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Au second retour du roi, la place de grand maître de l'université ayant été supprimée, M. Royer-Collard fut nommé président d'une commission de l'instruction publique, composée de cinq membres. Il conserva ces fonctions jusqu'en 1819, époque à laquelle il donna sa démission (voy. DECAZES). Pendant les quatre années de son administration, il eut à lutter sans cesse pour défendre l'université contre les attaques de la faction qui, dès 1815, avait presque subjugué le gouvernement. Soit à la tribune, soit dans le sein même du gouvernement, il justifia le corps enseignant calomnié dès lors comme aujourd'hui. Jamais les titres et les services de ces fonctionnaires modestes ne furent respectés avec plus de scrupule, jamais les jeunes talents ne furent encouragés avec plus de bienveillance. Pour ce qui est de la direction générale des études, nous devons rappeler que ce fut M. Royer-Collard qui créa dans les colléges de Paris l'enseignement spécial de l'histoire, innovation féconde qui a porté de si heureux fruits, qu'on s'efforça d'abolir dans les mauvaises années de la restauration, et qui, depuis 1830, a été étendue à tous les établissements publics. De lui encore vinrent les premiers encouragements donnés à l'instruction primaire et les mé

Il ne faut pas perdre de vue qu'à cette époque la philosophiede Condillac exerçait en France une domination exclusive, qu'elle passait pour être | en possession de la vérité tout entière, et pour avoir touché les dernières limites que pût atteindre la science de l'entendement humain. Il fallait donc une rare indépendance d'esprit et de caractère pour attaquer de front cette puissance incontestée. Pendant que M. Laromiguière, interprète élégant de Condillac, réunissait autour de sa chaire un immense auditoire, séduit par le charme de sa parole, M. Royer-Collard poursuivait avec constance sa tâche critique devant un petit nombre de disciples assidus, parmi lesquels venaient s'asseoir quelques hommes graves, tels que Maine de Biran, M. de Sade, au- | jourd'hui député, et un groupe de jeunes gens, la plupart élèves de l'école Normale, non encore convaincus, mais ébranlés par la conviction du maître, et toujours frappés de la vigueur de ce noble langage sous lequel se produisait un enseignement si élevé. Parmi ces jeunes auditeurs, | dont quelques-uns sont devenus célèbres, on distinguait MM. Cousin, Viguier, Ch. Loyson, Patin, Ch. Renouard, la Rauza, etc. Fidèle au plan qu'il s'était tracé, le professeur subordonnait l'examen des divers systèmes philosophiques à la division des facultés de l'entendement; l'ex-dailles décernées publiquement aux plus habiles position de chaque système était éclairée par instituteurs. une théorie rapide de la faculté à laquelle il se rapportait de sorte que son cours d'histoire de la philosophie moderne était, comme il le disait lui-même, un cours de philosophie, où les analyses historiques tenaient une grande place. Pendant les deux ans et demi que durèrent ses leçons, elles roulèrent presque exclusivement sur une question unique, mais fondamentale, celle de la perception externe; et le discours d'ouverture de la 3o année, qui fut imprimé alors, contient l'analyse la plus complète de ce vaste et difficile problème et des faits intellectuels qui s'y rattachent. En le creusant à cette profondeur le professeur ébranlait dans ses bases la philosophie régnante, et préparait la révolution philosophique qui fut continuée et accomplie par ses disciples, en tête desquels se place M. Cousin, qui lui succéda dans la chaire de la faculté des lettres. Le cours de M. Royer-Collard avait duré depuis le mois de décembre 1811 jusque vers la fin de mars 1814. Attaché à la famille royale par d'an-truire la fidélité des engagements. Membre de ciennes affections et par ses opinions politiques, M. Royer-Collard fut nommé par Louis XVIII conseiller d'État et directeur de la librairie. Pendant les cent-jours, il resta seulement professeur et doyen de la faculté des lettres.

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Depuis 1815, il faisait partie de la chambre des députés : sa parole grave et sa noble indépendance y avaient conquis une autorité, un ascendant qui n'ont fait que croître d'année en année. Il résista à la réaction violente de la chambre introuvable, et vota constamment avec la minorité dont il fut une des lumières et un des plus puissants orateurs. Il défendit l'inamovibilité des juges contre M. de Bonald, organe des passions furieuses de la majorité : il la défendit et au nom de la charte, et comme principe fondamental de l'ordre social. Dans la discussion de la loi d'amnistie, il combattit avec énergie les amendements de la commission qui aggravaient par de nouvelles rigueurs et de nouvelles proscriptions le projet du gouvernement. A l'occasion du budget de 1816, il s'opposa aux prétentions d'une partie de la chambre qui, en s'attribuant le droit de revenir sur les lois de finance antérieures, tendaient à dé

cette courageuse minorité, il lutta contre tous les excès du parti royaliste, de concert avec son ami Camille Jordan, Laîné, M. Pasquier, de Serres.

M. Royer-Collard fut un de ceux qui con

seillèrent la dissolution de la chambre introu- | l'instrument de ses passions. M. Royer-Collard a vable, accomplie par l'ordonnance du 5 septembre 1816. Nommé président du collège électoral de la Marne, il fut réélu à une grande majorité, et il n'a plus cessé de faire partie de la chambre, jusqu'au jour où il lui a plu de rentrer tout à fait dans la vie privée. Pendant les quinze années de la restauration, il a pris part à toutes les grandes discussions où s'agitaient les questions fondamentales du régime représentatif. Par la nature même de son esprit, autant que par l'habitude des investigations philosophiques, il avait le besoin de remonter en toutes choses jusqu'aux principes: aussi, dès qu'il avait abordé une question, laissait-il après lui une trace profonde. C'est par là que, sans jamais sortir de son attitude calme et digne, avec un ou deux discours par an, il a été peut-être l'homme de France qui a le plus fait pour notre éducation contitutionnelle. Voy. DOCTRINAIRES.

Deux lois principales qui sont comme les deux grands ressorts du gouvernement représentatif, la loi électorale et la loi de la presse, ont été perpétuellement étudiées, débattues, remaniées pendant tout le cours de la restauration. A chaque phase de ces grands débats, nous retrouvons M. Royer-Collard dégageant et mettant en lumière les vrais principes, ceux qui ont le plus complétement réuni l'assentiment de la raison publique, ceux qui, contredits ou éclipsés momentanément, sont destinés à survivre. Sans doute lui-même ne se refuserait pas à reconnaître l'apprentissage qu'il faisait pour son propre compte en initiant la nation aux secrets de la vie politique, et le progrès de ses idées à mesure qu'il approfondissait les problèmes. Ainsi, dans la première session de 1816, il monte deux fois à la tribune, le 2 et le 24 février, pour démontrer l'insuffisance et les imperfections du premier projet de loi électorale. Il tâtonne encore, ainsi que la chambre; il critique bien plus qu'il n'établit. A la démarche timide des orateurs, on peut reconnaître l'enfance du système constitutionnel. Mais dans la seconde session, le 26 décembre son allure est plus ferme et plus assurée. Ici, il arrive directement à établir comme principe de l'élection l'intervention de la nation elle-même qui exerce sur son gouvernement une influence régulière; il déclare que c'est la chambre élective qui constitue les gouvernements représentatifs. Il y a progrès marqué d'une session à l'autre. C'est que l'orateur n'est plus en présence d'une chambre violente qui, sous prétexte d'un royalisme exalté, veut entraîner la monarchie dans des voies périlleuses et en faire

posé les bases de la législation sur cette matière, en défendant le projet qui devint la loi du 5 février 1817. Il établit victorieusement le principe de l'élection directe, au lieu de l'élection à deux degrés qu'on voulait introduire; il la fixe au chef-lieu du département pour la dégager de l'esprit de localité, de cet esprit étroit et mesquin qui fausse trop souvent la représentation nationale. « Car, dit-il, nous sommes ici dans l'ordre politique, et l'électeur est pris dans l'intérêt général de la société, et non dans l'intérêt local du point qu'il habite. » Et on ne l'a pas vu plus tard renier son œuvre. Lorsqu'en 1819 la proposition Barthélemy, tendant à modifier la loi électorale, fut reportée de la chambre des pairs à la chambre des députés, il soutint avec force les deux conditions essentielles de la loi primitive, c'est-à-dire l'élection directe et l'élection au chef-lieu. C'est à cette occasion qu'il émit ses idées sur l'influence de la classe moyenne, et le rôle qu'elle est appelée à jouer dans notre nouvel ordre social. Lorsqu'à son tour le gouvernement, effrayé par les conquêtes que faisait l'opinion libérale au renouvellement de chaque cinquième de la chambre, s'abandonna à la réaction qui le pressait depuis la mort du duc de Berri, et vint proposer le changement de cette loi, M. Royer-Collard combattit avec force le privilége du double vote, et montra dans la loi de 1817 les véritables libertés du pays et les principes vitaux du gouvernement représentatif, c'est-à-dire l'élection directe et l'égalité des suffrages. C'est à la suite de cette discussion que son nom et celui de Camille Jordan furent rayés de la liste du conseil d'État. Enfin, en 1824, il fut aussi un des adversaires du projet de loi de la septennalité qui emportait les derniers débris du système électoral.

En matière de liberté de la presse, dès l'année 1817, il prouvait, d'une manière victorieuse, que la libre publication des opinions individuelles est la condition et le principe nécessaire de la liberté politique, et que, la provocation indirecte étant indéfinissable, la seule juridiction légitime pour les délits de la presse est celle du jury. Il n'y a de nations politiquement libres que celles qui participent, sans relâche, et au pouvoir législatif et au pouvoir judiciaire. Dans la discussion de la loi de 1819, la plus libérale qui eût encore été présentée aux chambres, il motiva la condition du cautionnement pour les journaux sur la nécessité d'une garantie pour l'influence politique, garantie qui ne se rencontre, selon notre droit public, que dans une cer

Cette haute raison, qui alliait au respect le plus inviolable pour la vérité un grand fouds de modération naturelle, cette éloquence si grave, mûrie par de longues méditations et par l'expérience de quarante années de révolution, gagnèrent peu à peu l'assentiment de la France, et finirent par s'en emparer si bien, qu'après la dissolution de la chambre, aux élections de 1827, M. Royer-Collard fut réélu à la fois par sept colléges, ceux de Vitry-le-Français, Châlons, Lyon (midi), Melun, Paris (7o collége), Béziers et Neufchâteau.

taine situation sociale, dont le signe est la pro- | tant de qualités éminentes qui distinguent le priété ou ses équivalents. Mais bientôt, en 1820, philosophe orateur, le caractère le plus frappant le ministère ayant demandé l'arbitraire pur, la de son éloquence est peut-être cette rigueur de censure fut rétablie, M. Royer-Collard appuya raisonnement, cette logique inexorable, qui arun amendement qui eût limité la durée de la rache à un principe tout ce qu'il contient, et censure à la durée de la cession. Il attaqua aussi met à nu toutes ses conséquences. les lois d'exception: « Elles sont, dit-il, des emprunts usuraires qui ruinent le pouvoir, alors même qu'ils semblent l'enrichir, Amenées par une réaction, elles traînent à leur suite une réaction qui déjà se fait sentir, Les partis s'en emparent plus ils sont redoutables et menaçants, plus il y a d'imprudence à leur donner pour manifeste l'apologie de la charte et la défense des libertés publiques. » La présentation d'un nouveau projet sur la répression des délits de la presse, en 1822, fut l'occasion d'un admirable discours où M. Royer-Collard, dénombrant les conquêtes de la démocratie et le rôle qu'elle est Ce fut un beau moment pour la France elleappelée à jouer dans la société, mettait en re-même, et pour le grand citoyen adopté par elle, gard l'humble part qui lui était faite dans le gouvernement. C'est là aussi que sa prudence prophétique accusait la politique du ministère de montrer aux peuples la monarchie incompatible avec les libertés politiques qu'elle avait promises. Enfin, en 1827, le projet de M. de Peyronnet sur la police de la presse, plus connu sous le nom de loi d'amour, fut foudroyé par une puis- | sante ironie, plus profonde peut-être que celle de Socrate, et moins amère que celle de Pascal. « Dans la pensée intime de la loi, disait l'orateur, il y a eu de l'imprévoyance, au grand jour de la | création, à laisser l'homme s'échapper libre et | intelligent au milieu de l'univers de là sont sortis le mal et l'erreur, Une plus haute sagesse vient réparer la faute de la Providence, restreindre sa libéralité imprudente, et rendre à l'humanité, sagement mutilée, le service de l'é- | lever enfin à l'heureuse innocence des brutes. >> Et plus loin : « Une loi de suspects, largement conçue, qui mettrait la France en prison sous la garde du ministère, cette loi ne serait qu'une conséquence exacte et une application judicieuse du principe; et, comparée à la loi de la presse, elle aurait l'avantage de trancher d'un seul coup, dans la liberté de se mouvoir et d'aller et de venir, toutes les libertés. Le ministère, en la pré-versation de M. Royer-Collard, et il le témoignait sentant, pourrait dire avec bien plus d'autorité; Le mal produit cent fois plus de mal que le bien ne produit de bien, L'auteur des choses a cru autrefois le contraire il s'est trompé. »

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Il nous faut résister à la tentation de rappeler bien d'autres discours, et surtout de citer des exemples de ce style énergique et précis, qui grave la pensée avec tant de profondeur. Entre

que celui où les seuls efforts de l'intelligence et du patriotisme, décidant la victoire de l'opinion publique et la chute du ministère déplorable, ouvraient la perspective d'un meilleur avenir, Les diverses fractions du parti libéral se rallièrent alors autour de celui qui avait épuré le libéralisme, et l'avait fondé sur des doctrines, en le dégageant des déclamations surannées et de l'alliage bonapartiste. L'opinion nationale s'était alors personnifiée en lui; c'était à qui le saluerait des noms d'illustre maître, illustre ami, etc. L'Académie française s'empressa de l'admettre à l'unanimité dans son sein, à la mort de Laplace. Sa réception fut une des plus brillantes solennités de ce temps-là, un véritable triomphe.

A l'ouverture de la session, la chambre des députés le présenta le premier des candidats pour la présidence, et le choix royal ratifia aussitôt cette désignation. On sait avec quelle dignité.il occupa le fauteuil, avec quelle haute impartialité il dirigea les délibérations, maintenant dans un juste tempérament et les droits de la chambre et la déférence due à la couronne,

Charles X, qui, malgré la profonde ignorance où il était resté de l'état réel de la France, ne manquait pas d'esprit, goûtait volontiers la con

un jour à ses familiers, en ajoutant cette étrange restriction : « C'est dommage qu'il n'ait pas l'esprit sain!» Nous avons rappelé cette anecdote, qui n'est pas inventée à plaisir, pour montrer combien était fatal l'aveuglement qui poussait cette malheureuse dynastie à sa perte. L'avènement du ministère Polignac, cet effet sans cause, ainsi que le définit alors M, Royer-Collard, vint

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tout remettre en question, et briser brusque- | tion censeur dramatique et pensionné du roi. On ment cette alliance de la nation et de la royauté, a de lui deux tragédies: Phocion (1817), la à laquelle s'était dévoué le fidèle serviteur de la Mort de César (1825), une comédie, le Fronmonarchie. La révolution des trois jours (voy, | deur; mais il est plus connu par des compilaJUILLET) fil justice de la dynastie. Le lendemain tions historiques, où il se montre à la fois parde cette crise, que ses conseils auraient pu pré- tisan de la puissance royale et adversaire des venir, on l'a entendu dire : « La restauration envahissements du clergé (Précis de l'Histoire nous a enseigné le prix de la liberté; la révolu- ancienne d'après Rollin, 1802, 4 vol.; Histoire tion nouvelle va nous apprendre le prix de l'or- romaine jusqu'à Auguste, 1806, 4 vol.; Hisdre. » Il prêta serment au nouvel ordre de choses, toire des empereurs romains, 1808, 4 vol.; et vint s'asseoir silencieux sur les bancs du | Histoire du Bas-Empire, 1803, vol.; Hiscentre. Aux élections de 1831, il pensait à se re- toire de France depuis Pharamond, 1819, tirer tout à fait; mais les instances de Casimir | 6 vol.), BOUILLET, Périer, alors ministre, le décidèrent à accepter un nouveau mandat. En remerciant les électeurs de Vitry-le-Français, qui venaient de le réélire, il déclara que la révolution de juillet n'avait été ni dans ses prévisions, ni dans ses vœux, qu'il l'avait acceptée comme un fait, et pour éviter un mal pire encore; mais qu'il était convaincu qu'on avait dépassé la limite au delà de laquelle l'ordre est en péril. Depuis lors, il a reparu deux fois à la tribune: la première, pour soutenir l'hérédité de la pairie. La seconde fois, dans la discussion des lois de septembre, lorsqu'on débattit le projet de loi qui retirait au jury la connaissance des délits de la presse, il reprit la parole pour défendre le principe qu'il avait si victorieusement établi sous la restauration. Forcé de combattre les hommes qui avaient autrefois partagé ses convictions, il déplora ce qu'il appelait l'erreur d'un homme de bien irrité (M. le duc de Broglie). Enfin, aux élections de 1842, il a définitivement renoncé à la députation. Aujourd'hui, âgé de plus de 80 ans, il jouit, dans sa verte vieillesse, de la gloire incontestée que la postérité lui décernera, comme à une des plus belles intelligences et un des plus nobles caractères qui aient honoré notre époque. ARTAUD,

ROYOU (l'abbé THOMAS-MARIE), journaliste, né à Quimper en 1741, mort en 1792, beau-frère de Fréron, remplit 20 ans la chaire de philosophie du collège Louis le Grand, eut part à l'Année littéraire, et fonda en 1789 l'Ami du roi, journal qui défendit avec courage la cause monarchique et qui lui attira des poursuites. Il mourut en 1792, pendant qu'on le recherchait. On a de lui Le monde de verre réduit en poudre; c'est une réfutation des Époques de la nature de M. de Buffon (Paris, 1780, in-12).

ROYOU (JAQ.-CORENTIN ), historien, frère du précédent, né à Quimper vers 1745, mort en 1828, fut comme son frère journaliste, puis se fit avocat à Paris, arracha à la mort plusieurs accusés sous le Directoire, fut sous la restaura

ROZIER (JEAN l'abbé), l'un des plus célèbres agronomes du XVIIIe siècle, naquit à Lyon en 1734, et y périt dans la nuit du 29 septembre 1793, écrasé dans son lit par une bombe, lors du siége de cette ville par l'armée conventionnelle. Membre d'une famille nombreuse et peu fortunée, Rozier se destina de bonne heure à l'état ecclésiastique, et ne manifesta pas moins promptement son penchant pour les sciences naturelles. Il consacra sa vie à cette étude, et acquit en ce genre des connaissances presque universelles, qu'il ne cessa pas d'appliquer à l'agriculture, éclairant autant qu'il put le faire, l'une par l'autre, la théorie et la pratique. Ses écrits toutefois, d'après l'opinion des praticiens, révèlent plutôt l'homme d'étude que l'homme d'expérience. Les travaux et l'instruction aussi variée qu'étendue de ce savant lui assurèrent des moyens d'existence, et même les avantages temporaires de la fortune. Il fut successivement chef de l'école vétérinaire établie à Lyon par Bourgelat, propriétaire et rédacteur du recueil des Observations sur la physique, sur l'histoire naturelle et sur les arts; prieur de Nanteuil le Haudouin, riche bénéfice que lui enleva la révolution; et enfin membre de l'Académie lyonnaise, professeur et directeur de la pépinière provinciale. Les principales publications dues à cet infatigable écrivain sont d'abord celles du recueil que nous venons de citer; 2° ses Démonstrations élémentaires de botanique (2 vol. in-8°, Lyon 1766), où les savants reconnurent une heureuse combinaison du système de Tournefort avec celui de Linné; et 3° son Cours complet d'agriculture, le plus renommé et le plus répandu de ses ouvrages. Il ne put cependant en publier que 8 volumes, et ce cours n'a été terminé qu'après la mort de l'auteur. Il a servi de base à d'autres travaux du même genre, et, malgré les progrès des sciences agronomiques, on le consulte encore aujourd'hui avec fruit comme une sorte d'encyclopédie ru

AUBERT DE VITRY.

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rale. La méthode d'exposition de l'abbé Rozier | général, les procédés de fabrication pour les
se recommande par l'ordre et la clarté. Une élé- rubans rentrent dans ceux de la fabrication des
gante facilité est en général le mérite de son étoffes de soie; on les fabrique soit en une seule
style, qui s'élève et prend de la chaleur quand pièce par métier, comme beaucoup d'autres
l'auteur combat des erreurs dangereuses. Une étoffes, ou en plusieurs pièces à la fois sur un
franchise, quelquefois portée jusqu'à la ru- seul métier. Les rubans ouvragés se tissent avec
desse, était le trait principal de son carac- la navette sur le métier comme les étoffes d'or
tère.
et d'argent; les rubans unis et de fil se fabri-
RUBAN, RUBANERIE, RUBANIER. Le ruban: quent d'après les mêmes procédés que la toile; le
qui ne connaît ce tissu de soie, de fil, de laine, métier seulement est un peu plus léger; puis la
de coton, de soie et coton, de filoselle, plat et largeur de la chaîne établit toute la différence
mince, de trois ou quatre doigts de large, et qui entre la toile et le ruban. Les rubans en laine se
a joué longtemps un rôle si musqué, si préten- | fabriquent de la même manière que ceux de fil.
tieux dans les pastorales de nos bons ancêtres, Enfin les rubans soit de laine, soit de fil et de
ornant tour à tour la houlette du berger ou le filoselle se font à pas simple, à grains de toile,
corset de la bergère? Voulez-vous remonter à à lisière unie; ils sont quelquefois croisés, et
son origine, vous le retrouverez en Égypte atta- quelquefois encore leurs lisières sont dentelées;
chant les sandales d'une statue d'Isis; Pietro pour qu'ils soient figurés, il faut une augmenta-
della Valle vous le montrera servant au même tion de marches, de lames, de lisses, etc... Ces
usage sur une momie; vous le verrez enfin orner trois espèces de rubans sont du reste écrus, blan-
la chaussure des Juifs, des Grecs et des Ro- chis et teints, rayés ou d'une seule couleur, unis
mains. Quelquefois les femmes grecques liaient ou croisés, plus ou moins larges, plus ou moins
leurs cheveux avec des rubans. Numanus repro- | fins. Lorsqu'ils sont unis, ils se fabriquent aussi
chait aux Troyennes leurs mitres ornées de ru- sur le métier à deux marches; lorsqu'ils sont
bans; les Juives s'en paraient aussi la tête, et le croisés, ce qui arrive rarement, on les travaille
goût en passa aux Romains. Certains prêtres sur le métier à quatre marches. Les rubans de
hébreux s'environnaient la tête d'un ruban de la pure soie ne se teignent jamais après la fabrica-
largeur du petit doigt. La mitre du roi d'Égypte tion; les soies, de quelque couleur qu'on les
se nouait sous le menton avec des rubans, ainsi veuille, doivent avoir été teintes d'avance. Les
que le chapeau des voyageurs. Les dessins et les rubans de soie se font en uni comme le taffetas,
façons se plient à l'infini aux caprices de la
ou à gros grains comme le pékin, le gros de
mode, aux goûts divers du fabricant, du mar- Naples, etc., etc. Il y en a aussi de satinés qui
chand et du consommateur. On désigne sous la se croisent sur le pas d'une serge ou d'un satin,
dénomination de rubanerie, toutes les manipu- et se confectionnent de même; de brochés, qui
lations relatives à la fabrication des rubans; et se font à la tire, et avec autant de petites na-
celui qui fabrique ces sortes de tissus s'appelle vettes qu'il y a de couleurs, afin de former les
rubanier. Les rubans servent à divers usages, à fleurs et de varier le dessin, etc.; de veloutés;
lier, joindre, orner d'autres tissus, des vêtements, d'autres encore, dont une partie ressemble à de
des meubles, des tentures d'appartements, de la gaze. En général, ces diverses espèces de ru-
voitures, etc... Les rubans d'or, d'argent, de bans se fabriquent au métier dit à la Jacquart,
soie, sont consacrés à l'ornement des coiffures qui remplace avec avantage la tire.-Les rubans
et des habits des femmes; ceux de bourre de veloutés se font avec deux chaînes, l'une for-
soie, plus connus dans le commerce sous la dé-mant le tissu de l'étoffe, l'autre constituant le
nomination de padous, servent aux tailleurs, poil ou le velours. Par le moyen de la mé-
aux couturières, etc. Ceux de laine et de fil aux canique que l'on a dans ces derniers temps sub-
tapissiers, aux fripiers, aux selliers et aux autres stituée au métier à haute lisse, on peut faire à la
professions analogues. Les padous doivent leur fois 10, 12, 25, et même 36 rubans. — Le ruban
nom à Padoue, ville d'Italie, où l'on assure qu'ils dit ruban anglais se fait à chaîne d'organsin,
furent inventés. Les rubans de fil et coton, de mais à trame d'une soie particulière de Chine.
laine et coton, ou tout autre mélange, donnant
pour résultat un tissu grossier, prennent le nom
de galons: ils se font avec un organsin commun
pour la chaîne, et une trame beaucoup plus
grosse que celle des autres rubans; on s'en sert
pour border des meubles, des voitures, etc... En

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- Dans les rubans, les largeurs sont indiquées par des numéros, depuis 1/2 jusqu'à 11; ceux qui vont au delà ne portent plus de numéros. Le ruban gaufré est celui sur lequel on imprime certains ornements, des fleurs, des oiseaux, des ramages, des grotesques. La mode de ces rubans

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