée par notre savant confrère M. de Parieu.

(1) Le Journal des Économistes a publié de nombreux travaux sur cette question. En voici l'indication pour les quatre dernières années: Septembre 1865. A. CLÉMENT. Enquête sur la circulation monétaire el fiduciaire.

Mai

Juin

Septembre

Janvier

Juin
Août

Celebre

1866. E. HORN. Monnaie et Banque.

E. DE PARIEU. Compte-rendu à l'Académie des sciences morales et politiques de la brochure de M. Hendricks, sur le monnayage décimal.

MICHEL CHEVALIER. La monnaie et les métaux précieux.

DE SERRIGNY. Lettre sur la convention monétaire de 1865.

1867. CHERBULIEZ. Nature de la monnaie complémentaire ae la convention de 1865. Réponse au précédant.

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-

E. DE PARIEU. De l'uniformité monétaire.

E. DE PARIEU. Rapport à la Conférence monétaire.
DE HOCK. Rapport au Comité international des poids

et mesures.

MANNEQUIN. Rapport aux commissaires de l'Amérique

Entrant en matière sans plus de préambule, nous transcrivons ciaprès les résolutions adoptées par la majorité de la Commission:

«L'étalon unique d'or est plus favorable que le double étalon à l'unification monétaire.

<«< Il sera aussi plus avantageux pour notre commerce extérieur. << Il est enfin plus propre à constituer une circulation à la fois stable et commode.

« Pour établir en France, sans dépense pour le trésor, le régime complet de l'étalon unique d'or, il suffit de prendre les mesures sui

vantes :

« 1o Modifier la convention de 1865, d'accord avec les États qui y

centrale et méridionale, sur l'uniformité monétaire. 1868. L. TOUZE. De l'uniformité monétaire et de l'unité d'é

Mars

Avril

Juin
Juillet

Septembre

Octobre

Novembre

Décembre

Janvier

-

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talon.

E. DE PARIEU. Situation de la question monétaire internationale.

P. Roux. Enquête monétaire.

L. TOUZE. Nécessité de résoudre la question monétaire.

E. DE PARIEU. Unification monétaire. Réfutation des arguments de la minorité de la Commission du Sénat des États-Unis.

L. WOLOWSKI. Les métaux précieux et la circulation fiduciaire.

MICHEL CHEVALIER. De l'établissement d'une monnaie universelle.

SOCIÉTÉ DES ÉCONOMISTES. Débat sur la question monétaire MM. Rouland, Villiaumé, de Parieu, Joseph Garnier, Bénard, Wolowski, Léon.

L. N. BENARD. Analyse de l'enquête anglaise sur la
monnaie internationale.

SOCIÉTÉ DES ÉCONOMISTES. Suite de la discussion ;
MM. Joseph Garnier, Boutron, de Parieu, Wolowski,
Mannequin, de Lavergne, Pautet, Block, Juglar, Rau,
Léon, V. Bonnet, Coullet, Foucher de Careil.
1869. SOCIÉTÉ DES ÉCONOMISTES. Suite de la discussion;
MM. Chevalier, Cernuschi, Wolowski, Du Puynode,
Joseph Garnier, H. Passy, Bénard, de Parieu, Coullet,
Juglar, Léon, Michel Chevalier.

E. DE PARIEU. Les conférences monétaires internatio-
nales de 1867, et leurs résultats.

Février

30 SERIE, T. XIV.

-15 avril 1869.

3

sont compris, et présenter en France une loi approbative de cette modification, qui interdise ou limite étroitement la fabrication de la pièce de 5 francs en argent, et fixe à une somme de 100 francs le cours légal obligatoire de celles qui existent aujourd'hui.

« 2o Modifier pareillement la convention de 1865, de manière à auto riser en France la fabrication d'une pièce de 25 francs modification qu'un décret suffirait à légaliser. >>

Après les vifs débats auxquels se sont livrés ici même, ou dans les réunions de la Société d'économie politique, les représentants les plus autorisés des différents systèmes monétaires, ce serait faire double emploi et prolonger sans utilité une polémique stérile, que de rentrer maintenant dans les considérations générales sur la monnaie. Pour nous d'ailleurs, ou, plus exactement, pour le signataire de ces lignes, il ne s'agit pas dans l'espèce d'une question de science : aucun des principes de celle-ci n'étant contesté par les défenseurs des systèmes contraires, ni compromis par les mesures que la Commission recommande; mais uniquement d'un mécanisme pratique, d'une application des principes, et il n'y a dès lors à examiner que le point de savoir si les propositions faites sont celles qui conviennent le mieux au public, qui offrent le plus de commodité aux transactions intérieures, et sont de nature à faciliter et à développer le mouvement et les bénéfices des échanges internationaux, en ménageant à la fois les intérêts généraux et particuliers les plus dignes d'attention et de respect.

L'ÉTALON UNIQUE D'OR.

Si l'adoption de l'or, comme étalon unique de la monnaie, laisse des regrets à quelques personnes, on peut assurer que, dans le public, comme dans le sein de la Commission, et plus encore peut-être, la majorité approuvera la résolution prise.

Depuis vingt ans déjà, le public français est familiarisé avec la monnaie d'or; dans les villes et partout où il y a à faire en espèces des payements d'une certaine importance, ou à transporter des espèces, on ne veut plus guère entendre parler d'autre chose. Dans les campagnes même, ou du moins dans plus des deux tiers de nos départements, on a si rapidement pris l'habitude de l'or que, suivant la formule du questionnaire de l'enquête de 1868, on n'y éprouve « aucune répugnance à voir l'or devenir l'instrument exclusif des payements au-dessus d'une certaine somme. » Il n'y a de résistance, ou du moins d'objection sérieuse et générale, qu'à l'égard de la pièce de 5 francs en or. Nous re

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